habitent avec elle la grotte des fées, dans les Alpes. Entre les deux allégories, l’opposition est continue. Geneviève prie pour Philippe ; Mélusine dirige les projets des conjurés. Geneviève instruit Philippe des pièges qu’on lui tend ; Mélusine protège le château où les rebelles font leur plan de campagne. Geneviève dissipe les prestiges des démons et éclaire Philippe sur les moyens de s’emparer de la place ; Mélusine envoie à la cour de Londres le démon de la volupté pour séduire Thibault. Geneviève sauve miraculeusement le roi malade ; Mélusine, voulant disperser et détruire la flotte de Philippe, va réclamer, dans les entrailles du globe, le secours du génie des volcans.
Ce poème, qui n’est ni épique, ni héroïque, fut très-admiré à son origine et ne manque pas absolument de mérite. C’est un pastiche, une imitation intelligente, mais banale, des poëmes de Voltaire et de Delille. La versification, uniforme et laborieuse, n’est que de la prose rimée.
PHILIPPE III, dit le Hardi, roi de France, fils de Louis IX, né en 1245. Quand son père expira sur la plage de Tunis (1270), il reçut le serment des barons et des chevaliers, remporta sur les Maures quelques avantages qui le mirent en état de conclure avec eux une trêve de dix ans et ramena en France les débris d’une armée décimée par la peste, ainsi que les cercueils de cinq membres de sa famille morts pendant cette funeste expédition. Mais le fléau qui avait moissonné les siens l’enrichissait en même temps de leurs dépouilles. Le comté de Toulouse, le Poitou, l’Auvergne, la Touraine, le Rouergue, l’Albigeois, l’Agénois, le Comtat Venaissin, etc., vinrent doubler l’étendue de ses domaines ; mais il abandonna le Comtat Venaissin au pape Grégoire X (1273). En 1272, il réprima une révolte du comte de Foix et du comte d’Armagnac. La vigueur qu’il déploya dans cette guerre, ainsi que la noble clémence dont il usa envers les vaincus, assurèrent la pacification du Midi. Il soutint ensuite une guerre contre les Navarrais, tenta deux vaines expéditions en Espagne, dans le but de placer les enfants de La Cerda sur le trône de Castille, franchit encore les Pyrénées en 1285, pour combattre Pierre d’Aragon, instigateur du massacre des Vêpres siciliennes ; mais, après avoir soumis une partie de la Catalogne, il fut contraint par les fièvres de rentrer en France et vint expirer à Perpignan (1285). Malgré sa médiocrité, ce prince continua la politique de saint Louis et travailla à l’abaissement de la féodalité ; il tint la main à l’exécution des ordonnances qui défendaient ou limitaient les guerres privées, donna les premières lettres d’anoblissement, « attaque à la constitution féodale » (Chateaubriand), enjoignit aux gens de justice « de ne plus molester les non-nobles qui acquerront des choses féodales, » fit achever la rédaction des coutumes de France, commencée sous saint Louis, établit le principe de l’inaliénabilité du domaine de la couronne, institua le parlement de Toulouse, etc.
PHILIPPE IV, surnommé le Bel, roi de France, fils et successeur du précédent, né à Fontainebleau en 1268. Proclamé roi à Perpignan (1285), après la mort de son père, il ramena l’armée en France, reçut l’hommage
d’Édouard Ier, roi d’Angleterre, pour ses provinces
françaises, continua mollement la guerre d’Aragon et la termina enfin par les traités de Tarascon (1291) et d’Anagni (1295), qui laissaient la Sicile à la maison d’Aragon et le royaume de Naples à Charles le Boiteux.
Dès le commencement de son règne, ce prince se montra ce qu’il fut toujours depuis, l’ennemi du pouvoir féodal et ecclésiastique. Avec lui commence la ruine des institutions du moyen âge ; l’ordre social moderne est
inauguré ; mais il apparaît d’abord au monde
sous l’aspect odieux d’une tyrannie fiscale et
judiciaire aussi violente et aussi dure que la
puissance des seigneurs et des gens d’Église.
