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Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 3, part. 2, Caq-Cel.djvu/115

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saints offices, et un chapelain y était attaché, qui le suivait partout.

De tous les corrodas, le plus renommé et le plus connu était celui de Florence. Les Florentins avaient fait élever sur un char, qui était comme un second carroecio, une cloche qu’ils nommaient Martinella. S’ils voulaient déclarer la guerre à quelqu’un de leurs voisins, ils conduisaient le char aussi loin qu’ils le jugeaient convenable dans la direction du pays menacé, et sonnaient la Martinûlki un mois entier, jusqu’à ce que leurs adversaires avertis se fussent mis en défense, car ils n’admettaient ni la surprise ni la ruse parmi les moyens d’accroître leur gloire et leur puissance. Us avaient apporté dans la démocratie la plus ombrageuse toute la générosité, toute la courtoisie et tous les procédés de la chevalerie. Ce carrocia fut pris à la fameuse bataille de Monte-Aperti, livrée le 4 septembre 1260, par les Siennois aux Florentins. Celte journée vit la ruine du parti guelfe et de la démocratie florentine ; mais eue fut illustrée par maint acte de courage, et, entre autres, par le dévouement héroïque du chevalier Jean Passavanti, qui, après avoir vaillamment défendu le carroecio, voyantque toutespoir était perdu, excita son fils et ses autres compagnons à l’imiter, et se précipita avec eux au milieu des ennemis pour ne pas survivre à la ruine de sa patrie. Quand Castruccio Castracani rentra triomphalement à Lucques, en 1328, après sa victoire sur les Florentins, il traîna après lui les restes tronqués du fameux carroecio de Florence, avec lequel disparaissait la liberté oui avait fait si grandes ces républiques italiennes.

CARROCHIER s. m. (ka-ro-chié — de l’ital. carroecio, char). Conducteur de char, cocher. Il Vieux mot.

CARROFUM, nom ancien de Charroux.

CARROI s, m. (ka-roi — du ïat. carru ?, char). Chariot. [(Rue, chemin. [[ Vieux mot.

CAItBOLL (Charles), homme politique américain, un des signataires de la déclaration d’indépendance ries États-Unis- Il appartenait à l’Egiise romaine, et sa famille était originaire de l’Irlande. Il naquit à Annapolis, dans le Maryland, le 20 septembre 1737, fit ses études à Paris et à Bourges, et s« rendit à Londres en 1757. En 17C4, il retourna en Amérique, où il arriva au milieu des troubles causés par l’acte du timbre, et épousa chaudement les intérêts de sa colonie. Elu au congres en 1775, il signa, l’année suivante, la déclaration d indépendance. En 1778, il quitta le congrès pour aller reprendre sa place dans la législature de son État, et mourut à l’âge de quatre-vingt-seize ans, à Baltimore, le H novembre 1832, après avoir survécu de six ans aux derniers signataires de la déclaration d’indépendance.

CARROLLITE s. f. (ka-rol-li-te — de Carrait, nom de lieu). Miner. Sulfure de cobalt naturel, dans lequel une partie du cobalt est remplacée par du cuivre, et qui est une variété de coboldine trouvée dans le canton de Carroll, en Maryland, aux États-Unis.

CARRON s. m. (ka-ron). Forme ancienne

du mot CHARRON.

— Papet. Bon carron, Nom donné, dans la fabrication du papier à la main, à un des coins de la feuille, qui a été renforcé par l’ouvreur, c’est-à-dire sur lequel il a laissé un peu plus de matière, afin de faciliter l’opération du leveur. C’est ordinairement le coin que l’ouvreur a sur sa droite, a l’extrémité du grand côté de la forme le plus éloigné de lui, quand il tient celle-ci dans une position horizontale. Il On l’appelle aussi bon coin ou

DONNE CORNIÈRE.

CARRON. village d’Écosse, comté de Stirling, à 3 kilom. N.-E. de Falkirk, sur la petite rivière de Carron, près de son embouchure dans le Forth ; 3,000 hab. Cette localité est célèbre par ses usines à fer, les plus belles d’Écosse. Pendant les dernières guerres continentales, ces usines ont fourni annuellement 5,000 canons ; elles occupent encore 2,000 ouvriers et consomment jusqu’à 200,000 kilogr. de houille par jour. Un canal navigable unit ce magnifique établissement avec le port de Grangemouth.

