Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 1, part. 1, A-Am.djvu/118

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v. Absterger. Nettoyé : Un ulcère abstergé. Une plaie abstergée.

ABSTERGEANT {ab-stèr-jan) part. prés. du v. Absterger : On guérit quelquefois une plaie en l’abstergeant avec soin.

ABSTERGENT, ENTE adj. (ab-stèr-jan, an-te — rad. absterger). Méd. Qui est propre à nettoyer les plaies dont la suppuration est de mauvaise nature : Remèdes abstergents.

— s. m. Se dit des remèdes eux-mêmes : Les abstergents s’emploient pour éviter la putréfaction. L’eau simple et l’eau végéto-minérale sont les meilleurs abstergents. (Lav.) || On dit mieux Détersif.

ABSTERGER v. a. ou tr. {ab-stèr-je — lat. abstergere ; formé de abs, hors ; tergere, essuyer). Méd. Nettoyer une plaie dont la suppuration est mauvaise, dangereuse : Médicament propre à absterger.

S’absterger, v. pr. Être abstergé, nettoyé, lavé, purifié : Les plaies peuvent s’absterger de différentes manières.

ABSTERSIF, IVE adj. (ab-stèr-sif, i-ve — rad. absterger). Qui est propre à absterger, à nettoyer.

ABSTERSION s. f. (ab-stèr-si-on — lat. abstersio, même sens). Chir. Action, effet des remèdes abstergents : L’abstersion d’une plaie.

— Fig. Se dit aussi de l’action de s’absterger, de se purifier : Le baptême, l’immersion dans l’eau, l’abstersion, la purification par l’eau est de la plus haute antiquité. (Volt.)

ABSTINENCE s. f. (ab-sti-nan-se — lat. abstinentia, même sens). Action de s’abstenir, de se priver de l’usage de certaines choses : Abstinence du vin, des plaisirs, etc. L’abstinence des viandes est un des moyens les plus efficaces pour avancer notre sanctification. (Boss.) L’abstinence entière de la chair ne peut qu’affaiblir la nature. (Buff.) L’abstinence du vin est un bon précepte de religion dans l’Arabie. (Volt.) Les athlètes, pour se rendre plus robustes, vivaient dans une abstinence générale de tous les plaisirs. (Dacier.) Je vous dirai donc confidentiellement que l’abstinence des plaisirs me paraît un grand péché. (St-Evrem.) Le journal de Verdun fait mention d’un religieux qui, pendant plus de vingt ans, passa chaque carême dans une abstinence absolue du boire et du manger. (Improv. franç.)

Du vin l’on doit surtout faire abstinence.
Regnard.


|| Peut, dans ce sens, être suivi d’un nom de personne : L’Église catholique enjoint l’abstinence des femmes aux prêtres. (Acad.)

— Absol. Jeûne plus ou moins complet ; privation plus ou moins totale d’aliments et de boissons : La pratique, les rigueurs de l’abstinence. L’abstinence est utile au corps et à l’âme. (Acad.) Leur abstinence ridicule allait jusqu’à faire un crime de manger des animaux. (Boss.) Il choisit deux ou trois jours dans l’année, où, à propos de rien, il jeûne ou fait abstinence. (La Bruy.) Silius Italicus a fini ses jours par une abstinence volontaire. (Sacy.) L’abstinence, dans l’état de maladie, est un des moyens les plus importants de la thérapeutique. (Chomel.) Autrefois, en Pologne, on arrachait les dents à quiconque était convaincu d’avoir enfreint les lois de l’abstinence. (Ess. hist. sur Paris.)

Le seul chanoine Evrard, d’abstinence incapable,
Ose encor proposer qu’on apporte la table.
Boileau.
……… Par ma foi, la science
Ne s’acquiert pas du tout à force d’abstinence.
Regnard.

— Se dit aussi en parlant des animaux : Des chiens adultes ont vécu trois, quatre, cinq semaines et au delà dans l’abstinence la plus complète. Quoique très-vorace, le vautour peut supporter l’abstinence pendant quatorze jours. (Buff.)

— Privation de l’usage de la viande, prescrite par l’Église à certains jours : Observer l’abstinence. Être exténué d’abstinences. L’abbé de St-Cyran avait écrit un peu librement sur l’abstinence de la viande pendant le carême. (Rac.) Les abstinences dont l’Église nous fait une loi sont presque toujours violées. (Mass.)

