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Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 3, part. 4, Chao-Chemin.djvu/75

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taient point honorables. » (Milan et les princes de Savoie, par Ant. Casati ; Turin, 1859.)

Personne ne peut révoquer en doute le sincère dévouement de Charles-Albert à l’indépendance de l’Italie ; mais l’abnégation de sa retraite et de sa mort ne saurait pallier des faiblesses de caractère, des erreurs de jugement et des contradictions de conduite qui faillirent compromettre pour longtemps l’avenir et la liberté de l’Italie. M. Mamiani a prononcé son Éloge et M. L. Cibrario, son ami personnel, a écrit un autre panégyrique sous le titre de : Souvenirs d’une mission en Portugal auprès du roi Charles-Albert (Turin, 3e édition), traduits en français par M. Anatole de Laforge.


CHARLES-MARTEL, roi titulaire de Hongrie de 1290 à 1295. Il était fils de Charles II, roi de Naples, et de Marie, reine de Hongrie, fut opposé à Albert d’Autriche, après la mort de Lad i si as III, mais ne prit jamais possession de ses États.


CHARLES-ROBERT ou CHAROBERT, fils du précédent, roi de Hongrie de 1308 à 1342,


CHARLES III (Henri-Honoré Grimaldi), prince régent de Monaco, né en 1818. Il épousa en 1846 la comtesse Antoinette de Mérode, et porta, du vivant de son père, le titre héréditaire de duc de Valentinois. En 1853, poussé par le désir prématuré de devenir prince souverain, il tenta de provoquer, à Menton, un soulèvement en sa faveur. Cette échauffourée eut pour résultat de le faire arrêter par la garde nationale et par les carabiniers sardes, formant la garnison de cette petite ville. Il fut conduit à Gênes et mis aussitôt en liberté. En 1856, il succéda à son père comme prince de Monaco. À l’époque de l’annexion de la Savoie et du comté de Nice à la France, le prince Charles a vendu à la France les villes de Menton et de Roquebrune, ainsi que leur territoire, ne se réservant que la ville de Monaco, qui représente aujourd’hui toute sa principauté.


CHARLES D’EGMONT, duc de Gueldre, V. EGMONT (Charles D’). — Voir de même, pour tous les personnages du nom de Charles qui ne se trouvent pas ici, au nom patronymique,


Charles (ordre de Saint-), ordre de chevalerie fondé, le 15 mars 1858, par Charles III, prince de Monaco. C’est une de ces institutions ridicules que les souverains des États lilliputiens imaginent trop souvent pour flatter la vanité des imbéciles. Dans tous les cas, cet ordre ne figure que dans l’almanach de Gotha.


Charles-Frédéric (ordre du Mérite militaire de). V. MÉRITE MILITAIRE De CHARLES-FRÉDÉRIC (ordre du).


CHARLES (Chaffrey, Jaffred ou Geoffroy), d’une ancienne famille noble de Grenoble, éteinte au XVIIe siècle, s’acquit une grande réputation comme magistrat et comme savant. Il était président du parlement de Grenoble, lorsque, vers 1499, Charles VIII le nomma vice-chancelier du sénat établi à Milan. Louis XII l’employa à plusieurs négociations importantes, notamment auprès du pape et de l’empereur des Romains. Il prit une part active aux deux conquêtes du Milanais en 1499 et en 1500, se trouva à la bataille d’Agnadel, et, quoique magistrat, y combattit avec tant de bravoure que Louis XII voulut lui-même l’armer chevalier après la victoire. Vers 1514, il fut appelé à Paris par la reine Anne de Bretagne, qui lui confia l’éducation de sa fille Renée. On ignore les autres événements de sa vie et l’époque de sa mort. Guy Allard, dans son Dictionnaire manuscrit du Dauphiné, rapporte de lui un trait bien sombre, mais que font excuser les mœurs du temps : « Il avoit fait sculpter sur la porte de sa maison, rue des Clercs, à Grenoble, un ange tenant un doigt sur sa bouche. Ce doigt est mystérieux et fait connoistre qu’il faut sçavoir se taire. Chaffrey Charles sçut, en effet, se taire assez longtemps, avant qu’il trouvât l’occasion de se venger de l’infidélité de sa femme, qu’il fit étouffer dans un gouffre d’eau qu’il falloit passer pour aller à un domaine qu’il avoit, hors de la ville, et dans lequel se jeta une mule sur laquelle étoit sa femme, qu’à dessein il avoit commandé de laisser plusieurs jours sans boire. J’ay vu cette aventure imprimée en plusieurs endroits, mais on n’en nomme pas les personnes. »


