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est assez disposé à croire que ces artistes étaient des personnages vivant dans les cloîtres et tout attachés aux plus étroites pratiques religieuses. Mais, sans prétendre que ces artistes fussent des croyants tièdes, il serait cependant assez étrange que ce sentiment religieux se fût manifesté d’une manière tout à fait remarquable dans l’art de la statuaire précisément au moment où les arts ne furent plus guère pratiqués que par des laïques, et sur ces cathédrales pour la construction desquelles les évêques se gardaient bien de s’adresser aux établissements religieux. Il ne serait pas moins étrange que l’art de la statuaire, pendant tout le temps qu’il resta confiné dans les cloîtres, ne produisit que des œuvres possédant certaines qualités entre lesquelles ce qu’on peut appeler le sentiment religieux n’apparaît guère que sous une forme purement traditionnelle. Voici le vrai. Tant que les arts ne furent pratiqués que par des moines, la tradition dominait, et la tradition n’était qu’une inspiration plus ou moins rapprochée de l’art byzantin. Si les moines apportaient quelques progrès à cet état de choses, ce n’était que par une imitation plus exacte de la nature. La pensée était pour ainsi dire dogmatisée sous certaines formes ; c’était un art hiératique tendant à s’émanciper par le côté purement matériel. Mais lorsque l’art franchit les limites du cloître pour entrer dans l’atelier du laïque, celui-ci s’en saisit comme d’un moyen d’exprimer ses aspirations longtemps contenues, ses désirs et ses espérances. L art, dans la société des villes, devint, au milieu d’un état politique très-imparfait, une sorte de liberté de la presse, un exutoire pour les intelligences toujours prêtes à réagir contre les abus de l’état féodal. La société civile vit dans l’art un registre ouvert où elle pouvait jeter hardiment ses pensées sous le manteau de la religion : que cela fût réfléchi, nous ne le prétendons pas, mais c’était un instinct, l’instinct qui pousse une foule manquant d’air vers une orte ouverte. Les évêques, au sein des villes du Nord, qui avaient dès longtemps manifesté le besoin de s’affranchir des pouvoirs féodaux, dans ce qu’ils crurent être l’intérêt de leur domination, poussèrent activement à ce développement des arts, sans s’apercevoir que les arts, une fois entre les mains laïques, allaient devenir un moyen d’affranchissement, de critique intellectuelle dont ils ne seraient bientôt plus les maîtres. Si l’on examine avec une attention profonde cette sculpture laïque du xiiie siècle, si on l’étudie dans ses moindres détails, on y découvre bien autre chose que ce qu’on appelle le sentiment religieux : ce qu’on y voit, c’est avant tout un sentiment démocratique prononcé, dans la manière de traiter les programmes donnés, une haine de l’oppression qui se fait jour partout, et ce ui est plus noble, ce qui en fait un art digne de ce nom, le dégagement de l’intelligence des langes théocratiques et féodaux… Il ne faudrait pas croire cependant que ces statuaires du xiiie siècle n’ont pas pu, quand ils l’ont voulu, exprimer cette sérénité brillante et glorieuse qui est le propre de la foi. A Paris, à Reims, bon nombre de figures sont empreintes de ces sentiments de noble béatitude que l’imagination prête aux êtres supérieurs à l’humanité. Les anges ont été pour eux un motif de compositions remarquables, soit comme ensemble, soit dans l’expression des têtes. » On peut voir dans les voussures de la porte principale de Notre-Dame de Paris deux zones d’anges à mi-corps, dont les gestes et les expressions sont d’une grâce ravissante. La cathédrale de Reims a conservé une grande quantité de ces représentations d’êtres supérieurs, traitées avec un rare mérite.

