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Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 10, part. 2, Lep-Lo.djvu/291

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<span style="color:#00A000" class="no_erreurs_communes" title="lon">lon- Battre d’une longueur, de deux longueurs. || Longueur de tête, Dimension de la tête d’un cheval, servant aussi d’unité pour les courses.

— Mar. Longueur de câble, Distance de 120 brasses : Nous passâmes à deux longueurs de câble de l’écueil.

— Techn. Partie de la chaîne qui se trouve tendue depuis le rouleau ou ensouple de derrière jusqu’au rouleau ou ensouple de devant.

— Encycl. Géom, La longueur d’une courbe n’est pas plus capable de définition que la durée d’un temps, la chaleur d’un corps, etc. Une infinité de gens confondent définition avec transformation de notion : ils ne s’aperçoivent pas que l’acceptation de leurs prétendues définitions suppose de la part de l’esprit une opération qui constitue une nouvelle difficulté, sans supprimer l’obligation de la conception primitive. Ainsi on prétendra définir la longueur d’une courbe en disant que c’est la limite vers laquelle tend un contour polygonal inscrit dans la courbe et dont les côtés diminuent indéfiniment. Personne assurément ne niera cette identité, mais il est clair que le consentement accordé exige : 1° la conception de la longueur de la courbe ; 2° celle de la longueur limite du contour polygonal ; 3° le sentiment de l’égalité des deux choses. Autrement, l’acceptation exclusive du nouveau point de vue n’équivaudrait qu’à la suppression de la notion primitive. Lorsque je demande la longueur d’un arc de courbe, je sais ce que je veux indépendamment de votre définition ; pour calculer la longueur que je cherche, je fais la transformation indiquée dans votre énoncé ; mais, le calcul fait, je ne songe plus aux intermédiaires par lesquels j’ai dû passer. Toutes les recherches comportent toujours de la même manière le passage du concret à l’abstrait et le retour de l’abstrait au concret ; mais de ce que l’abstrait peut être mis à la place du concret, il n’en résulte pas qu’il puisse lui servir de définition. Dans l’espèce, la longueur polygonale n’est introduite que pour abstraire l’idée de longueur de l’idée de courbe. La définition complète, si elle avait été possible, aurait dû comprendre les deux idées.

Pour calculer la longueur d’un arc de courbe on le considère comme composé d’éléments rectilignes infiniment petits. Si la courbe est rapportée à des axes rectangulaires, l’élément ds est la diagonale du parallélépipède rectangle dont les cotés seraient dx, dy et dz ; par conséquent

ds = /dx’ + dy’ + dz*

et l’arc s lui-même est

s = JV dx* -- dy’ + ds'

—J’-V-W^)’

Si les équations de la courbe sont œ=ç{s) et y = ${z), la formule do l’arc s devient

  • = J* dx i/i+iywp.+’[+’(*)]* ;

lorsqu’il s’agit d’une courbe plane y = tp(x), l’arc s est exprimé par

—JV’+(2f —/

dx)/i + [, ’(x)]'

Si la courbe est rapportée à des coordonnées polaires, ?, 0 et ç, ds est la diagonale

d’un pârallélipipède rectangle ayant pour côtés fdt}, çdt et df ; l’expression en est donc

ds = Jfdf’ + t’dV + dt*. Cette formule se réduit à

ds = v’ ('1 + df*

lorsqu’il s’agit d’une courbe plane.


LONGUEVAL (Jacques), écrivain et jésuite français, né près de Péronne en 1680, mort à Paris en 1737. Il professa pendant plusieurs années la littérature et la théologie, et publia, entre autres ouvrages : Traité du schisme (Bruxelles, 1718) ; Histoire de l’Église gallicane (Paris, 1730-1749, 8 vol. in-8°), à laquelle les Pères Brumoy et Berthier ont ajouté 10 volumes de continuation.