CHARLES (Claude), peintre lorrain, né à Nancy en 1661, mort en 1747. Il habita Rome et Paris, puis devint peintre du duc Léopold et professeur à l’Académie de peinture de sa ville natale. La plupart des œuvres de ce peintre distingué se trouvent en Lorraine. On cite particulièrement le Banquet des pauvres, et le Couronnement de saint Sigisbert, dans la cathédrale de Nancy ; l’Assomption de la Vierge à Saint-Sébastien, etc.


CHARLES (René), médecin français, né à Preny-sur-Moselle, mort en 1752. Il fut directeur des eaux minérales de Bourbonne-les-Bains, puis professeur et recteur de l’Académie de Besançon, et a laissé d’assez nombreux écrits, qui ont tous pour objet les eaux minérales, les épidémies et les épizooties. Nous citerons ses Observations sur différentes espèces de fièvres (1743).


CHARLES (Antoine), horloger français, né. en 1694. Il se rendit en Allemagne et se réfugia à Magdebourg, où il exerça son état. Il a laissé quelques écrits, notamment un Mémoire sur les avantages que le public pourrait retirer de l’établissement de l’horlogerie dans les États du roi, etc. (1751).


CHARLES (Jean-Baptiste-Benoît), magistrat et économiste français, né à Rouen en 1730, mort dans cette ville en 1804. Il était conseiller au parlement de Normandie quand cette cour s’occupa de la fameuse affaire des jésuites. Chargé de l’examen des constitutions de cet ordre, Charles fit un rapport dont la lecture ne dura pas moins de six jours. Ce rapport fut publié, la même année, sous le titre : Comptes des constitutions et de la doctrine de la société se disant de Jésus, rendus au parlement de Normandie, toutes les chambres assemblées, les 16, 18, 19, 21, 22 et 23 janvier 1762 (1762, in-12). Ce magistrat devint membre du conseil des Cinq-Cents. On a de lui, entre autres ouvrages : Considérations du tiers état de la province de Normandie sur l’assemblée des états généraux (1789) ; Examen des principaux droits, impôts, impositions qui se perçoivent dans la province de Normandie, adressé aux futurs représentants de la province aux états généraux (1789).


CHARLES (Jacques-Alexandre-César), physicien et habile expérimentateur français, né à Beaugency en 1746, mort à Paris en 1823. Il a popularisé en France les découvertes de Franklin et des frères Montgolfier. Ses leçons et ses expériences sur l’électricité furent admirées de l’illustre inventeur du paratonnerre, et ce fut lui qui, pour le gonflement des aérostats, substitua à l’air dilaté le gaz hydrogène, quatorze fois plus léger que l’air atmosphérique. Il exécuta plusieurs ascensions qui excitèrent alors un véritable enthousiasme. La science lui doit des expériences très-ingénieuses sur la dilatation des gaz, et plusieurs instruments de physique parmi lesquels il faut citer le mégascope. Lors de la création de l’Institut, il entra l’un des premiers a l’Académie des sciences, et en devint par la suite le secrétaire.


CHARLES DE SAINT-PAUL, historien ecclésiastique français, mort en 1644. Il devint général des feuillants et fut archevêque d’Avranches en 1640. On a de lui : Geographia sacra, Mémoires du cardinal de Ricnelieu (Paris, 1640).


CHARLES-EDMOND (Charles-Edmond Chojecki, dit), littérateur français, né en Pologne en 1822. Il a été quelque temps un des rédacteurs de la Presse, puis est devenu secrétaire particulier du prince Napoléon. M, Charles-Edmond est auteur de quelques pièces de théâtre : la Florentine, drame en cinq actes, joué à l’Odéon en 1856 ; les Mers polaires, drame en cinq actes, représenté au Cirque en 1858, et l’Africaine, drame en quatre actes, donné aux Français en 1860. On lui doit, en outre, sous le titre de : Voyage dans les mers du nord à bord de la corvette la Reine-Hortense (1857), la relation d’une exploration intéressante que le prince Napoléon fit à cette époque et à laquelle M. Charles-Edmond prit part.


