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laume attaqua sues détour Karl Marx : « Nous ne voulons pas, dit-il, d’un chef qui juge des hérésies. » La minorité anarchiste protesta avec violence contre 1b vole qui accordait au conseil général te droit de suspendre des sections et des fédérations, sauf appel au congrès. Plusieurs membres de la minorité, MM-Comnet, Raiivier, Vaillant, quittèrent avec fracas la salle des séances. Le congrès, acquis en majorité au conseil général, vota l’exclusion de l’Internationale de M. James Guillaume et de Bakounine et il décida que le siège du conseil général serait transféré à New-York.

La fédération jurassienne, ne gardant plus de mesure, se réunit en congrès à Saint-Emile. Toutes les décisions du congrès de la Haye furent tenues pour nulles et non avenues. Les délégués formant la minorité du congrès de La Haye se firent représenter à Saint-Emile. Un pacte « d’amitié, de solidarité et de défense mutuelle » fut conclu entre les fédérations jurassienne, italienne et espagnole, pour lutter contre la dictature du conseil général et du congrès de la Haye. La fédération jurassienne, où dominait l’Alliance de Bakounine, fut le centre de la résistance autonomiste. La fédération jurassienne ainsi constituée en association universelle, Bakounine se retirade la vie militante. Il mourut quelques années après (1876). Il n’avait pas atteint son but qui était de dominer l’Internationale ; il n’avait réussi qu’à la diviser et à la réduire à l’impuissance.

III. L’école anarchiste depuis Bakounine, Bakounine n’a pour ainsi dire pas exercé d’influence en France de son vivant. Nous avons dit qu’il avait échoué, en 1870, dans ses efforts pour faire triompher l’anarchie à Lyon. Ce fut quelque temps après cette époque qu’il trouva dans le prince russe Kropotkine et dans M. Elisée Reclus ses principaux adeptes. Plus tard un certain nombre de socialistes dissidents, qui prêchaient le mépris du suffrage universel et l’abstention politique, tendirent à se rapprocher des anarchistes suisses. Nous citerons parmi eux M.Emile Gautier, qui ne tarda pas à entrer en relations avec MM. Reclus et Kropotkine. Les éléments anarchistes épars à Paris finirent par se grouper. Des cercles d’études sociales, ceux des V«, VI» et XIII« arrondissements, dirigés par M. Gautier et quelques étudiants, allèrent de l’abstentionnisme à l’anarchie.

Comme sou véritable fondateur Bakounine, l’école anarchiste réclame la destruction de l’État, l’abolition de l’autorité gouvernementale sous toutes ses formes. La première conséquence naturelle de cette négation de l’État est l’abstention électorale ; voter c’est participer à l’organisation de l’État. Il est clair que des hommes qui veulent supprimer l’État n’ont nullement besoin, ne peuvent nullement se soucier d’y entrer et d y prendre position par le vote. « Le suffrage universel, lit-on dans une brochure anarchiste intitulée (a Question électorale, le suffrage universel, qui a toujours été un instrument de duperie politique, ne saurait être un instrument d’émancipation économique. • Donc le premier mot de l’anarchie est l’abstention. Mais ce n’est que le premier mot. t Abstienstoi, continue 1 auteur de la brochure ; mais ne va pas croire que, parce que tu te seras abstenu de voter, que tu auras refusé de consacrer toi-même ton exploitation, tout fiera dit. Non ! ton abstention sera le commencement de l’action. » De quelle action

s’agit-il ? De ce qu’on a appelé un peu plus tord la propagande par le fait, c’est-à-dire de l’attentat contre les personnes et les propriétés. La propagande par le fait, pour

effrayer et déconcerter les conservateurs de l’état social actuel, pour donner courage et espérance a ceux qui veulent le détruire ; telle est la méthode qu’avait préconisée Bakounine.