Habile et profond politique, mais despote
avide et cruel, sans foi, sans scrupule et
sans pitié, Philippe le Bel, entouré d’avides
banquiers et d’impitoyables légistes, accomplit
avec une inflexible rigueur la transformation
de la monarchie féodale et « précipita
violemment la royauté vers le pouvoir
absolu » (Guizot), évolution nécessaire à la
constitution de l’unité française, mais qui fut
accompagnée d’actes si révoltants, que les
colères nationales poursuivirent jusque dans
la tombe l’instrument détesté de réformes
dont la haute portée ne fut comprise que
quelques siècles plus tard. Un des premiers
actes législatifs de Philippe fut de régler les
droits et les devoirs de la bourgeoisie des
villes (1287). Par une autre ordonnance, il
exclut les ecclésiastiques du parlement et des
tribunaux, défendit (1288) qu’aucun juif fût
arrêté sur la simple réquisition d’un moine,
limita (1291) la faculté qu’avaient les ecclésiastiques
d’absorber par legs ou donations
les terres du royaume, et réprima l’usure à
laquelle se livraient les marchands italiens
établis en France. Après cinquante années
de paix entre la France et l’Angleterre, une
rixe de matelots amena une rupture (1293),
et Philippe s’empara de la Guyenne. Cette
guerre ne se termina qu’en 1299, par le traité
de Montreuil, par lequel Philippe donnait sa
fille Isabelle en mariage au fils d’Édouard,
avec la Guyenne pour dot, à la condition que
le prince reconnaîtrait la suzeraineté de la
France. Cette guerre fut suivie de la conquête
de la Flandre, dont le comte avait pris
parti pour l’Angleterre. Mais la tyrannie et
les exactions du gouverneur français déterminent
la révolte des Flamands (1302), qui
écrasent la présomptueuse noblesse française
à la célèbre bataille de Courtrai et suspendent
4, 000 éperons de chevaliers aux
voûtes de leur cathédrale. Philippe, qui était
au plus fort de ses violents démêlés avec le
pape Boniface VIII, redouble d’énergie et
prend les mesures les plus violentes pour
remédier à sa constante pénurie d’urgent ; il
oblige ses sujets à porter au Trésor leur vaisselle
d’or et d’argent, donne des ordres secrets
pour la falsification des monnaies (ce
qui les fit tomber à la moitié de leur valeur
nominale, dès que cette supercherie fut connue),
établit de nouveaux impôts et des maltôtes,
force des serfs à acheter une prétendue
liberté, vend la noblesse à des roturiers,
etc. Il rentre en campagne à la tête
d’une puissante armée (1302) ; mais, malgré
les brillants succès de Lille et d’Arques
(1303), malgré la Victoire navale de Ziericksee
et la déroute des communes flamandes à
la journée de Mons-en-puelle (1304), il se
voit obligé de traiter, reconnaît l’indépendance
de la Flandre, sauf le lien féodal, et
conserve Lille, Douai, Orchies et Valenciennes
(1305). C’est pendant cette guerre de
Flandre qu’éclata la célèbre rupture entre
le pape et le roi de France. Celui-ci, à bout
de ressources, avait voulu lever des subsides
sur le clergé et faire prévaloir le principe
de ses légistes, « que les clercs doivent servir
par des subsides le pays qu’ils ne peuvent
servir par les armes. » Le clergé défendit
ses intérêts menacés avec l’âpreté
égoïste qui le distingue. Boniface lança plusieurs
bulles violentes contre Philippe et
finit par l’excommunier et mettre le royaume
en interdit. Le roi passa outre, fit brûler la
bulle Ausculta fili (1302) par les états généraux
de la noblesse, du clergé et de la bourgeoisie,
convoqués alors pour la première fois. « Ces
états généraux de Philippe le Bel ont été
l’ère nationale de la France, son acte de
naissance. » (Michelet.) Tous les ordres du
royaume se soulevèrent avec une patriotique
unanimité contre cette prétention du
pape de faire de la France un fief du saint-siége.
La querelle s’envenima de plus en
plus et Philippe finit par envoyer en Italie
son chancelier Nogaret pour enlever le pape
et le conduire à Lyon, où il se proposait de
le faire juger par un concile (v. Boniface).