Un dévot aux yeux creux, et d’abstinence blême,
S’il n’a point le cœur juste, est affreux devant Dieu.
Boileau.

Jours d’abstinence, Jours où la viande est défendue par l’Église : Il n’est pas jeûne aujourd’hui, il n’est que jour d’abstinence. (Acad.) Pour de l’argent, quelques-uns obtiennent le droit d’user, dans les jours d’abstinence, de quelques nourritures prohibées. (Raynal.)

……… Ciel ! un jour d’abstinence,
Prendre du chocolat sans ma permission !
Demoustier.

— Par ext. Éloignement des plaisirs mondains : Je suis enfin dans le repos de mes bois, et dans cette abstinence et ce silence que j’ai tant souhaités ! (Mme de Sév.)

— Se dit aussi de la privation des plaisirs de l’amour : Ce caractère fait que l’abstinence et la jouissance, le plaisir et la sagesse, m’ont également échappé. (J.-J. Rouss.)

— Peut s’appliquer aux choses : Quelle abstinence de paroles ! (Mariv.)

Encycl. Physiol. On donne le nom d’abstinence à la privation d’aliments et de boissons. L’abstinence prolongée amène nécessairement la mort. Les effets les plus constants de l’abstinence sont, d’abord la sensation douloureuse de la faim et de la soif, une grande sécheresse de la bouche, des tiraillements à l’épigastre, puis l’abattement et l’affaiblissement musculaire, le ralentissement de la respiration, la diminution de la chaleur animale, enfin des phénomènes nerveux, exaltation, délire, fureur, lesquels sont suivis d’une atonie complète, qui se termine par la mort. Pendant la durée de l’abstinence, l’oxygène continue d’être absorbé par la respiration, et les combustions qui constituent la vie font perdre peu à peu au corps le carbone et l’hydrogène de ses tissus. Cette perte, que les aliments ne viennent point réparer, porte d’abord sur la graisse, puis sur les muscles, et enfin sur le système nerveux.

L’abstinence se prolonge d’autant moins avant d’amener la mort que l’individu est moins chargé de graisse, qu’il fait plus de mouvement et d’exercice, que la température est plus basse. Plus on se rapproche des premiers mois de la vie, moins l’abstinence peut être supportée : l’histoire d’Ugolin survivant à ses enfants, dont le plus jeune meurt le premier, est un fait vraisemblable. — L’abstinence joue un grand rôle dans la thérapeutique. Les médecins en retirent de précieux avantages, surtout dans le traitement des maladies aiguës. V. Diète.

— Théol. Presque toutes les religions ont prescrit l’abstinence, soit comme moyen hygiénique, soit comme moyen de mortifier les sens et de dompter les passions. La loi de Moïse défendait aux Juifs la chair des animaux impurs ; elle ne permettait pas aux prêtres l’usage du vin pendant tout le temps qu’ils étaient occupés au service du temple. Dans le culte catholique, l’abstinence se distingue du jeûne. Elle consiste dans la privation d’aliments gras à certains jours, les vendredis et samedis, la veille des fêtes solennelles et pendant le carême. Elle est formellement prescrite par le sixième commandement.

Synonymes simples. Continence, diète, jeûne, privations.

ABSTINENT, ENTE adj. (ab-sti-nan, an-te — du lat. abstinens, qui s’abstient). Qui observe la tempérance, qui est modéré dans le boire et le manger : Le précurseur de Jésus-Christ était le plus austère et le plus abstinent des hommes. Les peuples du Midi sont plus abstinents que ceux du Septentrion. (Furetière.) || Se dit particulièrem. de ceux qui observent rigoureusement le jeûne et les autres prescriptions diététiques de l’Église : Valentinien devint si abstinent qu’il jeûnait très-souvent et mangeait fort peu, même dans les festins magnifiques qu’il donnait à ses courtisans. (Fléch.)

— Substantiv. Celui qui s’abstient de voter dans les élections : Plus le nombre des abstinents augmentera, plus il est clair que la pensée abstentioniste acquerra de puissance. (Proudhon.)

ABSTINENTS s. m. pl. (ab-sti-nan). Hist.{{lié}relig. Hérétiques du iiie siècle qui, sans adopter toutes les idées de Manès, lui empruntaient seulement l’horreur du mariage et de l’usage de la chair.

