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Héloïse et l’autre Émile, au lieu de citer Boerhaave et Hippocrate. »

On peut consulter le livre de M. P. Lacroix : Marat philosophe.


Homme des champs (L’), ou les Géorgiques françaises, poëme de Delille, en quatre chants (1800). Ce poëme est fondé sur un contraste continuel entre Les mœurs de la ville et celles de la campagne. Saint-Lambert s’était déjà rapproché de cette idée dans son poëme des Saisons ; mais il est loin de lui avoir donné autant de développements que Delille. Dans le premier chant, le poëte essaye de peindre un véritable philosophe, sachant multiplier ses plaisirs, au milieu des champs, en multi pliant ses sensations par la variété des scènes rustiques. L’exemple de la bienfaisance lui st donné par la nature même, qui n’est à sos eux qu’un échange éternel de secours et do bienfaits. Il s’associe à ce concert sublime, appelle à l’appui de ses utiles projets les autorités du hameau qu’il habite, et, par ce concours de soins et de bienveillance, assure le bonheur de l’enfance et de la vieillesse. Le second chant peint les plaisirs du cultivateur et décrit ses travaux ; il l’arrache à l’ornière de la routine pour lui apprendre à triompher de tous les obstacles, à perfectionner et les productions et les races indigènes, ainsi qu’à naturaliser les étrangères, à créer ou améliorer les terrains, à fertiliser par des arrosements les lieux les plus arides, à creuser des canaux, à dévider la soie ou à dompter les métaux ; en un mot, le poëte nous montre l’agriculture tantôt comme une déesse qui sème des bienfaits, tantôt comme une fée qui prodigue des enchantements. Le troisième chant est consacré à l’observateur qui s’attache à l’étude des merveilles de la nature dont il est entouré, et se crée un cabinet d’histoire naturelle qu’il enrichit de productions variées, nées sur son propre sol. Enfin, le quatrième apprend au poëte des champs à célébrer, en vers dignes de la nature, ses phénomènes et ses richesses. En enseignant l’art de peindre les beautés champêtres, Delille en à rendu lui-même les traits les plus majestueux et les plus saisissants.

L’Homme des champs souleva de vives critiques lors de son apparition. La vérité est qu’en voulant éviter la trivialité l’auteur a rencontré la sécheresse. Ses peintures sont jolies, mais mesquines et froides ; ses villageois ne sont que d’aimables citadins ; ses cultivateurs, savants, délicats, raisonneurs, physiciens et même métaphysiciens, ressemblent beaucoup aux bergers de Fontenelle ; mais on ne peut s’empêcher de louer l’art avec lequel il sait toujours faire ressortir le trait principal de son tableau, et plusieurs morceaux sont des chefs-d’œuvre dans leur genre, tels que le Tableau de la chasse du cerf, et ce portrait si comique du magister de village.

L’Homme des champs a été traduit en vers latins par Dubois (Paris, 1808, 1 vol. in-18), avec texte en regard


Homme sans nom (L’), par Ballanche (Paris et Genève, 1830, 3e édition ; t. Ier des œuvres de l’auteur). L’Homme sans nom est l’histoire d’un régicide qui a voté la mort de Louis XVI. Le livre ressemble aux pamphlets de M. Th, Muret, écrits en 1849 et 1850, sous l’inspiration du comité de la rue de Poitiers, et à l’usage exclusif des campagnes. Chaque phrase sue la mauvaise foi et cette naïveté un peu niaise qu’on emploie sciemment pour se mettre au niveau d’un auditoire peu éclairé, bien que Ballanche n’adresse point ce livre à des lecteurs spéciaux.

La fable du livre est des plus simples:l’auteur voyageait en Italie ; un accident de voiture lui donne une demi-journée de loisir, et il en profite pour s’enfoncer dans les montagnes. À quelque distance, une cahute isolée est entr’ouverte ; un enfant passe ; Ballanche lui demande qui reste là; c’est le régicide, dit l’enfant. Au même instant, le régicide sort de la cabane : il avait l’air fatal. Le voyageur l’interroge et il se trouble : « Ses mains, qu’il se mit à considérer avec horreur, semblaient vouloir écarter un être surnaturel et menaçant, ou une ombre accusatrice. Puis il se remit un peu ; son visage ne présenta plus que l’aspect d’un calme presque stupide. Son regard, qui tout à l’heure implorait si bien la compassion, était devenu terne, sinistre, d’une sombre indifférence. Cette apathie terrible, cette funeste résignation pénétraient mon âme de je ne sais quelle épouvante, et me glaçaient le cœur. »

