Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 3, part. 3, Cem-Chan.djvu/235

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Ce petit mètre alerte et sautillant fut bientôt dans toutes les bouches hérétiques ; la Chanson de la messe devint une sorte de ronde populaire parmi les réformés ; les soldats le répétaient en fourbissant leurs armes, les enfants en dansant et en se tenant par la main. Les têtes blondes s’agitaient folles et souriantes, et le lendemain les pères s’égorgeaient en chantant Hari, hari l’âne ! Un seul de ces couplets fît peut-être à la messe plus d’ennemis que nombre de sermons et de traités théologiques. Nulle raillerie ne blessa plus vivement les catholiques ; ils y répondirent par la Chanson de Marcel, la veille de la Saint-Barthélemy.


Chansons des étudiants, en allemand Studentenlieder, chants légendaires des universités d’au delà du Rhin. « La plupart de ces pièces, dit M. N. Martin, ont été faites un peu par tout le monde, car on en ignore les auteurs ; d’autres sont signées de noms depuis longtemps consacrés ; d’autres enfin sont dues à des poètes modernes demeurés fidèles aux mœurs comme aux traditions du passé. L’amour, le vin et les chants y occupent naturellement la première place… Ces poëtes ont chanté le vin avec une sorte de frémissement religieux que nos Collé, nos Panard et nos Désaugiers n ont pas connu. Le vin leur inspire des odes, à nous des flonflons. »

Les plus remarquables de ces pièces, d’après lesquelles on peut se faire une idée assez nette des Chansons des étudiants, sont : le dithyrambe de Mathias Claudius en l’honneur des vignes rhénanes ; le lied de W. Millier, intitulé Fraternité, morceau d’un art consommé ; une chanson de Binzer, l’Étudiant est libre, qui est la charte de l’étudiant allemand ; Voyager, Séparation, l’Anneau brisé ; enfin les chants belliqueux qui valurent une armée à la cause de l’indépendance germanique.


Chansons de Hugues Guérin, dit Gaultier Garguille, publiées en 1634. Lors de la publication de ses chansons, l’auteur se défendit de toute vanité littéraire : la crainte qu’on ne fît passer sous son nom des compositions ordurières l’a seule engagé, dit-il, à se faire imprimer. Si le ton général de ses chansons est, en effet, très-leste, si les expressions affectent parfois une crudité cynique, Gaultier Garguille a le talent d’écarter les mots orduriers ; sa plaisanterie est, d’ordinaire, aussi convenable dans la forme qu’elle l’est peu dans le fond. En voici une preuve qu’il est inutile de commenter :

S’il y a quelqu’un aussi
Qui ait besoin de lunettes,
Je lui en réserve icy
Une paire de bien faittes.
Qu’il vienne les essayer,
Quitte pour n’en rien payer.
L’un après l’autre venez
Y apporter votre nez.

Gaultier Garguille n’attachait pas grand prix à ces enfants de sa muse, car il disait :

En bouffonnant j’ay fait ces vers,
    En bouffonnant je te les donne.
    Ce n’est qu’une rime bouffonne.
Mais j’ay mis aujourd’hui mon esprit à l’envers.

Ces chansons se recommandent cependant par plus d’un mérite, et leur auteur a bien gagné ses lettres de naturalisation dans le pays des joyeux drôles ou dans l’abbaye de Thélème. « Sa joie et sa gaieté, dit M. Demogeot, sont confites en rire et en bons mots. » On sent le gai compère ami des belles, de la bouteille, de la table et du joyeux savoir, comme il nous l’apprend lui-même :

Jamais n’eschet d’occasion
Que Gaultier Garguille n’empoigne,
Car c’est l’artisan mieux appris
Qui fut jamais mis en besoigne,
Au grand attelier de Cypris.

Et quelle verve dans le couplet suivant !

Dans le fond d’une écurie,
Un gros cocher amoureux
Peignit d’un ton langoureux
L’excès de sa forte envie :
Morgue ! si je la tenais.
Comme je l’étrille, trille.
Morgue ! si je la tenais,
Comme je l’étrillerais !

