Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 2, part. 2, Be-Bi.djvu/115

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Cette page a été validée par deux contributeurs.
BENE BÉNÉ BÉNÉ BÉNÉ 533

exposée au boulevard des Italiens, en 1860. Dans ce dernier tableau, on voit une femme debout, une petite fille assise et un petit garçon qui récitent la prière ; au premier plan, un garçon pâtissier, vu de dos, tient un plat ; dans le coin, à droite, est un réchaud.

Bénédicité (le), tableau de M. Brion ; salon de 1861. La scène se passe dans une ferme de l’Alsace. Le père de famille, patriarche en bonnet de coton, lit gravement la prière dans une lourde Bible in-folio, à tranche rouge et à coins de cuivre, que ses deux mains dressent avec peine sur la table. Devant lui se tiennent la mère, les fils, les valets, tous debout, joignant les mains et priant avec recueillement. L’enfant lui-même a cessé ses espiègleries, et le chien semble s’associer à cette componction générale. La peinture de ce tableau, a dit M. Paul de Saint-Victor, est simple et solide, comme le sentiment qui l’a inspiré c’est le style rustique dans toute sa verdeur.

Un autre artiste contemporain, M. Charles Fortin a peint sur le même sujet une composition agréable, qui, après avoir figuré à l’exposition universelle de 1855, a été placée au musée du Luxembourg.

BENEDICK (Julien-Roderic), auteur dramatique et romancier allemand, né à Leipzig en 1811. Après être entré au théâtre pour y jouer la comédie, il débuta comme ténor en 1833, parcourut une partie de l’Allemagne ; devint régisseur du théâtre de Wesel, créa dans cette ville, sous le titre de Sprecker (le Parleur), une feuille littéraire, dans laquelle il publia de nombreux articles de critique, et fit, en 1842, des cours de littérature à Cologne. Trois ans après il prenait la direction du théâtre d’Elberfeld, et revenait en 1847 à Cologne, gérer le théâtre de cette ville. Doué d’une grande activité intellectuelle et d’une imagination vive, M. Benedick a beaucoup produit. Il a fait jouer avec succès sur les principales scènes de l’Allemagne, des pièces de théâtre qui, pour la plupart, ont été traduites à l’étranger. Les plus connues sont : Jeanne Jebus, la Tête Moussue, qui eut une vogue extraordinaire le Docteur Wespe, l’ennemi des femmes, le Procès, le Voyage des Noces, les Jaloux, la Lettre d’amour. On a recueilli ses œuvres dramatiques en six volumes (Leipzig, 1846-1851). En dehors de la scène, il a écrit des ouvrages que le public a fort bien reçus : Contes populaires allemands (6 vol.) ; 1813, 1814 et 18)5, tableau réaliste de la guerre de l’indépendance (1841) ; Scènes de la vie des comédiens (plusieurs éditions), le meilleur de ses romans, l’Un sous l’autre (1859), suite d’histoires du genre intime, etc.

BENEDICT ou BENOIT, musicien surnommé l’Appenzélien parce qu’il était né à Appenzell en Suisse, au XVIe siècle. On cite de lui un morceau intitulé Monodia in Josquinum a patre, musicorum principem, et M. Fétis trouve que l’harmonie de ce morceau est pleine et correcte, que la tonalité en est douce et naturelle. On trouve aussi de beaux motets de Benedict dans plusieurs recueils.

BENEDICT (Traugott-Guillaume-Gustave), médecin allemand, né dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle. Il a professé la médecine à l’université de Breslau, et publié en allemand et en latin un assez grand nombre d’ouvrages, parmi lesquels nous citerons Essai d’histoire de la navigation et du commerce des anciens (1806) ; Histoire de la fièvre scarlatine des épidémies dont elle fut la source et de sa thérapeutique (Leipzig, 1808) ; Manuel de la cure pratique des maladies des yeux (Leipzig, 1822) ; etc.

