Aller au contenu

Page:Laporte - Émile Zola, 1894.djvu/101

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

donc, différence absolue dans la nature même du sujet scientifique du document humain. Le médecin opère sur un phénomène physique, matériel : le corps ; le romancier n’opère, lui, que sur un phénomène intellectuel, impalpable, immatériel : l’esprit. Logiquement, de cette disparité, il est impossible de conclure autre chose que l’incompatibilité de méthode expérimentale entre les deux sciences, si science il y avait. Que d’effets littéraires on pourrait expérimenter et documenter sur ce thème d’adaptation ! — Roman expérimental, p. 10 : « Voyez quelle première clarté jaillit, lorsqu’on se place à ce point de vue de la méthode expérimentale appliquée dans le roman, avec toute la rigueur scientifique que la matière supporte aujourd’hui… L’idée d’expérience entraîne avec elle l’idée de modification. Nous partons bien des faits vrais, qui sont notre base indestructible ; mais pour montrer le mécanisme des faits, il faut que nous produisions et que nous dirigions les phénomènes ; c’est là notre part d’invention, de génie dans l’œuvre… Je constate dès maintenant que nous devons modifier la nature sans sortir de la nature, lorsque nous employons dans nos romans la méthode expérimentale. » Si les mots sont faits pour être compris, il résulte de ce passage que Zola a du génie parce qu’il modifie la nature, il s’y enfonce même et la modifie si bien, que de laide qu’il l’a choisie, il l’idéa-