Le conseil municipal s’assemblait au moins une fois tous les quinze jours, et plus souvent si cela était nécessaire. Les administrateurs, tirés, comme nous l’avons dit, de son sein, étaient sous sa direction.
Le conseil général, qui comprenait la municipalité tout entière, délibérait sur toutes les questions relatives à la ville, réglait les affaires en litige, gardait la haute direction, rendait des arrêtés, soit sur la proposition de ses membres, soit sur le réquisitoire du procureur de la Commune, recevait les citoyens à sa barre, cassait ou approuvait les arrêtés des sections, etc. Au temps de sa plus grande puissance, pendant la Terreur, la Communs était une sorte de Convention parisienne qui domina plus d’une fois la grande assemblée. Elle était, il est vrai, subordonnée en certains cas à l’administration départementale, ou, comme on disait, au département, mais cette subordination était à peu près illusoire.
Les séances du conseil municipal, et à plus forte raison celles du conseil général, étaient publiques. Ce dernier n’avait point de réunions régulièrement fixées. Depuis le 10 août, il s’assembla tous les jours ; dans les circonstances critiques, il restait même en permanence nuit et jour.
Enfin, il faut ajouter que l’Assemblée constituante avait complété l’indépendance municipale en ne laissant au pouvoir exécutif que le droit de suspendre les administrateurs qui, par leurs actes, compromettraient la tranquillité publique, et en ne donnant qu’aux seuls membres des municipalités le droit de requérir la force armée dans l’intérieur des villes. En cas de troubles publics, ils étaient tenus de marcher en tête de la force armée pour faire appliquer la loi.
La nouvelle Commune fut installée en octobre 1790, avec Bailly pour maire ; elle eut de grandes crises à traverser : la tentative de démolition du donjon de Vincennes ; la journée des poignards, aux Tuileries ; la fuite du roi ; le massacre du Champ-de-Mars (17 juillet 1791), qui la rendit odieuse aux révolutionnaires, par l’obligation où elle fut de proclamer la loi martiale. Ce fut cette municipalité qui créa le papier-monnaie connu sous le nom de billets de confiance. Le renouvellement de la moitié de cette assemblée, dans les derniers jours de 1791, y fit entrer des hommes plus ardents, imbus d’idées plus radicales. Paris déjà avait bien dépassé le parti constitutionnel. En novembre, Bailly avait donné sa démission de la place de maire ; deux candidats étaient en présence : La Fayette et Pétion ; c’est ce dernier qui fut élu. Manuel fut nommé procureur, avec Danton pour substitut.
L’événement capital qui eut lieu sous l’administration de cette municipalité fut l’envahissement des Tuileries par le peuple dans la journée du 20 juin 1792. Il est peu douteux que ce mouvement ne fût envisagé favorablement par la Commune et par le maire Pétion ; tous les patriotes pensaient alors qu’il était nécessaire que le peuple exerçât une pression sur l’esprit du roi pour l’amener à sanctionner les décrets, à rappeler les ministres patriotes et à se rallier franchement à la Révolution. Toutefois, les municipaux firent quelques efforts inutiles pour que la manifestation ne se fit pas en armes et ils n’y prirent officiellement aucune part. Pétion, Sergent et plusieurs autres se rendirent aux Tuileries pour engager le peuple à se retirer en bon ordre après avoir manifesté ses vœux, et ils contribuèrent à l’évacuation du palais. Mais la cour ne trouva point que ce fût assez, et quelques jours plus tard elle fit prononcer par le directoire du département, qui était tout à sa dévotion, la suspension de Pétion et de Manuel. Cette mesure produisit une véritable explosion. Tout Paris cria : Vive Pétion ! et, dans les circonstances critiques où se trouvait la monarchie, on ne pouvait se méprendre sur la signification menaçante de ce cri. La suspension, confirmée par le roi, fut levée par un décret de l’Assemblée nationale le 23 juillet. Les deux magistrats populaires furent réinstallés avec un grand éclat.
