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RÉTABLISSEMENT DE L’ESCLAVAGE AUX COLONIES



Le 27 floréal An X (1802), Dupuy, au nom des Consuls, soumet au corps législatif un projet de décret qui rétablit aux colonies l’esclavage et la traite, conformément aux lois et règlements antérieurs à 1789.

Ainsi, discussions et actes de la Constituante, de la Législative, de la Convention, toute la Révolution des colonies était rayée d’un mot.

"La Constitution, avait dit Boissy d’Anglas, doit être le serpent d’airain qui guérissait toutes les blessures." Dans le même style mythologique, Dupuy disait en l’abolissant : "Les accents d’une philanthropie faussement appliquée ont produit dans nos colonies l’effet du chant des sirènes : avec eux sont venus les maux de toute espèce, le désespoir et la mort."

Deux jours après, 29 floréal, Adet fait, devant le Tribunat, un rapport sur ce projet de décret.

Ecoutons. Quel langage nouveau ! A quelle distance nous sommes de la Révolution ! Un peuple, en huit ans, peut-il passer ainsi aux deux extrémités de l’esprit humain !

"Il en est de l’esclavage des noirs, dit le rapport, comme de la guerre, sur laquelle tous les philosophes gémissent et qui est nécessaire cependant à la conservation des peuples… Un peuple ne peut renoncer à l’esclavage, sans compromettre les intérêts des autres nations ; un homme ne peut avoir l’horrible droit de se donner la peste… Il faut offrir un gage de sécurité à toutes les nations de l’Europe… Quant à la traite, il ne faut pas se laisser attendrir par des images d’expatriation violente, pas plus qu’un général, à la veille de livrer une bataille, ne doit se laisser détourner du combat par l’image de la mort.. »

Le Tribunat vote le décret par 54 voix contre 27. Le lendemain, Jaubert (de la Gironde) fait, au Corps Législatif, sur le même décret, un rapport qui exprime