Page:Larivière - La Villa des ancolies, 1923.djvu/10

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par ses habitudes, ses accoutrements que par sa manière générale de vivre dans une absolue solitude, semblait en avoir quarante.

Elle était la dernière et seule survivante de huit enfants issus du mariage de Paul Perrin et de Louise Gagné. À quatre ans, elle perdait sa mère. Son père, déjà vieux et cassé, ne put se décider à se séparer du seul être qu’il lui restait à chérir, il la garda près de lui, l’entoura d’une sollicitude égoïste, jalouse et quelque peu tyrannique. Il ne permit jamais qu’elle eut d’autre éducateur que lui-même.

M. Perrin était un ancien journaliste autrefois assez remarquable, qui avait essayé de la politique et enfin s’était consacré, durant cinq années, à la grande œuvre de la colonisation. De ces diverses carrières il était sorti désabusé et meurtri : ses grandes conceptions n’étaient pas comprises, ses efforts méconnus, sa sincérité même mise en doute.

Possesseur d’une fortune personnelle assez considérable, il se décida enfin à renoncer à la lutte et à venir terminer paisiblement ses jours dans la vieille maison de ses pères, sur la rive de l’Yamaska.

C’était, au dire de ceux qui l’ont connu intimement, un homme d’une haute intelligence et d’une vaste érudition ; il causait indifféremment, et avec une parfaite aisance, politique, philosophie, chimie ou physique, agriculture ou géologie. Mais, de toutes ces diverses sciences, il y en avait une surtout qui lui était chère : la botanique. Ami et disciple de l’abbé Provencher, il avait, à la mort de ce grand prêtre, malheureusement trop oublié de nos jours, voué tous ses efforts à la continuation de son œuvre.

Inutile de dire que l’éducation qu’il donna à son enfant se ressentit de la naïve passion du bon papa pour tout ce qui était fleur ou plante.