Parfois une leçon de morale se cache sous le rire. Filles, méfiez-vous des garçons ; ils sont tous volages ; écoutez Toinette :

Robin, si j’eusse bien pensé
Que tu fusses si tost lassé,
Je fusse encore pucelle, da !
Dame, ne vous déplaise, da,
Dame, ne vous déplaise !

Puis à côté vient se placer le couplet badin et le leste propos :

Moi, je voudrais bien estre
      Femme d’un menuisier ;
Ils ne font rien que cheviller
  Et fouiller dans la cassette
         Verduron, durette.

De nos jours, de pareilles chansons sembleraient hasardées ; mais il faut se reporter par la pensée à l’époque de Gaultier Garguille, et se souvenir que les seigneurs de la cour se pressaient pour entendre ses ponts-neufs, comme ils se disputèrent les places aux pièces de Molière. Le succès de ces chants s’explique surtout parce qu’ils protestaient alors au nom de la vieille gaieté gauloise contre le faux goût prétentieux et lourd qui envahissait le théâtre avec les tragi-comédies et le monde avec le précieuses.

Ces chansons, spirituelles et plaisantes, offrent presque tous les thèmes sur lesquels ont été brodés, de nos jours, les couplets que les écoliers se répètent en cachette. Elles ont été fort souvent imitées, comme le constate Wolf dans ses Chansons récréatives ; mais les pastiches qu’elles ont fait naître ont perdu leur saveur et sont tombés dans la grossièreté, à l’exception de quelques-uns, comme celui que cite M. Champfleury dans son Réalisme. On comprend que la pruderie de ce temps hypocrite ne nous permette pas de faire déguster à nos lecteurs le sel de certains couplets de Gaultier Garguille, digne précurseur de Collé et de Vadé.


Chansons de Coulanges, publiées en 1698. Homme du monde avant tout, renommé pour son esprit et ses succès, M. de Coulanges, dont Mme de Sévigné et Bussy-Rabutin font le plus grand éloge, s’avisa, malgré son titre de grand seigneur, de composer des chansons. Elles circulèrent dans le public, par l’indiscrétion de quelques amis, et l’on en publia un recueil plein de fautes. Chagriné de voir ainsi compromettre sa réputation de poëte, que d’ailleurs il n’avait nullement recherchée, M. de Coulanges fit paraître lui-même une édition de ses œuvres en tête de laquelle il s’annonçait ainsi au lecteur :

Manger et rire incessamment
  Est tout ce qui l’occupe ;
D’un solide raisonnement
  Il n’est jamais la dupe.
Il est sans chagrin, sans ennui
  Et rien ne l’importune :
Tout ce qu’il possède est à lui
  Et rien à la fortune.

Le recueil obtint un franc succès. L’auteur se distinguait par un esprit brillant et railleur. Le style était vraiment d’une admirable légèreté, tout à la fois poétique et énergique. On y reconnaissait un goût prononcé pour le genre lyrique. La majeure partie des pièces étaient plutôt de petites épîtres en dix, douze ou quatorze vers que des chansons. Quelques morceaux étaient des plus sérieux ; nous citerons comme exemples plusieurs fables de La Fontaine mises en chansons, idée ingénieuse reprise par M. Péan, l’un des secrétaires de l’Assemblée nationale de 1848. M. de Coulanges avait choisi le Héron, la Fille, le Coche et la Mouche. On a retenu les vers suivants de Coulanges, qui font allusion à l’inégalité des conditions :

D’Adam nous sommes tous enfants,
  La preuve en est connue,
Et que tous nos premiers parents
  Ont mené la charrue ;
Mais las de cultiver enfin
  La terre labourée,
L’un a dételé le matin,
  L’autre l’après-dinée.

Le trait est finement tourné, et la facture du couplet est des plus naturelles. M. de Coulanges est, en vérité, un habile versificateur, et l’on a lieu de croire que, s’il eût fait de l’art d’écrire une application plus essentielle et plus suivie, il serait au nombre de nos bons poëtes.