Après la mort de ce pontife et celle de Benoît XI, son successeur (1303-1305), le roi
consomma l’abaissement du saint-siège en y
faisant parvenir une de ses créatures (v. Clément V), qui lui était asservie par des conventions
secrètes. Libre de ce côté, et tout
en poursuivant le procès contre la mémoire
de Boniface, qu’il voulait faire condamner comme hérétique, il se livra à tous les excès
d’une insatiable cupidité. Dans le cours
de l’année 1305, il altéra cinq fois les monnaies ;
en 1306, il dépouilla les juifs de tous
leurs biens et les chassa de France. De nouvelles
altérations de monnaies déterminèrent
des séditions dont il ne triompha qu’en multipliant
les supplices. Mais ce fut surtout
dans le procès célèbre des templiers que se
dessina son caractère cruel et cupide. Ayant
obtenu du pape la suppression de cet ordre,
il en fit arrêter tous les membres, sous un
prétexte banal d’hérésie, mais en réalité
pour s’emparer de leurs immenses richesses,
et fit commencer contre eux le procès le
plus inique dont l’histoire fasse mention, et
qui se termina par une longue série de supplices
(v. templiers). Philippe le Bel termina
son règne en faisant brûler un nombre
immense d’hérétiques et de sorciers. « À ses
attaques contre les papes, on l’aurait pris
pour un esprit fort ; son intolérance seule
prouvait son orthodoxie. » (Sismondi.) Son
ordonnance (1313) pour empêcher les seigneurs
de battre monnaie, ses exactions, ses
maltôtes soulevèrent contre lui nobles et
communes, et il mourut flétri du surnom de
Faux-monnayeur, et au moment où toutes
ces colères accumulées allaient éclater en
révoltes formidables (1314). Ses derniers moments
avaient encore été assombris par une
tragédie domestique. Deux gentilshommes
normands, Philippe et Gautier d’Aulnay,
complices des désordres des belles-filles du
roi, avaient été, par son ordre, écorchés
vifs, mutilés et pendus, pendant que les princesses
étaient outrageusement rasées et plongées
dans un cachot, où l’une d’elles, Marguerite
de Bourgogne, femme de Louis le Hutin, fut étranglée peu de temps après, par ordre de son époux. Philippe le Bel réunit à la France plusieurs provinces considérables
(la Flandre française, le Quercy, la ville de Lyon, la Navarre, etc.), créa l’ordre judiciaire,
abaissa la féodalité et la puissance
ecclésiastique, protégea l’Université, rendit
sédentaire le parlement de Paris, prépara
l’unité et la centralisation modernes, accomplit
enfin de grandes choses, mais avec des
moyens que la morale réprouve et dans le
seul but d’augmenter les prérogatives royales.
« Ce prince, continuateur violent de
saint Louis, compléta, dit M. Mignet, ses
établissements judiciaires. Il fit plus. Saint
Louis avait ordonné que sa monnaie eût
cours dans les terres des barons ; Philippe le
Bel suspendit le droit que les barons avaient
d’en faire battre eux-mêmes ; saint Louis
avait soustrait le clergé de France aux excès
du pouvoir de la cour de Rome par sa
Pragmatique sanction ; Philippe le Bel rendit
en quelque sorte le saint-siége dépendant de
la couronne par sa victoire sur Boniface VIII.
Jaloux de l’autorité qui lui avait été transmise
et de celle qu’il y avait ajoutée, il osa
le premier employer la formule : « Par la plénitude
de la puissance royale. » Pour diminuer
l’aliénation des domaines acquis, il restreignit
les apanages aux seuls héritiers mâles,
ce qui devait les faire revenir plus tôt à
la couronne et empêcher qu’ils ne tombassent,
par les femmes, dans des maisons
étrangères ou ennemies. Il créa dix clercs du
conseil de France. Enfin il ébaucha le nouveau
système financier de la nouvelle monarchie
par la création des impôts indirects sur
les consommations… Philippe le Bel essaya
de procurer à la monarchie des moyens pécuniaires
plus stables. Comme le commerce
avait acquis du développement, il établit des
bureaux de douane sous un maître des ports
et passages de France, et soumit les denrées
et les marchandises exportées au payement
de 7 deniers pour livre du prix (1/32).
Il mit aussi un impôt sur le sel. Toutes ces
rentrées nouvelles ne lui suffisant pas, il
fut obligé de recourir aux diverses classes
de l’État pour leur demander des subsides,
qu’il eût été dangereux de lever sans qu’elles
les eussent accordés. Il convoqua donc les
nobles, les ecclésiastiques et les bourgeois,
soit du nord, soit du midi du royaume, en
assemblées publiques, et organisa ainsi les
états généraux de France et de Languedoc. »
Philippe le Bel (CHRONIQUE MÉTRIQUE DE), par Godefroy de Paris (XIVe siècle). Elle commence en l’an 1380 et s’arrête en 1316. Ce n’est pas précisément de l’histoire versifiée, car l’auteur s’attache plus aux petits faits qu’aux grands. Cependant cette Chronique présente une sorte de résumé où les événements sont racontés au fur et à mesure qu’ils se produisent, sans autre lien que l’ordre chronologique. Aussitôt après le narré d’un démêlé de Philippe le Bel avec le pape, Godefroy raconte une émeute à la porte d’un boulanger. On n’a, du reste, aucun renseignement sur la personnalité de ce Godefroy de Paris, et M. Buchon, qui a publié la Chronique métrique dans la collection des Chroniques nationales (Panthéon littéraire, 1840, gr. in-8o), s’est borné à donner quelques éclaircissements sur l’œuvre. Elle débute ainsi :
En l’onnor de la Trinité,
Qui est une en déité,
Des mil et trois cents, cele année
Ai-je ma pensée ordonée,
Par quoi je puisse inne faire
Dont l’en sache les faits retraire,
Qui sont en ce monde advenus,
Ainsi com les ai retenus.
