Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 1, part. 2, An-Ar.djvu/182

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— s. f. L’apologétique, Partie de la théologie qui a pour but de défendre la religion chrétienne contre les attaquesde ses ennemis : ^’apologétique forme aujourd’hui une véritable science. (Mariés.) //apologétique diffère des simples écrits polémiques, en ce qu’il n’est pas destiné à soutenir des doctrines contre d’autres doctrines. (Mariés.) Ce procédé (/’apologétique, tantôt part de la raison pour s’élever jusqu’à ta foi, tantôt descend de la foi pour rejoindre la raison. (De Broglie.) Le génie d une théologie se reflète toujours dans /’apologétique à laquelle elle donne naissance. (Ed. Scherer.)

— Particulièrem. s. m. Titre d’un livre composé par Tertullion pour la défense du christianisme : Chose étrange que le christianisme soit obligé de se défendre maintenant devant ses enfants, comme Use défendait autrefois devant ses bourreaux, et que /’Apologétique aux gentils soit devenu /’Apologétique aux chrétiens/ (Chatcaub.) V. plus loin.

— Antonymes. Critique, déprédateur, épiframmatique, improbateur, improbatif, morant, réprobateur, satirique, virulent.

— Encycl. Comme il n’y a pas <je religion qui n’ait ses détracteurs, il n y en a pas non plus qui n’ait son apologétique ; c’est l’arsenal théologique où ses défenseurs vont puiser les preuves et les arguments dont ils ont besoin pour repousser les attaques dont elle est l’objet. Tout ouvrage, tout traité, quels qu’en soient d’ailleurs Te titre et la forme, écrit pour la glorification d’un système d’idées religieuses, appartient à l’apologétique. Mais ce sont surtout les apologistes du christianisme qui ont fait l’éclat et la célébrité de cette science. Avant Tertullien, et dès le m siècle de l’Eglise, des voix éloquentes s’étaient déjà élevées pour la défense de la foi chrétienne. Nous citerons Quadratus, évêque d’Athènes, saint Apollinaire, gouverneur de l’Église d’Hiérapolis en Phrygie, saint Méliton, évêque de Sardes : malheureusement, leurs ouvrages ne nous sont point parvenus. Mais nous avons les deux Apologies de saint Justin, qui scella de son sangja sincérité de sa foi, et son Dialogue avec le juif Tryphon ; le Discours aux gentils, par Tatien ; la Satire contre les philosophes païens, par Hermias ; VAmbassade d’Athénagore pour les chrétiens, adressée aux deux empereurs Marc-Aurèle et Lucius "Verus ; les trois livres de saint Théophile, évêque dAntioche, adressés à Autolycus : VExhortation aux païens, de saint Clément d’Alexandrie ; la Dispute contre les païens, d’Arnobe ; le dialogue de Minutius Félix, intitulé Octavius ; les huit livres d’Origène contre Celse ; les Institutions divines, de Lactance ; le Discours de saint Athanase contre les païens ; la Thérapeutique, (e Thôodoret ; les deux Lettres de saint Cyrille contre Julien ; le discours de Grégoire de Nazianze contre le même empereur ; les nombreux écrits de saint Cyprien de saint Jean Chrysostome, de saint Augustin^ et de tant d’autres beaux génies qu’il serait trop long d’énumérer.

Dans les temps modernes, nous pourrions citer encore, comme du domaine de Vapologétique, le Génie du Christianisme de Châteauuriiind : les Conférences de Frayssinous et celles du p. Lacordaire, enfin le premier volume de l’Essai sur l’indifférence en matière de religion, de Lamennais. J apologétique . protestante nous offre les noms de Hugo Grotius, Less, Naesselt, Reinhard, Rosenmuller et Spaldtng.

Apologétique de Tertullien. Cet ouvrage. m dp, t,1„. ™* * -J„ :.x. ieg premier£

ip après J.-C.