Bn 1880, une feuille hebdomadaire, la Révolution sociale, fut fondée pour servir la cause anarchiste. Dès son premier numéro, elle publiait, conformément à la méthode et aux préceptes de Bakounine, sous le titre d’Études scientifiques, des renseignements concernant les substances explosibles les plus puissantes. Il convient de dire que la méthode de la propagande par le fait n’est pas née en France ; elle n’est pas dans les traditions des révolutionnaires français, elle répugne à leurs instincts de logique et de justice ; c’est de Russie qu’elle a été importée chez nous. Ce sont deux anarchistes allemands, MM. Most et Hasseimann, qui l’ont développée avec le plus de précision. La seule application bien authentique qui ait été faite en France de cette méthode est l’attentat contre la statue de Thiers, à Saint-Germain. Voici en quels termes cet incident était présenté au public, sous forme d’avis officiel placé en gros caractères en tête de la Révolution sociale : « La propagande par le fuit. — Dans sa dernière séance, le comité révolutionnaire français a décidé que, comme avertissement donné à la bourgeoisie, il était urgent d’accomplir un acte significatif. Il a donc été arrêté que la statue de l’odieux bourreau qui était son chef devait disparaître. Dans la nuit du 15 au 16 juin, la statue de Thiers, érigée à Saint-Germain, a été détruite en partie par le fulnii-coton. Cette exécution n’est que le prélude d’autres événements plus efficaces, que toutes les mesures policières ne sauraient empêcher. Mort

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aux exploiteurs ! Vive la révolution sociale ! Signé : le Comité exécutif ».

On raconte au sujet de cet attentat qu’un comité exécutif de dix personnes avait été formé pour attenter à l’existence de la statue. Il avait été convenu que le tirage au sort désignerait au dernier moment un membre chargé d’exécuter l’opération. Tout le comité, qui s’était i ; endu dans la nuit à Saint-Germain, eut une délibération nocturne au milieu du parc. La première personne désignée était un tout jeune homme, égaré dans "anarchie, et qui n’avait pas la moindre envie de commettre un pareil acte de van dalisme. Le pauvre anarchiste essaya de se tirer de ce mauvais pas ; il réussit à faire agréer ses excuses. Après une grande heure d’incertitude et de discussion, trois membres voulurent bien se névouer. Uacte significatif fut accompli, mais à peu près sans succès.

Il ne parait y avoir eu aucune corrélation entre les événements de Montceau-les-Mines et l’action anarchiste. Tout au plus les disciples de Bakounine ont-ils essayé de les exploiter. Quant aux attentats de Lyon, dont nous parlons plus loin, on n’y a pas vu clairement leur main, mais on a cru pouvoir les attribuer à leur influence et les en rendre moralement responsables. Il est à remarquer d’ailleurs que les théoriciens de 1 anarchie étaient pour ainsi dire devenus les prisonniers de leur parti. Des agents mystérieux ont pu compromettre dans des crimes de droit commun leurs prétendus directeurs.

Il nous reste à dire quelques mots du programme économique de 1 école anarchiste. Ce programme n’est autre que celui du communisme. La richesse sociale sera mise à la disposition de tous, de telle façon que chacun, travaillant selon ses facultés, puisse librement consommer selon ses besoins. Il n’y a rien, comme on voit, de moins original. Le prince Kropotkine résume ce programme en un mot : expropriation. Il déclare que ce mot expropriation doit être indissolublement attaché au mot anarchie. ■ L’expropriation dit-il, voilà le mot d’ordre qui s’impose à la prochaine révolution, sous peine de manquer à sa mission historique. L’expropriation complète de tous ceux qui ont le moyen d’exploiter les êtres humains. Le retour à la communauté de la nation de tout ce qui peut servir entre les makis de n’importe qui à exploiter les autres... Il faut travailler incessamment, dès maintenant, k semer l’idée d’expropriation par toutes nos paroles et tous nos actes ; que chacun de nos actes se rattache à cette idée mère ; que le mot expropriation pénètre dans chaque pays ; qu’il soit discuté dans chaque village et devienne pour chaque ouvrier, pour chaque paysan, une partie intégrante du mot anarchie, et alors nous serons sûrs que le jour de la Révolution il sera sur toutes les lèvres, qu’il s’élèvera formidable, poussé par le peuple entier, et que le sang du peuple n’aura pas coulé en vain... Nous prendrons garde de toucher au lopin du paysan tarit qu’il le cultive lui-même avec ses enfants, sans recourir au travail salarié. Mais nous exproprierons tout ce qui n’est pas cultivé par les bras de ceux qui détiennent la terre en ce moment. Et lorsque la Révolution sociale sera un fait accompli, lorsque l’ouvrier des villes ne travaillera plus pour un patron, mais pour les besoins de tous, les bandes ouvrières, gaies et joyeuses, se rendront à la campagne, donner aux champs expropriés la culture qui leur manque, et transformer en quelques jours les bruyères incultes en plaines fertiles, apportant la richesse dans le pays, fournissant à tous les produits riches et variés que la terre, la lumière, la chaleur, ne demandent qu’à leur donner... Seule, l’expropriation générale peut satisfaire la multitude des souffrants et des opprimés. Du domaine de la théorie il faudra la faire entrer dans celui de la pratique. Mais pour que l’expropriation réponde au principe, qui est de supprimer la propriété privée et de rendre tout à tous, il faut qu’elle s’accomplisse en de vastes proportions. En petit, on n’y verrait qu’un vulgaire pillage ; mais en grand, c’est le commencement de la réorganisation sociale. »