Le régicide mène le voyageur dans sa cabane et lui raconte son histoire. Au temps de la Convention, il était représentant du peuple, et, malgré sa douceur habituelle, il a dû hurler avec les loups. Le jour du jugement de Louis XVI, il était monté à la tribune pour absoudre 1e roi martyr, qui était bien le prince le plus loyal, le meilleur et le plus saint que Dieu eût encore fait. Sans savoir au juste comment la chose se fit, il vota la mort. « Celui dont un sort cruel appela le nom immédiatement avant le mien prononça d’une voix assurée l’arrêt de mort. Des murmures d’une exécrable approbation l’accompagnèrent lorsqu’il descendit de la tribune ; des murmures de menace me suivirent lorsque je me présentai pour y monter. J’y arrivai en frémissant. Je sentis, comme mille poignards à la fois, tous les yeux qui furent spontanément fixés sur les miens : cette multitude de regards inquiets et inexorables ainsi concentrés exercèrent aussitôt sur mon âme une puissance surnaturelle de trouble et de fascination que je ne puis expliquer. »

En voilà assez. Nous n’avons rien à dire du style de Ballanche, qui est le même que dans ses autres écrits. Quant à ses idées, il a voulu nous faire croire que la mort de Louis XVI avait été votée par des hommes inconscients, et il est arrivé seulement à nous prouver qu’il n’avait pas pris la peine de relire, avant d’écrire son livre, les solennelles et terribles séances de la Convention, des 15 et 16 janvier.


Homme (ESSAI SUR L’), ou Accord de la philosophie et de la religion, par Ed. Alletz (Paris, 1835, 2 vol. in-8°). Concilier la philosophie et la religion ! L’auteur eût peut-être tenté plus volontiers de renverser la philosohie pour établir la religion, comme le prouve le passage suivant, qui donnera une idée suffisante de son style et de ses opinions:

« Lorsque le nom de la philosophie retentit à nos oreilles, dit-il, nous sommes en droit de nous alarmer. Elle marche accompagnée de souvenirs sinistres. Une foule d’idées lamentables se réveillent et nous la représentent comme cette machine funeste qui portait dans ses flancs la ruine de Troie, et qu’on disait consacrée à la sagesse. La philosophie ! À ce nom prononcé, le XVIIIe siècle nous apparaît tout entier ; c’est une parole prononcée au milieu des ruines pour évoquer les esprits rebelles. Nous voyons s’avancer tous ces hommes qui ont soumis la France entière à la tyrannie des paradoxes impies, ces sophistes plus orgueilleux que pervers qui, s’érigeant en précepteurs du genre humain, eussent volontiers instruit les rois à les combler d’honneurs et de richesses; ces contradicteurs d’eux-mêmes qui se déclaraient les apôtres du néant pour obtenir l’immortalité, qui faisaient de leurs attaques contre Dieu un moyen d’illustration personnelle, et qui eussent consenti, dans l’intérêt de leur orgueil, à la destruction de l’univers, s’il n’eût pts fallu que le monde existât pour les admirer. »

Enfin il a tenté de concilier, ne pouvant faire mieux. Dans ce but, il fait deux volumes de philosophie orthodoxe, et termine en prouvant la nécessité d’une rédemption. Sa conclusion finale est que le catholicisme est la plus philosophique des sectes chrétiennes.


Homme (L’), essai zoologique sur le genre humain, par Bory de Saint-Vincent (Paris, 1836, 2 vol. in-18 ; 2e édition, 1827, 2 vol: in-16). L’auteur, contrairement à l’opinion de Cuvier, auquel cependant il dédiait son livre, admettait quinze espèces différentes dans l’espèce homme, et soutenait que la Genèse n’a donné l’histoire que d’une seule de ces espèces. La question de l’unité de l’espèce est surtout une question de mots, et, si l’on écarte l’hypothèse de la création, si l’on ajoute que toutes les espèces ou variétés du genre homme se reproduisent ensemble, on sera bien près de s’entendre sur ce sujet. Du reste, si le savant naturaliste n’a pas complétement résolu toute la question de l’homme, il a du moins bien indiqué le vrai mode de solution, en déclarant que les recherches statistiques et philologiques auxquelles il a pu se livrer sont appelées à apporter un grand secours à l’histoire naturelle. Son grand défaut est d’admetre des données purement légendaires, et de bâtir là-dessus des systèmes scientifiques. Nous l’avons déjà vu admettre, en l’expliquant, la création mosaïque; il admet également les quatre âges mythologiques d’or, d’argent, d’airain et de fer, en donnant seulement à ce dernier la préférence sur les trois autres. On sait où un pareil système à conduit les philosophes qui ont admis les faits miraculeux et ont essayé d’en donner des explications naturelles.