CARRON (Gui-Toussaint-Julien), ecclésiastique, moraliste, né à Rennes en 1760, mort à Paris en 1821. Sa vie tout entière fut consacrée à des œuvres de philanthropie. Dès son enfance, il s’était voué à l’enseignement des pauvres dans sa ville natale. Plus tard, il y fonda des ateliers de charité où plus de 2,000 ouvriers des deux sexes trouvèrent a s’employer. Pendant la Révolution, il crut devoir refuser le serment à la constitution civile du clergé, fut déporté à. Jersey en 1792, fonda dans cette île des écoles, une bibliothèque, une pharmacie et divers autres établissements pour les émigrés. Etabli à Londres de 1796 k 1814, il exerça une charité active par de nouvelles fondations, dont quelques-unes subsistent encore aujourd’hui. Il rentra eu France après la Restauration et établit l’institut royal de Marie-Thérèse, à Paria, pour l’éducation des jeunes orphelines que la Révolution avait frappées dans leur famille et dans leur fortune. Au milieu de tant de travaux, il trouvait encore le temps de composer un grand nombre d’ouvrages de piété et de morale, qui n’ont sans doute pas une haute valeur littéraire, mais qui témoignent de son ardente

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hilanthropie, ainsi que dé*- la noblesse et de a bonté de son cœur. Son plus important ouvrage a pour titre : les Confesseurs de la foi dans l’Egiise gallicane à la fin du xvme siècle (Paris, 1820, 4 vol.in-8°). — Son neveu, Philippe-Marie-Thérôse-Gui Carron, né à Rennes

en 1788, mort en 1833, fut nommé évêque du Mans en 1829, et fonda dans cette ville l’établissement des dames carmélites et celui du Bon-Pasteur.

CARROSSABLE adj. (ka-ro-sa-ble — rad. carrosser). Que les carrosses peuvent parcourir : Chemin carrossable. Boute carrossable. Rues carrossables. Un pont sera jeté sur tes ruines du vieux pont turc, et dès lors Alger sera en communication carrossable avec le centre de l’intéressante vallée de Visser. (Courrier franc.)

CARROSSE s. m. (ka-ro-se —de l’ital. carrozza, dérivé de carro, char ; formé du lat. carruca, espèce de char. Le français a été féminin comme l’italien). Voiture à quatre roues, suspendue et couverte : La salle du palais retentit, quand nous sortîmes, des acclamations accoutumées, et j’eus ce jour-là trois cents carrosses chez moi, ou je n’en eus pas un. (Card. de Retz.) Il n’y a point si vile condition où les avantages ne soient plus sûrs, plus prompts et plus solides que dans les lettres et les sciences ; le comédien, couché dans son carrosse, jette de la boue au visage de Corneille qui est à pied. (La Bruy.) Tu te trompes si, avec ce CARROSSE brillant, ce grand nombre de coquins qui te suivent et ces six bêtes qui te traînent, tu penses que l’on t’en eslime davantage. (La Bruy.) Un prince ira-t-il se faire cocher parce qu’il mène bien un carrosse ? (J.-J. Rouss.) Christophe de Thou, ■ père de l historien, est le premier citoyen de | Paris qui ait fait faire un carrosse ; mais il l’enfermait soigneusement chez lui, comme toi produit curieux d’une nouvelle industrie. (Ph. I Chasles.)

On ne parlait chez lui que par doubles ducats, Et mon homme d’avoir chiens, chevaux et carrosses ; Ses jours déjeune étaient des noces.

! La Fontaine.

Carrosse de voiture ou simplement carrosse, S’est dit autrefois pour Voiture publique, coche, diligence : Un carrosse de voiture qui allait à Bordeaux fut, dans la route, attaqué par des voleurs. (Mariv.) Je suis venu par le carrosse de Bordeaux. (Regnard.)

— Fam. Cheval de carrosse, Homme grossier, brutal ou stupide : Comment, grand cheval de carrosse 1 (Mol.) Il est vrai que cela est écrit du style d’un cheval de carrosse. (Volt.) D Bouler, faire rouler carrosse, aller en carrosse, Vivre dans l’opulence, mener une vie fastueuse : Tel que tu me vois, j’Ai fait rouler pendant cinq ou six ans un fort bon carrosse à Paris. (Danc.) C’était un fameux homme, celui-là ! si j’avais connu son secret contre ta goutte, nous roulerions tous deux carrosse aujourd’hui. (Balz.) Un cardinal,

; mollement étendu dans un carrosse, rencontre
; un religieux monté sur une maigre haridelle.

