Page:Laprade - Œuvres poétiques, Psyché, Lemerre.djvu/77

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Des ruches, des vergers, les suaves prémices,
Et les coupes de vin, et le lait des génisses,
Et sur la toison molle un long sommeil goûté,
Et l’espoir, sur son corps, ramènent la beauté.

Dans le temple bientôt, entre toutes insigne,
Comme entre les oiseaux, sur un lac, un doux cygne,
Par sa voix, par sa forme égale aux immortels,
Sainte et belle prêtresse, elle orna leurs autels.

Lorsqu’au bord des forêts elle guidait les fêtes,
Les Nymphes pour la voir sortaient de leurs retraites ;
Et les travaux sacrés, les ombrages épais,
Les Muses lui donnaient l’oubli des jours mauvais.

Mais dans son calme heureux une image connue,
Comme l’aube au milieu des étoiles venue,
Eclipse par degrés le monde extérieur,
Aux clartés des rayons qu’elle jette en son cœur.
Chez elle un souvenir, qui réveille une attente,
De rêves inquiets remplit l’heure présente :
Un dieu l’avait aimée, un dieu fut son époux !
Beau, jeune, tout puissant. Un écho triste et doux
De la voix de ce dieu la poursuit sans relâche
Le doit-elle revoir ? Quel asile le cache ?
Comment de son séjour retrouver le chemin,
Et renouer l’espoir de ce céleste hymen ?
Vers lui, vers l’avenir, son cœur se précipite,
Sans donner un regret aux douceurs qu’elle quitte.
Tel un oiseau captif, malgré sa cage d’or,
S’il entrevoit le ciel, cherche à prendre l’essor.