Après avoir considéré l’anarchisme et les anarchistes d’un point de vue si élevé, il serait bon, sans aucun doute, de les étudier dans leurs différentes manifestations de la vie de tous les jours ; mais en descendant ici à ces détails, qui offrent un intérêt d’une nature spéciale, nous craindrions que les deux parties de cet article ne fussent par trop disparates : nous renvoyons donc ceux de nos

lecteurs qui désireraient avoir sur l’anarchiste contemporain quelques aperçus pittoresques à l’article réunions publiques.

  • ANARCHISME S. m. — V. ANARCHIE et

SOCIALISME.

Atiarchiite* de Lyon (PROcks DES). La police française, avisée de la reconstitution de l’Association internationale des travailleurs, surveillait les agissements des socialistes, qui semblaient avoir pris Genève et Lyon pour centres de ralliement, lorsque, dans la soirée du 21 octobre 1888, l’explosion de bombes chargées de dynamite devant le bureau de recrutement militaire, quai de la Vitriolerie, et dans le sous-sol du théâtre Bellecour, où elles firent plusieurs victimes, vint démontrer que sa vigilance s’était laissé

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surprendre. Les auteurs de ces criminels attentats ne purent être découverts aussitôt, et ce ne fut que postérieurement, par le fait d’un hasard, que l’un d’eux, le nommé Cyvoct, tomba entre les mains de la justice. Une grande quantité d’arrestations furent faites parmi les socialistes soupçonnés, et les perquisitions amenèrent chez quelques-uns d’entre eux la découverte de matières explosibles, de recettes pour en fabriquer, de correspondances où il était question de la livraison de quelques-unes de ces matières, et surtout les preuves manifestes d’un essai de reconstitution de l’Internationale. La complicité des détenteurs de matières explosibles avec les auteurs des attentats du théâtre Bellecour n’ayant pu être juridiquement prouvée, quoiqu’on fut certain de sa réalité, ce fut ce dernier point seul que visèrent les poursuites, par application de la loi de 1872 sur. les associations internationales, loi d’exception et de tendance, sans doute, mais dont on se servit faute d’autre.

Il résulta de l’enquête, des correspondances saisies, des journaux rédigés par quelques-uns des inculpés, « le Droit social » et « l’Etendard révolutionnaire •, publiés à Lyon, « le Révolté » à Genève, et en partie aussi de leurs aveux, qu’il existait à Lyon une fédération de groupes anarchistes, — dite Fédération anarchiste révolutionnaire lyonnaise, ayant des ramifications avec ceux de Saint-Étienne, de Villefranche, de Vienne, de Montceau-les-Mines, du Creusot, et même avec des centres plus éloignés, Paris, Bordeaux, Marseille, Cette. À Saint-Étienne, il existait divers groupes, les Outlaws, la Jeunesse anarchique, qui s’étaient fédérés sous le nom d’Alliance stéphanoise, puis reliés à ceux de Lyon, de même que les groupes du Glaive et des Indignés, à Villefranche. Cette fédération anarchique possédait ses organes dans « le Droit social » et d’Etendard révolutionnaire ■, rédigés par le prince Pierre