Chansons de Panard. Si, en 1750, on eût demandé à Panard quelques couplets, il eût répondu : « Fouillez dans la boîte à perruque. » Cette réponse, qu’il faisait parfois à ses éditeurs, était un trait de caractère, et prouve le peu d’importance qu’il attachait à ses œuvres. Et cependant, leur valeur est telle, qu’on a pu depuis imiter le vaudevilliste, mais qu’on ne Va jamais dépassé. Nous ne devons nous occuper ici que de ses chansons. On a souvent répété qu’on ne prête qu’aux riches ; on pourrait ajouter qu’une fois morts, leur fortune passe à des collatéraux. Que de fois n’a-t-on pas attribué à Béranger ce qui appartenait à son aïeul, quoiqu’il s en défendît ? Les donataires persistaient ; on est si généreux du bien d’autruil Dans les quatre volumes in-12 des œuvres complètes de Panard, les chansons ne tiennent qu’une petite place. Mais quelle gaieté 1 quelle rondeur ! Ni Désaugiers ni Béranger ne l’ont retrouvée : le premier est trop caricaturiste, l’autre trop penseur. C’est qu’aussi Panard est un croyant fervent de Bacchus, c’est qu’il a été son fidèle adorateur. Pourtant il n’oubliait pas l’Amour, car il admettait la pluralité des dieux et ce s’en cachait guère :

J’aime Bacchus, j’aime Manon, Tous deux partagent ma tendresse ; Tous deux ont troublé ma raison Par une aimable et douce ivresse. Ah ! qu’elle est belle 1 Ah ! qu’il est bon 1 C’est le refrain de ma chanson.

En général, ces chansons sont fort courtes et n’ont parfois qu’un couplet ; mais que do choses en si peu de mots ! quelle substance de doctrine 1 quelle force de raisonnement ! Tout passe, amis, tout passe sur la terre, Ce sont du ciel les ordres absolus :

Tel qui voit du vin dans mon verre, Dans un moment n’en verra plus.

Tous ces refrains sans prétention, nos plus ravissants glouglous, sont de Panard, et c’est à cette source qu’il faut s’enivrer de vraie gaieté française.


Chansons de P. Laujon (1771 à 1809). Ces chansons joyeuses, trop oubliées aujourd’hui.

CHAN

ont un tour vif et naturel. Comme Anuoréon, dont la vieillesse ressemble à la sienne, le poëte célèbre le vin, la table, les amours, les plaisirs. Fidèle au caractère national, Laujon n’a d’autre philosophie que d’égayer par ses joyeux couplets la cour et la ville. Collé dit dans ses Mémoires, si pleins d’épigrammes : Laujon est inépuisable ; il a fait des couplets charmants, délicats, agréables, et avec une profusion qui m’étonne toujours, J’ai surtout remarqué une chanson sur le printemps quim’a paru de la poésie la plus anacréontique ; c’est une petite idylle qui n’a pas sa pareille. • Un autre contemporain de Laujon, dont l’indulgence n’est pas non plus la principale qualité, Palissot, a écrit dans ses Mémoires : « On connaît de Laujon un grand nombre de chansons agréables, et qui pourraient rivaliser avec celles de Panard, de Collé et de Favart, avec lesquels il travailla souvent en société. II avait même si bien saisi leur manière, que, dans le genre de chacun d’eux, son nom peut être placé à côté du leur ; il est chansonnier enfin dans le même sens que celui que Mme de la Sablière attachait au nom de fablier qu’elle donnait à La Fontaine. • L’académicien Étienne s’exprimait à peu près dans les mêmes termes, en 1816, devant le successeur de Laujon : « Doué d’une imagination facile, il excellait dans l’à-propos ; mais il dédaignait ces triomphes que l’esprit obtient aux dépens du cœur. H n’a connu ni la haine ni l’envie, et la saillie, qui est si souvent l’arme de la médisance, ne fut jamais chez lui que l’éclair de la gaieté. Ami du plaisir, il respecta la décence ; chantre de l’Amour, il n’effaroucha point les Grâces… On reconnaît dans ses œuvres un esprit fin, un travail facile, une aimable négligence. On voit que l’auteur n’a pas besoin d attendre l’inspiration… Son talent flexible et varié saisit tous les caractères de la chanson, en fait ressortir toutes les nuances. »