n des plus justement admirés des premiers Jècles chrétiens, parut vers l’anîop après J.-C. Comme on avait oté aux chrétiens la liberté

s défendre devant les juges, Tertullien entreprend de prouver par écrit leur innocencé. S’adressant aux magistrats de Carthage, aux gouverneurs des provinces, à l’empereur lui-même, il montre les progrès croissants cte la religion nouvelle. On connaît ces ftères paroles si souvent citées : « Nous ne sommes qu» d hier, et nous remplissons vos cités, vos colonies, l’armée, le palais, le sénat, le forum : nous ne vous laissons que vos temples. » Cette religion qui pénètre partout, on la condamne sans la connaître ; ces chrétiens si nombreux, on les envoie au suppKce sans les entendre : on ne s informe pas de ce qu’ils ont fait : le nom seul de chrétien est un crime digne de mort. Y a-t-il rien de plus odieux et de plus absurde que ces.accusations dont les charge la haine païenne, d’égorger des enfants dans leurs mystères, d’y manger de la chair humaine, dy commettre des incestes, etc. ? Nous citerons ici le début de ce beau plaidoyer : à S’il ne vous est pas libre, souverains magistrats do 1 empire romain, qui rendez vos jugements en publie et dans le lieu le plus éminent de cette capitale ; s’il ne vous est pas libre, sous les yeux de la multitude, de faire des informations exactes sur la cause des chrétiens ; si la crainte ou le respect humain vous portent à vous écarter en cette occasion des règles étroites de la justice ; si la haine du nom chrétien, comme il arriva dernièrement, trop disposée à recevoir des délations domestiques, ferme les oreilles à toute défense judiciaire que la vérité puisse au moins vous parvenir par 1 intermédiaire de nos lettres muettes. Elle , ne demande pas de grâce, parce que la persécution ne l’étonné point. Etrangère sur la terre, elle s’attend à y trouver des ennemis, i-ille du ciel, c’est au ciel qu’est son trône, que

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sont ses espérances, son crédit et sa gloire. Elle ne souhaite qu’une chose, c’est de ne pas être condamnée sans être entendue. Qu’avezvous à craindre pour vos lois, en permettant à la vérité de se faire entendre dans le siège de leur empire ? Est-ce que leur puissance se montrerait avec plus d éclat en condamnant la vérité sans l’entendre ?... Voilà notre premier grief : cette haine injuste pour le nom chrétien. Votre ignorance même, qui semblerait devoir l’excuser, est précisément ce qui prouve cette injustice et la rend encore plus criminelle. Quoi de plus injuste, -en effet, que de haïr ce que l’on ne connaît pas, quand bien même ce que l’on ne connaît pas serait par hasard haïssable ? »

On peut juger par ce fragment de l’éloquence de Tertullien. Cette éloquence virile, peu soucieuse des ornements du discours, va droit à la preuve et s’adresse toujours à la raison ; on y sent le langage d’une société nouvelle, de mœurs nouvelles, de sentiments au milieu de l’ancien monde. « Ce

loppement de l’esprit humain ; on entre dans un nouvel ordre d idées ; ce n’est plu3 la première antiquité ou le bégayement de l’homme qui se fait entendre. Tertullien ’parle comme un moderne ; ses motifs d’éloquence sont pris dans le cercle des vérités éternelles, et non dans les raisons de passion et de circonstance employées à la tribune romaine ou sur la place publique des Athéniens. »

APOLOGIE s. f..(a-po-lo-jî — du gr. apologia ; formé de apo, indiquant écartement ; logos, discours). Discours, écrit, pour justifier, défendre une personne ou une chose : Faire /’apologie de quelqu’un, de la conduite de quelqu’un. Il avait entrepris de faire /’apologie de ce livre.1 Nous nous faisons à nous-mêmes /’apologie de nos vices. (Mass.) Nous faisons tous les jours /’apologie des maximes du monde. (Mass.) Son apologie de Socrate est un service rendu aux sages de toutes les nations. (Volt.) Dois-je apprendre si tard à faire mon t (3.-3. Rouss.) Saint Julien martyr

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été écrites par des laïques, (châteaub.) La oassesse, comme toujours, se trouva à point nommé pour faire /’apologie du crime. (Chateaub.) Par d éloquentes apologies, lordNorth et Fox, étayés l’un sur l’autre, obtinrent lamajorité dans la Chambre des communes.’INzm.) Un accès de toux épouvantable interrompit /’apologie du canonnier. (E. Sue.) Les hommes font leur apologie de bien des façons. (Nisard.) L’écrivain qui fait /’apologie du crime en est le complice. (3, Sim.) //apologie du bien en ce monde demande beaucoup plus de frais de talent que /’apologie du mal. (St-M. Gir.) ""11" «™ opuiugic. jjkù Ai’uiAïuiiis ac j.m phile sont plus remarquables encore que lettre à Balzac. Il n’élucide pas seulement 'faits, il ne débrouille pas seulement l’intrigue ; il traite avec supériorité le côté moral de la cause. (Ph. Chasfes.) ■

— Par ext. Tout ce qui tend à justifier quelqu’un : Sa conduite fait son apologie. (Acad.) Ils sont ravis de trouver dans leurs imitateitrs /’apologie de leurs vices. (Mass.)