Kropotkine, un réfugié russe qui, expulsé de Genève pour sa trop active propagande en faveur des nihilistes, avait trouvé un asile en France, et par Emile Gautier, Joseph Bernard, Toussaint Bordât, Pellion, etc. ; elle avait, de.plus, manifesté son fonctionnement en envoyant au congrès socialiste de Saint-Étienne deux délégués, en se faisant représenter au congrès international de Londres par Kropotkine et, pendant la période électorale de 1881, en publiant des professions de foi recommandant l’abstention, au nom des principes anarchistes, et signées de son secrétaire, Bordât, qui, postérieurement, fut délégué au congrès de Genève. Cette fédération avait si bien une organisation complète, que ■ le Droit social • publiait, le 5 mars 1882, la nomenclature des différentes sections qui la composaient, avec les noms des sociétaires. Lorsque, du 14 au 20 juillet 18S1, s’était tenu le congrès international da Londres, les procès-verbaux en avaient été publiés par « le Révolté » de Genève et par ■ la Révolution sociale • ; il résultait de ces procès verbaux que les groupes anarchistes de Lyon, Vienne et Marseille y étaient représentés ; que Kropotkine, délégué de la fédération jurassienne, avait accepté d’être aussi celui delà fédération lyonnaise, et avait présenté un rapport sur l’organisation de cette fédération, sur son développement, son extension en dehors de la ville de Lyon, et sur l’esprit qui animait ses membres. Dans une autre séance, il avait exposé comment on concevait la révolution dans la fédération jurassienne et lyonnaise, soutenu la nécessité d’adhérer à l’Association internationale des travailleurs et d’établir un bureau central de renseignements pour relier les groupes. Gautier assistait au congrès en qualité de délégué des groupes de Vienne et du Panthéon. Enfin, il résultait des mêmes procès-verbaux, insérés dans « le Révolté ■, qu’à la suite des délibérations le titre d’Association internationale des travailleurs avait été définitivement repris, une commission de renseignements fondée, et l’admission des groupes considérée comme de droit par le seul fait de l’envoi de leur adhésion au bureau central. Cela n’empêcha pas ceux des inculpés qui avaient signé ces procès-verbaux, qui les avaient insérés dans

leurs propres journaux, de prétendre, au cours des débats, que la reconstitution de l’Internationale était tout simplement une invention de la police. Kropotkine, plus avisé, demanda la représentation de son mandat de délégué ; il savait bien qu’on ne pouvait le satisfaire. Quant aux résolutions prises par le congrès de Londres et acclamées au nom des groupes anarchistes par les délégués, elles pouvaient, toujours d’après les mêmes procès-verbaux, se résumer ainsi : faire une guerre féroce, sans pitié, de toutes les manières et sous toutes les formes, aux détenteurs du capital et de la propriété ; préconiser l’abstention électorale complète ; décrier le suffrage universel ; poursuivre la destruction de tout gouvernement, républicain ou monarchiste ; calomnier les députés, à quelque parti qu’ils appartinssent, pour amener le discrédit du parlementarisme ; provoquer l’abolition du service militaire, de l’idée de patrie ; réclamer l’expropriation collective ; exciter à la grève sous toutes ses formes ; recommander partout et toujours l’emploi de la violence.

Ces résolutions ayant été prises à l’étran ANAft

ger et ne tombant pas, par conséquent, sous le coup de la loi, on avait d’ailleurs, en France même, dans les journaux anarchKtes, de quoi s’édifier suffisamment sur les tendances de la fédération lyonnaise : souscription d’un revolver d’honneur à l’assassin Fournier ; annulation d’un verdict du jury dans une poursuite concernant « le Droit social • ; condamnation à mort des jurés et des magistrats qui avaient participé au jugement du journal » l’Etendard > ; déclaration de solidarité avec les auteurs des attentats commis à Montceau-les-Mines et avec les auteurs de tous les attentats futurs ; encouragements donnés à un certain Joly {l’un des inculpés), qui s’était offert pour tuer le président de la République, un commissaire de police ou le premier venu, au choix ; désignation des monuments à faire sauter les premiers et de catégories de personnes à supprimer ; glorification continuelle de tous les moyens odieux et violents, notamment de l’emploi du poison, du poignard et de la dynamite.