Chansons de Dieulafoi, disséminées dans divers recueils de 1783 à 1822. Ces chansons, pour la plupart, sont badines ou politiques ; celles qui ont trait à la politique soutiennent avec ardeur le parti légitimiste et ont fait à leur auteur une certaine réputation. Les chansons proprement dites sont moins de gais refrains, des flonflons à la manière de Béranger, que des imitations du genre de Désaugiers. Une citation le prouvera. Dieula foi écrivait à la future d’un marchand de papier :

Hé quoi ! c’est vous que l’on marié, Chère Angéla ! c’en est donc fait ! Et c’est d’une papeterie Que l’Amour a lancé son trait 1 Demain, le fripon, je parie, À chacun dira volontiers Qu’il ne s’est jamais de sa vie Si bien tronvé dans ses papiers. L’Hymen, 6 ma pauvre Angélique, Est un dérangeur indiscret ; Dans votre petite boutique ÏI va fouiller comme un furet ; Mais, rassureï-vous, la nature. Avant qu’il soit dix mois entiers, Aura remis, je vous l’assure, L’ordre qu’il faut dans vos papiers.


Chansons de de Piis, publiées en 17S4, suivies des chants patriotiques imprimés en 179-L De Piis, auteur de vaudevilles amusants, avait encadré dans ses œuvres dramatiques quelques tableaux gracieux peints en vers charmants. Leur succès l’engagea à cultiver la Muse des chansons, mais il n’y réussit que faiblement. Les Vendangeurs, le Sabot perdu, les Amours d’été avaient assuré la vogue de ses pièces, et l’on fut étonné que l’auteur de ces jolies bluettes tombât dans la prolixité dès qu’il s’adonna à la chanson. Les épigrammes ne lui manquèrent pas : Di meliora Piis, disait l’un en parodiant Virgile ; un autre répondait par cette phrase du rituel ; Auge piis ingenium. Bah ! interrompait un troisième en faisant allusion à. Barré, le collaborateur de de Piis : < Dans ses œuvres il y a beaucoup à barrer. »

Néanmoins, plusieurs de ses chansons ne manquent pas de mérite ; nous citerons : le Quart d’heure de Rabelais ; le flot** de l’oreille ; Mis en demeure ou" les Mésaventures d’un amant trop heureuse, et une fantaisie sur les Premiers ballons :

Va-t’en voir s’il vole,

Jean, Va-t’en vo, ir s’il vole.

Une des plus originales est l’Homme marqué par hasard, dont le refrain renferme une pensée philosophique sous un jeu de mots : L’innocent a souvent bon dos Et paye alors pour le coupable. Bien que de Piis regardât la plaisanterie et le badinage comme son domaine : Serais-tu donc assez ingrate Pour sortir du genre léger ? Ton amour-propre en vain te natte, Tu ne peux que perdre 6. changer, sa Muse fit une excursion sur le terrain de la politique et publia des chansons patriotiques. Elle fut honnête et modérée, de talent comme d’opinion, se contentant de rimer les sentiments publics :

Il arrive souvent qu’au bois On va deux pour revenir trois,

Dit la chanson frivole ; Trois ordres s’étaient rassemblés, Un sage abbé les a mêlés, C’est ce qui nous console.

CHAIN yyy

Quelques-uns regrettent leurs rangs. Leurs croix, leurs titres, leurs rubans,

C’est ce qui les désole. Ne brillons plus, il en est temps, Que par les mœurs et les talents ;

C’est ce qui nous console.

Le style de de Piis est ordinairement correct et de bon aloi, parfois trop prosaïque, mais il n’est pas toujours dépourvu de verve ni d’entrain.


