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visage imberbe, l’air rêveur et maladif ; il est coiffé d’une toque plate et est décoré de l’ordre de la Toison-d'Or. Ses armes, — les colonnes d’Hercule, — et sa devise en allemand, Noch weiter (encore plus loin), accompagnent ce portrait, dont une reproduction quelque peu idéalisée a été dessinée par L. Massard et gravée par Geille dans les Galeries de Versailles. — Un autre portrait de profil, daté de 1520, donne une triste idée de la figure du jeune empereur : mâchoire fortement accusée, menton pointu, lèvre inférieure pendante, œil petit et sans vivacité, longs cheveux plats ; tout cela s’accorde assez bien, du reste, avec les descriptions des historiens du temps. Au-dessous de ce portrait sont énumérés, en langue flamande, les titres du prince : « Charles, par la grâce de Dieu, roi des Romains, empereur césar, roi d’Espagne et des Deux-Siciles, archiduc d’Autriche, duc de Bourgogne et de Brabant, comte de Flandre et de Tyrol. » — À l’année 1519 appartient encore un singulier portrait, édité en Allemagne : Charles, vu de profil, est coiffé d’un feutre rond à ailes étroites, mais d’une forme très-élevée et qui ressemble tout à fait à celle de nos modernes chapeaux ; il tient d’une main un livre, de l’autre un bâton, et a les épaules couvertes d’un manteau ; sa devise est commentée dans le vers suivant :

Plus ultra imperium, plus ultra sidera nomen.

À peu près à la même époque appartiennent un portrait dans un médaillon ovale, entouré d’arabesques, avec l’inscription : Carolus rex Catholicus, et un second portrait encadré dans un portique, avec les mots : Imperator Caesar Carolus V, Hispaniae rex ; ce dernier ouvrage nous montre l’empereur encore imberbe, de face, coiffé d’une toque plate, la bouche béante, la main posée sur un coussin.

En 1530, le Titien, recommandé par son ami l’Arétin au puissant empereur d’Allemagne, fut mandé à Bologne par ce dernier qui le chargea de peindre son portrait : Charles-Quint fut si satisfait de la manière dont le maître vénitien s’acquitta de cette tâche qu’il le prit en affection, le combla de bienfaits, le créa chevalier et comte palatin ; par la suite, il l’appela auprès de lui, à diverses reprises, notamment à Bologne, pour la seconde fois en 1538, à Vienne en 1548 et en 1550, à Inspruck en 1555. Une anecdote célèbre peut donner une idée de l’estime dans laquelle l’empereur tenait l’artiste : un jour que celui-ci était occupé à faire le portrait du monarque, son pinceau s’échappa de sa main ; Charles-Quint daigna le ramasser et le lui rendre ; vivement touché de cette marque d’honneur, le Titien s’inclina devant son puissant modèle et lui dit : « Sire, je ne suis pas digne d’avoir un serviteur tel que vous. » À quoi Charles répondit : « Le Titien mérite d’être servi par des Césars. » Se non è vero è bene trovato. Les plus beaux portraits que le grand maître vénitien ait faits du grand empereur d’Allemagne, les plus beaux du moins qui nous soient parvenus, sont ceux que possèdent les musées de Madrid, de Munich et du palais de Schleissheim ; nous en donnons ci-après la description. Si l’on compare ces divers portraits à ceux qui ont été exécutés par d’autres artistes, on est tenté de croire que le Titien ne plut tant à Charles-Quint que parce qu’il eut le talent d’embellie la figure de ce prince. Les peintres allemands, qui ne savaient pas transiger avec la vérité, ont reproduit cette figure avec un réalisme dont nous devons leur savoir gré. Un portrait, par Amberger, qui se voit au musée de Berlin, représente l’empereur en barrette noire, manteau de la même couleur et habit de dessous verdâtre sur lequel brille l’ordre de la Toison-d’Or ; les deux mains sont posées sur une table, la droite tenant un livre, la gauche une paire de gants. Sur le fond gris du tableau se détachent les armes impériales, les deux colonnes et la devise : Plus oultre ; au-dessous, on lit l’inscription ; Aetatis XXXII. « Avec son teint blême, son œil terne, sa lèvre pendante, Charles-Quint à trente-deux ans est vraiment ignoble, dit M. Viardot ; et si cette image était plus fidèle que les portraits du Titien, il faudrait que le peintre de Cadore eût payé le titre de Caesaris eques par une incroyable flatterie envers le souverain qui ramassait son pinceau. J’aime mieux penser que le portrait de Berlin est une satire peinte, l’œuvre d’un protestant, d’un républicain peut-être ; car il y en avait alors, puisque Luther triomphait à Nuremberg, puisque les comuneros d’Espagne venaient à peine d’être vaincus, et qu'en France La Boëtie écrivait le Contre un. » Non, ce portrait n’était pas une satire, car nous savons qu’Amberger jouissait de l’estime et des faveurs de Charles-Quint. Un autre portrait de ce prince, par le même artiste, supérieur pour l’exécution à celui du musée de Berlin, figure dans la galerie de l’Institut des beaux-arts, à Sienne.

