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Page:Laporte - Émile Zola, 1894.djvu/165

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vante et vous prétendez m’imposer la copie ? À quoi sert, dans l’art, la reproduction salement réalisée de ce que je ne puis voir et regarder sans dégoût dans la nature ? Quoi ! vous constituez, comme document humain du réel, un homme ivre, laid de plusieurs laideurs, une fille, Nana, un résumé de toutes les prostitutions parisiennes, un souteneur, Lantier, modèle de toutes les spéculations de la débauche, un pétomane ignoble, Jésus-Christ, qui déshonore un nom sublime que respecte et admire l’histoire de tous les peuples ! … Vous étalez sous mes yeux des exhibitions repoussantes de femmes qui accouchent, de vaches qui vêlent, de génisses qui…, de jeunes filles… ; vous semez partout les adultères, les incestes, les viols ; vous ruez des femmes de mineurs sur un malheureux épicier avare, elles le tuent, et, insatiables de sang, d’outrages et d’insultes, elles violent jusqu’au mystère honteux de sa chair secrète, elles l’accrochent fumante, drapeau sanglant et horrible, digne de ces natures monstrueuses, à un bâton sanglant, elles… Mais ma plume, répugnée et dégoûtée, refuse de reproduire ces scènes et ces mots ; vous me jetez devant les anatomies les plus macabres, devant les académies les plus obscènes… et vous me dites : Admirez ! voilà la réalité dans sa vérité, voilà la nature toute pure. « Le sens du réel, c’est de sentir la nature et de la rendre telle qu’elle est » (Roman