Godefroy rapporte tout au long les impressions populaires que provoquaient les démêlés de Philippe le Bel avec le pape, et il y mêle d’intéressants détails anecdotiques. Les affaires de l’Église le préoccupent beaucoup. Les cardinaux s’étant réunis en 1304, la veille de la Pentecôte, pour élire un pape, leur choix tomba sur l’archevêque de Bordeaux, et cette élection est amèrement critiquée par lui :
Car l’esleu cele journée
N’avait pas bonne renommée ;
D’en atrai (appelle) chacun a garant
Que l’en le tenait pour tyran,
Et félon et tout plein de maux.
Après l’élection, le nouveau pape alla à Lyon. Le roi de France, les seigneurs et un grand nombre de prélats « furent lui faire honneur, » et la chute d’un mur écrasa « un des plus prud’hommes de la compagnie, » le bon duc de Bretagne. Le pape resta deux mois à Lyon. Mais il avait un neveu qui mit beaucoup de désordre dans la ville, séduisant les filles et surtout les bourgeoises, si bien que les habitants en vinrent souvent aux mains avec les gens qui accompagnaient le pape ; on joua du bâton et même de l’épée. L’archevêque de Lyon ayant pris fait et cause pour ses ouailles et porté plainte au pape, celui-ci ne s’en émut, et ses gens redoublèrent de méfaits. L’archevêque, indigné du silence du pape, ordonna à ses bourgeois qu’ils eussent à se défendre et qu’ils n’en eussent peur. Godefroy raconte au long ces détails. Pour ce qui regarde Paris, et entre autres faits que nous apprend le poète, le pain fut très-mauvais en 1316, par la faute des boulangers, qui y mirent tant d’ordures que beaucoup de gens en périrent. Mais un homme, que notre chroniqueur appelle Roger Bontemps, signala le méfait des boulangers, dont quelques-uns furent pris et roués, et qui subirent dans les halles de rudes châtiments, pour être ensuite à tout jamais bannis du royaume. La Chronique finit à la mort du successeur de Philippe le Bel, Louis X, dit le Hutin, qui mourut cette même année, au bois de Vincennes, et, selon Godefroy, d’une maladie aiguë « qui souvent les saines gens tue. » Le roi aurait pris cette maladie en jouant à la paume. Étant en sueur, il descendit « dans une cave, » où il se lava à l’eau froide. Après cette imprudence, il se coucha pour ne plus se relever. Cet événement eut lieu le 4 juin 1316. Voici le jugement que porte sur ce roi notre chroniqueur : « Il était généreux et violent, mais il ne s’entendait pas bien à gouverner son royaume. » En mourant, il recommanda à ses oncles et à son frère de La Marche sa femme Clémence, qui était enceinte. Il reconnut, en même temps, une fille qu’il avait eue de son autre femme, la trop célèbre Marguerite de Bourgogne.