— Législ. Justification ou défense présentée soit par écrit, soit de vive voix, en faveur d’un accusé ou d’un fait incriminé. Toute apologie de faits qualifiés crimes ou délits par la loi pénale est punie, quand elle est faite par l’un des moyens énoncés en l’article ï" de la loi du 17 mai 1819, d’un emprisonnement d’un mois à deux ans et d’une amende de 16 fr. À 1,000 fr.

— Antonymes. Attaque, blâme, condamnation, censure, critique, déert, dénigrement, dépréciation, désapprobation, détraction, diatribe, flétrissure, improbation, objurgation, philippique, ravalement, répréhension, satire.

— Syn. Apologie, .Ufciisc, justiflcoilon. h apologie est une réponse à des reproches généraux ; à des bruits vagues, comme ceux que l’on taisait courir contre les premiers chrétiens, et est ordinairement spontanée : Les Pensées de Pascal devaient, dans l’esprit de l’auteur, porter le titre «/’Apologie du Christianisme. La défense a pour but de repousser une attaque : Les plus savants ministres protestants entreprirent la défense de la doctrine de la grâce universelle. (Boss.) La justification est la preuve ou la manifestation de l’innocence d’un accusé : Une justification si évidente ne fut point reçue. (Volt.)

Apologie de Socrntc, ouvrage de Platon. C est le discours mémorable prononcé par Socrate devant l’Aréopage, en réponse à l’accusation intentée contre lui. On sait que cette accusation, formulée par Mélitus, reposait sur ces deux chefs : que Socrate ne reconnaissait pas les dieux de la république ; 2« qu’il corrompait la jeunesse. Après s’être excusé de ne pas se servir d’un discours étudié et travaillé selon l’usage, et prié les juges de le laisser parler comme il avait coutume de le faire, Socrate s’attache à détruire une calomnie depuis longtemps répandue et enracinée dans les esprits, et qui, en prévenant un grand nombre d’Athéniens contre lui a d, onné con APO

fiance à ses accusateurs. Certaines gens n’ont cessé de le signaler comme un homme dangereux qui, par une curiosité criminelle, veut pénétrer ce qui se passe dans le ciel et sous la —terre, fait une bonne cause d’une mauvaise, et enseigne aux autres ces secrets pernicieux. Cette accusation ancienne, anonyme, irresponsable, n’a pas de fondement ; Socrate n’a jamais recherché les mystères de la nature ; sa science n’a pas d’autre objet que l’homme, et ne se vend point pour de l’or. Quel est le secret de cette calomnie ? C’est l’envie excitée par sa réputation de sagesse, ce sont les ini—mitiés nombreuses et puissantes qu’il s’est attirées en éprouvant tour à tour politiques, postes et artistes, et en démasquant leur ignorance.

