Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 7, part. 2, Em-Erk.djvu/289

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

EPER

Espagnols, après îa levée du siège de Saint-Omer, s’en rendirent maîtres de nouveau sans difficulté. L’année suivante, le maréchal de La Meilleraye recommença l’attaque ; cette fois, le fort fut pris et rasé en partie, ainsi que le château, et le commandant, qui avait refusé de se rendre, fut pendu au haut du donjon.

Le château d’Eperlecques, ancien cheflieu de la châtellenie, n offre plus aujourd’hui que quelques ruines. En 1789, on le voyait encore entouré de deux larges fossés, quil fallait franchir sur des ponts-levis. Il était construit de briques et de pierres blanches, et couvert de tuiles. Au rez-de-chaussée, on remarquait trois grandes salles et des cabinets voûtés ; au-dessous, les caves ; au-dessus, les étages, surmontés de greniers. On y voyait aussi un fournil, ainsi qu^in puits sur la terrasse, entourée de murs à droite, avec une tourelle à son angle nord. Cette tourelle était flanquée de bastions et de murailles de force. Lors de la Révolution, tous ces bâtiments tombaient déjà de vétusté. Vendus en 1794 comme propriété nationale, à la suite de l’émigration du comte d’Egmont, dernier seigneur d’Eperlecques, les restes du château lurent démolis presque entièrement, sauf la terrasse. Aujourd’hui, avec les débris, on achève de combler les fossés, et dans quelques années il n’en restera plus de vestiges. La démolition a amené la.découverte de nombreuses médailles roinaines et du moyen âge, quelques-unes même de Charles IX, de Henri IV et de Louis XIII.

L’église d’Eperlecques, elle aussi, mérite de fixer l’attention. La tour en est remarquable, le portail entouré de nervures d’un bel effet. L’architecture gothique y domine. Cette église paraît être du xive ou du xvo siècle. Le vaisseau n’est pas de la même époque, mais de 15G3 environ, et le chœur a été bâti eu 1768. La galerie qui couronne l’édifice, ornée, à. sa base, d’une guirlande de feuillagesdélicatement sculptée, et à sa partie supérieure de tètes en bas-reliefs, vues de profil, quelques-unes coiffées de casques, a pu échapper à la destruction en 1793. L’église d’Eperlecques, un curieux reste de 1 architecture du moyen âge, a subi depuis d’intelligentes restaurations.

M. Louis Delozière, facteur de la poste aux lettres, c’est ainsi qu’il se qualifie lui-même, modeste travailleur auquel il est bon de rendre justice, a publié sur Eperlecques, sa seigneurie et son église, une monographie savante, qu’a récompensée, en 1854, la Société des antiquaires de Saint-Omer (Dunkerque, 1SG1, in-8<>).

ÉPERLÈQUE s. m. (é-pèr-lè-ke). Arboric. Nom d’une variété d’orme.

ÉPERNAUX s. m. pi. (é-per-nô). Agric. Ouvertures des claies des parcs à moutons. ■

EPERNAY, en latin Sparnacum, proprement Meu abondant en épines, épinaie, du celtique spernec, qui signifie lui-même épinaie, ville de France (Marne), chef-liêu d’arrond, à 33 kilom. N.-O. de Châlons-sur-Marne, à 142 kilom. N.-E. de Paris par le chemin de fer de Strasbourg, sur la Marne ; pop. aggl. 11,358 hab. — pop. tôt. 11,704 hab. Tribunaux de première instance et de commerce, col—lége communal, bibliothèque, chambre d’agriculture, comice agricole, cercle du commerce. Epernay est Te centre du commerce des vins de Champagne. L’arrondissement fournit des vins de première qualité, qui se récoltent sur des coteaux très-célèbres dont les noms se trouvent ci-dessous, et dont la réputation, comme vins non mousseux, était établie dès le moyen âge.

Flodoard rapporte quePardulle, évêque de Laon, dans une lettre adressée à Hincmar vers 880, recommande a l’illustre prélat les vins d’Epernay comme les meilleurs pour la santé. Le canton d’Epernay possède près de 1,200 hectares de vignes, dont plus de 800 produisent des vins blancs. La côte, rapide en plusieurs endroits, se compose généralement d’un calcaire argileux, souvent mêlé de pierres et ayant la craie pour sous-sol. Son orientation regarde le sud-est. Les vignes les plus estimées dans le vignoble d’Epernay proprement dit sont’ le Closet et les Pateleines. Presque toutes ces vignes sont peuplées de cépages rouges.

