Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 15, part. 4, Vl-Zz.djvu/390

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questions, à éclaircir tous les doutes, dans la mesure, bien entendu, du degré de perfection auquel sont arrivées ces diverses branches de nos connaissances.

Enfin les doctrines philosophiques, religieuses, politiques. et économiques, même les plus controversées, ont été présentées sans autre préoccupation que de leur conserver leur véritable physionomie, laissant à chacune d’elles le soin de plaider sa cause.

Pour les diverses parties que nous venons d’énumérer, l’auteur du Grand Dictionnaire, après avoir péniblement amassé des matériaux sans nombre, les a classés dans un ordre logique, en tenant compte des travaux de ses devanciers et des progrès de la science actuelle. Là, il a amélioré plutôt qu’innové. Mais ce qui constitue le côté véritablement neuf, original, du Grand Dictionnaire ; ce qui lui imprime un cachet tout particulier d’intérêt et d’utilité ce sont les innombrables articles de bibliographie, de littérature et d’art, articles que le lecteur n’avait jusqu’ici jamais rencontrés réunis dans un même ouvrage.

Ainsi se trouve entièrement parcouru le vaste cercle des connaissances humaines ; ainsi le XIXe siècle se trouve doté d’une Encyclopédie sans précédent, le plus vaste monument de littérature et de science qui ait paru jusqu’ici ; ainsi se trouve réalisé le rêve, ainsi se trouvent couronnés les efforts de Pierre Larousse !

Le Grand Dictionnaire restera. l’œuvre de vulgarisation la plus complète qui ait été tentée. Ce qui était épars en cent ou mille ouvrages est là réuni et condensé. Il faudrait, pour étudier seulement une partié des matières qui le composent, de grands loisirs, des recherches dans des collections immenses et hors de la portée du plus grand nombre, une vie entière d’études ; ici, on a tout sous la main. On pourrait comparer le Grand Dictionnaire à ces expositions universelles où, des quatre points de l’horizon, affluent les produits du monde entier ; où tous les peuples se donnent rendez-vous, chacun apportant son histoire, son industrie, ses arts, sa religion, son costume, son langage.

En présence de tant de matières si diverses et si disparates, on pouvait craindre la confusion, l’encombrement. Comment se reconnaître au milieu de tant d’éléments divers appelés à tour de rôle, au hasard, par ordre alphabétique, et destinés cependant à faire un tout systématique et harmonieux ? Pierre Larousse a résolu la difficulté grâce à la simplicité lumineuse de son plan. Partout le même ordre a présidé à la distribution des matières ; des articles généraux présentent la définition, l’origine, les progrès et les développements successifs de la science, de l’art, de l’industrie, de la littérature dont on s’occupe ; une multitude d’articles spéciaux font pénétrer jusque dans les plus petits détails.

L’apparition de cette œuvre gigantesque fut accueillie d’abord avec une sorte de surprise causée par son immensité même ; quelques esprits naturellement portés à la défiance conçurent et manifestèrent des doutes sur la possibilité de son achèvement. L’œuvre marchait pourtant toujours, un peu lentement d’abord, à cause de certaines difficultés matérielles, puis de plus en plus rapidement, surtout à partir du jour où le Grand Dictionnaire eut son imprimerie spéciale, dirigée par Pierre Larousse, qui ne craignit pas d’ajouter cette surcharge nouvelle aux occupations déjà si nombreuses dont il était accablé Les événements désastreux de 1870-1871 auraient pu tout compromettre, si les matériaux n’avaient pas été consciencieusement amassés d’avance. L’aurore de jours plus calmes venait à peine de naître, que les premières atteintes d’une cruelle maladie mirent bientôt Pierre Larousse dans l’impossibilité de présider lui-même à la dernière révision des manuscrits, à l’impression, à la correction des épreuves, à toutes ces opérations multiples qui depuis vingt ans absorbaient ses journées et ses veilles. Mais le Dictionnaire était resté sa préoccupation constante, et lorsque la mort est venue l’enlever à l’affection de tous, sa pensée se reportait encore sur son œuvre, qu’il nous laissait la mission d’achever.

La tâche était lourde. Nous l’avons entreprise parce que nous avions la ferme intention de ne pas dévier de la ligne que Pierre Larousse avait tracée et parce que nous sentions nos efforts encouragés par la sympathie du public. Aujourd’hui que l’ouvrage est terminé nous pouvons dire que, pour accomplir religieusement la promesse que nous avions faite, il nous a suffi de nous conformer à l’esprit qui a toujours dirigé et soutenu Pierre Larousse. Cet esprit se dévoile à chaque page, à chaque ligne. Comme il l’a écrit : « Il n’a pas cherché à abriter derrière des réticences obscures ou des euphémismes pusillanimes la pensée qui a présidé à la rédaction de tous les articles, parce que cette pensée est honnête, loyale et impartiale, et qu’elle est en harmonie avec la tendance et les aspiratiom du siècle. »

Pierre Larousse a écrit dans la dernière ligne de sa préface : « Le germe de 89 est impérissable ; il serait déjà arraché s’il avait pu l’être. »

Ces paroles que nous venons de citer, et qui résument si bien le programme du Grand Dictionnaire, sont restées constamment présentes à notre pensée ; nous étions, en outre, soutenus dans nos efforts par des collaborateurs pleins de zèle, depuis longtemps attachés à Pierre Larousse, qui l’avaient, pour ainsi dire, suivi dans toutes les phases de sen existence laborieuse, et dont quelques-uns connaissaient ses plans et pouvaient deviner ses intentions les plus intimes.