Page:Laprade - Poèmes évangéliques, Lévy, 1860.djvu/43

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Et, pressant les beaux fruits de la sagesse antique,
J’en ai fait, sous mes doigts, jaillir le vin mystique.

Puis les chênes gaulois m’ont dit tous leurs secrets ;
J’ai traduit aux humains la chanson des forêts.
J’ai, sous les noirs sapins, comme un fils des Druides,
Écouté les esprits qui leur servaient de guides,
Et, la verveine au front, avec la serpe d’or,
Du gui sacré de chêne invoqué le trésor.
Saignant des coups portés à mes forêts divines,
J’ai maudit notre engeance acharnée aux ruines ;
J’ai noté les accords des derniers sommets verts,
Et l’âme du grand chêne a parlé dans mes vers.

Maintenant j’ose plus et j’attends plus de grâces :
Sur les moûts de Juda je vais chercher vos traces,
O Christ ! dans votre champ, je vais près du chemin,
Après les moissonneurs choisis de votre main,
Glaner quelques épis du grain sacré qui reste,
Et pétrir aux enfants un peu de pain céleste.
J’ose ouvrir l’Évangile et chanter à mon tour,
Au pied du Golgotha, le cantique d’amour.
J’ose m’aventurer, ô croix ! sois ma boussole,
Sur le vaste océan de la sainte parole.
Je descends seul et nu, plongeur audacieux,