Page:Laprade - Poèmes évangéliques, Lévy, 1860.djvu/189

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Vos prophètes, Seigneur, sont ainsi ; leur aspect
Remplit la foule au loin de haine ou de respect.
Eux, pourtant, descendus des monts que Dieu visite,
Ils serrent notre main qui devant eux hésite ;
Quand l’écho vibre encor des sermons triomphants
Ils reviennent parler la langue des enfants.
A quelque table obscure, où l’amitié les lie,
Leurs gloires, leurs douleurs, hormis Dieu tout s’oublie.
Là, pour se reposer des grandeurs du Thabor
Ils voilent, en entrant, les feux du nimbe d’or ;
Heureux, loin des chemins où l’on étend les palmes,
D’abriter sous ce toit leurs fronts tristes et calmes.

Vous-même, des douleurs exemple à tous donné,
Vous, marchant vers la croix pour qui vous étiez né,
Vous l’aviez, ô Jésus, cet asile si rare,
Cet asile du cœur ! Et c’était chez Lazare.

Le frère et les deux sœurs empressés sur le seuil
Vous le voyaient franchir avec un doux orgueil,
Vous les aimiez tous trois !… et l’enclos solitaire
Et des larges figuiers l’ombrage héréditaire,
Et ces murs de rosiers et de pampres vêtus
Qu’habitaient le travail et les humbles vertus.