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LA PAGODE AUX COBRAS

Elle lui tendait un papier et, tout émue, lui dit :

— Regarde ce que j’ai trouvé ce matin dans ton bureau. Ce billet enveloppait un caillou qui a été lancé de la rue à travers une vitre qu’il a brisée. Lis ! c’est grave !

Rigo examina un papier semblable à celui des documents saisis et dont les caractères étaient identiques. Voici ce qu’il lut :

« Fils d’une femme d’Annam, époux d’une femme d’Annam, tu trahis le sang de ta mère, tu trahis le sang de ton épouse.

« Renonce, sinon, à ton tour, l’Esprit t’atteindra. »

— C’était à prévoir, dit Rigo, ils m’ont repéré. Je prendrai mes précautions. Peut-être m’atteindront-ils, mais je crois plutôt que c’est moi qui les atteindrai.

Il exposa alors le plan qu’il avait mis sur pied et obtint toute approbation de sa femme. Sur un point ou deux seulement, elle indiqua quelques modifications, mais, surtout, insista pour faire partie de l’expédition.

— On se méfie moins d’une femme, dit-elle. Je changerai mon aspect, je me vieillirai et tu verras combien je pourrai t’être utile.

Sans hésiter, Rigo acquiesça :

— Entendu, mais promets-moi d’être prudente !

Promesse facile à faire, sinon à tenir !

Les deux époux se mirent d’accord : ils allaient se séparer ; elle, irait s’installer à Hongay dans le village près des usines de la société des « Charbonnages du Tonkin ». Village de petits commerçants, fournisseurs des coolies des Charbonnages, tous plus ou moins étrangers au pays, trans-