PHILIPPE V, surnommé le Long, deuxième fils de Philippe le Bel, né en 1293. À la mort
de son frère Louis le Hutin (1316), il s’empara
de la régence, puis de la couronne, au
détriment de Jeanne de France, fille du roi
défunt. Jusque-là, la couronne avait été
transmise, depuis Hugues Capet, en ligne
directe, de père en fils, sans qu’il se présentât
un cas sur le droit des femmes à cette
succession. Par une interprétation nouvelle
de la loi salique, purement territoriale, qui
ne réglait que les alleux et non point la succession
à la couronne, Philippe prétendit que
les femmes étaient exclues du trône. Un certain
nombre de barons et de princes du sang
prirent parti pour Jeanne, s’appuyant sur
l’exemple des grands fiefs qui, presque tous,
« tombaient de lance en quenouille. » Mais
Philippe n’en fut pas moins sacré, et les
états généraux de 1317 approuvèrent son
couronnement et tranchèrent cette grande
question en réglant l’ordre de succession à la
couronne tel qu’il s’est maintenu jusqu’à nos
jours. Le rappel des légistes, proscrits sous
Louis le Hutin, quelques efforts pour la réforme
des abus, l’exclusion du parlement prononcée
contre les prélats et les hauts fonctionnaires ecclésiastiques, la confirmation de l’inaliénabilité du
domaine, des ordonnances pour l’organisation de la chambre des comptes et l’administration des eaux et forêts, la confiscation de certaines prérogatives féodales, telles que les droits d’aubaine, d’épave, etc., la paix conclue avec la Flandre (1320), l’extermination d’une nouvelle bande de pastoureaux,
d’horribles persécutions contre les juifs et
les lépreux furent les principaux événements
de ce règne. Philippe mourut en 1322, sans
avoir pu réaliser son grand projet de l’uniformité
des poids, des mesures et des monnaies dans toute la France.
PHILIPPE VI, dit de Valois, chef de la deuxième branche des Capétiens, né en 1293,
successeur de Charles le Bel (1328). Chef de
la réaction féodale tentée dès la mort de
Philippe le Bel, sous la direction de son père
(Charles de Valois), il commença par dispenser
les seigneurs de payer leurs dettes.
Ces nobles aventuriers prétendaient qu’il y
avait une conspiration des hommes de bas
état pour ruiner la noblesse française, et, en
conséquence, ils obtinrent d’abord un ordre
du roi pour que tous leurs créanciers fussent
mis en prison et leurs biens séquestrés ; puis
vint l’ordonnance qui réduisit toutes leurs
dettes aux trois quarts, à quatre mois de
terme, sans intérêts. Philippe leur rendit
aussi le droit de guerre privée. Ce règne fut
fécond en grands événements. Appelé par
Louis, comte de Flandre, qui avait été
chassé par ses sujets, Philippe remporta sur
les communes flamandes la célèbre victoire
de Cassel (1358), qui eut pour résultat le rétablissement de Louis, la ruine de Cassel, de
Bruges, d’Ypres et de Courtrai, et le supplice
d’un grand nombre de bourgeois des cités
soulevées. Dix ans plus tard éclata la célèbre
guerre de Cent ans entre la France et l’Angleterre,
déterminée par la protection qu’Édouard III accordait à Robert d’Artois, ainsi
que par ses prétentions à la couronne de
France (il était petit-fils de Philippe le Bel).
Après quelques hostilités de Philippe en
Guyenne (1337), suivies d’un armistice (1338)
presque aussitôt rompu, la guerre se poursuivit
sur les côtes d’Angleterre, dans le
Cambrésis et le Vermandois (1339). Allié au
brasseur Artevelde, chef des communes de
Flandre révoltées de nouveau, Édouard prit
le titre et les armes de roi de France et vint
débarquer dans les Pays-Bas, après avoir
anéanti la flotte française à la bataille de
l’Écluse (1340). Coupée par quelques trêves,
la guerre recommença en 1344. Édouard obtint
en Guyenne quelques succès, balancés
par ceux du duc de Normandie dans l’Angoumois.
Il fit ensuite une descente en Normandie
et ravagea tout le pays jusqu’aux portes
de Paris. Refoulé à travers la Picardie jusqu’au
delà de la Somme, il se retrancha au-dessus
du village de Crêcy, où il fut attaqué
par Philippe (26 août 1346), et remporta cette
célèbre victoire de Crécy, si funeste à la
France et dont le principal résultat fut l’établissement
des Anglais dans le royaume.
Édouard alla ensuite faire le siège de Calais, dont les héroïques habitants furent obligés de capituler, après la résistance la plus glorieuse. La médiation du pape Clément VI amena une nouvelle trêve (1347). Philippe de Valois mourut avant la reprise des hostilités (1350), laissant la France épuisée par des calamités de toute nature : peste noire (1348), famine, misères inénarrables, bandes anglaises licenciées par la trêve et qui parcouraient le pays en commettant d’horribles ravages, brigandages de la secte mystique des flagellants (1349), impôts écrasants, exactions, taxes arbitraires, altérations des monnaies et autres rapines. Philippe VI ajouta à ses domaines les comtés de Champagne, de Brie, d’Anjou et du Maine, Montpellier, Latte et le Dauphiné (cette dernière acquisition fit donner