Les portraits exécutés par le Titien ont été fréquemment reproduits ; on trouvera, à l’article suivant, des indications sur quelques-unes de ces reproductions. L’œuvre gravé du maître, au cabinet des Estampes à la Bibliothèque impériale, contient un portrait daté de 1531 et qui porte les initiales du graveur Barthélémy Beham : le type, toutefois, s’éloigne quelque peu de celui du Titien, pour se rapprocher de celui d’Amberger ; la bouche est béante et inexpressive ; le regard est languissant ; la tête est coiffée d’une barrette et au cou est suspendue la Toison-d’Or. Le distique suivant se lit au bas de l’estampe :

Progenies divum, Quintus sic Carolus ille,
Imperii Caesar, lumina et ora tulit.

Nous croyons qu’il faut attribuer aussi à un maître allemand un autre portrait classé dans l’œuvre du Titien et qui représente Charles-Quint à l’âge de quarante et un ans (Carolus V Roma. Imp. semper August. aetat. suae XLI), les bras appuyés sur un coussin, la tête de trois quarts, coiffée d’une toque, la barbe longue et taillée carrément ; joli portrait, d’ailleurs, avec les armes de l’Empire, les deux colonnes et la devise : Plus oultre.

Parmi les autres portraits de Charles-Quint, nous citerons : un charmant petit tableau de Clouet, au musée de Cluny ; une excellente peinture de Holbein le jeune, au musée d’Amsterdam ; un portrait en pied, par l’Espagnol Juan Panteja de la Cruz, au musée de Madrid (l’empereur, couvert de son armure, a la tête nue, la main sur son casque, posé sur un meuble) ; un portrait en buste, par le même, à l’Escurial ; un buste de marbre, attribué à Jean Cousin, au musée de Versailles ; une estampe de Vischer, représentant l’empereur jusqu’à mi-jambes, les deux mains posées sur un gros chien, la tête couverte d’une barrette, le corps enveloppé dans un par dessus garni de fourrure ; une belle estampe de F. van Gunst, d’après Van der Werff ; le même portrait, gravé au trait par Landon ; un portrait équestre, gravé par Crispin de Pas ; un portrait de fantaisie, gravé par Garavaglia ; une tête couronnée de laurier, gravée par François, d’après Soutman ; diverses estampes de Basan, de Sorello, de Houbraken, de Chapman, de Wichem, etc.

Les actions du puissant empereur d’Allemagne ont été souvent retracées par la peinture. M. Hamman a représenté ; l’Éducation de Charles-Quint ; M. Leys : l’Archiduc Charles prêtant serment entre les mains du bourgmestre et des échevins d’Anvers, en 1515 ; Érasme Quellyn le jeune : le Couronnement de Charles-Quint à Bologne (musée du Belvédère, à Vienne) ; Sebastiano Ricci : le même sujet (palais Ridolfi, à Vérone) ; Ajez, peintre italien du XIXe siècle : Charles-Quint ramassant le pinceau du Titien (galerie Peloso, à Gênes) ; Bergeret : le même sujet (Salon de 1808) ; Gros : François Ier et Charles-Quint visitant les tombeaux de Saint-Denis ; Revoil : Charles-Quint refusant de reprendre son anneau à la duchesse d’Étampes (Salon de 1810) ; M. Ch. Comte : le même sujet ; H.-S. Beham : l’Entrée de Charles-Quint à Munich (4 pièces gravées sur bois) ; M. Ch. Comte : Charles-Quint visitant le château de Gand (Salon de 1866) ; J.-C. Vermeyen : Charles-Quint, vainqueur des Maures, aux environs de Carthage (palais de Schœnbrunn) ; Enea Vico : Charles-Quint passant l’Elbe à Mühlberg (composition ovale très-curieuse, dont quelques iconographes attribuent le dessin au Titien) ; Bergeret : le Naufrage de Charles-Quint sur les côtes d’Afrique (Salon de 1824)’ ; Jérôme Francken : Abdication de Charles-Quint (musée d’Amsterdam) ; Solimena : le même sujet ; J. Francken : Charles-Quint prenant l’habit religieux (musée de Lille) ; Bergeret : Charles-Quint s’amusant, dans sa retraite, à faire des horloges de sable (Salon de 1822) ; Robert-Fleury : Charles-Quint au monastère de Saint-Just recevant les ambassadeurs de Philippe II ; M. de Groux : la Mort de Charles-Quint, etc. La plupart de ces tableaux sont l’objet d’un compte rendu particulier dans cet ouvrage.

