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QUIN

Généralement, lorsque, sur un panneau peint on sur un papier de tenture, on fait, comme décoration, un semis d’un petit ornement toujours le même, ce semis est disposé en quinconce.

Dans la construction, lorsque l’on doit employer des pilotis sur une surface de terrain « plus ou moins grande, les pieux destinés à tonner les pilotis sont enfoncés en quinconce.

Lorsque l’on veut soutenir une vaste salle par des colonnes en foute, par exemple, ces colonnes sont souvent disposées en quinconce, et cela par la même raison que l’on dispose ainsi les arbres d’une avenue pour permettre facilement la circulation dans plusieurs directions différentes, obliques et rectangulaires.

En mécanique, dans la construction des machines, lorsque l’on doit, pour remplir un but déterminé, couvrir une surface d’une grande quantité de pointes ou la cribler de trous, les uus et les autres sont disposés en quinconce.

Sur les cartes à jouer, les piques, trèfles, carreaux ou cœurs sont placés en quinconce, etc..,

En définitive, lorsque l’on a k répartir régulièrement et uniformément des objets, quelle que soit leur nature, sur une surface

Suelconque, on choisit de préférence cette isposition en quinconce.

QTJINCONCIAL, ALE adj. (knin-kon-si-al, a-la — rad. quinconce). Qui est disposé en quinconce.

— Bot. Se dit des feuilles disposées autour do la tige en une spirale simple formée de cinq feuilles, tl jEstioalion quiuconciale, Disposition des enveloppes florales dtins laquelle on remarque cinq parties : deux extérieures, deux intérieures et une intermédiaire.

QUINÇONHEAU s. m, (kain-so-no). Mar. Morceau ne bois appelé aussi cabillot.

QUINCT1A (famille), maison patricienne de l’ancienne Rome. Trois branches de cette famille se sont illustrées par les services qu’elles rendirent à la république, les. CAPiTOUNUS, les (JiNCINNATUset les Flaminius. l.esCapiiolinus furent probablement ainsi nommés parce que leur maison était située au Capitole, au moins avant 370, où, à l’occasion de ta conspiration de Manlius, il fut défendu aux patriciens d’habiter le mont Capitolin. Les Capitoukusportaient encore l’ugnom de Barbatus. Dans le vie siècle, le nom de Crispinus, dérivant de la qualité des cheveuxd’un des membres de cette maison, remplaça ceux de Capitolinus et de Barbatus. Ils s’éteignirent sous les premiers empereurs. Les Cincinnatus, ainsi nommés parue qu’ils avaient l’usage de porter les cheveux bouclés, se subdivisèrent en deux branches, dont la cadette se nomma Pennus. Cette famille disparaît de l’histoire après celui qui lut consul en 403 ; elle continua cependant a vivre dans l’obscurité, puisque Suétone rapporte que Caligula lui défeudit de porter la chevelure qui distinguait cette ancienne famille. Les Flaminius furent ainsi nommés parce qu’ils étaient chargés d’une prêtrise de Jupiter. L’arrière-petit-fils du vainqueur dé Philippe fut consul en 631 ; après lui, l’histoire ne parle plus de cette branche.

QUINCT1LIÀ ou QU1NTILIA (famille), maison patricienne de l’ancienne Rome. Cette ■ famille remonte aux premiers temps de la république ; dés l’an 301, un Sex. Quintilius fut consul ; elle fournit cependant peu d’hommes célèbres. Le fils de celui qui vient d’être nommé fut appelé Varus parce qu’il était bancal ; ce nom passa à sa postérité. Le plus connu est P. Quinctilius Varus, qui, après avoir été consul, treize ans avant J.-C, fut défait par les Germains, neuf ans après J.-C C’est au sujet de ce Varus que 1 empereur Auguste, inconsolable de cette désastreuse défaite, s’écriait : «Varus, rends-moi mes légions 1 ’

QU1NCT1US CAPITOLINUS (Titus), un des membres les plus distingués de la famillo Quiuctia, à Rome. Il fut six fois consul. Il battit les Volsques, s’empara d’Antium, leur capitale, l’an 468 av. J.-C, et y établit une colonie romaine.

QOINCUNX s. m. (kuain-koncs). Antîq. rom. V. quinconce.

QUINCY, villa des États-Unis (Massachusetts), comté de Norfolk, à M kiloin. S.-E. de Boston ; 6,000 hab. Fabrique de chaussures. Carrière de magnifique granit.

