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Les’médecins sont loin de le prendre sur ce ton plaisant avec le libertinage ; pour eux, c’est une dépravation morale et physique particulière à l’espèce humaine et conduisant, par degrés, à 1 abrutissement, à la folie, à la mort. La nature, en attachant la plus grande volupté à l’acte de la reproduction, n’a eu en vue que la perpétuité des espèces ; se souciant peu des individus, elle ne s’est pas préoccupés, du moins pour l’homme, de mettre à ses désirs d’autre limite que ses forces, limite assez mal définie et qu’il faut pourtant respecter. Si vous restez en deçà, vous êtes un sage ; si vous poussez au delà, vous êtes un libertin. Les animaux sont plus heureux ; ils ne sont poussés a l’amour qu’à l’époque du rut, qui se présente à différentes saisons de l’année ; et encore leurs désirs sont toujours satisfaits d’une manière simple. Us ne cherchent pas à s’exciter par des moyens artificiels, et, une fois leurs sens apaisés, leurs désirs sont éteints. Il n’en est pas de même de l’homme ; une alimentation abondante, une imagination vive, le contact des sexes, l’exemple d’autrui le portent sans cesse à convoiter des plaisirs que ses organes deviennent bientôt impuissants à lui procurer. De là le libertinage, qui réveille lessensations et excite l’appétit, en changeant sans cesse d’objet, puis quand le changement ne suffit plus, tous les raffinements de la débauche. Il n’y a que la raison qui puisse dominer les sens, et malheur à celui qui ne ne l’écorne pas.- L’intelligence, la force, la santé, tout disparaît sous l’influence de la débauche.

Si l’on jette un coup d’œil rapide sur les conséquences du libertinage et de la dépravation générale des mœurs, on voit que l’époque la plus dissolue des États a été la plus voisine de leur décadence ou de leur destruction. Le despotisme et la corruption s’engendrent mutuellement, et l’un comme l’autre ne tardent’pas à être suivis d’une violente réaction. Un gouvernement tyrnnnique concentre la fortune entre les mains d’un petit nombre au détriment du peuple ; la fortune engendre presque nécessairement !e vice chez celui qui la possède et chez celui qui la convoite. De là toute espèce de corruption de part et d’autre ; le supérieur abuse de l’inférieur, et celui-ci se fait une gloire de corrompre celui-là. L’égalité et la liberté, l’abaissement’des grandes fortunes au profit de la misère sont donc indispensables pour établir et entretenir la pureté des mœurs. Si des considérations générales nous passons à l’examen des libertins en particulier, qu’allons-nous trouver ? Hélas 1 nous le voyons tous les jours ; des êtres blasés, dégoûtés de la vie, incapables du moindre effort pour sortir du fond de l’égout où ils sont plongés. Tout ce qu’ils désirent, tout ce qu’ils rêvent, ce sont de nouveaux plaisirs. Les simples rapports sexuels ne leur suffisent plus ; il leur faut d’autres raguûts plus épicés, des saveurs plus piquantes. De la tous les excès de la débauche la plus honteuse et la plus effrénée. Cependant le corps faiblit en même temps que l’esprit ; toutes les facultés intellectuelles et murales disparaissent ; le cerveau et les muscles refusent d’agir ; la vieillesse arrive à l’âge où l’on observe d’ordinaire le plus de vigueur. En même lemps que surviennent ces infirmités physiques, le caractère change aussi complètement. Les libertins, arrives k leur dernière période, sont lâches, craintifs, hypocrites, cruels et toujours portés a la vengeance quand ils peuvent l’exercer impunément. Il n est point de béte brute plus dégradée et plus odieuse que le crapuleux libertin, se retournant dans le bourbier de ses infamies, rongé de syphilis, énervé de dégoûtants plaisirs qu’il paye de mille souffrances et d’une mort prématurée.

LIBERTINER v. n. ou intr. (li-hèr-ti-nérad. libertin). Faire le libertin, mener une conduite déréglée.

— Se livrer à la dissipation, en parlant des écoliers ; Un enfunt qui libertine.

LIBERTISTE s. in. (li-bèr-ti-ste — rad. liberté). Philos. l’artisan dé ta doctrine du libre arbitre : Les fatalistes sont donneurs de conseils, non moins que, les libertistes. (C. Renouvier.)

LIBERUM-VETO s. m. (li-bé-romm-vé-to

— du lat. liberum, libre, et de veto). Hist. Droit de veto, qui appartenait à chaque membre de la diète polonaise.