Les sculpteurs du xiiie siècle ont possédé le sens dramatique beaucoup plus qu’on ne croit généralement. Les groupes de damnés, sculptés dans les voussures de la porte centrale de Notre-Dame de Paris, ont une expression terrible que font mieux ressortir encore la béatitude et le calme des élus. Les Prophètes, les Vices du portail de la cathédrale d’Amiens, les bas-reliefs des porches de Notre-Dame de Chartres offrent des scènes très-pathétiques. Les nombreuses figures colossales, exécutées à cette époque, se font remarquer par un caractère de véritable grandeur qu’elles doivent à la largeur du modelé, à la simplicité de l’ajustement. Mais il est une qualité, dans la bonne statuaire de cette période, dont on ne saurait trop tenir compte : c’est celle qui consiste à bien répartir la lumière sur les compositions ou les figures isolées, afin d’obtenir un effet, une pondération des masses. Rien de plus intime, d’ailleurs, que l’alliance de la sculpture et de l’architecture dans les monuments du xiiie siècle. La sculpture d’ornement y sert de lien, de transition naturelle entre les formes architectoniques et celles de la figure humaine. Les façades des cathédrales de Paris, d’Amiens, certaines parties de Notre-Dame de Chartres, de la cathédrale de Laon, montrent avec quelle entente de la composition les maîtres de cette brillante époque savaient rattacher l’ornementation à l’architecture. Les motifs de cette ornementation étaient puisés tantôt dans une flore plantureuse, dont les moindres détails étaient reproduits avec une souplesse et une réalité extraordinaires, tantôt dans une faune composée d’animaux réels, tels que lions, panthères, ours, etc., ou d’animaux fabuleux, comme le griffon, le phénix, la harpie, la sirène, le basilic, la salamandre, le dragon, la guivre, la caladre, le pérédoxion, etc.

Sous le rapport iconographique, la statuaire des cathédrales de cette époque diffère essentiellement de celle des églises monastiques élevées antérieurement. Au lieu de s’en tenir presque exclusivement aux sujets tirés des légendes, elle va chercher ses inspirations dans l’Ancien et le Nouveau Testament ; elle se passionne pour les encyclopédies et essaye de rendre saisissables pour la foule certaines idées métaphysiques. Si les scènes principales indiquées dans le Nouveau Testament prennent la place importante, si le Christ assiste au Jugement, si le royaume du ciel est figuré, si l’histoire de la Vierge se développe largement, si la hiérarchie céleste entoure le Sauveur ressuscité, à côté de ces scènes purement religieuses apparaissent l’histoire de la Création, le combat des Vertus et des Vices, des figures symboliques, l’Eglise personnifiée, les Vierges sages et les Vierges folles, la Terre, la Mer, les productions terrestres, les Arts libéraux ; puis les Prophètes qui annoncent la venue du Messie, les ancêtres du Christ, le cycle davidique commençant à Jessê. Il y a dans cette statuaire de nos grandes cathédrales un ordre, et un ordre très-vraisemblablement établi par les évêques, suivant un système étranger a celui qui avait été admis dans les églises conventuelles ; mais, à côté de cet ordre, il y a l’exécution qui, elle, appartient à l’école laïque. Or, c’est dans cette exécution qu’apparaît un esprit d’indépendance tout nouveau alors, mais qui, pour cela, n’en est pas moins vif. Dans les représentations des Vices condamnés à la géhenne éternelle, les rois, les seigneurs, ni les prélats ne font défaut. Les Vertus ne sont plus représentées par des moines, comme sur les chapiteaux de quelques portails d’abbayes, mais par des femmes couronnées : l’idée symbolique s’est élevée ; parmi ces Vertus apparaît, comme à Chartres, la Liberté (Libertas).

Ces tendances philosophiques et encyclopédiques, qui se manifestent dans l’art du xiiie siècle, constituent l’un des mouvements intellectuels les plus intéressants de notre histoire.

Outre les splendides décorations, véritables poëmes qu’elle déroula sur les portails des cathédrales, les chapiteaux des piliers et les retables des autels, la statuaire du xiiie siècle produisit une multitude de figures de ronde bosse et de bas-relief, en pierre, en terre, en métal, pour l’ornementation des chapelles, des sanctuaires et des tombeaux. Les monuments de cette dernière sorte devinrent très-nombreux et très-remarquables à partir de cette époque ; la plupart ont été détruits, mais nous pouvons citer, d’après les chroniqueurs, quelques-uns des plus importants : tels sont ceux du savant docteur Alain de Lille (1203) et de l’abbé Arnaud Amalric (1225) au monastère de Cîteaux, ceux de l’évêque Eudes de Sully (1208), de Philippe-Auguste et de Louis VIII à Notre-Dame de Paris, celui de l’évêque Evrard dans la cathédrale d’Amiens, ceux de Philippe-Dagobert, frère de saint Louis, et du fils de ce dernier dans l’abbaye de Royaumont, celui de Blanche de Castille (1253) dans l’abbatiale de Maubuisson, les cénotaphes de Charles Martel, de Hugues Capet et de plusieurs autres princes à Saint-Denis, les mausolées des comtes de Provence dans l’église de Saint-Jean de Jérusalem, à Aix, ceux des princes de Dreux dans l’église de Saint-Yved, à Braine, etc.

