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Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 8, part. 2, Fj-Fris.djvu/322

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nait, par son éducation artistique et ses premiers travaux, à la Normandie : ses chefs-d’œuvre, — les Cariatides et les Renommées du Louvre, la statue de Diane de Poitiers, les bas-reliefs de la fontaine des Innocents, — montrent qu’il sut s’inspirer, avec un égal bonheur, de la sévérité antique et de la coquetterie italienne, et qu’il dut à l’étude de la nature la vérité de ses contours et l’âme de ses compositions. Germain Pilon puisa las premières leçons de son art dans l’atelier de son père, sculpteur manceau. Ce fut à Paris qu’il exécuta ses œuvres les plus remarquables, entre autres le groupe des Grâces, les statues de Henri II et de François Ier : s’il n’a pas réussi à imprimer à ses productions le cachet antique dont Jean Goujon a souvent marqué les siennes, s’il est tombé trop souvent, surtout pour l’exécution des draperies, dans le maniérisme italien, il a su, du moins, se montrer mâle et fier dans le nu des figures héroïques. Pierre Bontemps et Ambroise Perret furent les collaborateurs de Germain Pilon dans l’exécution du tombeau de François Ier. François Lerambert travailla au mausolée de Henri II. Barthélémy Prieur, que l’on croit élève de Pilon, ne manqua ni d’élégance ni de grâce ; mais il s’en faut bien qu’il ait conservé la fermeté et la finesse du maître ; ses meilleurs ouvrages sont les statues d’Anne de Montmorency et de Madeleine de Savoie, qui décoraient autrefois le tombeau du connétable. Ce tombeau avait été dessiné par Jean Builant, sculpteur et architecte. Parmi les sculpteurs de la même époque, nous citerons encore : François Gentil, qui orna l’église de Saint-Pantaléon, à Troyes, sa ville natale, de sculptures très-vantées ; Jean Gailde, Nicolas Havelin, François Matray, Hugues Bailly, Martin de Vaux, Nicolas Mauvoisin, Jean Brisset, Gabriel Noblet, Jacques Million, tous artistes appartenant à l’école de Troyes ; Jacques Bachot, qui demeura pendant dix ans (1495-1505) dans la même ville, et qui sculpta plusieurs des tombeaux des Guises dans la chapelle du château de Joinville ; Richier ou Ligier, qui fut, dit-on, élève de Michel-Ange, et qui exécuta, en 1530, dans l’église abbatiale de Saint-Mihiel, une Pietà, de proportions colossales, devenue célèbre sous le nom de Sépulcre de saint Mihiel ; Gaget, natif de Bar, à peu près contemporain de Richier, peut-être son élève ; Jean Cousin, peintre et sculpteur, né à Souci, près de Sens, maître du plus grand talent, qui s’inspira, en Italie, des œuvres de Michel-Ange et de Raphaël, et nous a laissé, entre autres œuvres de son ciseau, la statue tumulaire de l’amiral Chabot (1543), belle de vérité, de simplicité, de force et de noblesse ; Jacques d’Angoulêine, artiste mort jeune, après avoir exécuté, pour le petit château de Meudon (vers 1552), une statue de l’Automne, qui promettait un maître ; Nicolas Bachelier, architecte et statuaire, qui florissait à Toulouse ; Hector Lescot, qui refit, en 1571, le monument de bronze de Jeanne Darc, à Orléans ; Thibaud Boudin, sculpteur plein de finesse et d’élégance, qui termina, en 1612, la série de bas-reliefs du choeur de la cathédrale de Chartres, commencée un siècle auparavant par Jean Texier ; Jacquet, surnommé Grenoble, apparemment du lieu de sa naissance, qui exécuta, vers 1599 ou 1600, à Fontainebleau, un très-beau bas-relief représentant Henri IV à cheval ; François Briot, orfèvre et sculpteur, dont les aiguières en étain sont de véritables chefs-d’œuvre d’élégance, etc.

