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nommé confesseur du roi. Pour délasser son confesseur de ses travaux, Louis XIV voulut lui procurer la plus agréable retraite ; par ses ordres, l’enclos du Mont-Louis fut agrandi, la maison reconstruite, et le père de La Chaise s’y installa. Le Mont-Louis, même après la mort du célèbre jésuite qui devait pour la troisième fois le débaptiser, continua à être un foyer d’intrigues. C’est la, dit-on, que fut conçu le projet de la révocation de ledit de Nantes De.là aussi partirent les lettres de cachet au moyen desquelles les jésuites poursuivirent si aprement les jansénistes, leurs ennemis. Au xvtac siècle, l’histoire ne fait plus mention de la résidence du confesseur du roi que pour nous apprendre qu’elle fut vendue par décret du 31 août 1763, lors de l’expulsion de l’ordre des jésuites, sous le ministère Choiseul. Jusqu’à la Révolution, le domaine du-Pèrc-Laenaise, ainsi que l’usage commençait déjà à le désigner, demeura dans les mains de particuliers. La Révolution vint donner à l’ancien enclos du Mont-Louis la funèbre destination que le Père-Lachaise a conservée En 1790, l’Assemblée constituante, reconnaissant que les cimetières des églises, placés au centre de la ville, étaient de véritables foyers de corruption épidémique, rendit un décret défendant d’enterrer les morts dans l’intérieur des églises, et prescrivit l’établissement hors la ville de trois enclos de sépultures. En 1804, Napoléon renouvela ces prescriptions et ordonna la création de quatre cimetières hors de l’enceinte. L’enclos du Mont-Louis fut acquis par la ville, et son ouverture, comme lieu de sépulture, eut lieu le 21 mai 1804.

Ce fut l’architecte Brongniart qui fut chargé d’opérer cette transformation dans l’ancien domaine des jésuites. Pour rendre l’abord de tous les points facile, il traça le long de son contour une route sinueuse, se prolongeant en ligne droite, sur la sommité du coteau, parallèlement au mur supérieur. La double allée de tilleuls montant du bas de la colline à la maison du père de La Chaise fut conservée et prolongée jusqu’au bord du boulevard. Au delà du château, deux allées droites s’avancèrent jusqu’à la route supérieure. Tous les bouquets d’arbres servant à rendre ce lieu plus pittoresque furent conservés. Des chemins sinueux partagèrent le gazon en pièces irrégulières, dont les formes variées préservèrent l’œil de l’ennui d’un symétrique et monotone alignement. Quant à l’habitation du père de La Chaise, elle fut abattue quelques années plus tard.

Dans un parvis en hémicycle Se trouve la porte principale, décorée de torches renversées, avec des pilastres surmontés de torchères en bronze. À droite et à gauche du portail, on lit les versets suivants du’Psalmiste : Qui crédit in me, etiamsi mortuus fuérit, uioet. Spes iUorum immortalitate plena est. Depuis l’entrée jusqu’à la rue des Amandiers, 1 enceinte du cimetière est bordée d’une terrasse, ayant vue sur le boulevard et le long de laquelle s’alignent une multitude de tombes. Deburau, le célèbre mime, comme s’il ne pouvait se résoudre à quitter encore le bruit et la foule, se trouve placé sur ce front de bandière. Au fond de 1 avenue principale sur laquelle ouvre la grande porte que nous avons. décrite, au sommet de la’ montée, véritable falaise abrupte, on aperçoit la chapelle du cimetière, monument d’une conception simple et austère, très-bien approprié k la destination du lieu. À droite de cette grande allée se courbe une avenue qui monte et aboutit à une terrasse, premier étage de la culline. C’est l’allée des Acacias et la terrasse s’appelle terrasse du Dragon. De cette terrasse montérïne allée de sycomores, droite et rapide, jusqu’au sommet de la colline que couronne une double ligne de vieux marronniers. De là on peut embrasser d’un* coup d’œil l’ensemble du cimetière, cette foule de monuments et de tombeaux silencieux, ombragés de feuillage, et planer sur Paris, dont la masse se déroule aux pieds du spectateur et dont les mille bruits lui arrivent comme une rumeur indécise et confuse ! À droite, en descendant dans un endroit complètement dépourvu d’arbres, on rencontre le cimetière des pauvres.

