Page:Larivière - La Villa des ancolies, 1923.djvu/30

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garçon modèle ! c’est celui qui, tout enfant, ne s’est jamais attiré la moindre réprimande tant il était déjà soigneux, attentif et docile, à l’école, toujours propre, sage, studieux, il obtenait tous les honneurs et jamais un reproche ne venait altérer sa douce sérénité ; au collège, c’était un premier de classe ; sa conduite, sa piété, son application au travail, tout chez lui en faisait un élève de prédilection et ses maîtres n’avaient que des éloges à lui prodiguer ; plus tard, dans le monde, où le bruit de ses succès et sa réputation de sagesse et de bonté l’avaient précédé, il n’avait rencontré que des visages amis ; ses opinions faisaient loi, sa parole était toujours écoutée avec respect, tout le monde semblait conspirer pour lui rendre la vie facile et douce. S’il se mêlait quelquefois à une discussion, ses adversaires l’écoutaient avec attention, ses arguments leur arrivant précédés de toute la confiance qu’inspirait sa longue réputation de droiture de science et de vertu, il réussissait infailliblement à les persuader ; quelquefois même s’il avait tort.

Mais en face de cette bête qui lui montrait les crocs, de ce chien de malheur qui faisait fi de sa sagesse, en face de son impuissance à se défendre de cette agression brutale qui le rendait ridicule, tout son orgueil naturel avait bondi, son caractère autoritaire, qu’aucune pratique d’obéissance n’avait rendu malléable, s’était cabré, il avait chargé de la faute de son chien cette pauvre et douce Mlle Perrin et, sans donner aux bons instincts de son cœur le temps de se reprendre, il lui avait crié sa rancœur.


IV.

DENT POUR DENT.


Pour la vingtième fois, peut-être, Mlle Perrin relisait la lettre que le facteur venait de lui remettre et qui était signée « Jean Dupras, avocat » !