Le conseil de la Commune se montra en majorité favorable à la déchéance du roi et appuya les pétitions présentées à ce sujet à l’Assemblée nationale ; mais un grand nombre de ses membres hésitaient à sortir des voies légales. Aussi, le premier acte des sections, au 10 août, fut-il de pourvoir à son remplacement. Dès le 9, dans la soirée, un certain nombre de sections nomment chacune trois commissaires, avec pouvoirs illimités pour sauver la patrie ; d’autres sections suivirent ce mouvement, et c’est ainsi que fut formée cette Commune du 10 août qui présida à la grande insurrection. Chose assez curieuse, les choix tombèrent en général sur des citoyens obscurs. Nous y trouvons cependant les noms de Billaud-Varenne, de Rossignol, de Bourdon (de l’Oise), d’Hébert (le père Duchesne), de M.-J. Chénier, de Robert, de Fabre d’Églantine, de Robespierre, de Xavier Audouin et de quelques autres.
La Commune insurrectionnelle agit avec une grande vigueur. Elle ne garda de l’ancien conseil que Pétion, Manuel et Danton, fit consigner le maire de Paris chez lui, pour mettre sa responsabilité à couvert, nomma Santerre commandant de la force armée parisienne, et prit enfin toutes les mesures que commandaient les circonstances.
Après la chute de la royauté, elle concentra son pouvoir dans un comité de surveillance (lequel s’adjoignit Marat), qui exerça une grande action pendant un mois, et auquel on a attribué les massacres de septembre. À l’article consacré à ces affreuses journées, nous aurons à nous occuper spécialement du rôle de ce comité et de la part de responsabilité qui lui revient. Ici, nous devons nous borner à disculper sommairement le conseil général proprement dit, qui formait en quelque sorte le pouvoir législatif de la municipalité. Le comité de surveillance était sans doute sa commission exécutive ; mais, dans ce moment terrible, au milieu de la panique causée par la marche des Austro-Prussiens, le comité agissait beaucoup par lui-même, et le conseil ne saurait être équitablement rendu responsable de tous les actes. Il est certain qu’aux premiers bruits des massacres la Commune manifesta sa douleur. qu’elle prit toutes les mesures que les circonstances lui permettaient de prendre et qu’elle montra plus d’activité même que l’Assemblée nationale en envoyant commissaires sur commissaires aux prisons pour tenter d’arrêter l’effusion du sang ; elle protégea même le Temple, qui fut un moment menacé. Il faut rappeler aussi qu’elle désavoua énergiquement ce fameux comité dont on la rendait solidaire. Dans cet instant suprême de l’invasion, elle montra autant de patriotisme que d’énergie, organisa la levée en masse des Parisiens et mérita les éloges de l’Assemblée nationale.
Violemment attaquée par les girondins dès les premières séances de la Convention, elle soutint contre eux une lutte incessante, avec l’appui de la Montagne. Quelques historiens l’ont accusée de n’avoir pas voulu rendre ses comptes ; il est avéré cependant que, le 29 septembre, elle invita les 48 sections à envoyer chacune deux commissaires à l’Hôtel de ville pour assister à la reddition de ces comptes, et qu’elle enjoignit à tous ses membres de rendre publiquement compte de leur gestion depuis le 10 août et de tous les dépôts qui avaient été confiés à la Commune. Le comité de surveillance lui-même rendit également ses comptes (v. l’Histoire parlementaire, t. XX ; l’Histoire de la Révolution, de Louis Blanc, t. VII, etc.).