Les poursuites furent dirigées contre soixante-six individus, inculpés : trente-huit d’avoir fait acte d’affiliation à une association internationale ayant pour but de provoquer à la suspension du travail, à l’abolition du droit de propriété, de la patrie, de la famille, de la religion et d’avoir ainsi commis un attentat contre la paix publique, et les vingt-huit autres d’avoir accepté des fonctions dans cette association, concouru à son développement et propagé ses doctrines. Treize inculpés, et parmi eux Cyvoct, l’un des auteurs de l’attentat du théâtre Bellecour, parvinrent à s’enfuir ; cinquante-trois seulement comparurent devant le tribunal correctionnel de Lyon, le 8 janvier 1883. Les plus inarquants appartenaient, pour la plupart, à la seconde série ; c’était, pour ne parler que des principaux, outre Kropotkine, homme d’un réel talent et qu’on ne peut que regretter de voir mêlé à de tels débats : Emile Gautier, docteur en droit, le plus lettré de l’association après Kropotkine ; Bordât, directeur du « Droit social • ; Bernard, serrurier, l’un des fondateurs du journal ; Ricard, Martin, Liégeon, Blonde, Crestin, Pejot, Desgranges, Étienne Faure, Morel, Tressaud, Michaud et Potet. L’accusation ne pouvait reprocher au prince Kropotkine que ses actes de délégué de groupes au congrès de Londres et ses articles dans i le Révolté ■ de Genève ; aussi se défendit-ii facilement, non sans une certaine hauteur, en demandant si des magistrats français avaient le droit d’interroger un journaliste russe écrivant en Suisse, ou un Russe exposant en Angleterre ses idées sociales. Mais un réfugié avait-il le droit d’abuser de l’hospitalité française pour fomenter en France de l’agitation et du désordre ? C’est un point qu’il négligea d’aborder. Il avait formulé sa profession de foi dans ces lignes, signées de lui, d’un article du à Révolté » : • Notre action doit être la révolte permanente, par la parole, par l’écrit, par le poignard, le fusil, la dynamite, voire même des fois par le bulletin de vote, lorsqu’il s’agit de voter pour Trinquet ou pour Blanqui, inéligibles. Tout est bon pour nous qui n est pas la légalité ». Sa propagande active, le zèle qu’il avait mis à la formation des groupes et au développement d’une fédération qui, en le déléguant lui-même, un Russe, à Londres, avait pris un caractère international, ne permettaient pas de l’innocenter. Emile Gautier avait à répon dre des mêmes agissements à Londres, et d’une prédication anarchiste au moins aussi violente. Voici quelques extraits de ses articles et de ses discours : • Il faut que la foule révoltée, sans attendre l’ordre de personne, détruise spontanément toutes les institutions qui mutilent aujourd’hui la liberté, et n’oublie pas que l’endroit sensible, les parties génitales de la bourgeoisie, c’est sa caisse ; frappons donc à sa caisse, désorganisons tous ses services, brûlons ses paperasses et ses archi ves, comme l’ont fait uos pères en 17S9, détruisons ses titres de rentes et de propriétés. » « Nous ne reconnaissons pas de frontières. Notre idéal, pour terminer la guerre francoallemande, serait de combler le Rhin avec

les cadavres entassés des capitalistes et des gouvernants des deux pays, pour en faire un pont sur lequel les deux peuples se serreraient fraternellement la main.» — «La Commune n’a fait que deux bonnes choses • l’exécution des généraux Clément Thomas et Lecomte, et la fusillade des otages. » Parlant des troubles et des attentats de Montceau-les-Mines : « Cette révolte héroïque où, pour la première fois, les travailleurs, rompant avec une tradition désastreuse, ont fait usage de ia dynamite, est d’un excellent augure pour les batailles prolétariennes de l’avenir. » Il se défendit eu prétendant que la dynamite, dont il recommandait continuellement l’emploi, n’était, dans sa pensée, qu’une expression métaphorique, appropriée à la science moderne, comme autrefois on disait l’épée, le glaive. Le serrurier Bernard, fondateur du » Droit social », était un illettré, compromis surtout par la correspondance, trouvée chez lui, d’Elisée Reclus et de Kropotkine. Bordât, jeune exaJté da vingt-cinq ans, directeur du « Droit social », avait été le délégué de la fédération lyonnaise au congrès de Genève ; dans sa défense, il s’attacha surtout k démontter qu’il