Plusieurs de ces artistes s’étaient formés ou perfectionnés en Italie. Jean de Bologne, que l’on est habitué à regarder comme Italien à cause du long séjour qu’il fit dans la ville dont il prit le nom, naquit à Douai en 1524 ; Michel-Ange fut son maître, et ce fut à Bologne et à Florence qu’il exécuta ses principaux ouvrages. Pierre Francheville, dit Francavilla, de Cambrai, fut son élève et passa, lui aussi, la plus grande partie de sa vie en Italie ; appelé en France, en 1601, il ne contribua pas peu à y propager le style michel-angesque. Deux autres imitateurs de Michel-Ange, Simon Guillain, né à Paris en 1581, et Jacques Sarazin, né à Noyon en 1590, tempérèrent la fierté du grand maître florentin par un accent moelleux emprunté à l’école des Carrache. Guillain forma les deux frères François et Michel Anguier, qui achevèrent leur éducation en Italie et qui, revenus en France, y exécutèrent d’importants travaux ; un des meilleurs ouvrages de François fut le monument du duc de Longueville ; Michel, supérieur à son frère, fit une grande partie des sculptures du Val-de-Grâce et termina, d’après les dessins de Le Brun, les bas-reliefs de la porte Saint-Denis, qui avaient été commencés par Girardon. Ce dernier, élève de François Anguier, rechercha le patronage et subit volontairement l’influence artistique de Le Brun, sous la direction duquel il exécuta une foule de travaux pour Versailles, Trianon et les autres résidences de Louis XIV ; npmmé inspecteur général de tous les ouvrages de sculpture, après la mort de Le Brun, il exerça sur les artistes une véritable domination qui contraignit leurs talents et fit grand tort aux progrès de l’art. Il eut de nombreux élèves, parmi lesquels on distingue Robert le Lorrain, Granier, Frémyn, Jean Joly de Troyes, Nourrisson, Charpentier et Michel-Ange Slodtz (1703-1764), qui, après un assez long séjour à Rome, revint à Paris où il sculpta, entre autres œuvres remarquables, le mausolée du curé Languet, dans 1 église Saint-Sulpice. De l’atelier de Jacques Sarazin sortirent Gilles Guérin, Vanopstal, Legros et Lerambert (1614-1670). Celui-ci eut à son tour pour élève Antoine Coysevox (1640-1720), de Lyon, qui fut un des sculpteurs les plus hardis, les plus brillants, les plus féconds du siècle de Louis XIV.

Un artiste éminent de cette période, le plus original et, sans contredit, le plus puissant praticien de l’école française, Pierre Puget (1622-1694), de Marseille, architecte, peintre et sculpteur, se forma, pour ainsi dire, sans maître et étonna l’Italie elle-même par la fierté de son style. Plus habile à traduire l’expression des passions de l’âme et des souffrances physiques qu’à rendre la beauté des formes, il est parfois incorrect et heurté, mais toujours rempli d’énergie, de sensibilité, de mouvement : c’est le Michel-Ange français. Le Milon de Crotone, le groupe de Persée et Andromède, le bas-relief de Diogène et Alexandre, les Cariatides de Toulon, le Saint Sébastien de Gênes, sont rangés, à bon droit, parmi les chefs-d’œuvre de la statuaire moderne.

Antoine Coysevox eut pour principaux élèves Jean Coudray, Jean Thierry, sculpteur de Philippe V ; Jean-Louis Le Moyne (1665-1755), auteur du mausolée de Pierre Mignard, et les deux frères Coustau, Nicolas (1658-1733) et Guillaume (1678-1746), qui, à défaut d’un dessin sévère et d’un style tres-pur, déployèrent dans leurs œuvres beaucoup de facilité, de grâce, de vivacité et d’esprit. Guillaume Coustou, l’auteur des Chevaux de Marly, placés à l’entrée des Champs-Élysées, eut pour disciples Claude Francin, de Strasbourg, J. Saly, de Valenciennes, et son propre fils Guillaume, dit le Jeune (1716-1777), qui fut un des coryphées de la statuaire aimable et… maniérée de l’époque de Louis XV. A cette dernière époque appartiennent encore Le Moyne le fils, Bouchardon, Falconet, Pigalle, qui jouirent d’une très-grande réputation, et encore Pajou, Allegrain, Foucou, Caffieri, Vassé, Bridan, etc.