Arrivant aux chefs de l’accusation, Socrate quitte la forme apologétique pour prendre sa forme de discours accoutumée. Il interpelle Mélitus, etavec son ironie ordinaire, le réduit à quitter le terrain où il s’était placé, et à changer son accusation en celle d’athéisme. Il n’a pas de peine à prouver qu’il n’est pas athée, et qu’il reconnaît des dieux, à Comment croirais-je, dit-il, qu’il y a quelque chose de t/émon !£/iieenmoi, sijenecroyais aux démons ; et comment croirais-je aux démons si je ne croyais aux dieux ?» À l’accusation de corrompre la jeunesse", il répond en protestant qu’il enseigne aux jeunes gens une morale pure. « Je n’ai pas besoin, ajoute-t-il, d’une plus longue défense, Athéniens ; ce que je viens de vous dire suffit pour montrer que je ne suis pas coupable... Si je succombe, ce sera l’envie qui en sera cause, l’envie qui a déjà fait périr tant de gens de bien, et qui en fera périr encore tant d’autres... Du reste, vous êtes dans l’erreur si vous croyez qu’un homme qui vaut quelque chose doit considérer les chances de la mort ou de la vie, au lieu de chercher seulement, dans toutes ses démarches, si ce qu’il fait est juste ou injuste... Ce serait de ma part une étrange ’conduite, si, après avoir affronté la mort avec les braves de Potidée, d’Amphipolis, de Delium, dans le poste que m’avaient assigné vos généraux, la crainte de la mort me faisait aujourd’hui abandonner le poste où je crois que le dieu de Delphes m’a placé, et renoncer à la mission que j’en ai reçue de cultiver la philosophie, et d’éprouver sans cesse et moi-même et les autres !... Craindre la mort, Athéniens, ce n’est autre chose que se croire sage sans l’être, car c’est croire connaître ce que l’on ne connaît point. En effet, personne ne connaît ce que c’est que la mort, et si elle n’est pas le plus grand des biens pour l’homme. Cependant cm la craint comme si l’on savait certainement que c’est le plus grand de tous les maux... Pour moi, si j’osais me dire plus sage qu’un autre en quelque chose, c’est en ce que, ne sachant pas bien ce qui se passe après cette vie, je ne crois pas non plus le savoir ; mais ce que je sais bien, c’est qu’il est honteux et criminel de commettre une action injuste, et de manquer à une mission qu’on a reçue d’un supérieur, homme ou dieu... Si donc vous me disiez : Socrate, nous te renvoyons absous, mais c’est à condition que tu cesseras de philosopher et de faire tes recherches accoutumées, je vous répondrais sans balancer : Athéniens, je vous honore et je vous aime, mais j’obéirai plutôt au dieu qu’à vous... Renvoyez-moi ou ne me renvoyez pas, je no cesserai jamais de vous dire que ce n’est pas la richesse qui fait la vertu, mais au contraire que c’est la vertu qui fait la richesse, et que c’est de là que naissent tous le3 autres biens publics et particuliers ; je ne ferai jamais autre chose, quand je devrais mourir mille fois... Mats peut-être se trouvera-t-il quelqu’un parmi vous qui s’irritera contre moi en se souvenant que, dans un péril beaucoup moins grand, il a conjuré et supplié les juges avec larmes, -et que, pour exciter une plus grande compassion, il a fait paraître ses enfants, tous ses parents et tous ses amis. Je ne fais rien de tout cela, non par une opiniâtreté superbe ni par aucun mépris pour vous, mais pour mon honneur, pour le votre et pour celui de la république... 11 me semble que la justice veut qu’on ne doive pas son salut à ses prières, qu’on ne supplie pas le juge, mats qu’on l’éclairé et qu’on le convainque ; car le juge ne siège pas ici pour sacrifier la justice au désir de plaire, mais pour la suivre religieusement ; il a juré, non de faire grâce à qui bon lui semble, mais de juger suivant les lois. Il ne faut donc’pas que nous vous accoutumions au parjure, et vous ne devez pas vous y laisser accoutumer. »

Ici les juges ayant été aux voix, la majorité déclare que Socrate est coupable. Invité, d’après la loi athénienne, à indiquer lui-même la peine qui doit lui être infligée, il affirme son innocence et maintient avec une sublime fierté, en face de ses juges, toute la hauteur de sa mission, en déclarant que pour n’avoir connu dant toute sa vie, pour avoir

.les autres recherchent avec

tant d’empressement, les richesses, les emplois militaires, les fonctions d’orateur et les autres dignités ; pour n’être entré dans aucune des conspirations et des cabales si fréquentes dans la république ; pour avoir consacré tout son temps à les rendre vertueux et sages, ce n’est pas une peine, c’est une récompense qu’il doit attendre. Ce qu’il mérite, c’est d’être nourri aux frais du trésor public dans le Prytanée. Lui qui n’a jamais été injuste envers personne, il ne veut point l’être envers lui-même en avouant qu’il mérite une peine. S’il était riche,

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il se condamnerait volontiers à une amende

qui, en l’appauvrissant, ne lui ferait aucun

tort ; mais on n’ignore pas qu’il ne possède rien.

Les juges vont aux voix de nouveau, et la

fait pour être absous qui fût indig... d’un homme libre, do ne pas devoir la vie k une lâche apologie. Il n’est pas plus permis, dit-il, devant les tribunaux que dans les combats, d’employer toutes sortes de moyens pour échapper à un.péril. Eviter la mort n’est pas aussi difficile que d’éviter le crime ; le crime court plus vite que la mort. Aussi, vieux et pesant comme il est, il s’est laissé atteindre par le plus lent des deux, tandis que le plus agile, le crime, s’est attaché à ses accusateurs, qui ont de la légèreté et de la vigueur, 11 s’en va donc subir la mort à laquelle il est condamné, et eux l’iniquité et l’infamie à laquelle la vérité les condamne.