Les compositions allégoriques relatives à Charles-Quint ne sont pas moins nombreuses. Nous citerons, entre autres : l’Apothéose de Charles-Quint, par le Titien (v. apothéose) ; une estampe sur le même sujet, par J. Neefs ; Charles-Quint couronné par la Gloire et foulant aux pieds un Silène (personnification de l’Ivrognerie), tableau de Rubens, à Munich ; la Naissance de Charles-Quint (la Renommée et Mars assistent à l’accouchement de Jeanne la Folle), belle peinture de Carlo Caliari, au musée royal de Madrid (il y en a une répétition à l’Escurial), etc. Une grande composition d’Enea Vico mérite d’être sommairement décrite : dans un médaillon, placé sous un portique de riche architecture, l’empereur est représenté en buste, la tête tournée vers la droite ; c’est le portrait si souvent gravé d’après le Titien. Sous ce médaillon, entre les bases des colonnes du portique, deux femmes sont assises, l’une personnifiant l’Allemagne (Germania), l’autre l’Afrique (Africa). Sur les bases des colonnes sont retracés : à droite, le siège d’une ville ; à gauche, un combat entre des hommes armés de lances. Sur les colonnes est la devise : Plus ultra. À la colonne de droite s’appuie une femme nue (Minerve), armée d’une lance, d’un bouclier et d’un casque, ayant près d’elle un hibou. À la colonne de gauche est adossée une autre femme, drapée à l’antique, et tenant un livre. À côté d’elle se lisent ces mots : Jure belli, Germania, perieras, ego te servavi. Au milieu de l’entablement, un aigle, aux ailes éployées, soutient une femme tenant d’une main un glaive et de l’autre une couronne ; près d’elle, des guirlandes de fruits et des couronnes remplissent le tympan du fronton. Au-dessus sont assis : d’un côté, une femme casquée (la Justice) ; de l’autre côté, la Religion, tenant une croix, les clefs de saint Pierre, un rosier, un livre et un écusson. Sur les angles supérieurs du portique, à l’aplomb des colonnes, se tiennent de petits génies tenant des bannières. De chaque côté du portique s’étend un paysage : à droite sont des ruines ; à gauche, des gens armés de lances se livrent combat. Cette grande composition, dont quelques auteurs attribuent le dessin au Titien, porte cette inscription : Inventum sculptumque ab AEnea Vico Parmense MDL (Inventé et gravé par Énée Vico de Parme, en 1550). Elle a été copiée par N.-D. La Casa.

Charles-Quint (PORTRAITS DE), par Titien. Nous avons dit dans l’article précédent (Iconographie), que ce fut en 1530 que le Titien fut appelé à Bologne pour faire le portrait de Charles-Quint. L’artiste représenta sans doute le monarque dans le costume pompeux qu’il portait lors de son couronnement par Clément VII ; nous ne savons ce qu’est devenu l’original de ce premier portrait, mais on trouve dans l’œuvre gravé du Titien plusieurs estampes qui pourraient bien avoir été exécutées d’après ce prototype. Charles-Quint y est représenté en buste et de trois quarts, la tête couronnée d’une espèce de mitre orientale enrichie de pierreries, les épaules couvertes d’un manteau magnifique retenu sur la poitrine par une agrafe, la main droite tenant un sceptre, la main gauche un globe surmonté d’une croix. Il y a de ce portrait une très-ancienne gravure sur bois d’un maître italien, et des reproductions plus récentes exécutées au burin par C. Vischer, par J.-J. Flippart, etc.