LIBES (Antoine), physicien français, né à Béziers en 1752, mort à Paris en 1832. Il avait professé la physique à Béziers et à Toulouse lorsque, la Révolution ayaut éclaté, il se rendit à Paris, où il devint professeur à l’École centrale de la rue Saint-Antoine, laquelle reçut plus tard le nom de lycée Charlemagne. Ce fut lui qui découvrit, en 1804, avec des instruments très-imparfaits, l’électricité développée par le contact ou par le frottement de substances qu’on ne regardait pas alors comme susceptibles de s’électriser l’une par l’autre. Nous citerons de lui : Physicæs conjecturalis elementa (1788); Leçons de physique chimique (1796); Théorie de l’élasticité (1800); Traité élémentaire de physique (1802) ; Nouveau dictionnaire de physique (1816) ; Histoire philosophique des progrès de la physique (1811-1814,4 vol. in-8o) ; le Monde physique et le monde moral (1815, in-8o), etc.

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LIBÉTHÉNITE s. f. (li-bé-té-ni-te — de Libethen, nom de lieu). Miner. Phosphate de cuivre naturel.

— Encycl. La libéthénile se présente* le plus souvent en petits cristaux dont la forme primitive est un octaèdre à base rectangle. C’est une substance d’un vert olive brunâtre, translucide, et d’un éclat tantôt gras, tantôt vitreux. Sa dureté est exprimée par le nombre 4, et sa densité par le nombre 3,6. D’après Delafosse, elle renferme 30 parties d’acide phosphorique, 66 d’oxyde de cuivre et 4 d’eau : On ne la encore rencontrée qu’à Libethen, en Hongrie ; à Gunnis-Lake, dans le pays de Cornouailles, en Angleterre, et à Nischne-Tagilsk, dans la Russie ouralienne.

LIBETHRA, ville de l’ancienne Macédoine, sur le golfe Thermaïque, au S.-E. de Pydna, non loin du mont Olympe et de la frontière de Thessalie. On y voyait, dit-on, le tombeau d’Orphée. || C’était aussi le nom d’une fontaine voisine du mont Hélicon, en Béotie. C’est de cette fontaine que les Muses, à qui elle était consacrée, tiraient leur nom de Libethrides.

L1B1CK1 (Jean), poète polonais du xvne siècle. Indépendamment d’une traduction en polonais des Odes d’Horace, imprimée à Cracovie (1647, in-4o), il a laissé : Somuium de vino et aqua ititer se litiganiibus pro prxcedentia (16J7), sans nom d’auteur ni lieu d’impression, et itacchus miraculosus, poème polonais anonyme.

LIBIDIBI s. m. (li-bi-di-bi). Comm. Nom donné à des gousses aplaties de om,05 à O^oâ de longueur, contournées en 5, un peu rugueuses, qui sont produites par ua arbuste de l’Amérique du Sud, le cssatpinia coriaria, et qui contiennent du tannin.

LIBIDINEUX EUSE, adj. (lî-bi-di-neu, eu-ze — lat. libidinosus ; de libido, désir, passion, débauche ; de libère ou lubere, avoir envie, désirer ; de la racine sanscrite tubh, désirer, aimer, d’où aussi le grec tipô, liptà, liptomui, désirer ; le gothique leibian, aimer, liubs, amour, allemand liebeu, aimer, anglais tu love, lithuanien luùiju, russe tiubliu). Lascif, dissolu, livré avec excès aux plaisirs de la chair : Itiscours libidineux. Vie libidineuse. Tout ce que l’imagination peut enfanter.de plus horrible se trouve réuni dans le prêtre libidineux. (Proudh.)

LIBIDINOSITÉ s. f. (li-bi-di-no-zi-té — rad. libidineux). Caractère de ce qui est libidineux : La libidinositÉ des pensées et des actions.

LIBIDOCLÉE s. f. (li-bi-do-klé). Crust. Genre d’oxyrhynques, de la tribu des maïens, dont l’espèce type vit sur les côtes de Valparaiso.

LIBINIE s. f. (li-bi-nl). Crust. Genre de décapodes brachyures, de la famille des oxyrhynques, tribu des maïens, comprenant trois espèces qui habitent les mers d’Amérique.