Epernay se trouve sur un terrain admirablement favorisé pour l’établissement des caves ; celles-ci sont creusées dans des bancs de craie ; elles sont vastes et tout à fait proprès à la conservation et à l’amélioration des vins. On cite celles de M. Moet, les plus étendues, qui sont aussi solides que si elles étaient soutenues par des voûtes de pierre, et forment une espèce de labyrinthe dans lequel un guide est nécessaire. Les voyageurs ne manquent jamais de les visiter et d’y admirer surtout la tapisserie, qui se compose de bouteilles artistement rangées le long de la muraille, jusqu’à une hauteur de six pieds.

Les principaux crus de l’arrondissement d’Epernay sont : Mareuil - sur - Aï, Vertus, Mouzy, Damery, Chouilly, Dizy, Ablais, Pierry, Grauves, Vinay, Mesnil-Cramant, Avise et Hautvillers.

Le vignoble de Cumières, à 3 kilomètres d Epernay, est placé sur les coteaux dits de la Jtivière de Marne, et touche aux cantons les plus célèbres pour leurs vins blancs ; il n’a pourtant <fe réputation que pour ses vins routes, qui sont plus fins et plus délicats que

EPER

ceux de Reims, mais auxquels on reproche de posséder moins’de corps et de spiritueux ; ils sont si précoces que, lorsqu’ils proviennent d’une année chaude, ils parviennent à leur maturité dès la première année ; en revanche, ils se conservent rarement au delà de trois à quatre ans.

Les meilleurs crus sont : Côte à.bras, les Barillets, etc.

La pièce de vin, à Cumières, se paye en moyenne de 55 à 60 fr.

Nous citerons aussi Aï, dont les vins blancs, assez doux, fins et délicats, sont plus légers que ceux de Sillery.

« Quand les poeies veulent chanter le Champagne, c’est presque toujours le pétillant aï qu’ils célèbrent dans leurs vers. Aïl nom glorieux qui assure l’immortalité à la petite ville qui le porte, le temps a soufflé sur de puissants empires, sur de vastes et opulentes cités, qui ont disparu de la surface du globe sans laisser trace de leur passage, tandis que tu vivras toujours dans la mémoire des gourmets reconnaissants. Nous savons que François Ier, Charles-Quint, Henri VIII, Léon X possédaient des vignes à Aï ; nous connaissons la prédilection 3e Henri IV pour ce vin, qu’il proclamait le meilleur de tous ; on dit aussi que Louis XIV, qui se connaissait en bonnes choses, le préférait à beaucoup d’autres ; mais rien ne semble prouver que le vin d’Aï que buvaient ces princes fût mousseux. Je suis même très-disposé à croire qu’il était parfaitement non mousseux et tranquille, et cela par la simple raison que voici.-c’est que s’il eut été autrement, l’histoire en aurait sans doute fait mention. On sait, au surplus, que dans les bonnes années, les vins d’Aï non mousseux ont un bouquet et un parfum dont l’exquise délicatesse justifie suffisamment la haute préférence dont ils étaient l’objet. » (Sutaine, lissai sur l’histoire des vins de la Champagne.)

Lorsque les raisins du vignoble d’Aï ont acquis leur parfaite maturité, les vins qu’ils produisent conservent pendant de longues années la douceur qui leur est naturelle, sans aucune addition de parties sucrées. On distingue à Aï les vignes nommées Charmontânier, les Blancs-Fossés, les Doualles, etc.

Le vignoble d’Aï s’étend entre Dizy et Mareuil ; il comprend près de 300 hectares de bonne qualité. La chaîne de montagnes plantées de vignes se découpe, en plusieurs endroits, en conques ou vallons, formés par de petits rameaux qui se croisent en sens divers et déterminent autant d’expositions variées, parmi lesquelles celle du sud domine. Les deux cépages les plus cultivés sont le plant doré et le plant vert doré ; on Compte aussi un dixième de plant gris.

La pièce d’aï, bon choix, se paye de 180 à 200 fr., Les vignes y valent jusqu’à 15,000 fr. l’arpent de 43 ares.

Epernay possède des fabriques de bou—chons, de tonnellerie, des ateliers de réparation de machines du chemin de fer deLEst, des tanneries, des imprimeries, etc. La situation de la ville est très-agréable. Epernay est entouré de boulevards. On y voit bien encore.des maisons mal bâties et des rues mal pavées, mais chaque jour la ville s’embellit ; on y trouve aujourd’hui des habitations magnifiques, des rues larges, — de jolies promenades et des places régulières, notamment la place de l’Église, décorée d’une belle fontaine avec une statue de bronze.’La prospérité croissante d’Epernay est due surtout à l’extension que prend de jour en jour le commerce des vins de Champagne dont elle est le centre.