Le musée de Madrid possède deux portraits de Charles-Quint par le Titien. L’un, qui a été célébré par tous les biographes de 1 artiste, représente l’empereur à cheval, armé de toutes pièces et la lance en arrêt, tel qu’il combattit, dit-on, à Mühlberg ; son armure et son casque sont d’acier bruni incrusté d’or ; sa poitrine est croisée par une écharpe rouge à franges d’or ; le casque est orné d’une plume cramoisie ; la housse du cheval est de la même couleur que l’écharpe. Le fond du tableau est un paysage éclairé par le soleil couchant. Cette magnifique peinture a malheureusement poussé au noir. Le second portrait, qui est au musée de Madrid, nous montre Charles-Quint debout et de face, caressant de la main gauche son chien favori, qui lève la tête vers lui, et tenant de la main droite un chasse-mouches ; il est coiffé d’une toque noire ornée d’une petite plume blanche ; sa tunique, à manches tailladées, est en drap d’or ; son par dessus, en soie blanche brochée d’or, a un large collet et des parements de fourrure ; ses bas et ses souliers sont également en soie blanche ; les hauts-de-chausses présentent un singulier étui : « Si de nos jours un plaisant se montrait dans ce costume en temps de carnaval, dit M. Lavice (Musées d’Espagne), la police pourrait bien coffrer l’homme et l’étui. » Au point de vue de l’exécution, ce tableau est superbe ; il a été gravé au trait par Réveil dans la Galerie des arts et de l’histoire. M. Viardot assure qu’il y a au musée de Madrid « un troisième Charles-Quint, venu de l’Escurial, et qui fut peint à la fin du règne de ce prince, avec la barbe blanchie, lorsque la fatigue et le dégoût des affaires publiques conduisirent le vainqueur de Pavie à la chartreuse de Saint-Just. » Mais nous n’avons pas trouvé sur les catalogues l’indication de cette peinture.

Un autre beau portrait, signé du nom du maître et daté de 1548, se voit au musée de Munich : Charles-Quint est assis dans un fauteuil, près d’une fenêtre ouverte sur la campagne ; il porte une barrette noire et un ample par dessus de la même couleur doublé de fourrure ; à son cou est suspendu l’insigne de la Toison-d’Or ; de la main droite, posée sur le bras d’un fauteuil, il tient des gants ; la gauche est placée sur les genoux ; toute son attitude est pleine de calme, de dignité. Ce portrait a fait partie de la collection de Charles Ier, roi d’Angleterre ; vendu 3,800 fr. après la mort de ce prince, il fut acquis par l’électeur de Bavière et placé au château de Schleissheim, d’où il a été transporté à la pinacothèque de Munich. Il a été gravé par Réveil.

Au musée de Vienne se trouvent deux portraits de Charles-Quint par le Titien : l’un, simple esquisse sur bois, représente l’empereur vêtu de noir et assis dans un fauteuil ; l’autre nous le montre debout, vêtu aussi de noir et tenant un mouchoir à la main. Ce dernier tableau porte le monogramme du peintre (un T et un F accolés) et l’inscription suivante : Carolus V. IMP. AN. AETA. L MDL. (Charles-Quint, empereur, à l’âge de cinquante ans, en 1550). Suivant M. Viardot, « ce portrait n’est guère acceptable ; ce n’est ni la taille du fils de Jeanne la Folle, ni ses traits, ni sa barbe, rousse quoique blanchissante, et quand on a vu les vrais portraits de Charles-Quint par Titien, on ne reconnaît dans celui-ci pas plus le peintre que l’empereur. » M. Viardot. se trompe : le tableau est un peu altéré, mais il est incontestablement l’œuvre du maître vénitien, et il reproduit bien, comme l'a remarqué M. Lavice, le visage pâle et le beau front de l’empereur, la bouche entr’ouverte et la menton saillant, qui donnent quelque chose de dur et d’inexorable à sa physionomie.

Un tableau de Titien, qui est au Musée royal de Naples, offre réunis les portraits de Charles-Quint et d’un cardinal ; l’empereur, dont la tête est pleine de vie, tient un papier et semble préoccupé ; le cardinal, plus jeune, a moins de gravité. Nous ignorons quel est ce dernier personnage.

Parmi les portraits de Charles-Quint gravés d’après le Titien, on remarque encore celui qui représente ce prince à mi-corps, la tête nue et tournée de trois quarts, le corps couvert d’une armure d’acier bruni, la main gantée de fer et tenant une épée nue. Ce portrait, dont il existe une très-ancienne gravure sur bois, de la même main que celle qui nous montre l’empereur dans son costume du couronnement, a été fréquemment reproduit, notamment par Aeneas Vico, par Rubens, par Suiderhoef, qui ont seulement modifié les accessoires. Nous avons décrit, dans l’article précédent, la composition de Vico ; celle de Rubens (ex Titiani prototypo) nous fait voir l’empereur jusqu’aux genoux, appuyant la main gauche sur sa hanche et ayant au cou l’ordre de la Toison-d’Or ; le col de la chemise est abattu sur la cuirasse ; sur un socle est déposé un casque empanaché. La gravure de Suiderhoef est une eau-forte de la plus belle exécution : le portrait, en buste, est contenu dans un médaillon bordé de guirlandes de fruits et surmonté des armes de l’empereur, les deux colonnes et la devise Plus ultra, entre deux aigles ; cette estampe est accompagnée d’une inscription où Charles-Quint est qualifié de : Orbis monarcha potentissimus. Un autre portrait, attribué au Titien, se distingue par l’étrangeté du casque dont est coiffé l’empereur. Ce casque, de forme pointue, se termine par un grand panache et offre autour du front et des tempes une sorte de bordure ou de doublure d’étoffe. Il se pourrait que cette coiffure fût particulière aux comtes de Flandre, car tel est le titre donné à Charles-Quint dans les estampes où nous la rencontrons ; parmi ces estampes, nous citerons celles de Théodore van Kessel, de Gasper de Hollander, de Coenrad Waumans, etc. Mentionnons encore, comme ayant été exécutées d’après le Titien, les gravures de Vosterman, de Maucornet, de J. van Heyden, de J. Liefrink, de N.de Clerc, de Lommelin, de M. Engelbrecht, etc.