Le cimetière du Père-Lachaise est un cimetière aristocratique. En dépit de quelques monuments d une gravité en harmonie avec l’idée de l’éternité, le visiteur n’éprouve en parcourant le Père-Lachaise aucun dé ces sentiments profonds, aucune de ces impressions de mélancolie invincible que devrait cependant faire naître cette nécropole immense. Ce n’est pas un cimetière : c’est une véritable ville, avec ses quartiers opulents et ses quartiers pauvres. À côté de monuments magnifiques, ombragés d’arbustes et de (leurs, apparaît la fosse commune, formée par deux immenses tranchées pratiquées dans les flancs d’une terre stérile. Là, rien que la solitude ingrate et nue, tandis qu’à quelques pas se dressent chapelles gothiques, sarcophages, pyramides, obélisques, génies de la mort plus ou moins corrects, symboles et attributs divers, monuments d’orgueil pour la plupart. Les distinctions sociales y sont rappelées avec une ostentation qui attriste : titres, armoiries, blasons s’étalent sur la pierre. L’imagination s’est donné carrière dans la confection des inscriptions qui surmontent les tombes ; tous les genres, surtout les moins convenables au sujet, sont représentés au

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Pere-Lachaise : le genre pompeux, le genre anacréontique, témoin ce quatrain : Le souvenir, présent ciîleste, Ombra des biens que l’on n’n plus, Est tuicore un plaisir qui reste Après tous ceux qu’on a perdus. Ailleurs, le sarcasme a la parole : Attends-moi longtemps !

Plus loin, on trouve cette exclamation de mélodrame :

Vingt-deux ansl'et tumeurs, ô Mélanie ! Puis cette singulière pensée d’un garde du corps :

Je meurs content, je vais au ciel ; Mais ma pauvre mère, elle en mourra.

Ce qui équivaut à dire : ma mère- devant mourir du chagrin de ma mort, je meurs content. Cette pensée est d’ailleurs assez catholique. Parfois, un poste d’occasion ébauche un distique dont la facture cloche, mais dont le fond ne vaut pas mieux :

De toutes les vertus «Me était l’emblème ;

Elle n’avait qu’un défaut ; l’oubli d’elle-même.

Ce qui signifie clairement que l’égoïsme est une qualité qui a manqué k la défunte. Espérons pour elle que Dieu lui pardonnera cette faute grave. Il va sans dire que les tombeaux où nous cueillons ces divers spécimens d’éloquence funèbre sont riches, bien construits, supérieurs à leurs légendes. Mais ce que nous devons encore constater avant de quitter cette matière, c’est l’uniformité dans l’apologie dont ces inscriptions présentent un invariable ensemble. M. Benjamin Gastineau a fait cette remarque avant nous, et dans sa mordante notice l’a consignée en ces termes : • Au Père-Lachaise, ce ne sont que bons pères, bonnes mères ; bonnes sœurs, bons frères, bons maris, femmes fidèles, amis vrais, cœurs nobles, anges envolés aux cieux, blanches fleurs, chastes épouses, séraphins de perfection. Pas un traître ! Pas un lâche, .pas un hypocrite, pas un coquin, pas un égoïste I C’est le bercail de Florian, l’âge d’or, la patrie des saints I > Réflexion profonde dans son ironie, et qui peut, croyons-nous, se passer de tout autre commentaire.

Le jour de la Toussaint et le lendemain 2 novembre, jour des Morts, une foule nombreuse envahit les allées du Père-Lachaise ; car c’est la mode, à la Toussaint et !e 2 novembre, d’aller en pèlerinage au Père-Lachaise.

Un grand nombre de tombes, d’ailleurs, soit par les noms illustres qui les habitent, soit par leur importance architecturale, appellent au Père-Lachaise, non-seulement les parents, non-seulement même les indifférents, mais encore les curieux ; les Anglais en voyage vont là comme ils vont au Jardin des plantes ou aux buttes Chaumont. Cette transition nous conduit naturellement à parler des principaux monuments du Père-Lachaise, dont quelques-uns sont, en effet, de véritables objets d’art, signés de nos plus grands maîtres, et abritent des noms glorieux ou célèbres.à plus d’un titre.