Personne n’ignore combien le goût s’était corrompu sous le règne de Louis XV, tant dans la sculpture que dans la peinture ; les œuvres du ciseau accusaient un oubli complet des beautés de la nature. « Plus de vérité, de simplicité, de naturel, dit Emeric David ; des sentiments outrés, des attitudes maniérées, des formes tout à la fois sèches et sans nerf, des draperies pesantes et rocailleuses ; la recherche prise pour de la grâce, la roideur pour de l’énergie : voilà quel était le sublime de l’art ! La théorie n’était guère moins vicieuse que la pratique. L’imitation du vrai passait pour le travail des hommes sans génie. Si quelquefois encore on jetait les yeux sur le modèle vivant ou sur quelqu’un des chefs-d’œuvre de la Grèce, it était convenu qu’il ne fallait pas s’y conformer. La nature paraissait pauvre, l’antique froid et sans caractère. Nulle analyse du beau ; peu de connaissances anatomiques ; l’imagination et le goût devaient y suppléer. Il fallait tout créer, même les formes. L’esprit le plus pesant affectait de la fougue, de l’inspiration, de l’enthousiasme. Les défauts produits par un si étrange aveuglement devenaient plus choquants encore dans la sculpture que dans la peinture, par la raison que l’isolement et l’immobilité du marbre rendaient plus sensibles l’exagération de l’expression, la gêne de la pose, l’aridité des contours, la bizarrerie des costumes. » Plusieurs causes, dont quelques-unes sont étrangères à la France, rappelèrent enfin l’école française aux principes qu’elle avait abandonnés. Parmi ces causes, nous signalerons la découverte faite en divers endroits d’Italie, à Herculanum, à la villa Adriana, à la villa Tiburtina, d’une foule d’antiquités de tous les genres, dont quelques-unes, des plus remarquables, furent recueillies au musée Pio-Clémentin ; les descriptions des ruines de Palmyre, de Balbeck, de Pœstum, composées par de savants écrivains ; les Ruines de la Grèce, publiées par Le Roi ; les ouvrages de Hamilton, de Winckelmann, de Mariette, de Caylus et d’autres encore. Ces découvertes, ces écrits, qui appartiennent aux quinze premières années de la seconde moitié du xviiie siècle, invitèrent à l’étude, à l’admiration de l’antique. Une comparaison inévitable força les bons esprits à apprécier les grâces factices que le goût régnant avait substituées aux éternelles beautés dont les Grecs s’étaient faits les interprètes. La renaissance, la réformation des arts qui devait être la conséquence de ce retour aux études sévères, ne tarda point à s’opérer. Pigalle, que nous avons nommé plus haut, fut le principal promoteur de la restauration de la sculpture : animé du sentiment du vrai et ayant fait une étude approfondie delà structure du corps humain, il s’appliqua à rendre la nature avec une exactitude scrupuleuse ; aussi fut-il regardé longtemps comme un homme sans imagination, sans génie. Il ne racheta pas suffisamment par son amour de la réalité le mauvais goût de ses conceptions : nous n’en voulons pas d’autre preuve que l’idée qu’il eut de représenter entièrement nu Voltaire, âgé de soixante-quatorze ans, maigre, décharné, réduit à l’état de squelette. Allegrain, son parent, suivit la même voie et n’eut guère, comme lui, que le mérite d’une imitation fidèle : une Vénus sortant du bain et une Diane, regardées comme les meilleures productions de cet artiste, dénotent assurément un progrès sérieux, si on les compare aux œuvres de la période précédente, mais elles n’ont aucune des qualités de style qui constituent le grand art. Mouchy, auteur d’une statue de Sully et d’une figure du Silence, Jean-Guillaume Moitié, auteur d’une statue de Cassini et de divers bas-reliefs exécutés dans les monuments de Paris, Dupré, qui a travaillé à la Monnaie et au. Panthéon, Baquet et Le Brun furent les meilleurs élèves de Pigalle. Houdon, dans son admirable statue de Voltaire et dans son Ecorchè si souvent reproduit en plâtre et en bronze, déploya une habileté de portraitiste et une science de l’anatomie auxquelles, depuis longtemps, on n’était plus habitué. Pierre Julien fit preuve d’énergie et de vérité dans son Gladiateur mourant, de simplicité dans sa statue de La Fontaine, de souplesse et de grâce dans sa Galatée. Clodion, dont la main libertine s’égara longtemps dans des compositions qui ne manquaient, d’ailleurs, ni d’esprit ni de goût, modela avec savoir un groupe grand comme nature, représentant un épisode du Déluge. Dejoux, auteur d’une statue de Catinat, d’un Saint Sébastien, d’un groupe d’Ajax et Cassandre, contribua aux progrès de l’art. Berruer, Stouf, Boichot, Boizot, Delaistre, Gois père, Baccari, méritent aussi d’être cités.

La révolution classique ou académique qui s’opéra en peinture, sous l’influence et la direction de David, à la fin du xviiie siècle, s’étendit à la statuaire : Jean-Baptiste Giraud, élève de Moitte, Chaudet, élève de Stouf, Roland et Bosio, élèves de Pajou, Lemot, élève de Dejoux, Dupaty, élève de Lemot lui-même, Cartellier, élève de Bridan, Beauvallet, Ramey. Gois le fils, Calamard, Lemire le père, Milhomme, furent les talents les plus remarquables de cette nouvelle école qui, tourmentée par une préoccupation trop exclusive des types de l’antiquité, s’écarta de toute simplicité et finit par tomber dans la convention, dans le poncif. M. Guizot, dans son Salon de 1810, a signalé cette absence de naïveté, cette exagération du beau antique qui caractérisent les œuvres des sculpteurs de l’école académique : « Nos statuaires modernes, dit-il, ceux du moins qui exécutent des figures nues et de leur choix, semblent prendre à tâche d’outrer les belles formes : trop peu sûrs du charme de leur ciseau pour donner au marbre une beauté simple, facile et animée, ils croient y suppléer en exagérant la beauté telle que la déterminent les règles ; ainsi ils rendent les paupières plus longues, les lignes du front et du nez plus droites, la distance du nez à la bouche plus courte, et se flattent peut-être d’avoir créé ainsi de belles têtes. »