Epernay ne possède que des édifices modernes. Le plus important est l’église paroissiale, dont la façade est décorée d’un portique d’ordre dorique. Elle a été construite dans ces derniers temps, en remplacement d’une église gothique dont elle a conservé à l’extérieur une entrée latérale de la Renaissance, d’une riche et élégante architecture, et à l’intérieur des vitraux anciens très-estimés des connaisseurs. L’un de ces vitraux représente Noë foulande vin.

La façade du palais de justice, précédée d’un large perron, se compose d’un rez-dechaussée et d’un premier étage. « Elle comprend, dit M. Joanne, un corps de logis central et deux pavillons extrêmes, que relientdeux ailes de bâtiments, légèrement en retraite. Le premier étage est décoré d’une ordonnance de colonnes et de pilastres du style corinthien. L’ensemble offre un aspect assez grandiose. » Nous nous bornerons a signaler : la bibliothèque publique (13,000 volumes) ; le collège ; le théâtre ; la sous-préfecture ; l’hospice ; la chapelle Saint-Laurent, le monument le plus ancien de la ville ; les restes d’une habitation du xvie siècle, élevée par Louise de Savoie ; deux tours qui ont fait partie des anciennes fortifications, etc. Le faubourg de la Folie, un des plus beaux quartiers d’Epernay, doit probablement son nom aux splendides habitations que les plus riches négociants en vins de Champagne y ont fait élever.

L’origine d’Epernay est ancienne, niais on ne connaît pas d une manière précise la date de sa fondation. Des documents historiques établissent clairement que son existence est antérieure au règne de Clovis. Jadis entourée de remparts, elle fut souvent assiégée et pillée au moyen âge. Henri IV la prit en 1592, après un siège long et meurtrier. Les alliés,

ÈPER

en 1814, ont occupé cette ville à plusieurs reprises. C’est la patrie du P. Loriquet.

— Bibliogr. On peut consulter sur cette . ville les ouvrages suivants : Histoire de ta ville d’Epernay, par H.-M. G"* (Epernay, an VIII [1800], 2 vol. in-12)- Notice historique et statistique des rues et places de la ville et des faubourgs d’Epernay, présentée au conseil municipal de cette ville, en exécution d’une délibération du 10 mai 1836, par H.-H.-8. Poterlet (Epernay, 1837, in-8o, avec une vue de cette ville en 1592) ; Concilium Spamacense, anno 847 (impr. dans l’édit. du Louvre, t. XXI,

&517 ; dans Labbe, t. VII, p. 1852, et dans ar*douin, t. IV, p. 1515) ; Discours du siège et prise de la ville d’Epernay du 9 août 1502 (1598, in-8<>) ; Siège et prise d’Epernay (1592), par M. Henry (Reims, 1860, br. in-S°) ; Réponse à la lettre de M. le docteur Jiousseau sur l’administration municipale de la ville d’Epernay, par les rédacteurs de VEcho spamacien (Epernay, 1840, in-4o). On trouve citée dansLelong-Fontette une Histoire de la ville d’Epernay, par Bertin du Rocheret (ms. infol.)

ÉPERNÉE s. f. (é-pèr-né). Bot. Genre d’arbres de la Guyane, de la famille des légumineuses.


ÉPERNON, en latin Sparno, bourg de France (Eure-et-Loir), canton de Maintenon, arrond. et à 27 kilom. de Chartres, pittoresquement situé sur le penchant et au pied d’une colline dont la base est baignée par les belles eaux de la Gueslie ; 1,753 hab. Carrières de pierres meulières. Épernon, qui avait autrefois titre de ville, était défendue par une forteresse imposante dont on attribue la fondation à Hugues Capet ou à son fils Robert.

Sous Charles VI, la ville et le château tombèrent au pouvoir des Anglais, qui y demeurèrent longtemps et ne se décidèrent à s’éloigner qu’après avoir fait sauter les tours à l’aide de la mine. Indépendamment du château qui la protégeait, la ville possédait encore de solides murailles.