QUINCY-SÉGY, villageetcomm.de France (Seine-et-Marne), eant. de Crécy, arrond. et à 6 kilom. de Meaux, à 51 kilom. de Melun, sur un plateau ; 1,711 hab. Beau château agréablement situé.

QlUiSCY (John), médecin anglais, mort à Londres en 1723. Il se fit agréger au collège des médecins de Londres et professa la matière médicale et là pharmacie. Ou lui doit : Médicinal epist les {1714, in-8<>) ; Exuminution of Woodwurd’s state of physie (1719, in-S») ; Vispensatory of the royal collège of p/tysieians in Londou (1721, in-Su) ; Pmkcliones pharmaceuiicx (1723, in-4u) ; Piuirmacopœia officinalis et exlemporanea (1739, * vol.) ; Lexicon physico-medicum (1787, in-8<>).

QUINCY (Charles Skvin, marquis de), écrivain militaire, né près de Meaux en 1666, mort à Paris en 1736 ; Grâce à la valeur dont il fit preuve dans diverses campagnes, il devint rapidement lieutenant général d’artillerie, fut blessé & la bataille d’Hochstedt (1704), commanda l’artillerie sous les ordres du maréchal de Villars en 1707, coopéra l’année suivante a la campagne faite par l’électeur de Bavière sur le Rhin et devint, après la paix d’Utrecht, lieutenant du roi au gouvernement de la province d’Auvergne. On lui doit un ouvrage important, intitulé Histoire militaire du règne de Louis le Grand, roi de France (Paris, 1726, 8 vol. in-4"l, avec cartes et plans. On y trouve des détails utiles pour ceux qui veulent suivre dans leur lecture les opérations d’une campagne. Le huitiènm volume a été réimprimé sous le titre de VArl de faire la guerre (La Haye, 1728, 2 vol. in-12).

QUINCY (Josiah), célèbre patriote des États-Unis d’Amérique, né à Boston en 1744, mort en mer en 1775. Sa famille, d’origine anglaise, avait pris racine dans l’Amérique du Nord en 1633, par conséquent bien avant la guerre de l’Indépendance. Quincy se nt recevoir avocat en 17G5, s’établit à Boston, se signala bientôt par son talent, se mit surtout en évidence en défendant (177C) le colonel anglais Preston, lors de la répression par les armes des troubles de Boston, et il put faire acquitter cet officier. Quincy donna de grandes preuves de patriotisme en protestant contre les procédés de l’Angleterre, en travaillant par tous les moyens k l’affranchissement de son pays. Il partit pour la métropole au mois de septembre 1744, pour plaider les intérêts des colonies britanniques, puis revint en Amérique et mourut d’une maladie de poitrine pendant la traversée. On a de lui : Observations on the act of Parliament called the Boston port bill (1774), ouvrage vigoureusement écrit. En 1798, un monument a été élevé en son honneur dans les environs de Boston. Son cousin John Quincy, alors président de la république américaine, en rédigea l’inscription.

QUINCY (Josiah), homme politique américain, fils du précédent, né à Boston en 1772. Il a été successivement sénateur du Massachusetts, membre du congrès américain de 1805 k 1813, maire de Boston en 1823 et président de l’université d’Harvard, do 1829 à 1845. Ses productions sont : Life of Josiah Quincy (Boston, 1825, in-18) ; History of Harvard (Cambridge, 1S40) ; History of the Boston AthenXum with biographicai notices (Cambridge, 1851, in-SO).

QUINCYTE s. f. (kuain-si-te). Chini. Hydrosilicate de magnésie, coloré en rouge fleur de pêcher par une matière organique, qu’on a trouvé à Quincy.

— Encycl. La quineyte a été étudiée par Berthier. On latrouve dans les calcaires d’eau douce de Quincy, près de Mehun ; elle est accompagnée dans ce terrain par du quartz résinite, coloré de la même nuance par la même substance organique. Elle se présente sous la forme de masses amorphes. Quelques minéralogistes la considèrent comme ne constituant pas une espèce distincte, comme étant simplement de la magnésite impure.

V. MAONÉSITE.

QOINDÉCAGONE s. m. (kuain-dé-ka-go-ne

— dulat. quinque, cinq ; et du gr. defea, dix ; gània, angle). Géom. Figure qui a quinze angles et quinze côtés.

QUIHDÉCEMViR s. m. (kuain- dé-aèmm VÏl). V. QUINDÉCIMVIK.

