Page:Laprade - Psyché, 1857.djvu/283

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Ce que vous m’avez dit dans vos deuils, dans vos fêtes,
Ce que vous m’avez dit même au fort des tempêtes,
Ce que l’onde, et la feuille, et les oiseaux des bois,
Et son cœur, me chantaient avec toutes leurs voix,
Ce que je veux redire en paroles sans nombre,
C’est qu’au sein du grand tout le mal n’est rien qu’une ombre,
Qu’il sera par l’amour à jamais effacé.
Oui, le mal finira, car il a commencé ;
Oui, l’être est bon, oui, tout doit bénir l’existence ;
Le bien seul est réel, le bien seul est substance ;
Et, sans cesse agrandi, chaque être doit, un jour,
De l’amour émané, retourner dans l’amour !

Sous l’œil de Dieu, perdus au fond des solitudes,
Et des plantes faisant nos charmantes études,
Par l’attrait du désert sur les sommets conduits,
Tout l’été nous passions les jours, souvent les nuits.
Mais sitôt que le froid dépouillait les collines,
Et refoulait la sève au profond des racines,
De son chaume Hermia ne passait plus le seuil,
Objet d’étonnement pour nous tous, et de deuil,
Se cachant même aux siens, et comme enveloppée
Dans le sommeil pesant dont l’hiver l’a frappée.
Une blancheur de neige avait glacé son teint ;
Comme l’azur des flots que la gelée éteint,
Ses grands yeux sans rayons, et d’où l’âme s’absente,
Perdaient leur profondeur lumineuse et vivante.
Son souffle et sa parole, enchaînés et taris,
N’embaument plus sa lèvre où meurt son fin souris ;
La mauve, ouvrant sa feuille avec mélancolie,
Remplace le corail de sa bouche pâlie ;
Et, tel que le soleil enfui sur d’autres bords,
Son esprit semble avoir abandonné son corps.