Si nous en croyons l’auteur anonyme d’une Revue critique du Salon de 1824, la sculpture française se serait montrée, à cette exposition, « dans l’état le plus florissant de gloire et de grandeur. » Ce critique enthousiaste signale, entre autres morceaux dignes d’admiration : quatre « chefs-d’œuvre » de de Bay père, Mercure prenant son êpée pour trancher ta tête à Aryus, Argus endormi, Saint Jean-Baptiste et le buste du peintre Gros ; un Jeune homme entrant au bain, figure gracieuse, par Espercieux ; un Jeune chasseur blessé, par L. Petitot ; un Hercule retirant de la mer le corps d’Icare, groupe colossal, par Ruggi ; une charmante Baigneuse, de Gab. Seurre ; une Eurydice, de Ch. Nanteuil ; un Saint Pierre prêchant, de Ch. Bra, et enfin la Psyché, de Pradier, et le Bonchamp, de David (d’Angers).

Pradier devint le chef d’une école néo-païenne, préoccupée d’exprimer avant tout la souplesse, la grâce, l’élégance, la volupté, et faisant consister l’idéal de la statuaire dans le nu — et particulièrement dans le nu féminin — rendu avec une « morbidesse » propre à faire illusion. Certains critiques ont prétendu que Pradier s’était contenté de faire joli, et qu’il n’avait pas su rencontrer le beau. La vérité est qu’il ne chercha guère le beau moral, mais il réalisa la beauté plastique. L’Odalisque, la Phryné, la Poésie légère, la Cassandre, la Sapho, sont des créations que n’eût pas désavouées l’antiquité. « Sous le ciseau de Pradier, a dit un de ses biographes, M. L. de Cormenin, le marbre s’assouplit comme une chair, il prend le grain, la transparence, les jeux de lumière et les tiédeurs de l’épiderme. Plus que tout autre, il maîtrisa le marbre. Puget raconte que les blocs frémissaient sous sa main ; devant Pradier, je m’imagine qu’ils devaient sourire. Jamais, en effet, il n’admit la laideur dans l’art. Toute difformité lui répugnait, ainsi qu’une dissonance de beauté. » Parmi les nombreux élèves formés par ce maître, nous citerons : MM, Ch. Simart, Guillaume, Etex, Henri Chapu, Gustave Crauk, Victor Vilain, François Roubaud, Calmels, Lequesne, J.-L. Maillet, Elias Robert, Chabaud, etc. Plusieurs de ces élèves ont su acquérir un style bien personnel et sont devenus maîtres à leur tour. Simart, mort prématurément il y a quelques années, a fait preuve d’une grande science de l’antique et d’un goût très-pur dans son Oreste, du Salon de 1840, dans ses statues de la Poésie épique et de la Philosophie, exécutées pour la bibliothèque du Luxembourg, et surtout dans sa restitution de la Minerve chryséléphantine du Parthénon (Exposition universelle de 1855). M. Etex, dans Son groupe de Caïn maudit, exposé en 1833, et dans ses bas-reliefs de l’arc de l’Etoile, la Résistance et la Paix, s’est montré plus épris de l’énergie et de la rudesse grandiose de Michel-Ange que de la grâce de Pradier. M. Guillaume, aujourd’hui directeur de l’Ecole des beaux-arts (1871), est un des statuaires les plus corrects, les plus sobres, de l’école contemporaine ; sa statue d’Anacréon (1852), ses bustes des Gracques (1853), son Faucheur (1855), ses sculptures de l’église Sainte-Clotilde et du nouvel Opéra attestent un goût sévère et un talent d’exécution sage et ferme. Le Faune dansant, de M. Lequesne, est une des productions les plus charmantes de l’école moderne.