Le 2 décembre 1792, de nouvelles élections municipales renouvelèrent le conseil général de la Commune. Un homme très-modéré, le médecin Chambon, fut nommé maire ; Chaumette, procureur, avec Hébert (le père Duchesne) et Réal pour substituts. L’élément révolutionnaire dominait dans ce nouveau conseil. Chambon dut bientôt se retirer à la suite de nombreux conflits, et les sections lui donnèrent pour successeur Pache, qui venait de se démettre du portefeuille de la guerre, poursuivi sans relâche par les girondins. Ce choix était une réponse de Paris aux attaques incessantes de la Gironde et annonçait avec évidence un choc prochain. Dans la nuit du 30 au 31 mai 1793, 42 sections de Paris se déclarèrent en insurrection. Des commissaires nommés par elles se transportèrent à l’Hôtel de ville, et, pour la forme, cassèrent le conseil de la Commune et le rétablirent aussitôt sous le nom de conseil général révolutionnaire. Pour qui connaît les formes de ce temps, cette prétendue dissolution équivalait à une augmentation de pouvoir. L’épuration de la Convention, la suspension des girondins étaient évidemment le vœu presque unanime de la capitale. La Commune organisa le mouvement dans ce sens, mit toutes les sections sous les armes et contribua largement au résultat de cette insurrection morale. Après la chute des girondins, son influence devint énorme ; elle pesa même sur la Convention, quelquefois, il faut le dire, d’une manière salutaire, eut une grande part à l’adoption de toutes les grandes mesures révolutionnaires, au mouvement contre le culte catholique (v. raison [fêtes de la]) ; et, au milieu des plus terribles luttes, accomplit un grand nombre d’améliorations que Paris a oubliées depuis longtemps, dans le régime des hôpitaux, l’assistance publique, l’approvisionnement de la ville, etc. Elle envoyait des commissaires dans les départements et entretenait une correspondance active avec les autorités et les sociétés populaires. Le comité de Salut public prit ombrage d’une telle puissance. Il fit rendre, le 14 frimaire an II, une loi qui concentrait dans ses mains toute l’autorité révolutionnaire. Cette loi dépouillait la grande Commune d’une partie de ses attributions et la plaçait sous la dépendance de l’administration du district. La décadence municipale commençait et le régime de la centralisation était inauguré. Bientôt le procureur de la Commune ne fut plus qu’un simple agent national obligé de rendre compte, jour par jour, de ce qui se passait dans le conseil général. Hébert et Chaumette sont sacrifiés à la haine de Robespierre, qui les remplace par deux de ses créatures, Payan et Lubin. Pache, qui avait été mis en arrestation, est remplacé à son tour par un autre partisan de Robespierre, Fleuriot-Lescot. Le conseil lui-même est périodiquement soumis à des épurations, et plusieurs de ses membres sont jetés dans les prisons. Des proscriptions semblables eurent lieu dans les sections, qui déjà, depuis la loi du 14 frimaire, ne pouvaient plus correspondre entre elles ; pour les paralyser complètement, on réduisit le nombre de leurs séances à deux par mois (6 floréal). De son côté, la Commune cessa de se réunir tous les jours (23 floréal). Robespierre avait voulu ainsi amoindrir le pouvoir municipal de Paris pour le tenir dans sa main : quand il voulut s’en servir, il put reconnaître que ce pouvoir n’était plus que l’ombre de lui-même : l’impuissance de la Commune, ainsi mutilée, éclata dans la lutte du 9 thermidor. On sait que, dans cette journée, la Commune, où il avait placé tous ses amis, se prononça en sa faveur, mais fut brisée par la Convention. Près de cent de ses membres furent mis hors la loi et envoyés à l’échafaud. L’administration de la ville fut confiée provisoirement au directoire du département de Paris. Un mois après, le 14 fructidor, la Convention supprimait définitivement le conseil de la Commune, et confiait tous les détails administratifs de Paris à des commissions nommées par le gouvernement. Pendant les journées de prairial an III, les insurgés, maîtres un moment de l’Hôtel de ville, essayèrent de reconstituer la Commune. Cambon fut désigné comme maire et Thuriot comme procureur-syndic. Cette Commune insurrectionnelle dura à peine quelques heures. Ni Cambon ni Thuriot, d’ailleurs, ne s’étaient rendus à l’appel des insurgés. La Convention profita de sa victoire pour enlever leur artillerie aux sections, qui furent si soigneusement épurées, que, six mois plus tard, elles étaient envahies, dominées par les royalistes, auxquels il fallut livrer bataille dans la journée du 13 vendémiaire.
La constitution de l’an III divisa Paris en 12 arrondissements, ayant chacun sa municipalité et un président qui prit plus tard le nom de maire. Les sections, devenues des divisions, furent le siège d’autant de commissaires de police, et furent définitivement réduites au silence. La grande Commune n’était plus qu’un souvenir historique, et aucune révolution n’a tenté de la reconstituer ; mais toutes, par une sorte de réminiscence, ne manquent jamais d’installer leur gouvernement insurrectionnel à l’Hôtel de ville.
L’histoire de la Commune de Paris, depuis 1789 jusqu’au Directoire, n’a jamais été faite. Il y aurait là, cependant, matière à une étude aussi instructive que dramatique, et qui, certes, offrirait plus d’intérêt que l’histoire de beaucoup de royaumes et de souverains.
