Page:Laprade - Les Symphonies - Idylles héroïques, Lévy, 1862.djvu/90

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Il chante avec la feuille et voit à travers l’onde ;
Partout présent, cet hôte échappe à tous les yeux.

Mais, si profond qu’il soit dans, sa vaste demeure,
Quoique baissés toujours ses voiles sont légers ;
A nos cœurs par les sens il s’adresse à toute heure,
Il communique à nous par mille messagers.

Les bois, les vents, les flots sont pleins d’esprits sonores ;
De vivantes odeurs voltigent sur lès prés,
L’âme luit à travers les yeux des météores.
Je sens, je vois, j’entends ces envoyés sacrés.

Un souffle, des forêts agitant les grands dômes,
Verse en moi des accords le fécondant essaim.
Dans l’or dé ce rayon des tourbillons d’atomes,
Avec l’air respires, viennent vivre en mon sein.

Au penchant du coteau, des mains aériennes
Effeuillent mon bouquet et mêlent mes cheveux,
Écrivent leur pensée ou dessinent les miennes
Sur les horizons d’or où je lis quand je veux.

A ces pouvoirs de l’air sitôt que je me livre,
Sans rien faire souvent que respirer et voir,
Je sens mes bras plus forte, mon cœur prêt à revivre,
Comme un arbre arrosé des pleurs secrets du soir.