Les progrès de la sculpture ne se ralentirent pas au xive siècle ; ce qui est surtout remarquable, dit Eméric David, c’est que l’emploi de cet art s’introduisit de plus en plus, à cette époque, dans la vie civile : « L’argenterie devint plus commune dans les habitations des grands, et elle fut ornée, plus richement encore qu’au siècle précédent, d’émaux, de nielli, de bas-reliefs. Curieux d’abord de ces ouvrages par pure ostentation, l’homme riche apprit successivement à les estimer à cause de leur beauté. Après avoir admiré les productions de l’art en raison de la rareté du métal, il les rechercha pour l’art lui-même. Tandis que la peinture couvrait d’images les murs des palais, la sculpture en façonnait les portes et les lambris, elle en décorait les sièges, elle en enrichissait les vastes cheminées. L’art de peindre sur verre métamorphosait les vitraux en tableaux historiques ; celui de retreindre les métaux multipliait les aiguières émaillées, les coupes, les bassins à laver et tout le mobilier des tables. Plus d’un château devint une sorte de musée où chaque salle offrit toute la perfection alors possible dans tous les arts du dessin. Vraisemblablement par goût, mais plus encore par un motif de politique, nos rois surent habilement profiter de ces progrès de l’industrie pour en faire un instrument de leur grandeur. Plus riches que les seigneurs, ils parvinrent sans peine à les effacer tous par la somptuosité de leurs habitations. L’or dont elles brillaient frappa la multitude et éblouit les grands eux-mêmes. Philippe le Bel et Charles V établirent et consolidèrent leur puissance, autant par l’imposant appareil dont les environnaient les beaux-arts que par l’agrandissement de leurs domaines. L’orgueil, vaincu par cette magnificence, fut réduit à s’incliner devant la majesté royale. Marigny servait aussi utilement la France en décorant les palais de Philippe le Bel, que Richelieu, trois cents ans plus tard, en accroissant la pompe de ceux de Louis XIII. Le peuple, qui l’accusait de dissiper dans ces dépenses les trésors publics, méconnaissait le moyen que ce ministre faisait agir pour les progrès de l’industrie, et calomniait aveuglément une des sources de sa future richesse. » Ce développement, cette floraison de l’art industriel, est, en effet, un des caractères distinctifs du xive siècle.

La sculpture proprement dite produisit, à cette époque, une foule d’œuvres importantes dans la décoration des églises, des palais, des tombeaux. Les cathédrales d’Orléans et de Bourges, l’église Saint-Ouen, à Rouen, sont ornées d’une multitude de figures sculptées en ronde bosse ou en bas-relief. Comme spécimen des grandes compositions dont on décora l’intérieur même des églises, nous citerons les sculptures encore existantes que maître Jean Ravy et son neveu maître Jean Le Bouteiller exécutèrent sur le pourtour du chœur de Notre-Dame de Paris, et où ils ont retracé la vie et la passion de Jésus-Christ. Cette même cathédrale s’enrichit, au xive siècle, des statues des donataires ou fondateurs de quelques-unes des chapelles, ainsi que de plusieurs mausolées remarquables. D’autres églises de Paris, les Cordeliers, les Jacobins, les Carmes, les Augustins, reçurent les tombeaux de divers personnages.

Ce siècle eut véritablement la manie des tombes fastueuses. On ne se contenta pas d’en ériger en l’honneur des hommes éminents par leurs talents ou par les dignités dont ils avaient été revêtus ; le désir de se distinguer encore après la mort poussa de simples particuliers, qui n’avaient eu d’autre mérite que celui d’être riches, à préparer pour eux et pour les leurs d’orgueilleuses sépultures. Un évêque de Paris, Guillaume V, mort en 1318, prouva qu’il avait la reconnaissance… de l’estomac, en consacrant à son cuisinier, dans le cloître de l’abbaye de Saint-Victor, une tombe sur laquelle il fit représenter une poêle et une broche. Charles V fit élever des tombes monumentales à la mémoire de ses deux bouffons favoris ; l’une de ces tombes, érigée dans l’église Saint-Maurice de Senlis, existait encore au milieu du xviie siècle.