QU1NDÉCIMPONCTUÉ, ÉE adj. (kiiain-désiinm-pou-kiu-é — du lat. guindecim, quinze, et de ponctue). Entom. Qui est marqué de quinze points colorés.

QU1NDÉCIMVI» s. m. (kuain-dé-simm-vir

— lat. quindecimvir ; de guindecim, quinze, et do iiir, homme). Hist. rom. Chacun des quinze officiers préposés à ta garde des livres sibyllins, et chargés de la célébration des jeux séculaires, ainsi que de quelques cérémonies religieuses, dans eertaiues conjonctures où la république se croyait menacée. Il On dit aussi

QUINDÉCKjrVIR. Bncycl. Les quindëcimvirs constituaient

un collège de prêtres dans l’ancienne Rome, Ils étaient chargés de garder et de consulter les livres sibyllins et de présider à la célébration des jeux séculaires. Les livres sibyllins, ou recueils d’oracles vendus à Tarquin l’Ancien par la sibylle de Cuines, furent placés d’abord dans le temple de Jupiter Capitolin et périrent lors de l’incendie du Capitole", l’an 670 de Rome. Le sénat fit rechercher alors des oracles du même genre en Italie, en Grèce, en Afrique, et en forma un recueil. Ces nouveaux livres sibyllins furent placés dans le temple d’Apollon, sur le mont Palatin. C’est à ce temple et en mémo temps aux quindëcimvirs qu’Eues fait allusion dans sa prière à Apollon et k sa prêtresse (Enéide, VI, 71) : ■ Un grand sanctuaire t est réservé dans notre empire ; la je placerai tes oracles et l’expression des destins secrets prédits a ma nation ; là je te consacrerai des hommes choisis : Te quoque magna mènent regnis penetralia noslris ; Uio ajo nnmque lues sortes, arcanaque fala Dicta m«B «crUt ponam, tectosque sacrabo, Atma, viros—

Tarquin lo Superbe préposa deux prêtres, nommés duumvirs, à la garde des livres sibyllins. Après l’expulsion des rois, elle fut couflés à des patriciens choisis qu’on exempta de tout service militaire et de. toute fonction civile. Vers l’an 376 av. J.-C, le nombre de ces prêtres fut accru et porté à dbt ; cinq furent patriciens et cinq plébéiens ; on les appela alors décemvirs. Plus tnrd le nombre en fut porté à quinze ; mais l’époque de cette augmentation, et par conséquent de la création des quindëcimvirs mêmes, est incertaine. Cependant, comme ils n’étaient encore que dix lorsque le Capitole fut brûlé, en 82 avant notre ère, et comme il est question dés quindëcimvirs dans Cicéron, nous pouvons en conclure que l’augmentation fut faite par Sylla, qui accrut aussi le nombre de plusieurs autres collèges de prêtres. Durant les guerres civiles, il y eut des modifications diverses au nombre des quindëcimvirs ; il fut porté k quarante et même à soixante, sans que leur nom fût changé, mais ensuite on revint définitivement à quinze. Lorsque la république était dans des circonstances périlleuses, sous le coup d’une calamité publique, ou qu’on avait annoncé quelque événement extraordinaire, un prodige quelconque inventé pour effrayer les citoyens crédules, le sénat romain votuit aussitôt un décret par lequel les quindëcimvirs avaient ordre de consulter ces livres, de lui faire un rapport de ce qu’ils avaient pu y lire ; le tout avec les cérémonies et tes sacrifices usités en pareil cas. Comme les oracles sibyllins étaient écrits en vers obscurs et ambigus, il était facile d’y trouver des réponses et des prescriptions appropriées à toutes les circonstances ; ce soin regardait les quindëcimvirs, qui ordonnaient ensuite les sacrifices destinés à prévenir la colère des dieux ou à l’apaiser. En outre, les quiiidécimvirs présidaient k la célébration des jeux séculaires qui, l’an 455 avant notre ère, avaient été institués par ordre d’un oracle sibyllin, à la suite de prodiges menaçants, et qui duraient trois jours. Le premier jour, les quindècimoirs distribuaient au peuple les objets propres aux lustrations, cest-à-dire des torches, du bitume, du soufre, des fèves, et le soir ils immolaient, dans le champ de Mars, à la clarté des flambeaux, trois agneaux en l’honneur des trois Parques, sur trois autels dressés au bord du Tibre. Le second jour, ils sacrifiaient devant le Capitole à Jupiter, k Junon et aux autres divinités qui avaient leurs autels sur le mont Capitolin, puis ils descendaient au champ de Mars pour présider les jeux scéniques en l’honneur d’Apollon et de Diane. Le troisième jour, ils sacrifiaient des bœufs blancs devant le temple d’Apollon, et le soir Us immolaient une truie noire et un porc k la Terre, dans le même lieu où ils avaient sacrifié te premier jour. Le collège des quindècimvirs était sous la prééminence d’un chef nommé maître du collège. Tous étaient élus à vie dans les comices par tribus ; ils portaient la toge prétexte. Ils cessèrent d’exister sous le règne de Théodose.