LONGUEVILLE, bourg de France (Seine-Inférieure), chef-lieu de canton, arrond. et 16 kilom. S. de Dieppe, sur la Scie ; pop. aggl., 571 hab. — pop. tot., 720 hab. Commerce de bestiaux. Le comté de Longueville fut donné par Charles V à Du Guesclin, en récompense de ses services. Charles VII, également pour récompenser les services et le dévouement de Jean, bâtard d’Orléans, dit le comte de Dunois, fils naturel de Louis, duc d’Orléans, et de Mariette d’Enghien, l’en gratifia en 1443. Dunois mourut en 1468, laissant de son second mariage avec Marie, Jeanne d’Harcourt, Jean d’Orléans, mort sans alliance, et François d’Orléans, comte de Longueville et de Dunois, grand chambellan de France, gouverneur du Dauphiné, mort en 1491. Celui-ci avait épousé Agnès de Savoie, dont vinrent : 1° François II d’Orléans, comte de Dunois, etc., grand chambellan de France, connétable héréditaire de Normandie, gouverneur de Guyenne, qui accompagna Charles VIII à la conquête de Naples, suivit Louis XII au voyage d’Italie en 1502 et commanda l’arrière-garde de l’armée française à la bataille d’Agnadel en 1509. C’est en sa faveur que le comté de Longueville avait été érigé en duché en 1505 ; il mourut en 1513, ne laissant de Françoise d’Alençon qu’une fille, morte deux ans après lui ; 2° Jean d’Orléans, archevêque de Toulouse, puis cardinal, né en 1484, mort en 1533 ; et 3° Louis d’Orléans, duc de Longueville après son frère aîné, marié en 1504 à Jeanne de Hochberg, marquise de Rothelin, comtesse de Neufchâtel, en Suisse. De ce mariage sortirent : 1° Claude d’Orléans, duc de Longueville, tué au siège de Pavie en 1524, sans avoir contracté d’alliance ; 2° Louis II d’Orléans, grand chambellan de France, mort en 1537, en faveur de qui le comté de Dunois fut érigé en duché-pairie en 1525 ; il épousa Marie de Lorraine et en eut François III d’Orléans, duc de Longueville et de Dunois, mort sans alliance en 1551 ; 3° François d’Orléans, marquis de Rothelin, comte de Neufchâtel, qui servit dans les guerres contre l’empereur Charles-Quint et mourut en 1548, laissant de Jacqueline de Rohan, Léonor d’Orléans, duc de Longueville, à la mort de François III, son cousin. Ce Léonor, né en 1540, mort en 1573, épousa en 1563 Marie de Bourbon. De ce mariage sont issus, entre autres enfants : Henri d’Orléans, né en 1568, mort en 1595 ; François d’Orléans, comte de Saint-Pol, gouverneur de Picardie, créé duc de Fronsac en 1608, mort en 1631, n’ayant eu de son mariage avec Anne de Caumont, marquise de Fronsac, qu’un fils, tué au siège de Montpellier eu 1622 ; Catherine d’Orléans, fondatrice des dames carmélites du faubourg Saint-Jacques ; Antoinette d’Orléans, dame de Château-Gontier, mariée à Charles de Gondy, marquis de Belle-Isle, fondatrice, pendant son veuvage, de la congrégation du Calvaire à Poitiers. Henri d’Orléans, duc de Longueville, mort en 1595, avait eu de Catherine de Gonzague-Clèves Henri II d’Orléans, duc de Longueville et d’Estouteville, prince souverain de Neufchâtel et Walengin, qui joua un rôle dans les troubles de la Fronde, épousa en premières noces Louise de Bourbon, fille de Charles de Bourbon, comte de Soissons, dont il eut une fille, mariée à Henri II de Savoie, duc de Nemours, et, en secondes noces, Anne-Geneviève de Bourbon, fille de Henri II de Bourbon, prince de Condé, la belle duchesse de Longueville, qui fut l’âme et la cheville ouvrière de la Fronde. De ce second mariage vinrent Jean-Louis-Charles d’Orléans, qui se fit prêtre et mourut en 1694 ; Charles-Paris d’Orléans, duc de Longueville et d’Estouteville, tué au passage du Rhin en 1672, au moment où il allait être élu roi de Pologne. Il n’était pas marié. Après la mort des deux frères dont il vient d’être question, le duché de Longueville fit retour à la couronne. Nous compléterons cette notice généalogique en donnant la biographie des principaux membres de cette famille.