BENEDICT (Jules), compositeur et pianiste allemand, né en 1801, à Stuttgard. Après avoir achevé ses études littéraires au gymnase de sa ville natale, le jeune Benedict, qui avait déjà fait preuve de rares aptitudes musicales, obtint de son père, riche banquier israélite, qu’il suivrait sa vocation, partit en 1819 pour Weimar, où il eut pour maître Hummel, et se rendit en 1820 à Dresde, où Weber lui apprit la composition. Bientôt une intime liaison se forma entre l’élève et le maître, qui emmena avec lui Benedict à Vienne, à Berlin, et dans toutes les villes où se montaient les opéras de Weber. À Vienne, en 1823, Benedict, sur la recommandation de Weber, fut nommé directeur de musique de l’opéra allemand, fonction dont il se démit, au bout de deux ans, pour faire avec le célèbre impressario Barbaja un grand voyage en Allemagne et en Italie, où Barbaja lui confia la direction d’un des nombreux théâtres qu’il administrait. En 1830, Benedict fit un voyage à Paris, y séjourna quelque temps, puis se rendit à Londres. Il y contracta une étroite amitié avec Mmes Malibran et de Bériot, et les suivit à Naples. Après avoir habité cette dernière ville pendant quelques années, il revint à Londres et s’y fixa. Nommé chef d’orchestre au théâtre de Drury-Lane, en 1839, Benedict résigna bientôt cet emploi. En 1850, il suivit en Amérique, comme accompagnateur, l’illustre Jenny Lind, et les concerts fructueux qu’ils donnèrent en ce pays rapportèrent à Benedict un bénéfice de 250, 000 francs. De retour à Londres en 1857 d’un nouveau voyage Su’il avait fait en Italie, M. Benedict a repris depuis cette époque ses travaux de composition et ses leçons de piano.

Professeur de piano de la haute aristocratie anglaise, professeur et accompagnateur de la reine Victoria, M. Benedict donne chaque année à Londres des concerts pour lesquels les premiers artistes du monde s’empressent de lui offrir leur concours. Comme exécutant, M. Benedict a pris rang parmi les pianistes les plus distingués par l’élégance et la chaleur de son jeu. Comme compositeur de musique instrumentale et dramatique, il compte d’honorables succès. Ses œuvres pour piano sont classées parmi les bonnes productions du genre. Bellini et Rossini lui ont fourni des motifs de variations, sonates, concertos, etc. Enfin, les six opéras qu’il a composés jusqu’à ce jour ont été favorablement accueillis en Italie, en Allemagne et à Londres. Ces opéras ont pour titre : Ernesto e Giovinta (Naples, 827), les Portugais à Goa, et Un an et un jour (Naples, 1836) ; The Gypsy’s warning (Londres, 1833) ; le Fiancé de Venise et les Assassins (en Allemagne, 1848).

BÉNÉDICTE s. m. (bé-né-di-kte du lat. benedictus, béni). Pharm. Électuaire laxatif et purgatif, dont on faisait autrefois un grand usage contre les obstructions et pour provoquer les menstrues chez les femmes : Le pauvre homme s’efforça tant, qu’il fienta dans le lit plus que six ladres constipés ne feraient par un clystère enforcé de quadruple dose de bénédicte. (Bér. de Verv.)

BENEDICTI, médecin italien. V. Benedetti.

BÉNÉDICTIE s. f. (bé-né-di-kti de Bénédict prénom du savant de Saussure). Bot. Syn. de saussurée.

BÉNÉDICTIN, INE s. (bé-né-di-ktain — du n. pr. lat. Benedictus, Benoît). Hist. relig. Religieux, religieuse de l’ordre de Saint-Benoît : Les bénédictines prétendent qu’elles sont averties de l’approche de leur mort par quelque bruit nocturne, qu’elles appellent les coups de saint Benoit. (Volt.)

— Par ext. Un homme érudit d’une science profonde et solide : C’est un véritable bénédictin. Les encyclopédistes ont été surnommés, avec raison les bénédictins du xviiie siècle. || Peut avoir un complément et désigne alors un spécialiste de premier ordre Son appel a été entendu par les bénédictins du pinceau. (Moniteur.)

— Adjectiv. Qui a rapport à l’ordre des bénédictins Annales bénédictines. Il était ignorant et superficiel sur toute chose, mais il devenait d’une érudition bénédictine quand il s’agissait de la science de sa maison (Balz.)

Encycl. Ce fut saint Benoît qui créa l’ordre religieux des bénédictins, et qui établit ses premiers disciples dans un monastère qu’il fit élever, à cet effet, sur le mont Cassin, en Italie. C’étaient de simples laïques, qu’il groupa en communauté et pour lesquels il institua spécialement une règle de conduite, qui fut plus tard adoptée par un certain nombre d’ordres du même genre, et qu’on désigna sous le nom de règle de Saint-Benoit. Elle avait pour principales bases d’excellents principes, puisqu’elle reposait sur la pratique de l’amour de Dieu, du travail et du silence, et l’observation de cette règle était rigoureusement exigée, à ce point, que si un des religieux y contrevenait, il était d’abord officieusement rappelé à l’ordre, et, en cas de récidive, réprimandé publiquement, puis excommunié, c’est-à-dire mis à une sorte de secret, enfin soumis aux peines corporelles ; et, lorsque toutes ces pénalités avaient été impuissantes à corriger le coupable, on le chassait du monastère.