Chansons d’Armand Gouffé, publiées en

1802, sous le titre de Ballon d’essai. Elles sont pleines de verve et de saillie ; les vers sont abondants et faciles, la rime leste et pimpante. L’auteur, qu’on a surnommé le Panard du xix « siècle, est un véritable chansonnier, tel qu’on les aimait au temps du Consulat et de. 1 Empire. Loin d’ambitionner la gloire politique, Armand Gpulïé déclare que Tes inspirations de sa muse folâtre ne sont que des chansons de dessert auxquelles le cliquetis des verres doit servir d’accompagnement. Pour ceux qui ont connu Gouffé, il était curieux d’entendre ce buveur d’eau taciturne chanter : Plus on est de fous, plus on rit, et célébrer le vin. Désaugiers, s’étant moqué de Gouffé, su vit railler dans l’Fcuelle de bois, que l’on attribua à Béranger. Les autres chansons’.es plus connues de Gouffé sont : l’Éloge de l’eau, Saint-Denis ; le Corbillard et le Corbillon, composées pour son admission aux dîners du Vaudeville. Un couplet de chacune donnera un exemple de la manière facile et spirituelle de l’auteur :

LE CORBILLARD.

Que j’aime a. voir un corbillard !

Ce début vous étonne ? Mais il faut partir tôt ou tard ;

Le sort ainsi l’ordonne, Et, loin de craindre l’avenir.

Moi, dans cette aventure, Je n’aperçois que le plaisir

Do partir en voiture.

I.E COFBU.LOS.

Au temps heureux de l’innocence, Temps qui n’aurait pas dû changer, Fille donnait sans résistance Son corbillon a son berger ; Aujourd’hui, Plutus seul ordonne ; L’Amour a baissé pavillon ; Fille ne dit plus : Je vous donne, Mais je vous vends mon corbillon.

Quelques-unes des chansons de Gotilîésont considérées comme des modèles du genre pour la pureté du style et la philosophie de lu pensée ; telle est la suivante :

LA V1H ITC&fAtNg.

Pauvres humains, quelle est votre existence 1 Naître et gémir. Grandir, Languir, Vieillir, Voir la mort accourir Et la craindre d’avance ; Respirer pour souffrir, Et souffrir pour mourir Voila pourtant toute votre sxistence !

Cette chanson est bien lugubre, en vérité ; mais Gouffé était buveur d’eau.


Chansons de Collé (Paris, 1807). Vous tous, joyeux drilles, qui n’avez d’autre culte que celui de votre maîtresse et de la dive bouteille trop prompte à se vider ; vous tous, disciples de Panard, de Désaugiers, de Béranger, qui, après boire, entonnez 1 égrillarde chanson pour trouver le vin meilleur, inclinez-vous : voici le ma ! tre,.le rival de Piron, de Ctébillon fils et de Galletj le fondateur du Caveau d’hilarante mémoire, Collé enfin, le chantre du jus de la treille, le glouglou fait homme. Nul peut-être n’a su manier mieux que lui cette langue pittoresque et graveleuse, couper le vers d’une manière plus ingénieuse, ramener avec plus d’à-propos un gai refrain et donner à la pensée un tour plus piquant et plus vif. Aussi les chansons de Collé, qui fut aussi auteur dramatique et même historien, sont-elles son vrai titre de gloire. Il était bien de cette race de chansonniers qui devait donner encore Désaugiers et Béranger. Malheureusement, il y a dans son œuvre des pièces plus qu’erotiques et qui dépassent la mesure dans laquelle doit rester l’homme de goût. Il s’est pourtant élevé jusqu’à la chanson politique, témoin sa chanson Sur la prise de Ma/wn, qui courut les rues et lui valut une pension viagère de 600 livres. Parmi ses chansons badines, on cite surtout : la Surprise nocturne ; Mon sentiment sut les sentiments ; les Revenants et le Coût du jour. Ces chansons ont été réunies en deux petits volumes in-12 (Paris, 1807).


Chansons de Désaugiers (1808-1816). Où

sont les temps des joyeux refrains, des verres gaillardement choqués, des couplets lestement troussés ? On ne connaissait alors ni les verres prétentieusement contournés, ni les paniers d’osier qui donnent au bourgogne l’air d’un convalescent. Il ne suffisait pas au bordeaux d’être légèrement chauffé ; la bouteille ne devait pas seulement prouver sa noble origine. Pour faire naître la gaieté, il fallait la chanson, l’égrillarde chanson, qui faisait rougir un peu et rire beaucoup. Alors le bouchon de l’at mousseux, en sautant au plafond, donnait la réplique au chanteur, qui entonnait à pleins poumons quelque couplet bachique, dont le refrain était allègrement repris « n chœur, &

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