LONGUEVILLE (Louis d’Orléans, duc DE), capitaine français, mort en 1516. Il se distingua à Agnadel et à Marignan par son intrépidité, fut fait prisonnier par les Anglais à la bataille de Guinegatte (1513) et emmené à Londres. Là, il négocia le mariage de Louis XII avec Marie d’Angleterre, et amena la conclusion d’un traité de paix. Sa femme, Jeanne de Hochberg, lui apporta en dot la principauté de Neufchâtel (1504).


LONGUEVILLE (Léonor d’Orléans, duc de), petit-fils du précédent, né en 1540, mort en 1573. Il était gouverneur de Picardie et fut fait prisonnier à la bataille de Saint-Quentin. Rendu à la liberté, il prit une part active aux affaires politiques de son temps, et, en 1571, Charles IX lui accorda le titre de prince du sang en raison de ses alliances et de ses services. Il venait de prendre part au premier siège de La Rochelle lorsqu’il mourut.


LONGUEVILLE (Henri Ier d’Orléans, duc de), fils du précédent, né en 1568, mort en 1595. Gouverneur de Picardie, il battit à Senlis le duc d’Aumale et porta, dans cette occurrence, un tel coup à la Ligue que, suivant l’expression de Brantôme, « elle ne put jamais s’en bien guérir ni oncques remuer, » Après la mort de Henri III, il suivit la fortune du Béarnais, et lui amena sous les murs de Dieppe un renfort qui contraignit le duc de Mayenne à lever le siège. On sait sa vaillante conduite à la journée dite des Farines (20 janvier 1591).


LONGUEVILLE (Henri II d’Orléans, duc de), fils du précédent, né en 1595, mort en 1663 : Abstraction faite de sa participation parfois involontaire aux troubles de la Fronde, l’existence de ce politique secondaire, de ce capitaine de troisième ordre, offrirait peu d’intérêt. Mais, si effacé qu’il soit par l’absorbante individualité de sa femme, le mari de Mme de Longueville mérite au moins l’honneur d’une notice. Gouverneur de Picardie dès l’âge de dix-huit ans, il prit le parti de Condé et des princes contre le maréchal d’Ancre. En 1617, il épousa Louise de Bourbon, fille du comte de Soissons, fut en 1619 nommé gouverneur de la Normandie, et, malgré les instigations de sa famille, se tint prudemment à l’écart des complots tramés contre Richelieu. Comme il jouissait d’une certaine réputation de tacticien, il fut chargé d’un commandement en Normandie pour repousser les Espagnols, puis passa en Allemagne, en Piémont, où il remplaça Bouillon, et se distingua dans ces diverses campagnes. En 1642, avant de partir pour l’Italie, il avait épousé en secondes noces Anne de Bourbon, sœur du grand Condé. Appelé à faire partie du conseil de régence, lors de l’avènement de Louis XIV, M. de Longueville s’occupa plus de ses intrigues amoureuses avec Mme de Montbazon que des machinations féminines ourdies autour de Mazarin. Cependant, il accepta une mission au congrès de Munster ; mais, se voyant relégué en second rang par Servien, qui avait reçu du cardinal des instructions secrètes, il revint à Paris, et le dépit le poussa à se poser comme l’un des chefs de la première Fronde. Le 18 janvier 1650, il fut, en même temps que les princes de Condé et de Conti, arrêté au Palais-Royal et envoyé à Vincennes, puis au Havre. Mis en liberté après une détention d’une année, il rompit avec les turbulents et se retira dans son gouvernement de Normandie, laissant Mme de Longueville agiter à sa guise le drapelet des mécontents et filer ses tranquilles amours avec Marcillac.


LONGUEVILLE (Anne-Geneviève de Bourbon-Condé, duchesse de), célèbre héroïne de la Fronde, femme du précédent, née au donjon de Vincennes, où son père était prisonnier, le 28 août 1619, morte à Paris le 15 avril 1679. Fille de Henri III de Bourbon, premier prince du sang, et de Charlotte de Montmorency, elle fut la sœur aînée du grand Condé et du prince de Conti. C’est une des plus sympathiques figures de femme du XVIIe siècle. Sa naissance et plus encore sa beauté lui assurèrent à la cour, dès qu’elle y parut, les plus brillants succès ; elle avait une grâce particulière, faite de nonchalance et de langueur, qui lui gagnait les sympathies à première vue, sans compter un esprit fin et pénétrant dont elle donna des preuves précoces. Elle avait été élevée au couvent des carmélites de la rue Saint-Jacques et manifestait même quelques velléités claustrales ; son père sut la soustraire à l’influence des religieuses, et il la força à paraître malgré elle à un grand bal royal du Louvre (18 février 1635) ; ses bonnes amies du couvent ne la laissèrent partir qu’à condition qu’elle mettrait un cilice sous la robe de bal ; la convention fut sans doute bien vite oubliée.