L1B1QUES ou LIBUENS, en latin Libici ou Libui, peuple de l’Italie ancienne, d’origine figurienne, dans la Gaule Transpadane, sur les deux rives de la Sesia, à l’O. des Taurini et à l’E. des Jnsubres. Leur capitale était Verceltx, aujourd’hui Verceil.

LIBITINAIRE s. (li-bi-ti-nè-re — lat. libitinari’us ; de Libitine, déesse des funérailles). Autiq. rom. Ofticier public chargé de présider aux funérailles : Auprès des libitinaires antiques, des nêcrophores, nos croquemorts sont des vestales, qui méritent le prix Montyon. (Petrus Borel.)

— Encycl. NumaPompilius établit à Rome des entrepreneurs de funérailles, qui avaient pour siège de leur administration le temple de Libitine, d’où le nom de libitinaires, sous lequel ils étaient désignés. Ces fonctionnaires avaient pour mission de tenir registre du nom de ceux qui décédaient et de pourvoir à tout ce qui était requis pour leurs funérailles. Ils avaient sous leurs ordres des hommes chargés de laver, d’oindre et d’embaumer les corps et de préparer ce qui était nécessaire pour les oblations, les offrandes et les autres sacrifices faits en l’honneur des divinités infernales. Les libitinaires venaient, dans l’ordre hiérarchique, immédiatement après les désignateurs, et ils avaient sous leurs ordres les ustores et les custodes. Ces deux catégories de bas officiers mortuaires assistaient les libitinaires dans les diverses parties de leur office.

LIBITINE s. f. (H-bi-ti-ne — nommythol.). Moll. Genre de mollusques, formé aux dépens des cypricardes, et non adopté,

LIBITINE, déesse qui présidait aux funérailles. Elle avait à Rome un temple où

étaient déposés tous les ustensiles nécessaires aux pompes funèbres. Horace fait son nom synonyme de mort dans les vers suivants :

Non omnis monar, mullaque part ma

Vitabit Libitinam

Les Romains appelaient Libitinaire ou porte de Libitine la porte par laquelle on enlevait les corps des gladiateurs blessés ou. tues dans les combats’du cirque.

LIBITUM (AD). V. AD LIBITUM.

L1BNA, ville de la Palestine ancienne. V. Labana.

LIBON, architecte grec, né en Elide, qui vivait dans le vo siècle avant J.-C. Il con LIBR

struisit le magnifique temple de Jupiter Olympien, dans lequel se trouvait l’admirable statue d’ivoire et d’or, chef-d’œuvre de Phidias.

LIBOT s. m. (li-bo). Moll. Nom d’une coquille du genre patelle, qu’on trouve dans les mers du Sénégal.

LIBOORET s. in. (li-bou-rè). Pêche. Ligne armée de plusieurs hameçons, dont on se sert pour la pèche du maquereau.

LIBOUUNE, en latin Condate, ville de France (Gironde), ch.-l. d’arrond. et de cant., à 27 kiloin. N.-E. de Bordeaux, au confluent de l’Isle et de la Dordogne ; pop. aggl., 11,456 hab. — pop. tôt., 14,960 hab. L’arrond. comprend 9 cant, 133 comm. et 115,901 hab. Tribunaux de première instance et de commerce ; justice de paix ; collège communal ; bibliothèque publique ; consulats de Suède et de Norvège. Fabrication d’étoffes de laine et d’objets d’équipement militaire ; tanneries, clouteries, corderies, fonderies, scierie ’mécanique ; chantiers de constructions navales. Commerce considérable de vins, eaux-de-vie, farines, bestiaux, fers, grains, (il, bois de merrain, etc. Agréablement située dans une contrée riante et fertile, Libourne est en général bien bâtie ; ses rues, larges, droites, bordées de maisons élégantes, rayonnent aux quatre angles d’une place carrée entourée de porches. Poste militaire pendant la domination romaine, sous le nom de Condate portas, Libourne prit de l’extension sous Oharlemagne et porta le nom de Fuzera ou Fozela. Au xine siècle elle fut fortifiée par les Anglais et un seigneur de Leybum, localité au nord de l’Angleterre, lui donna le nom de son pays. En 1270, Édouard 1er, 10j d’Angleterre, donna à Libourne une constitution et une charte. Cette ville fut prise en 1377 par Du Guesclin, en 1451 par Dunois, et en 1452 par Talbot. La cour des aides de Bordeaux y fut transférée il différentes époques, et le parlement de la capitale de la Guyenne y fut quelquefois exilé. Libourne fut en 1541 le centre de l’insurrection des guitres. Pendant la Fronde, elle fut fortifiée par Condé et prise par le duc de Vendôme.