ABSTRACTEUR adj. (ab-strak-teur — V. Abstraire). Qui a la propriété d’abstraire, de séparer : La plus petite portion de leur nourriture leur offrait une si pure image du Verbe créateur et du Verbe abstracteur, qu’il était bien simple d’appliquer ce système à la création du monde. (Balz.)

— s. m. Celui qui aime les abstractions : Aujourd’hui le règne des abstracteurs est irrévocablement passé. (Ch. Nodier.) De tous les systèmes d’éducation, le plus absurde est celui qui scinde l’homme en deux entités impossibles : un abstracteur et un automate. (Proudhon.)

ABSTRACTIF, IVE adj. (ab-strak-tif, i-ve — V. Abstraire). Qui sert à exprimer des idées abstraites, ou qui est formé par abstraction : Termes abstractifs.

— Se dit quelquefois pour Abstrait : Pour nous, l’égalité malheureusement n’existe qu’à l’état abstractif. (Journ.)

— Anc. chim. Se disait des produits retirés des plantes par la distillation.

ABSTRACTION s. f. (ab-strak-si-on — V. Abstraire). Faculté, opération par laquelle l’esprit, séparant ce qui est naturellement uni, considère les qualités indépendamment des substances dans lesquelles elles résident : L’attention et l’abstraction sont les véritables puissances de l’homme penseur. (Mme de Staël.) Sieyès avait mené jusqu’à quarante ans une vie solitaire, réfléchissant sur les questions politiques, et portant une grande force d’abstraction dans cette étude. (Mme de Staël.) Les langues primitives, ignorant presque entièrement l’abstraction, donnèrent une forme éminemment concrète à l’expression de la pensée. (Maury.) L’abstraction est inconnue à l’homme primitif. (Renan.)

— Résultat de l’opération de l’esprit par laquelle on a isolé métaphysiquement les différents caractères des choses, pour les considérer à part et chacun en lui-même ; idées abstraites : Une page éloquente de Bossuet sur la morale est plus utile et plus difficile à écrire qu’un volume d’abstractions philosophiques. (Chateaub.) Il n’y a point de science plus certaine ni plus claire que la géométrie. On y a cependant mêlé certaines abstractions métaphysiques qui font que les géomètres tombent dans l’erreur comme les autres. (Girard.) Il était réservé à la puissance du génie d’Aristote, si profondément spéculatif et pratique à la fois, d’approfondir avec le même succès le monde des abstractions et ce monde des réalités matérielles qui renferme d’intarissables sources de mouvement et de vie. (Humboldt.) Homère dessinait nettement des traits caractéristiques, au lieu de les effacer par des abstractions. (Ponsard.) En un sens, ce sont des abstractions qui mènent le monde. (Renan.) Le grand abus des abstractions est de prendre, en métaphysique, les êtres de raison, tels que la pensée, pour des êtres réels. (Joubert.)

— Peut être suivi d’un adjectif ou d’un complément qui indique par quoi s’opère l’abstraction : L’opération de l’esprit qui tire l’idée de son sujet s’appelle précision ou abstraction mentale. (Boss.) C’est par une simple abstraction de l’esprit que le géomètre envisage les lignes comme sans largeur et les surfaces comme sans profondeur. (D’Alemb.) Parler, c’est abstraire, et l’abstraction du langage n’est pas moins naturelle que celle de l’esprit et des sens. (Laromig.)

— On dit aussi bien des idées d’abstraction que des abstractions d’idées, pour désigner des idées abstraites, des idées produites par abstraction : Les idées que nous avons communément du simple ou du composé sont des idées d’abstraction. (Buff.) On n’y trouve aucune de ces abstractions d’idées pour lesquelles on est obligé de se créer un langage inintelligible au commun des hommes. (Chateaub.)

— Se dit par anal., et dans une acception défavorable, des idées trop métaphysiques, des théories trop générales, trop vagues, qui ne peuvent recevoir d’application : C’est un esprit chimérique, qui se perd dans les abstractions. (Acad.) On sacrifiait à des abstractions et à de vaines espérances le bien des générations futures. (Napol. Ier.) Il faut aux peuples des vérités usuelles et non des abstractions. (Rivarol.) Gardez-vous de tomber dans des abstractions métaphysiques : il faut au peuple des dehors qui frappent les sens. (Vergniaud.) Il avait plus vécu dans les abstractions que dans les réalités. (Mignet.)