Dès cet âge, à seize ans, la future duchesse de Longueville était déjà d’une beauté accomplie. Son amoureux posthume, Victor Cousin, qui a recherché avec soin tous les portraits de l’héroïne, a retrouvé un médaillon de Du Coyer, appartenant au duc de Montmorency, et daté de 1634, où la jeune fille est représentée avec toute sa grâce et ses attraits naissants. L’impression qu’elle produisit dans le grand monde et à l’hôtel de Rambouillet, où elle figura assidûment, l’éloigna pour longtemps de l’idée de prendre le voile, qu’elle avait caressée dans son enfance. Elle fut sur le point d’épouser le prince de Joinville, l’héritier des Guises ; il mourut en Italie (1639). Un second projet de mariage fut concerté avec le duc de Beaufort ; il n’eut pas de suite. Enfin, en 1642, à vingt-trois ans, elle épousa le duc de Longueville, déjà veuf et qui en avait quarante-sept. Rien ne rachetait cette disproportion d’âge chez le duc, qui continuait d’entretenir des relations absolument publiques avec la duchesse de Montbazon. Fort indifférente pour un pareil mari,Mme de Longueville vécut avec la liberté d’une veuve et sembla ainsi encourager les méchants propos. Mme de Montbazon, pour la compromettre, fit circuler des lettres qui lui donnaient pour amant le duc de Coligny ; la fausseté de ces lettres fut reconnue ; mais le scandale que fit cette affaire, tout en déshonorant la maîtresse du duc de Longueville, n’augmenta guère la considération de sa femme ; il en résulta un duel dans lequel Coligny fut tué par le duc de Guise (1643). Coligny était certainement l’amant heureux de la duchesse, et, si les lettres produites étaient fausses, les infidélités de Mme de Longueville étaient très-vraies.

En 1646, M. de Longueville, nommé plénipotentiaire à Munster, appela sa femme près de lui ; ce fut pour elle, dans toutes les réunions et dans toutes les fêtes auxquelles donnèrent lieu ces célèbres conférences, l’occasion des plus grands triomphes. Elle fut traitée avec magnificence et on lui rendit des honneurs comme une femme d’ambassadeur n’en avait jamais reçu. On trouvera dans la Gazette de 1646, n° 94, le récit détaillé d’une de ces cérémonies d’un autre âge : c’est son entrée dans la ville de Munster. Bientôt lasse de tout cet apparat, regrettant le monde élégant et spirituel auquel elle était habituée, la duchesse revint à Chantilly, puis à Paris, où elle retrouva ses adorateurs ordinaires. À Coligny avait succédé dans son cœur Marcillac, duc de La Rochefoucauld, l’auteur des Maximes ; c’était même pour la distraire de cet amour naissant que son frère, le grand Condé, avait provoqué le voyage de Munster ; mais rien n’y fit, Mme de Longueville était alors dans tout l’éclat de sa beauté et dans sa plus grande fièvre de passion. C’est ici le lieu de placer le portrait qu’en a donné Victor Cousin, d’après les témoignages écrits et les peintures du temps : « Elle était assez grande et d’une taille admirable. L’embonpoint et ses avantages ne lui manquaient pas. Elle possédait ce genre d’attraits qu’on prisait si fort au XVIIe siècle, et qui, avec de belles mains, avait fait la réputation d’Anne d’Autriche. Ses yeux étaient du bleu le plus tendre. Des cheveux, d’un blond cendré de la dernière finesse, descendant en boucles abondantes, ornaient l’ovale gracieux de son visage et inondaient d’admirables épaules, très-découvertes, selon la mode du temps. Voilà le fonds d’une vraie beauté. Ajoutez-y un teint que sa blancheur, sa délicatesse et son éclat tempéré ont fait appeler un teint de perle. Ce teint charmant prenait toutes les nuances des sentiments qui traversaient son âme. Elle avait le parler le plus doux. Ses gestes formaient, avec l’expression de son visage et le son de sa voix, une musique parfaite ; ce sont les termes d’un contemporain fort désintéressé, d’un écrivain janséniste, peut-être Nicole ; en sorte, dit cet écrivain, que « c’était la plus parfaite actrice du monde. » Mais le charme qui lui était propre était un abandon plein de grâce, une langueur, comme s’expriment tous les contemporains, qui avait des réveils brillants, quand la passion la saisissait, mais qui, dans l’habitude de la vie, lui donnait un air d’indolence et de nonchalance aristocratique qu’on prenait quelquefois pour de l’ennui, quelquefois pour du dédain. » Cette indolence, la duchesse de Longueville sut très-bien la secouer dès qu’elle imagina de jouer un rôle dans la Fronde. Aux conférences de Munster, elle n’était pas restée tout à fait étrangère à la politique. Sa haine pour Mazarin la poussa à voir dans la Fronde une nouvelle Ligue dont elle serait la duchesse de Montpensier, et elle se mit à la tête de toutes les intrigues du parti parlementaire avec une ardeur qu’on n’aurait jamais pu lui soupçonner.