Charles-Quint (PORTRAIT ÉQUESTRE), par Van Dyck ; musée des Offices, à Florence. Ce portrait, qui fut exécuté, dit-on, d’après le Titien, offre de notables différences avec celui qui est au musée de Madrid. L’empereur, revêtu de son armure sur laquelle une écharpe rouge est passée en sautoir, tient d’une main la bride de son cheval, et de l’autre un bâton de commandement qu’il appuie sur sa cuisse. Au-dessus de sa tête plane un aigle qui tient dans son bec une couronne de laurier. Le cheval, robuste et plein de feu, a une crinière touffue et une longue queue qui descend presque jusqu’à terre. Dans le fond, on voit la mer et un vaisseau. Ce portrait est d’un dessin et d’une couleur magnifiques. Il a été gravé par Guttenberg, d’après un dessin de Wicar, et par l’Anglais Woodbrun.

Charles-Quint (L'ABDICATION DE), tableau de Francesco Solimena (musée de Toulon). L’empereur, à genoux sur la marche la plus élevée d’un autel, aux pieds d’un évêque, se retourne pour déposer la couronne sur un plat que tient un religieux. Derrière lui, un enfant de chœur agite un encensoir. Trois princesses sont agenouillées sur les degrés de l’autel ; l’une d’elles, coiffée d’un gigantesque diadème, porte son mouchoir à son visage ; celle qui est vue de dos, — une blonde à la chevelure opulente, — est d’une belle tournure. Il faut applaudir aussi au mouvement plein de vérité que fait, en se penchant pour voir la cérémonie, une petite suivante noire qui soutient la robe traînante de l'une des princesses. Des soldats, vêtus à l’antique, les pieds chaussés de sandales, forment la garde d’honneur. « On ne s’expliquerait guère cet anachronisme de costume, et encore moins la présence, au milieu de cette brillante assemblée, d’un mendiant au torse nu, si l’on ne savait, dit M. Chaumelin (Trésors d’art de la Provence), que Solimena avait une prédilection pour ces détails antiques et ces nudités qui prêtent à merveille à un certain arrangement pittoresque. Tous les groupes du tableau sont, d’ailleurs, savamment et élégamment ordonnés, et se détachent sans confusion sur un fond d’architecture d’une grande simplicité. » Ce tableau passe pour avoir appartenu au Puget. — Dans la composition de Jérôme Francken, sur le même sujet (musée d’Amsterdam), l’empereur est assis sur un trône, entre son frère Ferdinand Ier et son fils Philippe II. Une foule de courtisans et de grands seigneurs les entourent ; au premier plan sont les figures allégoriques des quatre parties du monde. — Une composition analogue a été gravée par Van der Does.

Charles-Quint au monastère de Saint-Just, tableau de M. Robert-Fleury ; collection de M. Émile Pereire, à Paris. Dans une vaste galerie richement ornée, et sur laquelle s’ouvre la chapelle du couvent, Charles-Quint, enveloppé dans une houppelande noire garnie de fourrure, est assis sur un fauteuil à brancard que les porteurs viennent de déposer à terre, par son ordre ; de ce siège où le retient la goutte, il reçoit, comme du haut d’un trône, don Ruy Gomez de Silva, comte de Melito, qui, le genou en terre, lui remet une missive par laquelle Philippe II supplie son père de quitter le cloître et de venir lui apporter ses conseils, au milieu des circonstances critiques où se trouve l’Espagne. La physionomie du vieil empereur exprime le mécontentement et le reproche : il est irrité d’apprendre que cette Espagne, qu’il avait faite si puissante, est menacée dans sa prospérité et