Les principales curiosités de Libourne sont : la tour de l’horloge, intéressant vestige des fortifications dont la ville fut entourée au xive siècle ;, l’église Saint-Jean, récemment rebâtie et dont la flèche attire de loin les regards ; l’hôtel de ville, édifice du xvie siècle ; le théâtre, décoré d’un péristyle ; l’hôpital civil et militaire ; les casernes ; plusieurs maisons du xive siècle ; le pont de pierre sur la Dordogne, bâti de 1820 à 1824 ; le pont supendu jeté sur l’Isle, et le pont du chemin de fer sur la Dordogne.

Libourne fait un très-grand commerce des vins récoltés dans ses environs, vins qui sont en général bien inférieurs à ceux des vignobles de Bordeaux ; ils méritent cependant considération, car ils se répandent dans le commerce sous le nom de vins de Bordeaux.

Les vignobles se divisent en trois principales côtes, savoir : côte de Saint-Emilion à 1 est ; côte de Canon et côte de Fronsac au nord. Les vins de la côte de Canon sont très-colorés, fermes et capiteux ; mais, en vieillissant, ils acquièrent plus de finesse que ceux de Saint-Emilion.

LIBRAIRE s. m. (li-brè-re — lat. librarius ; de liber, livre). Celui qui vend des livres : Une boutique de libraire. Acheter plusieurs volumes chez le libraire. Toute l’édition de son ouvrage est restée chez le libraire.

— Celui qui loue des livres, qui tient un cabinet de lecture : Louer des romans chez le libraire.

Libraire-éditeur ou simplement Libraire, Libraire qui achète les livres en manuscrit pour les faire imprimer et les vendre : Les libraires entendent leurs intérêts aussi mal qu’ils tes aiment avec fureur. (Volt.)

Douze uns sont écoulés depuis le jour fatal Qu’un libraire, imprimant lus essais de ma plume. Donna pour mon malheur un trop heureux volume.

Boileau.

Un ignoraDt hérita

D’un manuscrit qu’il porta

Chez son voisin te libraire ; Je crois, dit-il, qu’il est bon ; Mais le moindre tlucaton

Ferait bien mieux mon affaire.

La Fontaine.

Libraire d’assortiment, Commissionnaire qui fuit des achats pour ses clients chez les autres libraires.

Libraire juré, Libraire qui avait prêté serment devant l’Université de Paris.

Imprimeur-libraire, Celui qui imprime et vend des livres,

— Antiq. rom. Celui qui faisait métier de transcrire les livres : Les libraires étaient ordinairement des esclaves. Il Employé qui, dans les légions et les manipules, était chargé de tenir le contrôle et la comptabilité.

— Hist. eccl. Officier ecclésiastique qui, dans les monastères, était chargé de transcrire et de garder les livres.

— Adjectiv. : Un commis libraire. Un marchand libraire. Une marchande libraire.

— Encycl. Antiq. Dans l’antiquité, les libraires étaient ceux qui écrivaient et transcrivaient les livres ; k Rome, on les appelait aussi amanueuses, de manus, serviteurs de la main desquels on se servait pour écrire, et