— Absences d’esprit ; distractions causées par la tension de l’esprit, occupé d’idées abstraites ou de fortes spéculations : Les personnes qui font de profondes études, et celles qui ont de grandes affaires ou de fortes passions, sont plus sujettes que les autres à avoir des abstractions. (Girard.) Une religieuse s’accusait d’avoir eu des abstractions. « Dites des distractions, ma sœur, repartit le confesseur ; c’est déjà assez pour une religieuse. » (Improv. franç.)

Faire abstraction de, Mettre de côté, écarter, ne pas s’occuper de : Pour juger sainement, je ferai abstraction de haine et d’amour. (Mlle de Lespinasse.) Faites pour un moment abstraction des vérités révélées. (Montesq.) À qui servirait notre hauteur de pensée, si elle ne nous permettait pas de faire abstraction des petites cérémonies dans lesquelles les lois entortillent les sentiments ? (Balz.)

Abstraction faite, En laissant de côté, en n’ayant pas égard : Abstraction faite du style, qui est faible, cet ouvrage a quelque mérite. (Acad.) Il faut louer une bonne action, abstraction faite des motifs. (Boiste.)

Par abstraction, loc. adv. D’une manière abstraite : L’idée dont on s’occupe par abstraction est tirée, pour ainsi dire, des autres idées qui ont rapport à celle-là. (Dumarsais.) Il me semble que l’évidence ne peut jamais être dans les lois naturelles et politiques qu’en les considérant par abstraction. (J.-J. Rouss.)

Encycl. Philos. L’abstraction est une opération par laquelle notre esprit, après avoir distingué les différents caractères d’un objet, sépare des autres l’un de ces caractères et le considère isolément comme une chose ; ainsi, quand je considère la couleur d’un lis sans en considérer la forme, le parfum, etc., mon esprit fait une abstraction. On donne aussi le nom d’abstraction à la qualité, au caractère que l’esprit a isolé de cette façon, et pour ainsi dire réalisé ; ainsi, la couleur est une abstraction. On voit qu’abstraction, en ce dernier sens, est une expression corrélative du mot ensemble, puisque l’idée qu’elle exprime a rapport à une chose séparée d’un ensemble, d’un tout. En faisant des abstractions, nous découvrons les rapports de ressemblance qui existent entre les objets, nous nous élevons à la notion de ce qui leur est commun : de là les idées générales. Toute la connaissance humaine a pour fondement l’abstraction. Le plus simple raisonnement, la logique tout entière, les langues, toutes nos sciences enfin, n’existent que par cette faculté de notre esprit. Chaque science a ses abstractions. « Un fait, dit M. Chevreul, est une abstraction précise. En effet, dans les sciences, les faits que l’on étudie ne sont que des propriétés, des qualités, des attributs, des manières d’être, qui ne sont évidemment que des abstractions. L’histoire des corps vivants, comme celle des corps bruts, est le recueil de ces abstractions. » On a distingué deux espèces principales d’abstractions, celles des sens et celles de l’esprit. Les premières sont les propriétés de la matière ; l’analyse des phénomènes intellectuels et moraux fournit les secondes. Avec la capacité d’abstraire, s’élève la culture de l’esprit. L’humanité, comme l’homme, s’éloigne d’autant plus de l’état d’enfance, que l’abstraction joue un plus grand rôle dans ses idées et dans son langage. Disons aussi que l’imagination fait de l’abstraction une cause d’erreur, parce qu’elle tend à prêter une existence réelle aux conceptions abstraites de notre esprit ; c’est ainsi que la poésie personnifie l’amour, la beauté, la sagesse. Condillac s’est élevé contre l’abus des abstractions, et nous a appris à décomposer les idées abstraites.

Syn. Abstraction (faire), abstraire. On abstrait une chose en la séparant de tout le reste, pour s’en occuper exclusivement : Pour bien connaître un sujet, il faut en abstraire successivement les qualités et les considérer chacune séparément. (Lav.) On fait abstraction d’une chose en la laissant de côté sans la considérer : En faisant abstraction de ses livres, on aimait Helvétius tel qu’il était. (Marmontel.)