David (d’Angers) a exercé plus d’influence encore que Pradier sur la sculpture contemporaine. Thoré disait : « David, le sculpteur, a essayé avec éclat la régénération de notre école ; c’est lui qui a produit le plus depuis vingt ans ; il a envoyé ses œuvres partout, dans les villes de France et dans les villes des autres États ; il a le mérite de chercher la pensée en même temps que le grand style, et son exécution est tout à fait magistrale. » David d’Angers a eu sur les destinées de l’art contemporain une influence considérable ; il continua les traditions de l’école française Antique par le dessin de ses œuvres, il fut moderne par le style. Presque toutes ses œuvres, le Barra mourant, la Jeune fille au tombeau de Botzaris, le Philopœmen, le fronton du Panthéon, les monuments de Bonchamp, de Foy, les statues de Condé, de Racine, de Cuvier, de Larrey, de Gobert, de Jean Bart, les nombreux portraits en pied, en buste ou en médaillon de personnages célèbres, témoignent d’un sentiment des plus vivaces de la réalité, d’une puissance et d’une originalité hors ligne.

Les sculpteurs contemporains formés à l’école de David sont entrés résolument, pour la plupart, dans le mouvement de régénération inauguré par leur maître. Quelques-uns, comme M. Maindron, l’auteur de la Velléda, et M. Préault, l’auteur de la Misère, de la Douleur et des groupes du pont d’Iéna, ont été en sculpture les représentants les plus accrédités du romantisme ; d’autres, comme M. Ottin, qui a sculpté l’énorme groupe d’Acis et Galatée, du Luxembourg, et M. Aimé Millet, qui a exécuté pour le plateau d’Alésia un colosse de Vercingétorix, ont espéré atteindre au grandiose en faisant grand. M. Millet a été mieux inspiré dans son Ariane, qui se rapproche plus, à dire vrai, de la manière de Pradier que du style de David. M. Cavelier a su rajeunir l’antique par une grâce et une finesse toutes modernes, témoin sa charmante statue de Pénélope endormie, et son beau groupe de Cornélie assise entre ses deux enfants. M. Carrier-Belleuse a fait preuve de souplesse, de facilité et d’un vif sentiment de la réalité pittoresque et vivante dans sa Bacchante (1863), son Ondine (1864), son Angélique (1866), et ses bustes en terre cuite. Louis Brian et Armand Toussaint méritent aussi d’être cités parmi les disciples de David.

A côté de David d’Angers et de Pradier, Rude a sa place marquée au premier rang des statuaires de notre époque. Nul n’a déployé plus de vigueur et de hardiesse, nul n’a été plus mouvementé, plus passionné, plus vivant, nul n’a eu une inspiration plus haute, un souffle plus poétique. Nous n’en voudrions d’autre preuve que la Marseillaise ou le Départ, cette page immortelle qui décore l’arc de triomphe de l’Étoile. Le Petit pécheur (1833), le Louis XIII (1842), le Godefroi Cavaignac (1847) du cimetière Montmartre, la Jeanne Darc (1849) du Luxembourg, l’Hébé et l’Amour dominateur, du musée de Dijon, attestent, en des genres divers, la chaleur, la finesse, l’agilité et la force du style de Rude. Ce maître a formé des élèves dignes de lui : M. Carpeaux, dont les œuvres — l’Ugolin et le fameux groupe allégorique de la Danse, entre autres, — frappent par une exubérance de mouvement, et seraient tout à fait magistrales si elles étaient mieux équilibrées ; M. Christophe, l’auteur d’un colosse de la Douleur, très-remarqué à l’Exposition universelle de 1855 ; M. Chatrousse, qui s’est montré plein d’élégance et de poésie dans une figure de la Renaissance et dans un groupe intitulé la Source et le Ruisselet (1870) ; MM. A. Leveel et Ch. Confier ; MM. Caïn et Frémiet, deux habiles sculpteurs d’animaux ; MM. Cabet, Schroder, Marcellin, Garraud, Franceschi, etc.

Un artiste qui s’est acquis, en un genre spécial, la sculpture d’animaux, une grande et légitime réputation, est M. Barye, praticien des plus habiles. A la suite de ce maître, plusieurs artistes ont fait preuve de talent dans le même genre. Nous avons déjà nommé MM. Caïn et Frémiet ; citons encore : MM. Isidore Bonheur, Fratin, Rouillard, Lechesne, Alfred Jacquemart, etc.

Ramey fils, qui fut membre de l’Académie, comme son père, compte au nombre de ses élèves : M. Gruyère, auteur d’un Mutius Scævola (1846), et d’une statue de Chactas (1857) ; M. Leharivel-Durocher, qui a exécuté un assez grand nombre de travaux pour les églises de Paris et de province ; M. Jouffroy, talent fin et poétique, à qui l’on doit, entre autres ouvrages, la Jeune fille confiant son