Saint Benoît avait voulu que la vie monastique fût accessible à tous ; aussi, jeunes et vieux, riches ou pauvres nobles ou roturiers pouvaient-ils demander leur admission dans l’ordre, en prenant l’engagement de se soumettre aux prescriptions du règlement. La réception se faisait d’une façon assez bizarre : lorsqu’un postulant se présentait, on commençait par le laisser frapper à la porte pendant quatre ou cinq jours, et chaque fois on le repoussait au dehors ; puis, cette première épreuve subie, on l’introduisait dans la maison au bout de deux mois, on lui lisait la règle, on lui en faisait une seconde lecture six mois après, puis une troisième au bout de quatre mois, et enfin il était reçu, après avoir eu de la sorte une année, pendant le cours de laquelle il lui avait été loisible de réfléchir avant de s’engager d’une manière définitive. Au reste, tout avait été parfaitement prévu et défini par saint Benoît dans la règle qu’il imposait à ses religieux, et elle est remarquable par la sagesse de ses prescriptions ; elle ne demandait ni jeûnes outrés, ni abstinence, ni pratiques ridicules et superstitieuses, aussi contraires à la véritable religion que le sont celles d’une vie dissolue ; l’hygiène, la sobriété, l’amour du travail, tels sont les points fondamentaux de cette règle, qui devrait être celle de toutes les communautés. « Chacun, y était-il dit, a le don et la grâce particulière qu’il a reçus de Dieu, l’un d’une manière, l’autre d’une autre, et c’est pourquoi nous avons quelque scrupule et quelque peine à régler le vivre d’autrui ; toutefois, ayant égard à la faiblesse des infirmes, nous croyons qu’une hémine de vin (un quart de litre) par jour suffira à chacun. S’il s’en trouve à qui Dieu donne la grâce et la force de s’en abstenir entièrement, qu’ils s’assurent d’en recevoir une récompense particulière. Mais si la nécessité du lieu, ou le travail, ou l’ardente chaleur de l’été, demandent qu’on augmente cette mesure, le supérieur pourra le faire s’il le trouve bon, pourvu qu’il prenne bien garde que la gourmandise ou l’ivrognerie ne s’y glissent. »

Et plus loin : « L’oisiveté est l’ennemie de l’âme c’est pourquoi les religieux doivent s’occuper durant quelque temps aux ouvrages des mains, et durant certaines heures à la lecture des saints livres. Et que l’on ait un soin particulier de choisir un ou deux des anciens pour faire la revue du monastère, aux heures où les frères s’occupent à la lecture, et prendre garde s’il ne se trouve point quelque lâche et paresseux qui soit oisif et s’amuse à badiner au lieu de s’appliquer à lire, et qui non-seulement perde le temps à ne rien faire, mais le veuille faire perdre aux autres en les détournant de leur ouvrage… Quant aux frères faibles et délicats, qu’on leur ordonne un ouvrage ou un métier qui soit proportionné à leurs forces, et qui leur fasse éviter l’oisiveté, de peur que, s’ils étaient accablés par la violence du travail, ils ne se portassent à tout quitter et à s’enfuir. En quoi l’abbé doit aviser, en réglant leurs exercices selon la faiblesse de leur corps. Nous avons dressé cette règle, dit enfin le dernier chapitre, afin que, la pratiquant dans les monastères, nous témoignions qu’il y a parmi nous quelque honnêteté de vie et quelque commencement de vertu religieuse. » Quoi de plus digne et de plus sage que ce langage ! Il y eut encore, dans la constitution de l’ordre des bénédictins, un point essentiel qu’il est bon de signaler : ce fut celui qui était relatif à la propriété ; les moines conservaient ce principe vital de toute société mais cette propriété, d’individuelle qu’elle était, devint commune. « L’un des principaux désordres qu’il faut retrancher du monastère, jusqu’aux plus petites racines, est qu’aucun religieux ne prenne la hardiesse de donner ou de recevoir quoi que ce soit sans l’ordre de l’abbé et n’ait rien en propre, ni livres, ni tablettes, ni stylet, en un mot rien du tout, puisqu’il ne leur est pas permis d’avoir en leur propre puissance ni leur corps ni leur volonté… Que toutes choses ainsi soient communes à tous, afin que, selon le témoignage du Saint-Esprit dans les Actes, nul ne s’attribue rien comme étant à soi propre. Et si l’on reconnaît que quelque religieux soit porté à ce détestable vice, qu’il en soit repris une ou deux fois, et s’il ne se corrige pas, qu’il en soit châtié. » Il était formellement défendu aux religieux de rien donner ou recevoir du dehors, et dès qu’un postulant était admis à se faire moine, il devait donner tout ce qu’il possédait aux pauvres ou au monastère.