Nous commencerons par le tombeau d’Héloïse et d’Abailard. Il est situé à gauche de l’avenue des Acacias, dans un angle plein d’ombre et de mystère. C’est une sorte de chapelle dans le style gothique, à colonnettes dentelées, à fines nervures, aux délicates ogives, avec gargouilles, toiture à rosaces et clochetons. Le monument est bien conçu. * Des figurines groupées sur les façades retracent les principales scènes de la vie des deux héros de l’amour et de la science. Sur un sarcophage, reposant sur la pierre tumulaire, sont leurs deux statues couchées. Ce sarcophage est le même qui fut construit au xue siècle au Paraclet ; mais les têtes des statues paraissent avoir été rétablies au xvio siècle. Du Petit-Moutier au Paraclet, les deux corps furent transférés, en 1497, dans la grande église, et réinhumés séparément. De là, réunis, ils furent, en 1G30, ensevelis de nouveau dans l’église de la Trinité. En 1792, on plaça les deux corps dans un caveau particulier de l’église de Nogent-sur-Seine, dans un même cercueil, séparés seulement par une laine de plomb. Le sarcophage d’Héloïse et d’Abailard figura, à cette époque, au Jardin des monuments français. En 1814, il ornait, avec la chapelle gothique, la deuxième cour de ce musée. En 1815, il fut transféré à Saint-Germain-des-Prés, et enfin de là au Père-Lachaise. L’épitaphe latine qui suit, et qui fut composée pur l’Académie des inscriptions et belles-lettres, nous apprend que le tombeau fut érigé, en 1779, par les soins de la dame Caroline de Roucy, alors abbesse du Paraclet :

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BOB EODEM MARMORE JACENT

1IUJUS MONaSTERII

CONDITOR, PETRUS ACJiLARDUS

ET ABBATISSA PRIMA, IIELOISSA,

OLIM STUDIO, INfiENIO, AMORE, 1NFAUSTIS NUPT1IS

ET PŒN1TENT1A,

NUNCETERNA, QUODSPERAMUS, FËLICITATE CONJUNCTI

PETRUS OD11T XX APR1LIS, ANNO 1141 ;

IIELOISSA XXII MAI 1103.

CURIS CAROL^E DE ROUCY, PARACLET ! ABBATISSA,

MUCCLXX1X.

(Sous ce même marbre gisent Pierre Abailard, fondateur de ce monastère, et Héloïse,

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sa premièro abbesse, tous deux jadis unis par l’étude, par l’esprit, par l’amour, par des nœuds infortunés, et par le repentir ; unis aujourd’hui, c’est notre espérance, dans une félicité éternelle. Pierre mourut îe 20 avril 1141 ; Héloïse, le 22 mai 1163. Caroline de Roucy, abbesse du Paraclet, a fait élever ce monument en 1779.)

Du tombeau d’Héloïse et d’Abailard, en montant un sentier rapide, nous arrivons a des tombes toutes modernes, mais plus négligées peut-être que bien d’autres d’une époque bien antérieure. C’est pour cela que nous commençons par celles-là. Voici d’abord le monument de Frédéric Soulié, le romancier fougueux et passionné. Une simple table de marbre est dominée par une croix, sur laquelle est inscrit le nom du romancier. Cette tombe paraît peu visitée.

Le monument du compositeur Chopin est non loin de là. Au fronton du tombeau, on reconnaît son portrait en médaillon, et, sur la tombe, Clésinger a sculpté un génie de marbre brisant sa lyre, et dans 1 attitude d’un profond désespoir. Ce monument est très-remarquable. À peu de distance se trouve le tombeau de Vivunt Denon ; Carteliery a placé sa statue, elle sourit encore de ce sourire qui, dit un ingénieux historien, " plut tour à tour à Louis XV, àMme dePompadour, à Voltaire, à Louis XVI, à Robespierre et à Napoléon : il mena une vie de savant, d’artiste et de courtisan, »

Sur un carré voisin, s’est donné rendezvous un groupe de musiciens : Habeneck, d’abord, le fondateur de la Société des concerts du Conservatoire ; Boieldieu, l’auteur populaire de la Dame Blanche ; Bellini, l’auteur de la Norma ; au-dessus du portrait sculpté de ce dernier, se tient assise la muse de la musique, échevelée, abîmée dans sa douleur. Voici Wilhem, le fondateur glorieux de l’Orphéon. Sur sa tombe sont gravés, en guise d’épitaphe, ces vers de Béranger : Des classes q.u’à peine on éclaire Relevant les mœurs et les goûts, Par toi devenu populaire, L’art va leur faire un ciel plus doux. Sur ta tombe, tu peux m’en croire. Ceux dunt tu charmes les douleurs Offriront un jour à ta gloire Des chants, des larmes et des pleurs.