QOENDÉCIMVIRAL, ALE adj. (kuain-désiinm-vi-ral, a-le — lat. çuindeeimviralis ; de quindecimvir). Hist. rom. Qui appartient aux quindècimvirs : Fonctions quindécimvi-

RALKS.

QUINDÉCIMVIRAT s. m. (kuam-dé-simmvi-ra — rad. quindecimvir). Hist. Rom. Dignité des quindècimvirs. il Exercice des fonctions de quindecimvir.

QUINDÉCIQCTONAL, ALE adj. (kuain-dési-o-ktonal, a- le — dulat. quindecim, quinze ; octoni, huit). Miner. Se dit d’un cristal qui a la forme d’un prisme octogone, avec un sommet k quinze faces.

QU1NDENNIUM s. m. (kuain-dènn-ni-dmm — du lut. quinque, cinq ; annus, année). Hist. Nom qu’on donnait, en Portugal, à des pensions qui, prises sur certains bénéfices, se payaient tous les cinq ans, pour aider k subvenir, dans les besoins pressants, aux charges de l’Église.

QU1NDENTÉ, ÉE adj. (kuain-dan-té — du lat. quinque, cinq, et de denté). Bot. Se dit des parties de plantes qui ont cinq dents, cinq découpures.

QUINDIGITAIRE àdj. (kuain-di-ji-tè-redu lat. quinque, cinq ; digitus, doigt). Physiol. Qui a cinq doigts : Un enfant sexdigitaire peut naître de parents quinûigitairiss.

QUINE s. m. (ki-ne — du lat. quint, cinq). Suite de cinq numéros sur lesquels on mettait à la loterie, et qui devaient sortir tous les cinq pour que la personne gagnât : Le qbinb ne se jouait pas à la loterie royale de France. (Bouillet.)

C’est unquineà la loterie, C’est un avantage très-grand, mais très-difficile k obtenir : Ce soir même, j’en parierai à son o)icte, qui sera aux anf/es ; car, pour elle, c’est un quine a la LoraKih ; qu’une telle union. (E. Sue.)

— Jeux. Coup de dés qui amène les deux cinq, au trictrac :’ Amener un qoine. Faire un quink. Il Série de cinq numéros placés, au loto, sur la même rangée transversale d’un carton.

QUINE, ÉE adj. (kï-né — du lat. quini, cinq). Hist. nat. Disposés cinq par cinq : Feuilles O.UINÉES.

QU1NÈQOE s. f. (ki-nè-ke). Comm. Espèce de camelot, qu’on fabriquait autrefois en Hollande et en Picardie. Il On disait aussi qui-

NETTE.

QUI NESCIT DISSIMULABB NESCIT BB 64%

GNÀB.E(Q«t.i, i, e tqit dissimuler ne sait régner), Maximéfavorite de Louis XI, dont la : conduite politique est ainsi appréciée par un historien : » Lorsqu’il était le plus faible, il savait sur toutes choses s’accommoder au temps, faire des traités selon la volonté’de ses ennemis, leur céder ses droits et ses prétentions afin de les désunir ; mais quand une fois il avait rompu leur ligue et leur union, il reprenait ce qu’il avait cédé et ne tenait rien de ce qu’il avait promis. «

Louis XI avait toujours tenu le dauphin son fils, depuis Charies VIII, éloigné de là cour et ne lui avait fait donner aucune instruction. Il ne voulait pas qu’il sût d’autre latin que ces cinq mots : Qui nescit dissimulare nescil, régnare. Ces mots sont restés la devise de ceux qui, pour la réussite de leurs projets, emploient surtout la ruse et la dissimulation.. !