• Depuis quand, lui demande l’éminence, les religieux vont-ils à cheval ?Monseigneur, c’est depuis que saint Pierre a roulé carrosse. »

En carrosse don ! vous iries par les rues !

Molière.

J’ai, si je veux, de quoi

Faire aller un carrosse et rouler à mon aise.

Beonaed,

— Mar. Partie de l’avant d’une galerie où était le siège du commandant, ainsi appelée à cause de la forme primitive de la tente ou pavillon qui la recouvrait. IlSorte.de logement établi à l’arrière sur le pont et complètement isolé de la muraille : La teugue est un grand carrosse, et le carrosse est un grand rouf. Les anciens carrosses avaient quelque analogie de forme avec les voitures de même nom.

— Pêch. Petit parc très-bas dont le dessus est recouvert d’un filet.

— Techn. Instrument employé au commettage des cordes, et qui sert a porter le toupin ou couchoir.

— Rem. Le mot carrosse s’étant primitivement appliqué aux voitures suspendues, qui toutes alors avaient quatre roues, tend aujourd’hui à disparaître de la langue, depuis que l’on a fait des voitures suspendues à deux roues, qui ont pris des noms spéciaux, et des espèces diverses de voitures à quatre roues qu’il a fallu également désigner par des noms distincts, comme calèches, coupés, etc. Comme terme générique, on lui préfère le mot voiture : Les voitures, et non tes carrosses de la cour.

— Encycl. Entre les élégants carrosses modernes et le char traîné par des bœufs dans lequel se promenaient les rois de la première race, il y a un abîme. « On ne sait guère, dit Sauvai, quelle sorte de voiture c’était que ce carpentum dont parle Egmhard, attelé de quatre bœufs et conduit par un gros bouvier de village, où d’ordinaire nos derniers rois de la première race se faisaient traîner, une i fois l’an, lorsqu’ils allaient se montrer à i leurs peuples et recevoir leurs présent ; ! ; car ! on ne peut pas dire si c’était ou carriole, ou I manière de tombereau, ou charrette. « Quoi j qu’il en soit, l’usage des carrosses ne date que du xvis siècle ; jusqu’à ce moment, les nom- : mes se servirent uniquement du cheval, les [

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dames des litières, des mules et des palefrois. En 1389, lorsque Isabeau de Bavière fit son entrée à Paris, ce fut dans une litière découverte rehaussée d’or et de broderie ; l’es dames de sa suite étaient soit dans des litières, soit sur des palefrois. Les dames qui se rendaient aux tournois y allaient soit sur des palefrois, que deux palefreniers conduisaient par la bride. soit a cheval montées en croupe derrière leurs écuyers. Aux tournois qui furent faits à Paris Sous Charles VI, elles parurent ainsi, montées en croupe derrière les tenants qu’elles conduisaient de cette sorte jusqu’à dans la lice. Cet usage d’aller en croupe était d’ailleurs général’, aussi bien pour les hommes que pour les femmes. On lit dans les chroniques du xive siècle, que Charles VI, voulant voir sans être vu les appareils de l’entrée de la reine, monta en croupe derrière Savoisy, qui était un de ses favoris, et qu’il revint de son excursion chargé de coups qu’il avait reçus en poussant son cheval dans la foule pour s’ouvrir un passage. En M18, lorsque le connétable d’Armagnac alla en prison, on le fit monter en croupe derrière le prévôt de Paris ; et, en 1524, Saint-Vallier, conduit à la Grève pour y avoir la tête tranchée, était monté sur une mule ayant un huissier en croupe derrière lui, La mule était la monture des gens paisibles, des abbés, des évêques, des magistrats ; c’était toujours sur une mule que les légats faisaient leur entrée à Paris ; c’était sur cette monture que les conseillers et les présidents venaientau Palais-de-Justice, moins encore par crainte de la fatigue, que pour échapper aux amas de boue qui remplissaient les rues non encore pavées. Pour monter dessus, ils trouvaient, soit dans la cour du palais, soit à leur porte, des montoirs en pierre, comme ceux qui existaient autrefois sur les voies romaines et dont on retrouve encore quelques-uns à Pompéi.

