Aller au contenu

Page:Larivière - La Villa des ancolies, 1923.djvu/21

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Il y a toujours un bout, s’écria tout à coup Madame Lauzon, une voisine qui était accourue à son tour et que les récits fantaisistes avaient exaspérée, vous parlez tous sans rien savoir, vous n’avez rien vu, vous devriez vous taire.

— Mais le père Larose a tout vu. N’est-ce pas Monsieur Larose ?

— Je n’ai pas dit cela, c’est Deschamps qui m’a dit.

— Oui, bien tout cela c’est toujours l’homme qui a vu l’homme qui a vu l’ours, comme disait ma grand’mère. Eh bien, moi, j’étais à étendre mon linge sur ma galerie d’en haut et j’ai tout vu.

— Vous avez vu ?

— Oui, bien vu et je vous assure que c’est sa faute à M. Hainault, si Fidèle l’a maltraité. Comme je vous l’ai dit, j’étais à étendre mon linge, quand, tout à coup, je vois venir M. Hainault de l’autre côté de la rue et aussitôt Fidèle vient se montrer le nez à la barrière et lance deux ou trois jappements. M. Hainault prend sa canne et fait mine de vouloir lui en donner un coup. Fidèle fait quelque pas en montrant ses crocs. En ce moment, si M. Hainault avait « foncé » sur Fidèle et lui avait « bougré » un bon coup de canne sur le dos, le chien aurait été à jamais guéri ; mais savez-vous ce qu’il a fait ? En voyant arriver Fidèle, il prend sa course, mes amis, à croire qu’il avait le diable à ses trousses et se met à crier comme un perdu. Alors, le chien n’a fait ni un, ni deux, il a rejoint son homme, l’a saisi par le pan de son habit et l’a arrêté. Eh bien ! c’est toute l’histoire ! Comme vous voyez, il y a bien de sa faute à ce pauvre M. Hainault. Quand on est peureux comme lui, on ne fait pas mine de bâtonner les chiens !

Mademoiselle Perrin écoutait ce récit en frémissant. Les menaces qu’elle venait d’entendre résonnaient encore à ses oreilles. Grand Dieu ! qu’allait-on lui faire ?