Page:Laprade - Poèmes évangéliques, Lévy, 1860.djvu/14

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auguste qu’il a rendu plus présent à ses propres yeux sous les couleurs dont son imagination l’a revêtu. La signification du divin récit lui apparaît alors plus claire ; le pathétique en rayonne, et sa méditation prolongée avec ferveur jaillit, tour à tour,. d’enseignements, de prières ou de larmes.

Entre les mille révélations que fait à l’âme du chrétien chaque page du saint livre, l’artiste a le droit de choisir, selon le lieu et selon l’heure, renseignement qui répond le mieux aux besoins actuels de son cœur, à ses obscurités^ à ses douleurs, à ses aspirations personnelles, aux besoins, aux doutes, aux désirs des hommes de son temps. Mais dans ce vaste champ de l’exégèse poétique et morale, il faut savoir strictement se limiter. Autre est l’œuvre du poëte, autre celle du théologien. Le goût littéraire s’accorde avec la prudence orthodoxe pour ne soulever aucune question controversée, pour ramener l’imagination au point de vue le plus rationnel et le plus pratique, et ne permettre à la poésie que les passages les plus humains de la parole divine. L’arbre immense de l’Évangile tient ses rameaux à portée de notre main ; il cache ses racines en d’insondables profondeurs. La poésie ne doit toucher qu’aux fruits offerts à l’intelligence de tout homme de bonne volonté, et mûris pour nous à la lumière infaillible de l’Église. Il est permis à l’artiste de les cueillir ; mais ce n’est pas à lui de porter la bêche au pied de l’arbre en s’arrogeant les droits du céleste laboureur et de ceux qu’il a désignés pour cultiver son champ.

Le héros de cette divine histoire, écrite sous la dictée de l’Esprit-Saint, tient à l’homme par l’identité de la