Non loin de ce groupe d’artistes, voici le camp des guerriers célèbres. Le monument du maréchal Lefebvre, duc de Dantzig, se distingue par une grande richesse : sur la face principale d’un grand sarcophage, se dressent deux robustes Victoires, nues jusqu’à la ceinture, couronnant de lauriers l’énergique tête du maréchal. Masséna, duc de Rivoli, prince d’Essling, dort à ses côtés. Un obélisque en marbre, sans ornementation, compose tout son monument ; on y lit ces simples mots, plus glorieux que bien des épitaphes :

Zurich, Rivoli, Gênes, Essling,

André Barthe, l’aide de camp de Masséna, repose près de lui. Plus loin, une humble pierre grise recouvre les restes de Larrey, avec cette inscription :

C’est l’homme le plus vertueux que j’aie jamais connu.

(Testament de Napoléon 1er.)

Le tombeau du maréchal Suchet, duc d’Albul’éra, nous présente le buste du maréchal surmonté d’une Victoire au torse au, burinant sur une colonne les mots :

Italie, Allemagne, Pologne, Espagne.

Celui du général Gobert est un des chefsd’œuvre du ciseau de David d’Angers. Le général périt, comme on sait, en Espagne, tué par un guérillero. Sur un socle de marbre, asJis sur une solide base de granit, s’élève la statue équestre du général. Son corps se laisse aller en arrière, frappé à mort. Lin genou en terre, devant le cheval qui dresse sa crinière avec effroi, le guérillero, l’escopette au poing, contemple son œuvre avec une expression do triomphe. Tout ce morceau est excellent. Le piédestal présente quatre bas-reliefs. Trois d’entre eux représentent des scènes de la vie du héros. Le quatrième représente le fils du général, mourant en Égypte.

Le mausolée du maréchal Davout, d’une forme sévère et massive, est entouré d’une grille.<Le maréchal Gouvion Saint-Cyr est représenté debout sur le sien, tenant à la main la loi sur le recrutement. Le tombeau de Macdonald est d’une simplicité antique. En face de lui est un mausolée dont un basrelief représente l’intérieur d’une prison, où une femme change à la hâte ses vêtements contre ceux du captif. On a reconnu la tombe de La Valette, à ce souvenir héroïque de sa noble femme. Le bas-relief est bien fouillé et très-exact.

Non loin de la tombe de Dupuytren, on voit à l’angle de deux routes un petit jardin rempli de rieurs, entouré d une grille en fer noir, mais n’ayant ni mausolée ni même le moindre tertre ; cela provient de ce que depuis cinquante ans le sol s’est nivelé. Sous cette terre repose Ney, prince de la Moskowa. Le tombeau de l’amiral Decrès, ministre de la marine de 1802 à 1815, se distingue par deux bas-reliefs irès-remurquables.

Mais un monument fastueux nous réclame : c’est le mausolée de la princesse russe Demidoff. Il se trouve au-dessus du tombeau du

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maréchal Gouvion Saint-Cyr, à une prodigieuse hauteur. Son architecture semi-orientale est imposante, sévère et gracieuse en même temps. Il se compose d’un temple orné de dix colonnes de marbre blanc de Carrare, supportant un riche couronnement. Une couronne est déposée sur le sarcophage. Des martres, des hermines, des marteaux de mineur et autres attributs figurés çà et là dans l’ornementation rappellent les immenses propriétés de la famille. Ici encore l’orgueil survit a la mort. Ce^monument a coûté 120,000 fr.

Sur le parcours de la grande voie circufaire, on rencontre le tombeau d’une illustre tragédienne, Mlle Duchesnois, la rivale de Mlle Georges. À quelque distance se trouve la chapelle de marbre où reposent les restes de la dernière Célimène, M’ie Mars ; et au détour d’un chemin rapide, on voit un petit sarcophage de style grec placé au pied d’un coteau couvert de ronces : c’est le tombeau de Talma.

