Page:Laprade - Œuvres poétiques, Les Voix du silence, 1880.djvu/164

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V

Oh ! l’instant des aveux ! ce cri, ce mot furtif
Qu’éternise un écho dans le ciel attentif !
Mot qui tout bas murmure en tremblant sur la lèvre,
Ou gronde avec l’éclair et jaillit dans la fièvre ;
Triomphe de l’amour par un mot attesté ;
Pouvoir d’une syllabe où tient l’immensité !

Le lac d’azur et d’or, quand le vent se repose,
Reflète au loin des monts chargés de neige rose.
Fausta, Marco sont là, dans cette paix du soir ;
Baignés dans la nature, ils parlent sans la voir.

Et quel vague récit des songes de leur vie,
Quel rayon d’une flamme à ce beau ciel ravie
Emporta leur secret après tant de combats ;
Quel espoir les enivre ? Ils ne le savaient pas.
Leur âme a laissé fuir quelque rapide image,
Un accent plus ému vibre dans leur langage ;
Enfin l’aveu sacré part, et la chaîne d’or
A lié ces grands cœurs qui résistaient encor ;
Et jamais ni le temps, ni l’homme, ni Dieu même,
N'en briseront l’anneau fait d’un seul mot : Je t’aime.
Ainsi ce joug d’amour, qu’on méprisait hier,
S’impose, au gré du sort, à l’esprit le plus fier !
Si le dieu vous choisit, ou funeste ou propice,
Il faut que son mystère entre vous s’accompliss