Page:Laprade - Œuvres poétiques, Les Voix du silence, 1880.djvu/222

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Qui sait rendre à tes flots la voix de leurs sirènes,
Et l’accent de Virgile à tes bruns laboureurs.

Mêlant tous deux notre âme et nos raves sans nombre
Dans ces chants alternés à la Muse si chers,
L’élégant Phocéen parle au druide sombre :
Moi je dis les grands bois, et lui les blondes mers.

Vers ton soleil, ainsi, lorsque je m’oriente,
Quand le morne brouillard étend chez moi son deuil,
La poésie en fleurs, l’amitié souriante,
Sous ton ciel sans hivers viennent me faire accueil.

En tes fleurs, ô Provence ! en tes fils que j’embrasse,
En tes mille vaisseaux voguant vers l’avenir,
En tes flots, en tes monts dentelés avec grâce,
A l’heure des adieux, laisse-moi te bénir.

Chez toi, sur ces sommets qui surplombent la grève,
Où le myrte jaillit du rocher qui se fond,
Je veux dresser ma tente… au moins j’en fais le rêve,
Car j’y devins poëte, et presque ton enfant.