L’emploi de l’albâtre, matière plus douce et plus transparente que le marbre et la pierre commune pour représenter le visage et les mains des statues, fut adopté par un grand nombre d’artistes de cette période ; il témoigne d’une intention bien marquée de parvenir à une imitation fidèle, animée, parlante ; c’est un premier symptôme du naturalisme qui devait, par la suite, envahir le domaine de l’art. L’usage de colorier les sculptures fut très-répandu pendant tout le moyen âge.

Au xve siècle, les monuments funéraires continuent à se multiplier. Dans la plupart, les statues iconiques et de petites figures allégoriques, sculptées en albâtre blanc, se détachent sur le sarcophage en marbre noir. D’autres tombeaux sont exécutés en bronze. L’art de fondre, de repousser, d’émailler et de ciseler les métaux avait fait de grands progrès. Un des ouvrages les plus importants en ce genre est le monument élevé en l’honneur de Jeanne Darc à Orléans (v. Darc). Le tombeau en marbre de Philippe le Hardi, que conserve le musée de Dijon, donne une haute idée du talent des statuaires de cette époque : il a été exécuté par Claux Sluter, Claux de Verne et Jacques de la Barse ou Baer. En 1444, Philippe le Bon fit élever, dans l’église des Chartreux, de Dijon, à côté du tombeau de Philippe le Hardi, celui de Jean sans Peur. Le statuaire, directeur de l’ouvrage, fut Juan de la Vuerta, Espagnol, natif de l’Aragon ; il eut pour collaborateurs Jean de Drogués, vraisemblablement Espagnol, et Antoine Le Mouturier, évidemment français, si l’on en juge par le nom. Les artistes en renom que les princes faisaient venir des pays étrangers formaient, sans doute, des disciples en France et exerçaient une certaine influence sur le développement de l’art indigène ; mais, jusqu’à la fin du xve siècle, cette influence étrangère ne modifia pas sensiblement les caractères particuliers que le génie naturel avait imprimés à la statuaire pendant les siècles précédents. Nous ne possédons que des renseignements bien incomplets sur les sculpteurs français de cette période. Parmi ceux dont les noms sont parvenus jusqu’à nous, nous citerons : Raimond du Temple et Robert Fauchier, maîtres des œuvres des maisons royales, sous Charles V, en 1403 ; Jean Vilain et Jean Mainfroy, orfèvres sculpteurs et valets de chambre du duc Jean sans Peur ; Jean de Clichy, Gautier du Four et Guillaume Bocy, qui exécutèrent, en 1403 et 1409, une magnifique châsse et un devant d’autel pour l’église Saint-Germain-des-Prés, à Paris ; Philippe de Foncières et Guillaume Josse, les meilleurs sculpteurs du temps de Charles VII (ils exécutèrent plusieurs statues pour le Louvre, entre autres, celle de Charles VI et celle de Charles VII) ; Jean Gansel, qui termina, en 1439, la construction et la décoration du portail de Saint-Germain-l’Auxerrois ; Léon d’Alvéringue et Pierre Soquetti, architectes et sculpteurs, qui travaillaient, en 1465 et 1470, dans l’église de Saint-Maximin, en Provence, et qui commencèrent, en 1476, le portail de l’église Saint-Sauveur, à Aix ; Simon Leroy, qui sculpte six anges pour la décoration du jubé de Saint-Germainl’Auxerrois ; Richard Taurin, de Rouen, l’un des plus habiles sculpteurs de son temps, qui fit les belles stalles de la cathédrale de Milan et celles de l’église de Sainte-Justine, à Padoue ; Antoine de Hancy et les frères Jacquet, autres sculpteurs en bois, qui exécutèrent des travaux remarquables dans diverses églises de Paris ; Le Maire, Jean Lescot et Jean Lehun (ou Jean de Louen ?), qui sculptèrent les statues du grand portail de la cathédrale de Rouen ; Philippot Viard, maistre huchier, qui fit le plan et le dessin des stalles de cette même cathédrale (en 1457), et qui fut peut-être le maître de Richard Taurin cité plus haut ; Jean de Vitry, qui sculpta, en 1465, les stalles de l’église Saint-Pierre, à Saint-Claude (Jura), etc.