Malgré l’invention des carrosses, l’usage du cheval, de la mule ou de !a haquenée persista encore longtemps. Henri IV se promenait souvent à cheval par la ville, et c’est un jour qu’il passait ainsi sur le Pont-Neuf qu’un insensé, nommé Jean del’Isle, se jetasurlm pour l’assassiner ; le roi ne se débarrassa de lui qu’en piquant son cheval et en prenant la t fuite. Le lieutenant civil, le lieutenant crimi-I nel, le procureur du roi continuèrent pendant longtemps à se montrer dans les cérémonies publiques montés sur des mules ; et quand, à la fin du xvne siècle, le lieutenant civil d’Aubray abolit cette coutume, nombre de gens en furent scandalisés. Les femmes elles-mêmes (qui le croirait ?) n’adoptèrent pas l’usage du carrosse sans hésitation et ne renoncèrent pas du premier jour k leurs haquenées. À l’entrée solennelle de Louis XIV à Paris, on fît figurer les haquenées de la reine ; elles étaient blanches et couvertes de harnais étincelants d’or et d’argent. « J’ai appris de la vieille Mme Pilou, dit Sauvai, qu’il n’y a point eu de carrosses à Paris avant la fin de la Ligue. La première personne qui en eut était une femme de sa connaissance et sa voisine, fille d’un riche apothicaire de la rue Saint-Antoine, nommé Favereau. De dire comment était fait son carrosse, c’est ce que la même dame ne m’a pas dit ; elle se souvenait seulement qu’il était suspendu avec des cordes ou des courroies, qu on y montait avec une échelle de fer, et qu’enfin il ne ressemblait presque point a ceux d’à présent ; que tant qu’il parut nouveau, les enfants et le petit peuple couraient après, et souvent avec des huées. Pour aller par la ville, elle y faisait atteler deux chevaux, et quatre lorsqu’elle allait à la campagne ; et même il n’y en avait pas davantage au carrosse de Henri le Grand quand il alla à Saint-Germain avec la reine, et que ses chevaux, faute d’avoir été abreuvés, l’entraînèrent dans l’eau au pont de Neuilly ; ce qui l’obligea, en suite d’un tel accident, quand il sortait de la ville, d’en faire mettre sis, avec un postillon sur un des premiers, afin de les retenir en pareille ou semblable rencontre. En quoi aussitôt il fut imité par les grands seigneurs. »

Le duc de Roannez obtint de Colbert, en 1650, le privilège d’établir dans Paris des carrosses publics, dont le prix de la course serait fixé à cinq sols par personne, à condition toutefois qu’on n’y recevrait aucun page, soldat, laquais ni homme de métier. Bientôt la ville consentit à habiller les cochers de ses livrées et a y faire peindre ses armes. L’entreprise dut sa réussite à une circonstance heureuse. Un jour que le monarque se trouvait à Saint-Germain et qu’il se sentait en belle humeur, ce qui ne lui arrivait pas toujours, il fit monter Mme de Montespan dans un de ces carrosses de louage, puis, grimpant sur le siège du cocher, il saisit de ses mains royales les guides de cuir, et exécuta avec assez d’habileté le trajet du vieux château au palais de la reine mère. Il n’en fallut pas davantage pour que la cour et la ville raffolassent de ces carroses, dont on ne put plus se passer ; on ne se servit plus que de voitures publiques, et le duc d’Enghien, pour mieux faire sa cour, imagina de suivre l’exemple du roi et de traverser tout Paris en faisant l’office de cocher ; malheureusement l’équipage, qu’il menait a grande vitesse, fut heurté par un camion chargé de pierres, et le prince alla rouler de son siège dans le ruisseau. Mais ce léger échec ne nuisit en aucune façon k la vogue des carrosses ; le public seul y perdit, puisque, à la suite de l’événement, le prix de la

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course fut élevé d’an sol par individu. Grâce à la faveur croissante qui s attachait h, ces voitures, les entrepreneurs gagnèrent cinquante mille livres de rente. Bientôt il ne leur fut plus possible de répondre au besoin de carrosses k la course, et des privilèges furent accordés aux sieurs Manse et Francine, pour établir de nouveaux carrosses publics. Ce que voyant, le duc de Roannez céda son établissement à un particulier qui en transporta le siège principal rue Saint-Antoine, dans une maison à l’enseigne du Grand saint Fiacre. Mais celui-ci ne se piqua pas de donner une

frande élégance à ses voitures ; c’étaient, it Richelet, « de méchants petits carrosses à cinq sols qu’on appelle plus ordinairement fiacres, » et un poëte, Nicolas Damesme (ces sortes de gens ne respectent rien), fit, en 1652, une assez piètre description de ces voitures :

C’était pour avoir des corrossej.

Où l’on attelle chevaux rosses,

Dont les cuirs, tout rapetassés,

Vilains, crasseux et mal passas,

Représentaient le simulacre

De l’ancienne voiture à Fiacre,

Qui fut le premier du nrdtïer.