Charles et Marie, roman de Mme la baronne de Souza, publié en 1802 (Paris). M. Patin considère cette composition comme le chef-d’œuvre de l’auteur ; il avoue pour elle une prédilection décidée : « Elle me paraît, dit-il, supérieure encore à Adèle de Sénanges, quoiqu’elle soit moins célèbre. Le talent facile, naturel, agréable de Mme de Souza, ne se montre nulle part avec plus d’avantages que dans cette charmante production. » Ce roman offre une grande analogie avec les récits de Sterne. L’intrigue n’occupe qu’une place secondaire, les péripéties sont peu dramatiques ; mais, tout imparfaite qu’elle est, l’œuvre de Mme de Souza abonde en détails charmants. Le journal que tient Charles de ses actions, de ses pensées secrètes, présente des traits délicats, des sentiments exquis. Charles perd son excellente mère ; un bon père lui reste ; tous deux vivent ensemble à la campagne, où ils font connaissance avec un seigneur du voisinage, lord Seymour, père de trois filles. L’aînée a les inclinations de son père ; elle aime les chevaux et la chasse ; la seconde, élevée par une tante riche, a des prétentions à l’esprit et à la science ; la troisième, Marie, possède les vertus et surtout la bonté de sa mère, dont elle fait la consolation. Les deux aînées, pauvres créatures, se donnent de grands airs et brillent dans la société ; la bonne Marie joue un rôle, subalterne en apparence, mais réellement le plus intéressant et le plus respectable. Charles lui rend justice, la distingue de ses sœurs, en devient éperdument amoureux, et l’épouse après quelques incidents amenés par la résistance de la famille et par une jalousie d’amant. Rien ne saurait égaler la grâce et l’esprit de cette histoire, dans laquelle il n’y a ni prétention ni recherche, qu’on ne saurait lire sans émotion. Voici l’opinion émise par M. Sainte-Beuve, dans ses Portraits de femmes, sur le roman de Mme de Souza : « Charles et Marie est un gracieux et touchant petit roman anglais, un peu dans le goût de miss Burney. Le paysage de parcs et d’élégants cottages, les mœurs, les ridicules des ladies chasseresses ou savantes, la sentimentalité languissante et pure des amants, y composent un tableau achevé, qui marque combien ce séjour en Angleterre a inspiré naïvement l’auteur. » Après avoir rappelé le jugement trop favorable de M. Patin, l’ingénieux critique ajoute : « Pour moi, je l’aime (ce roman), mais sans la même prédilection. Il y a, si je l’ose dire, comme dans les romans de miss Burney, une trop grande profusion de tons vagues, doux jusqu’à la mollesse, pâles et blondissants. Mme de Souza dessine d’ordinaire davantage, et ses couleurs sont plus variées. C’est dans Charles et Marie que se trouve ce mot ingénieux, souvent cité : « Les défauts dont on a la prétention ressemblent à la laideur parée ; on les voit dans tout leur jour. »


Charles et Hélène de Moldorf, ou Huit ans de trop, roman allemand publié par Auguste Meissner en 1803. Le sujet de ce récit pèche contre la vraisemblance ; mais l’auteur a su tirer si habilement parti du jeu des passions qu’on lui pardonne de grand cœur l’impossibilité de son plan. Le colonel Moldorf recueille un neveu et une nièce, Charles, âgé de douze ans, beau, vif, impétueux ; Hélène, âgée de vingt ans, jeune fille modeste, douce, calme et réfléchie. Lorsque Charles revient au château, après avoir terminé ses études, Hélène, voyant en lui un cavalier accompli, ne peut s’empêcher d’aimer son cousin, et le colonel les marie, sans tenir compte des huit années qu’Hélène avait de plus que son futur. Plein d’estime pour sa femme, Charles goûte pendant onze années le bonheur le plus parfait. Il l’entoure d’une affection sans pareille, lorsque arrive au château Euphrosine, belle-sœur d’Hélène, enfant de douze ans. En voyant chaque jour sa beauté s’épanouir davantage, Charles en devient éperdument amoureux ; mais il essaye de combattre sa passion et la dissimule si habilement qu’il la cache à celle même qui la lui a inspirée. La peinture et le développement de cet amour, qu’Euphrosine partage sans se l’avouer, forment une des parties les plus intéressantes de l’ouvrage. Hélène devine cette affection mutuelle et se résout à un sacrifice malheureusement contraire à la réalité. Elle va prendre les eaux en Italie et se fait passer pour morte, afin que son mari puisse s’unir à Euphrosine. Le mariage a lieu à l’expiration du deuil ; les deux époux vivent heureux, deux enfants sont venus resserrer les liens qui les unissent, lorsque, dans un voyage, ils rencontrent Hélène, Charles est au désespoir de ne pouvoir récompenser Hélène de sa générosité ; mais, comme les besoins du roman l’exigent, la malheureuse femme se hâte de mourir pour délivrer son mari de sa présence. En dépit de l’invraisemblance du sujet, ce roman est un des plus estimés de la littérature allemande ; c’est qu’il renferme des beautés de premier ordre. Les mœurs y sont peintes de main de maître, les passions développées naturellement et cependant avec un art infini ; le style rachète certains défauts de correction par l’énergie et la chaleur que l’on remarque dans tout le roman. La perfection avec laquelle les sentiments sont analysés dans cet ouvrage a fait donner à Meissner le glorieux surnom de Balzac allemand.