Plusieurs écrivains ont prétendu qu’à partir des premières années du xvie siècle, la statuaire française subit une transformation radicale sous l’influence de la renaissance italienne ; mais, ainsi que l’a établi Emeric David dans son savant travail intitulé : Tableau historique de la sculpture française, ce ne fut guère qu’à partir de 1530, époque de l’arrivée en France du Rosso, que l’art italien vint supplanter les traditions nationales, et jamais la France n’avait été aussi riche en grands statuaires que dans les quarante années (1490 à 1530) qui terminèrent le xve siècle et commencèrent le xvie. Un des maîtres les plus éminents de cette époque fut Michel Colombe ou Coulombe, à qui l’on doit le beau mausolée de François II, duc de Bretagne, terminé en 1507 (aujourd’hui dans la cathédrale de Nantes), et qui fit les dessins des tombeaux de l’église de Brou (en Bresse), il fut secondé dans ses travaux par son neveu Guillaume Regnault et son disciple Jean de Chartres. Amé le Picard, Amé Carré et Jean Rollin ont exécuté la plupart des statues en pierre du jubé de la chapelle de Marguerite d’Autriche, dans l’église de Brou. André Colomban, de Dijon, et Philippe de Chartres, artistes de grand mérite, firent d’importants ouvrages dans ce même édifice. Pierre Terrasson, de Bourg, y exécuta des sculptures en bois. Mais le maître le plus marquant de cette époque, l’émule de Michel Colombe, fut Jean Juste, de Tours, l’auteur du magnifique tombeau de Louis XII, qui a été attribué par erreur au Florentin Paul-Ponce Trebatti.

Une œuvre non moins digne d’éloge fut exécutée à Chartres, à la même époque : nous voulons parler des groupes en ronde bosse et des bas-reliefs qui ornent la ceinture extérieure du chœur de la cathédrale. Cette suite se compose de quarante et un groupes représentant autant de sujets puisés dans la vie de Jésus et dans celle de la Vierge. Les quatorze premiers, en commençant à droite, furent l’ouvrage de Jean Texier, de Chartres, surnommé Beauce, qui en commença l’exécution, en 1514, après avoir terminé la construction et les sculptures du Clocher neuf, et qui y travailla jusqu’en 1559, époque de sa mort. Ses élèves exécutèrent, après lui, huit autres compositions, à l’extrémité opposée de la ceinture du chœur. Les dix-huit ou dix-neuf groupes de la partie intermédiaire furent sculptés, en 1611 et dans les années suivantes, par Thibaud Boudin.

François Ier a été appelé le père des arts, son mérite est de les avoir surtout honorés. Ils florissaient avant lui. L’idée d’une Renaissance sous François Ier est une chimère qui ne souffre pas le plus léger examen. C’est au commencement du xiiie siècle, ainsi que nous l’avons prouvé, qu’il faut chercher la restauration des arts, en France, comme en Italie. L’école de Fontainebleau, que fonda le Rosso, venu en France en 1530, que dirigea ensuite le Primatice, venu en 1531, et sur laquelle Benvenuto Cellini, venu en 1540, exerça à son tour une certaine influence, l’école de Fontainebleau, encouragée par les faveurs.de la cour, introduisit dans l’art français un style élégant, capricieux, très-séduisant au premier aspect, mais peu propre à satisfaire entièrement un ami de la vérité. C’est de l’époque où fut importé ce goût étranger que beaucoup d’écrivains font dater l’histoire de l’art dans notre pays. Ces écrivains ont commis une grave erreur en ce qui concerne particulièrement l’architecture et la statuaire.

Le sculpteur italien le plus renommé de l’école de Fontainebleau, — après Cellini, qui, à dire vrai, doit être considéré plutôt comme un orfèvre que comme un statuaire, — fut Paolo Ponzio Trebatti, dit Paul Ponce, qui travailla, sous la direction du Primatice, aux sculptures des résidences royales, et exécuta, à Paris, un assez grand nombre d’ouvrages, entre autres le mausolée d’Alberti Pio da Carpi, dont faisait partie une statue de bronze conservée au musée du Louvre. Paul Ponce et un autre artiste italien, Damiano del Barbiere, modelaient les figures de stuc que le Rosso et le Primatice associaient à leurs peintures décoratives. Parmi les artistes français qui puisèrent leur instruction à l’école de Fontainebleau, Félibien cite, en fait de sculpteurs, Jean et Guillaume Rondelet. Les statuaires français les plus éminents de la seconde moitié du xvie siècle, tout en sacrifiant plus ou moins au goût propagé par le Primatice et ses disciples, se formèrent en dehors de cette école. Jean Goujon apparte-