ABSTRACTIVEMENT adv. (ab-strak-ti-ve-man — V. Abstraire). Par abstraction : On peut considérer abstractivement les qualités des corps. (Acad.) Dites à l’artiste de peindre la lumière abstractivement, il confessera l’impuissance de son art. (Chabanon.) Cette analyse nous fera connaître que le mot sensation, pris abstractivement, n’exprime proprement aucune idée, et que ce mot n’est qu’une expression commune à toutes les idées que nous recevons par les sens. (D’Alemb.) La question n’a été traitée qu’abstractivement dans le premier article. (Fourier.)

— Indépendamment de. Dans ce sens, il est toujours suivi d’un complém. marqué par la prépos. de : Considéré abstractivement des institutions qui en font un être tout artificiel, l’homme abandonné à lui seul ne serait qu’une créature naturelle. (Encycl.) Cette épreuve a donné à mes sentiments la forme invariable qu’ils ont toujours observée abstractivement de toute réflexion. (J.-J. Rouss.)

— Idéalement, en idée : Il ne sentait plus l’aiguillon de la gloire ; il avait en quelque sorte abstractivement joui de la renommée. (Balz.)

Abstractivement parlant, loc. absol. En faisant abstraction de telle ou telle circonstance particulière : Abstractivement parlant, un reproche général peut être bien fondé contre telle manière d’exister d’un corps, sans qu’on entende en faire d’application personnelle à aucun de ses membres actuels. (Beaumarch.)

— Au lieu de abstractivement parlant, on dit quelquefois tout simplement abstractivement : De toutes les bévues de notre siècle, il n’en est pas de plus funeste que l’esprit de liberté, bon et très-louable abstractivement, mais si mal dirigé en application. (Fourier.)

Syn. Abstractivement, abstraitement. Abstraitement, d’une manière abstraite : Aimerait-on la substance de l’âme d’une personne abstraitement, et quelques qualités qui y fussent ? (Pasc.) Abstractivement, d’une manière abstractive, par abstraction : Abstractivement parlant, un reproche général peut être bien fondé. (Beaumarch.) On peut dire que le premier exprime une action et le second un état.

ABSTRACTIVITÉ s. f. (ab-strak-ti-vi-té — V. Abstraire). Néol. Faculté d’abstraire, de faire des abstractions : Il est des individus chez lesquels l’instinctivité se mêle à l’abstractivité dans des proportions infinies. (Balz.)

ABSTRAIRE v. a. ou tr. (ab-strè-re — du lat. abs, qui indique séparation, et trahere, tirer. En effet, abstraire, c’est séparer, au moyen de l’esprit, une qualité, une propriété d’avec le sujet auquel elle est inhérente. — J’abstrais, tu abstrais, il abstrait, nous abstrayons, vous abstrayez, ils abstraient. J’abstrayais, nous abstrayions. J’abstrairai, j’abstrairais. Abstrais, qu’il abstraie, abstrayons, abstrayez. Que j’abstraie, que tu abstraies, qu’il abstraie, que nous abstrayions, que vous abstrayiez, qu’ils abstraient. Abstrayant. Abstrait, te. Le passé défini et l’imp. du subj. manquent). Faire une abstraction, ne considérer qu’un attribut ou une propriété de quelque être, sans faire attention aux autres qualités ou attributs : Pour bien connaître un sujet, il faut en abstraire successivement les qualités, et les considérer chacune séparément. (Layeaux.)

— Absol. : L’imagination des premiers hommes fut d’autant plus féconde en symboles poétiques, qu’ils étaient plus jeunes, plus grossiers, plus incapables d’abstraire. (Michelet.)

— Par ext. Abstraire son esprit de, Détourner son attention de tous les autres objets pour la porter sur un seul : J’ai été forcé d’abstraire mon esprit dix, douze et quinze heures par jour, de ce qui se passait autour de moi, pour me livrer à la composition d’un ouvrage dont personne ne parcourra une ligne. (Chateaub.)

S’abstraire, v. pr. Être entièrement absorbé dans, occupé de ; s’isoler complètement des choses environnantes : Les barbouilleurs de papier ont surtout cette faculté de s’abstraire dans leur manie pendant les plus grands événements. (Chateaub.) Je suis donc forcé de m’abstraire de tout concours à la politique. (G. Sand.) La politique, en effet, ne se lance à travers les déclamations de la chicane que là