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antiquarii, vocable qui parait surtout s’appliquer à ceux qui reproduisoient ou réparaient les vieux livres des bibliothèques, endommagés par la vétusté. Les Grecs confondaient de même sous les noms de bibliopoles et bibliographes, les écrivains, les copistes et les vendeurs de livres. Lorsque le commerce des livres se développa, les libraires eurent des boutiques. Ces boutiques étaient, à Athènes, un lieu habituel de réunion pour les oisifs et les beaux esprits. L’auteur qui venait d’achever un ouvrage y venait en. faire la lecture, et c’était d après le succès de cette épreuve que le bibliopole se décidait à faire les frais d’un certain nombre de copies. C’est dans une de ces boutiques que Zénon sentit s’éveiller subitement en lui sa vocation pour la philosophie. Ce Zenon, qui était marchand de pourpre et avait alors trente ans, ayant fait naufrage au Pirée, se rendit à Athènes, et, s’étant arrêté près de la boutique d’un libraire, il assista à la lecture du second livre des Mémoires de Xénophon que faisait ce libraire. Transporté d’admiration, il lui demanda où demeuraient les gens qui savaient écrire de si belles choses. Cratès passait dans ce moment, et le libraire le lui montra en lui disant : à Suis celui-là. • Ce fut ainsi que Zénon devint le disciple de Cratès (Diogène Laèrce, Vie de Zenon, VII, 3). Pendant longtemps, le prix des livres fut très-élevé en Grèce. Ainsi Platon donna 100 mines (9,147 fr.) pour trois traités de Pythagore, et Aristote acheta 3 talents, c’est-à-dire 16,465 fr., les œuvres deSpeusippe, le neveu de Platon ; mais, à mesure que les matériaux sur lesquels on écrivait devinrent moins coûteux, lorsque surtout on sut préparer le parchemin, le prix des livres baissa, ce qui permit aux bibliopoles d’étendre leurs opérations. Ce qui contribua aussi à multiplier les livres, ce fut l’usage où étaient les étudiants de copier les écrits des maîtres afin de se former la main et le style. En outre, beaucoup de gens riches dressaient des esclaves au métier de scribes et so créèrent ainsi de très-riches bibliothèques. Aussi, dans les deux siècles qui précédèrent l’ère chrétienne, les livres se multiplièrent à un tel point qu’ils devinrent l’objet d’un commerce considérable. Il y avait à Alexandrie une place particulière réservée aux libraires. À Rome, les livres furent aussi l’objet d’un commerce important, dans les mêmes conditions, c’est-à-dire que la profession de libraire n’était pas distincte Je celle de copiste : ce dernier vendait lui-même les livres qu’il avait transcrits. De là vint que le mot de librarius, qui signiriait copiste, dési § na ensuite le libraire. Devenus très-nomreux, les libraires envahirent des quartiers à eux seuls ; le nombre d’esclaves lettrés qui furent employés, dès la fin de la république romaine, à copier les manuscrits, explique le peu de cherté des livres sous l’empire. Martial nous apprend que le VII<> livre de ses œuvres, contenant720 vers, bien conditionné, poli à la pierre ponce et colorié en pourpre, ne se vendait que 4 deniers romains. Le 111« livre, plus volumineux, était côté 4 Hummt, ce qui fait environ 6 francs de notre monnaie, et encore, ajoute Martial, en marchandant bien, on pouvait l’avoir à meilleur marché. Maintenant les éditeurs romains payaient-ils un droit aux auteurs ? On né peut répondre k cette question avec quelque certitude. Cependant la connaissance parfaite que Martial a du prix auquel ses livres sont vendus peut faire supposer que les auteurs romains avaient plus qu’un intérêt d’amour-propre à voir le public acheter leurs

œuvres. Du reste, le commerce de livres était parfaitement organisé. Les devantures des boutiques étaient couvertes d’inscriptions et d’affichés indiquant les ouvrages en vente. À l’intérieur, les volumes étaient soigneusement arrangés dans des casiers appelés nidi (nids) par Martial (liv. VII, xvii) : Ros nido licet inséras vel imo .. iibellos.

Le même poète, dans deux de ses épigrainmes, nous fait connaître les noms de ses libraires et le quartier qu’ils habitaient. L’épigramme cxlio du livre l"r indique au lecteur où ses livres sont à vendre : Ubi sunt libri oenales : « Toi, dit-il, qui veux toujours avoir mes livres sous la main et les prendre comme les compagnons d’une longue route, achète ceux de petit format, écrits sur parchemin ; il faut un eotfre pour les gros volumes, le mien tient dans la main. Sache pourtant où je suis a vendre, de peur de chercher par toute la ville ; je veux être ton guide. Cherche Secundus, affranchi du savant Lucencis, près du temple de la Puix et do la place de Nerva. » Dans une autre pièce (livre Ier, ép. exiv), c’est un autre libraire qu’il indique, Valerianus Pollius Quinctus, ■ dont la sollicitude, dit-il, ne permet pas que mes bagatelles périssent. « Cette épigramme, écrite en gros caractères, servait probablement d’affiche à la boutique de Pollius.

Quand un livre nouveau paraissait, les libraires l’expédiaient en province dans toutes les grandes villes de l’empire, principalement dans la tiaule, où il y avait des libraires dès les premiers siècles de l’ère chrétienne. Pline le Jeune, qui était trop bel esprit pour ne pas professer un certain dédain pour la province, a l’air de s’en étonner, ce qui ne 1 empêche pas d’être satisfait qu’on y lise ses œuvres. « Je ne croyais pas, dit-il, qu’il y eût des li-