Qui louait carrosse au quartier

De monsieur Saint-Thomas du Louvre.

Ce Fiacré avait en effet tenu des carrosses, concurrencent avec le duc de Roannez, avant de lui acheter son privilège. Les deux maisons n’en firent bientôt qu’une, et, à partir de ce moment, les carrosses de louage devinrent d’un usage journalier. Fiacres, cabriolets, vinaitrettes, brouettes, ce fut sous ces diverses énominations qu’ils se multiplièrent à l’infini. En 1657, M. de Givry avait aussi obtenu le privilège de faire stationner dans les carrefours, lieux publics de la ville et faubourgs de Paris, tel nombre de carrosses, calèches et chariots attelés de deux chevaux chacun qu’il jugerait à propos, et ce, depuis sept heures du matin jusqu’à sept heures du soir, pour le service de la ville et celui de la banlieue.

En 1664, on fit des carrosses traînés par un seul cheval, qu’on nomma carrosses à calèche ; ils contenaient quatre places, qui se payaient à raison de dix sols chacune. Ce fut à cette époque que l’on régla définitivement le prix de tous les carrosses h l’heure ; il fut fixé à vingt sous pour la première heure et à quinze pour la seconde. En 1606, ce prix fut augmenté : la première heure fut portée à vingt-cinq sous et les suivantes à vingt. On régla en même temps, dit l’auteur des Inventions et découvertes, le service des cochers do place et tout ce qui concernait la solidité dos voitures. En 1698, on enjoignit aux loueurs de carrosses d’apposer sur le derrière de leurs voitures des numéros avec de grands chiffres peints en jaune et à l’huile, de manière qu’ils pussent être distingués de fort loin.

Le nombre des carrosses s’était, nécessairement accru avec la population. Du temps de Henri IV, il était de 325 ; sous Louis XV, il s’était élevé à près de 15,000. Jusqu’à la Révolution de 1789, on donna indistinctement le nom de carrosses à tous les équipages destinés à la locomotion des individus. À cette époque, la carrosserie française n’existait pour ainsi dire pas : on ne parlait que des carrosses de Bruxelles, pour leur solidité ; de ceux d’Allemagne, pour leur légèreté, et de ceux d’Angleterre, pour le luxe, l’élégance et le confortable qu’ils offraient. L’acier manquait en France, tandis que l’Allemagne avait ses aciers naturels et ses étoffes, comme l’Angleterre ses aciers aimantés et ses cuirs. Ce fut là le premier obstacle qui s’opposa au perfectionnement de la fabrication des carrosses chez nous.

Les carrosses de cérémonie, ceux qui servaient pour le sacre des rois, pour les ambassadeurs des divers pays, fuient toujours des objets de grand luxe. Le carrosse du sacre de Charles X est au nombre des curiosités du musée de Versailles. Le passage suivant du Journal de Barbier montre quel luxe on déployait dans ces voitures d’apparat. ■ On fait ici des carrosses superbes pour l’entrée du duc de Nivernais, ambassadeur de France, dans la ville de Rome. Ces earrosses ont été placés dans une grande loge de planches que l’on a construite dans la cour du Carrousel, vis-àvis le Louvre, pour les laisser voir au publie, Il y a trois earrosses ; mais surtout les deux premiers sont de la dernière magnificence. Ils sont d’alWd d’une grandeur considérable ; la caisse, parfaitement sculptée et dorée, aussi bien que les roues ; les panneaux, d’une très-belle peinture ; les mains de ressort et boucles de soupente, travaillées au mieux et dorées en or moulu. L’un, en dedans, est garni d’un velours cramoisi tout relevé en bosses d’or et d’une très-belle broderie, avec les galons et les franges ; l’autre est tout en bleu et or, caisse et train, velours bleu tout brodé d’or. On dit qu’on n’en a point vu d’aussi grand goût. Aussi a-t-on mené les deux beaux carrosses, bien couverts, à Choisy, dans le dernier voyage du roi, pour les lui faire voir, et on doit les embarquer incessamment pour les envoyer à Rome. » Les ambassadeurs s’étaient toujours distingués par le nombre et le luxe de leur équipage. Au siècle dernier, le duc de Richelieu étonna la ville de Vienne par sa magnificence, et lorsque de Brèves, ambassadeur de Henri IV k Rome, voulut avoir son audience du saint-père, il lui fallut louer cent cinquante carrosses pour sa suite, afin de ne