Page:Laprade - Poèmes évangéliques, Lévy, 1860.djvu/228

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Ah ! jusque dans la nuit de l’éternel repos,
L’opprobre d’un tel jour réveillera mes os !
Vers le sol des aïeux se creusant une route,
Mon crâne du tombeau battra l’épaisse voûte ;
Je voudrai, de mon peuple espérant un remord,
Trouver chez lui l’honneur d’une seconde mort.
Mais puissé-je, en l’horreur dont ce jour nous menace,
Au combat des vivants avoir encor ma place !
Peut-être est-il resté dans le profond des bois,
Quelques rameaux noueux des vieux chênes gaulois,
Et qui remplaceraient, s’animant de mon âme,
Le glaive abandonné dans quelque pacte infâme.
Peut-être, ô sol sacré, monts que j’ai tant chéris,
Vos rustiques enfants descendraient à mes cris,
Et votre vieux granit, jusque vers la frontière,
Roulerait sur mes pas en bataillons de pierre !
Ou, si même l’honneur, si tout était perdu,
Mon faible corps, au moins, dans son sang étendu,
Retarderait pour toi l’heure, l’heure fatale !
Du temps qu’il faut pour qu’un dernier soupir s’exhale.