Les arômes, les bruits et les clartés naissantes,
Les émanations de partout jaillissantes,
Ont envahi son âme, ébranlée un moment ;
Et devant la nature elle hésite en l’aimant.
Dans une langue, alors, que la vierge surprise
Sut comprendre et parler sans qu’elle l’eût apprise,
Les fleurs et les oiseaux étant là seuls vivants,
Un invisible chœur chantait avec les vents :
« Viens, nous t’aimons déjà ; viens, ô douce inconnue !
La terre où tu manquais tressaille à ta venue.
Viens, habite avec nous ce monde jeune et pur ;
Nul être malfaisant n’en trouble encor l’azur.
Prends avec nous ta part de ses faveurs fécondes,
Goûte avec amitié ses épis et ses ondes.
Ses arbres innocents n’ont pas de fruits amers,
Et la douceur du miel coule au fond de ses mers.
Mêle au sien ton bonheur, et ta grâce à ses grâces ;
Ses germes de beauté fleuriront sur tes traces.
Sois belle, sans rougir, dans ton jardin natal ;
On n’y connaît pas plus la pudeur que le mal.
Viens ! De tes frais pensers ne fais point de mystères
À ces plantes, tes sœurs ; à ces oiseaux, tes frères. »
« Que la lumière est douce ! et que l’air plein d’encens
Baigne d’un flot sonore et pénètre mes sens !
Quel souffle harmonieux me caresse et m’enivre !
Et si la vie est telle, oh ! qu’il est bon de vivre !
Vivais-je avant cette heure ? ai-je vu ce soleil ?