« La politique de Gabriel Naudé garde son arrière-pensée à travers tous les temps. A son arrivée en Italie, il était déjk foncièrement de l’avis de Louis XI, et il admettait cet article unique des gouvernants : Qui nescit dissimulare nescit régnare. »

Sainte-Bbuvb.

QUINET (Louis), écrivain ecclésiastique français, né à La Houblonnière, près de Lisieux, vers 1595. mort en 1663. Il entra dans l’abbaye du Val-Richer, de l’ordre de Cîteaux, puis alla à Paris, où il passa son doctorat en théologie. Devenu prieur de l’abbaye de Royaumont, il eut des rapports avec le cardinal de Richelieu, qui était alors abbé général de Cîteaux. Celui-ci, ayant apprécié son mérite, le nomma, en 1638, abbé de Barbery. Quinet fut ensuite visiteur et vicaire général de son ordre. On a de lui : Ecclercissements (sic) ou Conférences sur la règle de saint Benoît (Caen, 1651, in-8°) ; Trésor de piété contenant divers sujets pour s’entretenir avec Dieu dans l’oraison (Paris, 1651, in-12) ; les États pénibles et humiliants de Jésus-Christ sur la Terre (Caen, 1B51, in-12) ; le Noviciat des bénédictins expliqué par des conférences (Paris, 1653, in-12).


QUINET (Edgar), philosophe, poëte, historien et homme politique français, né à Bourg (Ain) le 17 février 1803. Il était d’une ancienne famille de la Bresse, dont plusieurs membres furent des magistrats distingués. Son père, Jérôme Quinet, commissaire des guerres sous la République et durant les premières années de l’Empire, a laissé la préface d’un grand ouvrage : Sur les variations magnétiques et atmosphériques du globe. Edgar Quinet avait trois ans quand sa mère l’emmena rejoindre son père, alors attaché à l’armée du Rhin. Il vécut pendant de longs mois au milieu des soldais, qui l’avaient nommé l’Enfant du drapeau, et c’est là qu’il apprit, dit-il, à prononcer le nom de patrie.

De retour en Bresse au commencement de 1807, il passa son enfance à la campagne avec sa mère, qui s’occupa seule de son éducation première ; les leçons qu’il reçut d’elle exercèrent une influence considérable sur son développement moral et intellectuel ; à la grâce railleuse du XVIIIe siècle, elle alliait les qualités sévères et graves qu’elle devait à une éducation protestante.

Après avoir fait son éducation primaire d’une façon aussi irrégulière qu’originale, le jeune Edgar entra, en 1811, au collège de Charolles. Son professeur était un ancien capitaine de dragons, qui se plaisait moins à apprendre à ses élèves l’orthographe et le rudiment qu’à leur raconter ses campagnes. Les classes se passaient le plus souvent en répétition de manœuvres représentées sur la table au moyen de livres rangés en bataille. Par malheur, bientôt l’administration de la guerre s’empara du vieux couvent où se faisaient les classes et le remplit de fourrage ; l’élève n’eut plus pour maîtres qu’un vieux prêtre délié de ses vœux, marié et, comme tel, montré au doigt par tous les habitants, et un pauvre professeur de musique, vrai neveu de Rameau, qui, en lui faisant chanter la Marseillaise, oubliée par tout le monde dans le pays, ouvrit sa jeune âme aux sentiments patriotiques. Sa mère se chargea de la plus forte part de son éducation, qui consista en lectures faites à peu près au hasard, Hamlet, Macbeth, les Caractères de La Bruyère, tout le théâtre de Racine, de Corneille et de Voltaire et les Considérations sur la Révolution française de Mme de Staël.

Les tragiques événements de 1814 et 1815 furent pour lui la première initiation à la vie politique ; les hontes essuyées par la France, puis le retour de Napoléon de l’Île d’Elbe, Waterloo, la présence des alliés en France firent sur son imagination une impression ineffaçable, dont la trace, brûlante encore, devait se retrouver, bien des innées plus tard, dans les poëmes d’Ahasverus et de Napoléon. Il faut lire, dans son Histoire de mes idées, le récit vibrant de cette indignation toute française d’un enfant de douze ans. Mis au collège de Bourg à la fin de 1815, il y fit sa première communion, non sans témoigner dès lors les sentiments les moins orthodoxes.

En 1817, il vint finir ses études au lycée de Lyon, où il se plongea dans l’étude des classiques, surtout des poètes et des historiens, avec une ardeur passionnée. Un moment il fut sur le point de faire de l’histoire