Commune de Paris (LA), journal révolutionnaire publié par Sobrier du 9 mars au 8 juin 1848 (87 numéros in-fol.). Suivant M. Hatin (Bibliographie de la presse périodique), la
collection s’est vendue 72 fr. en 1854.
Sobrier, une des sommités de l’ancien parti républicain militant, tête exaltée, mais lutteur énergique et dévoué, avait quelque fortune, et il avait fait de nombreux sacrifices sous le gouvernement de Louis-Philippe, soit pour soutenir les publications de son parti, soit pour soulager des familles de patriotes prisonniers, etc. En février, il fut un moment délégué à la préfecture de police avec Caussidière, s’installa ensuite rue de Rivoli, dans les bureaux de l’ancienne liste civile, et commença la publication de son journal, qui se présentait comme le moniteur des clubs, des corporations ouvrières, etc., et qui eut un succès retentissant. Cette feuille fut une des originalités de la révolution de Février ; ses bureaux étaient gardés comme une barricade par une trentaine de montagnards volontaires, semblables à ceux de la préfecture de police, et les rédacteurs eux-mêmes étaient vêtus de la blouse traditionnelle, avec deux pistolets dans une ceinture rouge. La Commune de Paris suivait à peu près la ligne de la Réforme et de Caussidière ; ce n’était pas un organe socialiste proprement dit, car la science économique manquait à ses rédacteurs ; mais toutes les audaces révolutionnaires trouvaient un appui dans ses colonnes. Après la journée du 15 mai, les bureaux furent dévastés par la garde nationale, et le malheureux Sobrier entra en prison pour n’en sortir que plusieurs années plus tard, mourant et la tête égarée. En 1849, un des anciens rédacteurs de cette feuille, Cahaigne, publia plusieurs numéros d’une nouvelle Commune de Paris, qui ne put se soutenir.
Commune générale des Arts, constituée en 1793 par la Convention, qui avait supprimé toutes les Académies. On y admit indistinctement tous les artistes, et ce fut à son nom
que s’ouvrit, le 10 août 1793, l’exposition de
l’an II. « Il semblera peut-être étrange à
d’austères républicains, dit le livret, de nous
occuper des arts, quand l’Europe coalisée assiége
le territoire de la Liberté. Les artistes
ne craignent pas le reproche d’insouciance
sur les intérêts de la patrie. Ils sont libres par
excellence… » Cependant la Commune des
Arts s’était vue, dès le début, accusée de préjugés
académiques, et les patriotes l’avaient
bientôt abandonnée. Les peintres et les sculpteurs
les plus ardents s’étaient bientôt réunis
et avaient formé une Société populaire et
républicaine des Arts, qui tint ses séances au
Louvre, de pluviôse à prairial an II (février-juin
1793) ; celle-ci compta parmi ses membres
beaucoup de noms connus et d’artistes
distingués, entre autres les sculpteurs Chaudet,
Cartelier et Bosio, les peintres Gérard et
Isabey ; elle s’occupa de l’interprétation des
décrets relatifs aux arts, de pétitions au comité
de l’instruction publique, de lectures
historiques, comme aliment au cœur et à l’esprit
des artistes, des écoles publiques de modèles,
du moulage des antiques, de la restauration
des tableaux, de l’organisation des
fêtes. Des discussions s’établirent dans son
sein sur les moyens de faire révolution dans
les arts. La question du costume national y
fut traitée, et l’on y dénonça les estampes indécentes.
Les jacobins n’étaient pas disposés
à avoir sur ce sujet la manche aussi large que
le clergé de l’ancien régime.
