Page:Laprade - Poèmes évangéliques, Lévy, 1860.djvu/289

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Quand de son front touffu les bois sont respectés,
Elle en verse l’eau pure et l’ombrage aux étés.
Mais dès qu’un soc impie a fait les cimes chauves,
Du squelette des monts, du crâne des rocs fauves,
Les torrents descendus, comme des dieux vengeurs,
Détruisent la vallée et ses peuples rongeurs,

Brillant de nos vertus, ou terni par nos fautes,
Ce globe est le miroir de l’âme de ses hôtes.
La nature avec nous subit, incessamment,
Des chutes de l’orgueil l’antique châtiment.
Homme ! tu peux, au sein de la mère nourrice,
Du sang originel inoculer le vice ;
Ou bien, comme ton cœur transformant chaque lieu,
Refaire tout un monde à l’image de Dieu.

Mais le peuple, en ces jours insensés et cupides,
Décharné les sommets et les coteaux rapides,
Et, comme aux saints autels, fait la guerre aux forêts
Où les vertus du globe ont leurs germes secrets.
Les monts, les fronts humains portent les traces viles
Du niveau promené par les haines serviles.
Le rocher nu succède aux bois, aux prés fleuris.
Les vallons, encombrés d’infertiles débris,
Après quelques saisons de récoltes prodigues,