S’adressant enfin à ceux qui ont voté son acquittement, il les console pour ainsi dire de sa mort, en leur montrant les raisons qui peuvent faire espérer que la mort est un bien. La’ mort, dit-il, est, de deux choses l’une, ou l’anéantissement absolu et la destruction de toute conscience^ ou, comme on le dit, un simple changement, le passage de l’âme d’un lieu dans un autre. Si la mort est la privation de tout sentiment, un sommeil sans aucun songe, pourquoi la craindre ? Quel est celui qui trouvera dans sa vie beaucoup de nuits, beaucoup de jours plus heureux, que telle nuit qu’il a passée dans un sommeil sans songes ? Si la mort est un passage de ce séjour dans un autre, quel plus grand bien peut-on imaginer ?

Apologie <ie Socrntc, par Xénophon. L’impression qui ressort de la lecture de ces quelques pages, c’est qu’en les écrivant l’auteur a cédé ou à un devoir, ou simplement peut-être à un sentiment de reconnaissance, soit que la mémoire de l’illustre philosophe fût déjà suffisamment réhabilitée dans les esprits, soit qu’assez d’autres voix éloquentes se fussent élevées pour sa défense, soit enfin que la vie, les actions et la mort de Socrate eussent jeté assez d’éclat pour qu’il pût se passer d apologie. Ce n’est point le cri d’indignation d’un disciple et d un homme de bien, qui jaillit de son âme pour vouer un jugement inique à une éternelle flétrissure ; e est la voix calme d’un historien qui vient réparer quelques oublis, combler quelques lacunes. Mais enfin la grande figure de Socrate apparaît dans ce court résumé d’un immortel procès, et le reflet qui s’en échappe suffit pour éclairer le tableau d’une vive lumière. Xénophon ne veut que faire ressortir les raisons qui ont engagé Socrate à préférer la mort à l’humiliation de supplier ses juges pour quelques jours de vie qui lui restent encore ; le philosophe dédaigne de faire son apologie, dont il s’est toujours occupé, dit-il éloquemment à Hermogène, en ne commettant jamais d’injustice. Devant !e tribunal, "’" " ~ït accusé de n

point reconnaître les

dieux de la république, d’introduire de nouvelles divinités et de corrompre la jeunesse, il réfute en quelques mots et avec dignité l’accusation de Mélitus, et s’appuie surtout sur la réponse de l’oracle de Delphes, qui l’a proclamé le plus libre, le plus juste et le plus sage de tous les hommes. Puis il porte à Mélitus le défi de citer un seul jeune homme que ses leçons aient perverti. Lorsque la sentence de mort eût été prononcée, Sociale fitentendre encore quelques paroles’ à ses juges. Pour mourir injustement, il ne se laissera point abattre. L’opprobre est à craindre non pour lui, mais pour ceux qui le condamnent, et il trouvera un motif de consolation dans la destinée de Palamède, qui est encore le sujet des plus beaux hymnes, tondis que le nom d’Ulysse, qui le fit périr victime de l’injustice et de la calomnie, est en horreur à tous les gens de bien. V. plus bas AroLOGiB dis Palamède.

Après ce discours, Socrate, sortit de l’assemblée, et un de ses amis, Apollodore, lui ayant exprimé sa douleur de ce qu’il mourait innocent, le philosophe lui fit cette réponse si connue : 0 Aimerais-tu donc mieux me voir mourir coupable ? » En ce moment, voyant passer Any tus, son autre accusateur, il prédit que son fils se livrerait aux derniers excès, faute d’un guide vertueux ; prophétie, dit en terminant Xénophon, qui fut justifiée par l’événement.

Apologie d’Apulée, plaidoyer personnel de cet auteur qui, en devenant l’époux d’une riche veuve, avait soulevé contre lui une foule de haines dont l’intérêt et l’avidité étaient le principe véritable. Le fils de cette dame, à l’instigation de deux intrigants, déposa en justico une plainte, par laquelle il accusait Apulée de mœurs corrompues, de séduction à l’égard de la femme qu’il avait épousée, et enfin de magie. Après la lecture de Y Apologie, il est impossiblo de ne pas être convaincu de l’innocence d’A pulée, malgré le jugement tout différent porté par plusieurs Pères de l’Église, aux yeux desquels ses vastes connaissances et surtout ses. études scientifiques le faisaient passer pour "avoir eu des pouvoirs surnaturels. Grandprètre d’Esculape, disciple fervent de Platon, il était initié à presque toutes tes sectes religieuses de l’époque. Il prouve jusqu’à l’évidence, dans son Apologie, que ce n’était point dans des vues intéressées qu’il a épousé la veuve Pudentilla, et il se justifie avec un plein succès de l’accusation de magie. Il fait précisément tourner cette accusation à la gloire., do ses connais-