« La Rochefoucauld, dit V. Cousin, plut sans doute à Mme de Longueville pour les agréments de son esprit et de sa personne, surtout par cette auréole de haute chevalerie que lui avait donnée sa conduite envers la reine, et qui devait éblouir une élève de l’hôtel de Rambouillet. Il l’entoura d’hommages intéressés et en apparence les plus passionnés du monde. À mesure qu’il s’insinuait dans son cœur, il y animait habilement ce désir de paraître et de produire de l’effet, assez naturel à une femme. Peu à peu il fit luire à ses yeux un objet nouveau qu’elle n’avait pas encore aperçu, un rôle important à jouer sur la scène des événements qui se préparaient. Il égara ses instincts de fierté et d’indépendance ; il transforma sa coquetterie naturelle en ambition politique, ou plutôt il lui inspira sa propre ambition. » Cette action réciproque des deux amants l’un sur l’autre reste douteuse. La duchesse de Longueville fut l’âme de la première Fronde, l’auxiliaire le plus dévoué du coadjuteur ; elle rallia au parlement l’un de ses frères, Conti (Condé suivit le parti de la cour), et décida, par la journée des Barricades, la retraite de Mazarin et du jeune roi sur Saint-Germain. Pour encourager la résistance, elle s’installa à l’Hôtel de ville avec la duchesse de Bouillon, et, pendant les trois mois que dura le blocus de la capitale, elle y resta comme gage entre les mains des frondeurs. C’est là que, le 29 janvier 1649, elle donna naissance à un enfant que l’on appela Charles-Paris, et dont on considérait La Rochefoucauld comme le père. Il fut tenu sur les fonts de baptême par le prévôt des marchands, accompagné des échevins.

À l’Hôtel de ville, les jeux d’esprit se mêlaient aux intrigues, et la duchesse faisait succéder aux discussions littéraires et galantes les négociations relatives à la paix. Elle eut une influence sérieuse sur le traité qui fut signé, entre la cour et la Fronde, le 11 mars 1649.

Son rapprochement avec la reine et Mazarin fut plus apparent que réel. Elle conservait ses rancunes et s’efforça d’aiguillonner celles de Condé, qui ne tarda pas à devenir un adversaire violent du cardinal. Lorsqu’il fut arrêté avec son frère et le duc de Longueville pour être conduit à Vincennes, elle se rendit précipitamment en Normandie, province dont son mari était gouverneur, dans l’espérance de la soulever contre Mazarin ; mais celui-ci l’avait prévenue et avait pris des précautions qui rendirent ses efforts impuissants. Réduite à fuir, elle erra quelque temps sur les côtes au milieu d’aventures qui faillirent lui être fatales ; un jour, elle tomba à la mer et ne fut pas sauvée sans peine.

Elle s’embarqua au Havre et gagna la Hollande ; de là elle se rendit à Stenay, près de Turenne, qui subit à son tour l’ascendant de ses charmes ; pour ses beaux yeux, le rigide soldat, récemment promu maréchal de France,