Homme (ÉTUDE DE L’), par M. de Latena (1854, in-8°). Cet ouvrage est un des meilleurs livres de philosophie morale qu’ait produits la littérature française contemporaine. Ce n’est point à proprement dire un traité, c’est une suite d’observations et de sentences qui se suivent dans un enchaînement logique. Observateur attentif du monde et de la société, M. de Latena s’attache à donner le résultat de ses observations sous une forme pratique et familière. L’auteur a pour l’humanité cette indulgence qui est peut-être le dernier mot de la morale humaine. Sa philosophie a une grâce particulière:elle est affirmative sans être pédante et abstraite ; elle ne déclame jamais. « En recueillant ses remarques sur le cœur, sur les femmes et sur les sujets qui touchent aux passions, dit Sainte- Beuve, il s’est surtout inquiété d’être dans le vrai et de ne point dépasser dans son expression la mesure de ses propres jugements… Lorsqu’il en est particulièrement aux qualités et aux passions sociales, M. de Latena a de bonnes analyses et des définitions judicieuses. Sur les diverses impressions et les divers états de l’âme, tranquillité, calme, quiétude, etc. ; sur les qualités qu’on est porté à confondre, bonté, bienveillance, générosité, indulgence, etc. ; sur les formes en usage dans la bonne compagnie, civilité, urbanité, politesse, etc., il a des descriptions encore plus que des définitions, et qui donnent à l’esprit une idée exacte, qui lui apprennent à distinguer des expressions presque synonymes. »

Malgré le grand fonds d’indulgence et de sympathie générale qui est un des traits caractéristiques de son livre, M. de Latena ne se paye pas d’illusions. Il sait fort bien dévoiler l’amour-propre derrière les apparences trompeuses où il se réfugie, et découvrir tous les sentiments équivoques qui embarrassent notre conscience. (Comme La Rochefoucauld trouvait dans l’amour-propre l’unique mobile de toutes nos actions, les plus sublimes comme les plus basses, M. de Latena voit bien à quel point nos meilleurs sentiments sont mêlés de petites pensées mesquines, et combien notre faiblesse naturelle se fait jour, même dans notre grandeur. « Tout dans la vie, dit-il, est un jeu de hasard, tout, excepté la vertu. Elle procure seule un bénéfice certain. Je le crois, et cependant, en publiant ce livre avec un vif désir de faire quelque bien, je songe aussi à l’approbation des hommes. C’est contre elle que je joue mon repos. » Auprès de réflexions empreintes de tristesse et d’une mélancolie résignée, on rencontre, dans l’Étude de l’homme, beaucoup de passages piquants et qui témoignent de la plus fine observation. En résumé, cet ouvrage est l’œuvre d’un galant homme et d’un homme de bien. On n’y trouve ni une grande originalité, ni des observations bien neuves et bien profondes; mais il laisse une salutaire impression morale, et se lit avec intérêt.


