Page:Laprade - Psyché, 1857.djvu/183

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un espoir, qui n’aient été les vôtres ; je n’y trouve que mes faiblesses qui soient bien à moi.

Si j’ai puisé quelques gouttes aux sources de la vraie sagesse, c’est que vous m’avez aidé à soulever la pierre qui recouvre les puits sacrés. Nous nous sommes rencontrés dans les mêmes solitudes, conduits par les mêmes aspirations ; notre amitié s’est fortifiée dans des combats semblables et dans une commune tristesse ; elle s’est nourrie du même aliment, la sainte, l’éternelle poésie ; avec vous, c’est la poésie que Dieu retire de moi.

Cette œuvre que je vous offre, épanouie dans mes larmes, elle est née sous votre sourire, elle a reçu le baptême de vos conseils ; c’est votre esprit que j’interroge en l’achevant, car il portait en lui la règle du beau. Une parole de vous suffisait pour condamner ou pour absoudre mes actions et mes pensées. Seule au monde avec vous et sans autre écho que votre cœur, ma poésie aurait vécu aussi heureuse d’elle-même qu’avec les suffrages de tout un peuple. En vous, le rayon impersonnel et surhumain avait dissipé tout égoïsme de l’intelligence et du cœur ; et comme votre esprit s’abdiquait par l’amour en Dieu et dans les hommes, ce n’était plus un seul esprit, mais c’était l’esprit universel et divin qui pariait en vous. Avec vous j’avais deux consciences ; j’ai perdu la plus vigilante et la plus infaillible.

Cette force qui centuplait la mienne, elle m’est retirée à l’heure même où j’aborde les luttes les plus