Voici deux tombeaux d’orateurs illustres : celui de Garniei-Pagès, celui de Casimir Périer. Le premier est l’œuvre de David. Le grand sculpteur, par une inspiration excellente, a représenté une tribune vide au-dessus-d’un cercueil. Rien de plus éloquent et de plus sinistre. Le cercueil est en marbre noir, la tribune est en marbre blanc. Le tout repose sur une base de granit. Au-dessus de la tribune est gravée la liste des discours de l’orateur républicain. Le monument de Casimir Périer occupe à lui seul un rond-point auquel il a donné son nom. Malgré ’son importance matérielle (on sait que le mausolée ’ n’on a élevé à l’ancien ministre est le fruitune souscription nationale : le terrain au contre duquel il se trouve est estimé à plus d’un demi-million), ce mausolée est loin d’avoir la valeur artistique du précédent. Il se compose d’un piédestal quadrangulaire, avec bas-reliefs sur trois cotés : celui de face représente l’Eloquence, celui de gauche la Fermeté, celui de droite la Justice. Sur ce piédestal, Casimir Périer se tient debout, et du doigt montre ce mot gravé sur une table de bronze : Liberté. À ses pieds on lit, gravée, l’inscription suivante :

SEPT FOIS DÉPUTÉ,

PRÉSIDENT DU CONSEIL DES MINISTRES BOUS LE RÈONE

DB LOUIS’PHU.IPPE iCr^

IL DÉFENDIT PAJt SON ÉLOQUENCE ET SON COURAGE

L’ûlUmii ET LA LiniSRTÉ A L’INTÉRIEUR, LA PAIX ET LA DIONITÉ NATIONALE A L’EXTÉRIEUR.

Le tout formo un ensemble assez lourd et peu majestueux.

Nous ne quitterons pas le rond-point Casimir Périer, sans y faire notre récolte d’observations. Ici se dresse un immense tombeau de granit, remarquable par sa masse et sans aucun ornement. C’est celui de Monge, créateur de l’École polytechnique. Plus loin, derrière le buste do Chaussier, apparaît la tombe de Mœfi Raspail. Sur la principale face du mausolée, l’artiste a représenté une femme drapée des pieds à la tête de longs voiles aux plis flottants. Elle s’accroche d’une main crispée à des barreaux, comme pour adresser à un détenu un Suprême adieu. Enfin, à l’entrée d’une allée aboutissant au même rondpoint, nous rencontrons le monument d’Elisa Mercœur « cette douce gloire » comme l’a si bien nommée un poôte. Son tombeau se compose d’un sarcophage fort simple, sans buste ni bas-relief. Un y lit seulement ces mots :

ÉLISA MERCŒUR

NÉE À NANTES LE 24 JUIN 1810,

MORTE À PARIS LE 7 JANVIER 1835.

Et quelques fragments de poésies.

Le monument de Lesurques n’est pas loin. On y lit cette inscription :

À LA VEUVE DE LESURQUES SES ENFANTS ET SES PETITS-ENFANTS

13 OCTO3RE 1S48.

À LA MÉMOIRE DE JOSEPH LESURQUES,

VICTIME

DE LA PLUS DÉPLORABLE DES ERREURS HUMAINES.

31 OCTOBRE 1798.

MARTYRS TOUS HÈUX SUR TERRE,

’ TOUS DEUX RÉUNIS DANS LE CIEL.

Voici le tombeau de Géricault, le grand peintre. C’est un des plus remarquables du

  • Père-Lachaise. Le sculpteur Etex l’a représenté

h demi couché ut accoudé, tenant en main sa palette et son pinceau. Les bas-reliefs du piédestal représentent les trois plus célèbres compositions du maître : le Naufrage de la Méduse, le Cuirassier et le Hussard.

Plus loin, c’est le monument de la famille de Chénier, surmonté de l’urne antique où se lit cette pensée ;.

La mort ne détruit pas ce qui n’est pas mortel.

André Chénier manque à ce rendez-vous suprême. Quatre vers rappellent son absence :

Auprès d’André Chénier avant que de descendre, J’élèverai la tombe où manquera sa cendre, Mais où vivront du moins et son doux souvenir, lSt sa gloire et ses vers, dictés pour l’avenir.

Mais Désaugiers vient, avec le bon et franc sourire de son buste de marbre, faire diversion à ce souvenir sombre. Près de lui, dans un carré de sapins et d’acacias, nous trouvons réunis quatre derniers représentants du xvme siècle : Laharpe, Delille, Saint-Lambert et Boufflars. Le monument de ce dernier