Page:Larivière - La Villa des ancolies, 1923.djvu/67

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

— N’est-ce pas ? Cette grande blonde est-elle assez jolie, gracieuse, élégante…

— Quel feu ! quel feu !

— As-tu remarqué sa toilette ? Quel chic, quelle élégance !

— Attention, mon vieux, à ton âge, quand le cœur prend feu, cela dégénère bien vite en conflagration. Paul, mon vieux Paul, gare au coup de foudre !

— Rien à craindre de ce côté, Mlle Perrin et son chien sont de garde, tu peux dormir en paix. Et l’autre, qu’en dis-tu ?

— La petite qui se cachait derrière son journal ? Bah ! si elle avait été jolie, elle ne se serait pas cachée… D’ailleurs, tu sais, quant à moi, la tentation n’a pas de prise, la place est occupée !


VIII.

MACHIAVEL EN JUPONS.


Était-ce bien le hasard qui, le lundi après-midi suivant, avait conduit Mlle Yolande Perras sur la rue Girouard en face du parc Dessaules, juste au moment où Maître Dupras quittait le Palais pour se rendre à son bureau ? Le hasard est un bon père aux larges épaules que l’on charge volontiers de tous les péchés d’Israël.

Si vous aviez été au nombre des flâneurs qui, cet après-midi, faisaient leur sieste sur les bancs du parc, vous auriez été intrigué de voir la jeune fille faire, depuis près d’une demi-heure, la navette entre le viaduc et la cathédrale, parcourir minutieusement toutes les allées du parc et surveiller la sortie du Palais de Thémis qui le borne à l’arrière, comme une personne qui attend quelqu’un. Mais votre étonnement aurait été à son comble lorsque, voyant venir le jeune maître, elle était allée à sa rencontre, bien absorbée dans la lecture d’un journal quelconque, semblant être à cent lieues de soupçonner la venue de son ami.