Après avoir dépendu de la maison royale de France, Épernon passa dans la maison de Montfort ; cette baronnie appartint ensuite tour à tour aux Vendôme et aux d’Albret. En 1581, Henri III l’acquit du roi de Navarre, pour la donner, avec érection en duché-pairie, à l’un de ses mignons, Nogaret de La Valette, si connu depuis sous le titre de duc d’Épernon. Après ce dernier, la seigneurie passa dans la famille de Goih de Rouillac, puis dans celle d’Antin, en perdant le titre de pairie. Enfin elle échut par acquisition au maréchal de Noailles, dont les descendants en possédaient encore le domaine à la fin du XVIIIe siècle. Épernon n’a pas d’autres souvenirs, et il reste à peine aujourd’hui trace de son ancien château.

De larges escaliers de grès conduisent de l’église, qui n’a aucune valeur architecturale, à la partie haute du bourg, où se voit un curieux édifice du XIIIe siècle, composé de trois nefs à voûtes d’ogive, soutenues sur de lourds piliers. Ces salles basses sont connues sous le nom de la Diane ou de Pressoirs d’Épernon.


ÉPERNON (Jean-Louis de Nogaret de La Valette, duc d’), pair et amiral de France, né dans le Languedoc en 1554, mort à Loches en 1642. Après avoir fait, sous le nom de La Valette, ses premières armes au combat de Mauvesin (1570), où il sauva la vie à son père, Jean de Nogaret, seigneur de La Valette, il parut au siège de La Rochelle, en 1573, se distingua, sous le duc d’Alençon, dans les guerres contre les huguenots, aux sièges de la Charité, d’Issoire (1577), de Brouage et de La Fère (1580). Henri III, dont il sut attirer l’attention par sa belle figure, par ses manières à la fois hautaines et doucereuses, en fit un de ses mignons et accumula sur sa tête une multitude de dignités : l’ordre du Saint-Esprit, les titres et grades de pair, de duc d’Épernon (1581), de colonel-général de l’infanterie (1581), d’amiral de France ; les gouvernements des Trois-Évêchés (1583), du Boulonnais (1583), de l’Angoumois, de la Touraine, de l’Anjou. Le roi promit, en outre, à son favori la main de sa belle-sœur, Christine de Lorraine, et, en attendant qu’elle fût en âge d’être mariée, il donna à d’Épernon 300,000 écus, qui devaient constituer sa dot. Lorsque Henri III, effrayé par la direction que les Guises imprimaient à la Ligue, résolut de se rapprocher du roi Henri de Navarre, il chargea d’Épernon de négocier une alliance avec ce dernier ; mais cette mission n’eut aucun succès. Peu après, il lui donna le gouvernement de la Normandie, le plus considérable du royaume (1587). Cette nouvelle faveur, ajoutée à tant d’autres, accrut encore l’impopularité du favori, qui, du reste, fatiguait le roi par son avidité, par son orgueil, par la hauteur avec laquelle il usait de ses bienfaits. Les clameurs qui s’élevèrent contre d’Épernon furent telles que Henri III, pour les apaiser, enleva au duc une partie de ses gouvernements et l’exila à Loches (1588), Néanmoins, après l’assassinat du duc de Guise, d’Épernon revint à la cour, reprit tout son crédit, fut mis à la tête de l’armée royale qui marcha sur Paris et s’empara de Montereau et de Pontoise.

Sur ces entrefaites, Henri III fut assassiné (1589). Zélé catholique, d’Épernon se déclara d’abord contre Henri IV et retourna dans son gouvernement de l’Angoumois. S’étant rallié ensuite à sa cause, il fut employé par le roi à soumettre les villes du Languedoc et de la Provence. Nommé gouverneur de cette dernière province, il s’y rendit odieux par son orgueil, son despotisme et sa rapacité, manifesta des prétentions d’indépendance, ouvrit même des négociations avec l’Espagne et conclut, en 1595, avec Philippe II, un traité par lequel il s’engageait à faire la guerre au roi et aux hérétiques. Mais, la Provence s’étant soulevée contre lui, il se vit contraint de quitter son gouvernement (1596) et se rendit alors auprès de Henri IV, qui consentit à l’acheter moyennant une somme do 50,000 écus, outre le gouvernement du Limousin.