CHARLES-RIVER, rivière des États-Unis, dans l’État de Massachusetts ; elle prend naissance dans le comté de Worcester, et, après un cours sinueux, se jette dans l’Océan, en formant à son embouchure une partie du port de Boston. Cours de 93 kilom.


CHARLESTON ou CHARLESTOWN, ville des États-Unis (Caroline du Sud), à 160 kilom. S.-S.-E. de Columbîa, par 32° 46′ 33″ lat. N. et 82° 17′ 51″ long. O. Charleston est situé à la jonction de l’Ashley et du Cooper, à 10 kil. de l’Océan, au fond d’une rade dont l’entrée est fortifiée. C’est une cité tranquille ; devant les portes des maisons croissent des magnolias, des grenadiers, des azedarachs, qu’on appelle l’orgueil de l’Inde (pride of India). Ces maisons ont presque toutes de grandes vérandas et en général deux étages de portiques ; 42,132 hab., dont plus de moitié esclaves avant l’acte d’abolition de Lincoln. C’est une des cités les plus peuplées des États méridionaux. La fièvre jaune y a souvent exercé des ravages ; cependant on regarde cette ville comme une des plus saines de toutes celles de la région inférieure des États méridionaux. La politesse et l’urbanité qui distinguent les habitants de Charleston en rendent le séjour agréable à tous les étrangers. Avant la grande guerre de la sécession, elle était une place forte défendue par une citadelle, le fort Moultrie placé dans l’île de Sullivan, et plusieurs autres forts ; c’était à la fois un arsenal de l’Union et de l’État de la Caroline. Elle renferme une haute école classique, un séminaire catholique, et d’autres établissements importants d’instruction publique. Son port, vaste et sûr, dans lequel on pénètre par deux passes, est l’entrepôt du commerce des deux Carolines ; ses canaux, ses chemins de fer, la mettent en communication avec les autres villes de l’Union. Sur environ 2,000 millions de balles de coton qu’expédiaient les États-Unis avant la guerre, 400,000 partaient de Charleston, qui exporte aussi du riz, des bois de construction, des céréales, etc. Mais il faut ajouter qu’à cette époque elle figurait dans la grande république comme la métropole sacrée de l’esclavage. L’édifice qui y attirait le plus l’attention et le plus significatif était le Sugar-House, prison des nègres, où se tenait le marché aux esclaves. Dans cette espèce de caverne ou dans ces catacombes à l’air infect, humide et malsain, des hommes étaient enchaînés et pourrissaient pendant des mois, des années. Mais ces hommes étaient des nègres, et la pitié des Caroliniens n’est pas faite pour la race africaine. La moindre infraction, un retard de quelques minutes dans les rues après le couvre-feu, les amenaient à la Sugar-House, où ils étaient condamnés à recevoir de vingt-cinq à cent coups de fouet.

