Page:Laprade - Poèmes évangéliques, Lévy, 1860.djvu/131

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Autour de l’ennemi tourne en le resserrant ;
Il décrit lentement ses spirales infâmes
Le vautour infernal qui s’abat sur les âmes ;
Il arrive sans bruit et de chaque horizon,
Et forme autour du cœur une adroite prison.

Mais Jésus s’est muni du jeûne et du silence,
Et l’Esprit garde en lui toute sa vigilance.
Il avait vu de loin poindre cet ennemi
Qui nous cherche dans l’ombre et prend l’homme endormi ;
Et pour la lutte, armé d’une ardente prière,
Il veillait et pleurait, à genoux sur la pierre.

« Mon père, disait-il, ma force est toute en vous ;
Vous seul accomplissez l’œuvre que je résous ;
Malgré ce nom de fils, dont votre amour me nomme,
Je suis faible et craintif, du jour où je suis homme,
Et si votre vertu m’abandonne aujourd’hui,
En moi le sang d’Adam faillira comme en lui.
Car, tout nous vient de vous : de votre sein auguste,
La lumière de l’astre et la candeur du juste.
Et tout s’éclipserait, l’âme et le firmament,
Si le flot créateur tarissait un moment.
Ce qui n’est pas de vous, dans l’âme et la nature,
N’est que mal ou néant et menteuse figure.