Fondé vers 528, l’ordre des bénédictins ne fut d’abord qu’une institution de plus parmi toutes celles du même genre qui existaient ; mais saint Benoit, dans sa vie monastique, lui donna un caractère tout particulier ; déjà saint Martin dans les Gaules, Cassien à Marseille, saint Honorat à Lerins, saint Isidore, saint Colomban et d’autres avaient établi des communautés religieuses mais aucune d’elles ne possédait en soi une cause de progrès semblable à celle que la volonté de son fondateur avait introduite dans son principe, celle de l’aptitude à tout travail. « Il offrait, dit M. J. Leroux, aux papes, aux évêques et aux rois, un instrument plus souple et plus capable de remplir le but civilisateur qu’ils poursuivaient, qu’aucun autre ordre monastique. » Il devint vite célèbre ; en 534, un des principaux disciples de saint Benoît, saint Placide, alla établir des religieux de son ordre en Sicile, et, en 543, un autre, saint Maur, vint en France, accompagné de quatre religieux, bâtir un monastère dans la province d’Anjou. Bientôt il y eut des bénédictins chez toutes les nations en Angleterre, où ils s’établirent en 596 ; en Espagne, où on les voit fixés en 690 ; en Allemagne, où fut fondée en 744 la célèbre abbaye de Fulde, etc.

En France, pays de l’aumône et de la charité, les bénédictins acquirent de grands biens aussi couvrirent-ils le royaume de monastères mais dès que la richesse fut venue, la discipline se relâcha, et, préoccupés sans cesse du désir d’accroître leurs domaines et d’acquérir une grande influence, ils délaissèrent peu’à peu le soin des choses spirituelles pour’se consacrer trop aux temporelles ; c’en était fait de la fameuse règle de saint Benoît, qui leur interdisait formellement de mettre le pied hors du monastère, de se nourrir de viandes, etc. les bénédictins des viie et viiie siècles avaient changé tout cela ; la vie facile, agréable, oisive dans laquelle la pratique de l’abstinence et de la chasteté n’entrait pour rien, était devenue celle des membres de l’ordre, qui attirèrent sur eux l’attention de l’autorité royale. Louis le Débonnaire fit assembler un concile en 817, et une réforme sévère y fut votée et notifiée aux bénédictins, qui, pendant un certain laps de temps, parurent s’amender ; mais ce ne fut qu’une espérance, et ils ne tardèrent pas à se signaler de nouveau par un relâchement de mœurs qui était tout à fait en désaccord avec le but de l’institution. En 927, une nouvelle réforme eut lieu sur l’initiative prise par l’abbé de Cluny, saint Odon, qui forma une sorte de séparation entre les religieux une partie d’entre eux se rangèrent sous son obéissance et prirent le nom de Bénédictins de Cluny ; saint Odon fut reconnu pour supérieur général de l’ordre ; peu à peu les autres adoptèrent, à quelques exceptions près, la règle de ce réformateur, et l’ordre y gagna considérablement en puissance et en réputation, puisque, en 1157, il comptait environ deux mille maisons tant en France qu’à l’étranger.

Mais un fait à remarquer dans l’histoire de toutes les communautés religieuses, c’est que toujours la prospérité fut chez elles le signal d’une prochaine décadence de nombreux écarts furent encore signalés dans les différents monastères et une scission nouvelle s’opéra. Le fondateur de l’abbaye de Cîteaux fit adopter la règle de son ordre chez les bénédictins ; mais une partie de ceux-ci refusèrent de s’y soumettre, et se retirèrent à l’effet de se constituer en un ordre indépendant, qui devint celui des bernardins, du nom de Bernard, leur chef.