Dans son voyage en Amérique, J.-J. Ampère traversa Charleston, et voici le spectacle auquel il assista : « Je viens, dit-il, de voir en plein jour, sur la place publique de Charleston, vendre à l’encan une famille de noirs. Elle était sur un tombereau comme pour le supplice ; à côté s’élevait un drapeau rouge, digne enseigne du crime et de l’esclavage. Les nègres et les négresses avaient l’air indifférent comme le public qui les regardait. Le crieur, qu’on me dit bien reçu dans la société, faisait d’un air badin valoir les qualités d’un nègre « très-intelligent, jardinier de première qualité. » Les acheteurs s’approchaient des hommes, des femmes et des enfants, ouvraient leur bouche et considéraient leurs dents, puis l’on enchérissait, et… adjugé ! À vingt pas, en même temps, absolument de la même manière, on vendait à l’enchère un âne. On a vendu aussi un cheval. Le prix de l’homme a été 67 dollars ; le cheval a coûté 2 dollars de plus. Je me garderai bien d’ajouter la moindre réflexion à ce récit ; mais je rappellerai un fait. En 1803, un nègre a été brûlé ici à petit feu. Je fais remarquer que depuis la fin du dernier siècle les sauvages ont cessé de torturer leurs prisonniers, et je constate que, dans une ville chrétienne et civilisée, on a exercé, au commencement du XIXe siècle, une barbarie à laquelle les sauvages avaient renoncé. Je n’ajouterai non plus à ce rapprochement aucune réflexion. »

La ville de Charleston fut fondée en 1680, une colonie de protestants français s’y établit en 1690. Les Anglais, lors de la guerre de l’indépendance, résolurent de s’en emparer ; mais, n’ayant pas réussi (28 juin 1776) à prendre le fort Moultrie, ils se rembarquèrent pour aller grossir l’armée qui se formait sur les côtes de New-York. Quatre ans plus tard, le général Clinton, qui commandait en chef les forces britanniques, mit le siège devant Charleston, que commandaient le général Lincoln et le gouverneur Rousledge. Malgré les faibles moyens des assiégés, tout fut préparé pour une défense digne de l’honneur américain. Clinton, de son côté, se servit de tous les éléments de nature à lui assurer la victoire. Pendant le siège, deux corps américains, qui s’avançaient pour ravitailler la place, furent complètement battus, sans que la garnison pût secourir aucun d’eux. Le fort Moultrie, qui, quatre ans auparavant, avait seul arrêée une armée et repoussé une attaque, se rendit presque sans défense. Charleston capitula après quarante jours d’un siège poussé avec la plus grande vigueur.

Au mois de décembre 1860, le major Andersen occupait le fort Moultrie : se voyant dans une position difficile, à cause du peu de forces dont il disposait en face de l’insurrection carolinienne, il se décida à l’abandonner et, le 27, il partit et alla, avec ses troupes, s’enfermer dans le fort Sumter, qui commande l’entrée même du port de Charleston. Ce départ s’accomplit nuitamment, sans aucun bruit, et le lendemain seulement les habitants s’aperçurent que celui qu’ils croyaient tenir entre leurs mains avait, au contraire, sur eux un immense avantage. Ils agirent alors par représailles et s’emparèrent non-seulement du fort Moultrie, mais encore du château Pinkney, de l’arsenal, de la douane et de l’hôtel des postes. Ce coup de main produisit une profonde impression dans le Nord, et la presse libérale se hâta de demander le mitraillement du fort Sumter. À cet effet, ou envoya le steamer The Star of the West avec des troupes et des munitions. Arrivé à l’entrée du port, le navire essuya le feu des batteries caroliniennes : Charleston avait eu le triste honneur de tirer le premier coup de canon contre le drapeau de l’Union. Le 11 avril 1861, le général Beauregard intima l’ordre au général Anderson d’abandonner la citadelle. Sur le refus de celui-ci, on commença le feu. La résistance se prolongea pendant trente-huit heures. Enfin, après une héroïque défense, le major Anderson, convaincu de l’inutilité d’une plus longue résistance, fit hisser le drapeau blanc et se rendit. Il obtint les honneurs de la guerre et sortit avec armes et bagages. Charleston, où la sécession avait remporté sa première victoire, défiait la vengeance tardive du Nord, quand tout à coup un lugubre sinistre vint remplir cette ville de désolation : le 11 décembre 1861, un effroyable incendie en détruisit la plus grande et la plus belle partie. Le général Ripley se décida à faire la part du feu, et fit isoler le foyer de l’incendie en sacrifiant une large zone de maisons qui furent détruites. Cinq églises, l’Institut, l’hôtel de ville, le grand théâtre, les principaux établissements financiers et industriels avaient disparu ; le dommage fut évalué à 35 millions de francs. Quelques jours plus tard (19 décembre), l’amiral Davis fit saborder toute une flotte de navires chargés de pierres devant le port de Charleston. Seize grosses frégates furent immergées en face du Morris-Island, du fort Moultrie, du fort Sumter, pour obstruer les passes intérieures par lesquelles les navires