Page:Laprade - Les Symphonies - Idylles héroïques, Lévy, 1862.djvu/340

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KONRAD


La fête de mon cœur n’aura duré qu’une heure ;
L’hôte envoyé du ciel y retourne et me fuit.
Un printemps pénétrait dans ma sombre demeure ;
Mais le soleil s’éteint, je rentre dans ma nuit.

Tu sais dans quel hiver a brillé ton sourire,
Quel ténébreux linceul chargeait mon front glacé,
De quels âpres soucis le présent me déchire,
Quels spectres contre moi déchaîne le passé.

Tu sais, dans l’avenir, le destin qui m’effraie,
L’espoir qui m’était cher et que je vois flétri.
Tes yeux ont répandu leur baume sur ma plaie :
Tu connais bien mon mal, car tu m’avais guéri.

Et voilà que tu pars, toi, ma douce lumière !
Ma main est tiède encor de tes adieux de sœur,
Et, déjà, ramenant la douleur coutumière,
L’ombre des jours mauvais retombe sur mon cœur.

Fantômes du matin, spectres des nuits futures,
Doutes, remords, terreurs, pensers irrésolus,
Recommencez sur moi, redoublez vos tortures !
L’ange qui vous chassait ne me défendra plus.