Les choses allèrent ainsi pendant plusieurs siècles ; mais le temps avait marché, les mœurs n’étaient plus les mêmes ; il fallut derechef apporter des modifications dans les conditions réglementaires des bénédictins, et elles furent édictées par le concile de Trente. Ce fut le prieur de l’abbaye de Cluny qui fut, en 1621, le principal instigateur de cette nouvelle réorganisation. Toutes les communautés qui l’adoptèrent prirent alors le nom de bénédictins de Saint-Maur, du nom d’une congrégation qui devint maison-mère, et qui dut son origine au vœu exprimé par le clergé de France, aux états de 1614, de voir importée en ce royaume la réforme naissante du monastère de Saint-Vanne en Lorraine. En 1618, l’abbé de Saint-Vanne, reconnaissant l’impossibilité de rattacher les différents monastères à la réforme, jugea utile de solliciter auprès du roi l’érection d’une congrégation nouvelle, placée hors de sa dépendance et dans laquelle viendraient s’affilier toutes les communautés réformées. Telle fut l’origine de cette fameuse congrégation de Saint-Maur, qui obtint du roi Louis XIII des lettres patentes constitutives, datées d’août 1618, et dont l’existence fut solennellement reconnue et confirmée en cour de Rome, le 17 mai 1621. Elle devait bientôt s’acquérir une réputation destinée à traverser les siècles. En effet, ce furent les bénédictins de Saint-Maur qui eurent le glorieux honneur de faire oublier tous les motifs de plaintes qu’on avait formulés contre les bénédictins en général, et ils se montrèrent aussi studieux, aussi passionnés pour la science et les lettres, qu’ils avaient jusqu’alors été oisifs et inutiles, et le couvent cessa de servir de refuge à des hommes faibles et ignorants, pour devenir un asile de savants, qui se donnèrent la mission d’apporter des pierres monumentales au grand œuvre de l’instruction universelle.

Les immenses travaux des bénédictins de Saint-Maur ont rendu d’éminents services à l’Église, aux sciences, aux lettres, à l’agriculture ils ont tout embrassé et tout traité avec une grande supériorité d’intelligence. Certes, il ne faut pas chercher, dans les gigantesques monuments littéraires qu’ils ont élevés, le souffle d’un esprit libéral ; toutefois, loin de consacrer leur plume d’une façon exclusive à la défense du catholicisme, on les voit, pionniers hardis, s’élancer les premiers dans le domaine de l’inconnu pour tâcher d’y faire la lumière. Ils étudièrent beaucoup, et les fruits de leurs études furent d’excellents livres ; ils ont particulièrement laissé de nombreux ouvrages sur l’histoire de France. Savants, modestes et laborieux, ils furent les auteurs de la Gaule chrétienne, des Actes des Saints, de la Collection des historiens de France, etc., etc. ; la Bibliothèque historique et critique des auteurs de la congrégation de Saint-Maur fut publiée par les soins de Jean Leclerc, en 1726. On trouve encore une nomenclature des nombreux ouvrages de ces religieux dans une notice sur les ouvrages et la vie des écrivains de la congrégation du Mont-Cassin, par dom M. Armellini, qui fut publiée de 1731 à 1734, et forma quatre volumes in-fol. ; enfin, dom François fit paraître, en 1778, la bibliothèque générale des écrivains de l’ordre de Saint-Benoît, qui forma aussi quatre gros volumes in-folio.

L’importance de ces catalogues montre ce que fut l’œuvre des bénédictins au reste, ils se rendirent si célèbres par leurs publications, qu’aujourd’hui encore, lorsqu’on veut qualifier quelque grand ouvrage encyclopédique ou d’une longue et difficile composition, on dit que c’est un travail de bénédictin.

Ce fut dans cette fameuse abbaye de Saint-Maur-les-Fossés que Rabelais qui fut bénédictin, écrivit son Pantagruel. On montra la chambre qu’il y avait occupée, pendant plus de cent ans après sa mort.

Des hommes dont le nom est resté comme synonyme d’un haut degré de savoir ont appartenu à l’ordre des bénédictins Mabillon, qui se fit remarquer par la vaste érudition qu’il montra dans ses livres d’histoire et de diplomatique, fut un des plus illustres parmi les moines bénédictins de la congrégation de Saint-Maur ; la belle édition de Saint Bernard, les neuf volumes des Actes des saints de l’ordre de Saint-Bernard, les quatre volumes d’Analectes, contenant des pièces inédites et ramassées à grand’peine dans les abbayes bénédictines d’Allemagne, de France et d’Italie, les Annales de saint Benoit, qui demandèrent à Mabillon neuf années d’un travail soutenu avant qu’une ligne en fût imprimée, sont là pour attester la science profonde de ce savant religieux, dont l’émule, d’Achéry, exerça une puissante influence sur la direction des études au sein de la communauté, et sut encore atta-