Communes (Chambre des), nom donné à la chambre élective de la représentation de la Grande-Bretagne. L’origine de la Chambre des communes remonte à la seconde partie du XIIIe siècle. Pendant les deux premiers
siècles qui suivirent la conquête normande,
le Parlement, à l’aide duquel la royauté expédiait
les affaires de l’État, se composait
seulement des grands seigneurs, des évêques
et des abbés mitrés. Sous le règne de Henri III,
afin de mieux répartir les taxes imposées à la
communauté, et de les lever avec plus de facilité,
on sentit la nécessité de s’entourer d’un
certain nombre de représentants de la propriété
foncière et des corporations (communes)
des cités. Chaque comté et un certain
nombre de cités et de bourgs furent invités à
se faire représenter, au moment des sessions
du Parlement, par un certain nombre de sages
et discrets chevaliers ou bourgeois. Ces
gentilshommes et bourgeois délibéraient à
part sur les questions qui leur étaient soumises ;
aussi leur donna-t-on presque aussitôt
les noms de commons et de commoners, qui devaient
leur rester. Les attributions des commoners étaient d’abord à peu près celles d’une
assemblée de répartition, et, dès qu’on leur
avait fait connaître le chiffre de la somme
dont le roi avait besoin, il ne leur restait guère
qu’à le voler et à retourner auprès de leurs
commettants. Les membres bourgeois de cette
assemblée aux attributions si humbles étaient
particulièrement dédaignés et méprisés par
les grands personnages composant le conseil
permanent du roi. Cette situation devait bientôt
changer : les bourgeois et les propriétaires
fonciers qui siégeaient à côté des gentilshommes
ne tardèrent pas à faire cause commune avec eux. La distinction sociale qui existait entre eux disparut devant la communauté d’intérêts politiques. La royauté elle-même
ne fit entre eux aucune différence. Elle
employait pour les convoquer la même formule ;
tous étaient autorisés à agir au nom de
leurs commettants ; les uns et les autres devaient
également donner caution de leur présence
au Parlement, et à ce titre on exigeait
qu’ils fussent propriétaires dans le comté ou
la cité qui les avait élus, afin que leur propriété
servît de gage aux amendes qui, en
cas d’absence, pourraient leur être imposées
par le shérif. Leurs commettants devaient
leur fournir une indemnité. Les localités riches
enviaient fort ce privilège de figurer au
Parlement ; mais les localités pauvres n’y
voyaient qu’un surcroît de charges. Les communes
furent présidées d’abord par un membre
de la noblesse ou du conseil du roi, ensuite
par un de leurs membres agréé par le
roi. Sous Édouard III, elles firent prévaloir le
principe que nulle loi ne pût être valable sans
leur consentement ; on les vit, sous Richard II,
refuser des subsides, et sous Henri IV faire
usage pour la première fois du droit d’enquête,
et étendre l’exercice de ce droit à toutes les
parties de l’administration. Sous le même
règne, un statut déclara que les membres
des Communes ne pourraient être arrêtés à
raison de leurs discours au Parlement. Cette
garantie contre les arrestations arbitraires
fut étendue aux membres de leurs familles et
à leurs serviteurs. Jusqu’alors les Communes
n’avaient communiqué avec le roi que par
écrit ; elles introduisirent l’usage de présenter
leurs adresses de vive voix. Ces adresses
critiquaient souvent les mesures et les agents
du gouvernement, et même sa politique étrangère.
Sous Henri V et Henri VI, leurs privilèges
s’étendirent encore : elles s’arrogèrent le
droit de mettre en accusation les ministres,
dénièrent aux lords le droit de faire des modifications
aux lois de finance, et réglèrent
minutieusement le mode de leur élection. Pendant
toute la période du moyen âge, et même
pendant les deux premiers siècles de l’ère
moderne, tous ces privilèges existèrent beaucoup
plus dans les lois que dans les faits.
Maintes fois la couronne leva des taxes, fit
des guerres et des alliances sans se soucier
des remontrances de la Chambre des communes.
La prison et même la mort punirent
plus d’une fois une critique très-mesurée des
actes du souverain ou de ses ministres. Très souvent
aussi la couronne trouvait plus commode
d’agir, de taxer et de guerroyer sans
s’inquiéter du consentement des Communes,
Le libre exercice des privilèges de cette assemblée
n’existe en réalité que depuis la révolution
de 1688. Depuis cette année jusqu’en
1832, époque du bill de réforme, le pouvoir,
obligé d’agir avec le concours de la Chambre
des communes, ne pouvant plus lui imposer
ses volontés par la violence, les lui fit accepter
par la corruption. La constitution tout à
fait anormale du corps électoral favorisait singulièrement
ce système. Le mode de représentation
primitivement adopté avait été de
réunir les représentants des localités les plus
capables de fournir des subsides à l’État ; ce
système, suivi régulièrement, aurait naturellement donné aux comités, aux cités et aux bourgs un nombre de représentants proportionné à leur population, à leur richesse
et à leur prospérité ; il en fut autrement. Les localités invitées à se faire représenter à la