Lorsque Henri IV fut mortellement frappé par Ravaillac (1610), d’Épernon, qui se trouvait auprès de lui, le ramena au Louvre, prit en main le pouvoir et fit reconnaître le lendemain Marie de Médicis comme reine régente. Cette princesse, en récompense de ce service, lui accorda de nouveaux honneurs ; mais il continua de se rendre insupportable par son humeur irascible et hautaine. En 1618, voyant le garde des sceaux prendre place, à Saint-Germain-l’Auxerrois, avec les ducs et pairs, il le contraignit rudement à se retirer, et il en résulta un conflit à la suite duquel il dut se rendre dans son gouvernement de Metz. Ennemi du favori de Luynes, il prépara l’évasion de Marie de Médicis, exilée à Blois (1619), et ce fut lui qui rédigea le traité de paix fait à Angoulême entre Louis XIII et sa mère. Bien que son crédit eût considérablement baissé à la cour, il obtint néanmoins, en 1622, le gouvernement de la Guyenne, que les princes du sang avaient seuls possédé jusqu’alors. Exilé en quelque sorte dans son gouvernement, il y eut avec Sourdis, archevêque de Bordeaux, un démêlé fameux qui remplit sa vieillesse d’amertumes et d’humiliations. Ayant bâtonné le prélat sous le portail de son église. (1632), il fut exilé à Coutras (1633) et ne put reprendre possession de son gouvernement qu’après avoir écrit une lettre d’excuses à Sourdis et avoir écouté à genoux la réprimande que l’évêque lui fit avant de l’absoudre. Privé de ses dignités en 1641, il alla finir ses jours à Loches, après avoir troublé le royaume par ses intrigues et les prétentions de son insupportable orgueil. Il tirait de sa province plus d’un million de revenu, et son faste était tel qu’il exigeait de ses gardes les mêmes preuves de noblesse que pour les chevaliers de Malte. Le duc d’Épernon avait eu de son mariage avec Marguerite de Foix trois fils : Henri, duc de Candale (v. Candale ; Bernard, duc d’Épernon (v. plus loin), et Louis, connu sous le nom de cardinal La Valette (v. La Valette).


ÉPERNON (Marguerite {{sc|de Foix-Candale, duchesse d’) , femme du précédent, petite-fille, par sa mère, du connétable de Montmorency, morte en 1593. Elle devint, en 1587, l’épouse de Jean-Louis de Nogaret de La Valette, créé duc d’Epernon le 27 novembre 1581 par Henri III, dont il était un des favoris, un des mignons. En 1588, le duc d’Épernon, gouverneur de la Guyenne, s’était enfermé dans le château d’Angoulême. Sa femme, toujours en avant dans les sorties qu’exécutaient les assiégés contre les assiégeants, toujours au fort de la mêlée, est faite prisonnière. Certes, l’otage est précieux et les ennemis croient déjà tenir par lui la victoire. Donc, on l’emmène sous les remparts, et le duc d’Épernon ayant été mandé, on lui annonce que, s’il ne se rend sur l’heure, Sa femme sera égorgée sous ses yeux. Mais elle, inaccessible à la peur, fière du nom qu’elle porte et ne voulant pas, même au prix de sa vie, le voir déchoir, supplie son mari de faire taire les sentiments de son cœur, et elle l’engage à n’écouter que son devoir. À quelques jours de là, Marguerite, que son sublime courage, sa grande âme, avaient fait respecter de ses ennemis, rentrait en triomphe dans la ville d’Angoulême, qui, secourue par les troupes royales, avait pu chasser de ses murs les assiégeants.

Brantôme a dit que Marguerite de Foix fut une des femmes les plus agréables de son temps ; elle fut aussi, nous venons de le voir, épouse dévouée et vaillante héroïne. Elle mourut âgée de vingt-six ans.


ÉPERNON (Bernard de Nogaret de La Valette, duc d’), général français, fils des précédents, né à Angoulême en 1592, mort en 1661. Il fut connu, jusqu’à la mort de son père (1642), sous le nom de duc de La Valette. Dès l’âge de dix-huit ans, il obtint la survivance de la charge de colonel-général d’infanterie, combattit aux sièges de Saint-Jean-d’Angely, de Royan (1621), à l’attaque du pas de Suze (1629), en Picardie (1636), en Guyenne, et se signala alors contre les Espagnols, qui avaient envahi le pays de Labour, puis contre les paysans révoltés. Chargé par le prince de Condé, en 1638, de diriger l’assaut au siège de Fontarabie, il refusa, la brèche n’étant pas assez large, et dut céder son poste à Sourdis, qui se vit forcé dans ses lignes et obligé de regagner ses vaisseaux avec le prince de Condé. Ce désastre fut attribué au duc de La Valette, qui n’y était pour rien et qui avait, au contraire, mérité des éloges en ralliant et conduisant à Bayonne les débris de l’armée. Richelieu, qui le haïssait, le fit traduire devant un