Homme et la Révolution (L’), huit études dédiées à Proudhon, par J.-A. Langlois, ancien rédacteur du Peuple (Paris, 1867). Ces huit études ont pour titres:la Certitude, le Droit, la Justice, l’Égalité, le Travailleur, la Femme, la Mutualité, l’Égal-Échange. M. Langlois y donne aux doctrines de Proudhon des développements qui sont d’un penseur origimal et qui témoignent de vastes connaissances. Nous y signalerons d’une manière spéciale la théorie des forces collectives, par laquelle il croit pouvoir passer du sujet à l’objet, de la conscience à la certitude objective, problème insoluble, dit-il, dans l’hypothèse de la simplicité de l’âme ; — la distinction dans l’homme de la conscience première et de la conscience seconde ou conscience de la conscience, d’où naît la faculté du langage, de l’égoïsme et de l’amour-propre ou égoïsme spirituel, d’où naît la dignité, le sentiment des devoirs envers soi-même, et par suite le sentiment de la chute morale et du repentir ; — la démonstration de l’unité, sinon physiologique, au moins, intellectuelle et morale du genre humain, d’où naît, pour les races humaines, aujourd’hui inégales, la possibilité de s’élever, avec le temps, à l’équivalence industrielle; — la théorie de l’origine et du développement des religions, qui ont toutes pour point de départ le fétichisme ou pénatisme, et dont la sphère s’étend à mesure que s’étend le lien social.


Hommes et dieux, études d’histoire et de littérature, par Paul de Saint-Victor (Paris, 1867, in-8°). Ce livre est un recueil de morceaux écrits à différentes dates et publiés pour la plupart dans la Presse. « Sans lien entre eux, dit l’auteur, ils n’ont d’autre analogie que celle de reproduire des scènes et des figures du passé. » Dans cette galerie de tableaux et de portraits, on voit figurer successivement la Vénus de Milo, Diane, la pâle sœur de Phœbus, Cérès et Proserpine, Hélène, dont l’enlèvement amena la ruine de Troie, Méléagre et les poëtes de l’anthologie, Néron, le ténor couronné, le monstre dilettante, Marc-Aurèle, l’empereur philosophe, Attila, le Fléau de Dieu, Charles XII, Lois XI, le renard mangeur de loups, César Borgia, les Comédies de la Mort, les Bohémiens, la cour d’Espagne sous Charles II, don Quichotte, Agrippa d’Aubigné, Boccace, Manon Lescaut, Mlle  Aïssé, etc. Deux de ces morceaux surtout sont fort remarquables. Les pages que M. Paul de Saint-Victor a consacrées à Marc-Aurèle sont peut-être les plus belles de son livre. « Rien de plus sobre, de plus pur, de plus haut que le style de ces appréciations historiques et morales, » dit Théophile Gautier. L’étude sur la cour d’Espagne, la plus longue du livre, est d’un effet saisissant et magistral. « Tous ces morceaux, si divers par le sujet, dit M. Challemel-Lacour, sont reliés par un même sentiment de la forme plastique, qu’on retrouve au plus haut degré jusque dans le style do l’auteur et qui domine tous ses jugements. » La faculté maîtresse de M. de Saint-Victor, comme dirait Taine, c’est la passion de la forme. C’est en tout et avant tout un styliste. Il n’écrit pas ses phrases, il les sculpte ; au lieu d’une plume, il se sert d’un pinceau chargé de couleurs attrayantes. « Son style d’une perfection soutenue, dit Théophile Gautier, d’une unité de trame sans égale, d’un éclat qui fait tout pâlir, ne laisse à désirer que quelques négligences. Il ne s’endort jamais. Tout se tient, tout s’enchaîne ; les métaphores se suivent et se déduisent, les phrases sont étincelantes, coupées à angles vifs, jetant des bluettes de toutes couleurs, mais dans cette scintillation claire, pure et indestructible comme le diamant ; la pensée y luit comme sous une goutte de lumière. » Ce qui manque, à notre avis, à ces études de M. de Saint-Victor, c’est la flamme intérieure, c’est le mouvement et l’intensité de la vie. On y voit trop l’artiste et pas assez l’homme,


Homme dans la nature (DE LA PLACE DE L’), par Th. H. Huxley, traduit par le docteur E. Dally (Paris, 1868). Le but principal que s’est proposé M. Huxiey est de rechercher quels sont, au point de vue anatomique, les rapports précis de l’homme avec les animaux qui l’approchent de plus près:les singes anthropomorphes. La conclusion des naturalistes classiques, admise jusqu’à ce jour, est que les hommes forment un ordre du groupe des primates ; les singes un autre ordre, celui des quadrumanes. La conclusion de M. Huxley est que le singe et l’homme appartiennent au même ordre. La principale démonstration anatomique de M. Huxley a trait aux prétendues mains de derrière des singes. L’extrémité inférieure ou postérieure des singes se termine par un véritable pied, et non par une main ; le pied et la main de l’homme offrent entre eux des caractères différentiels qui se retrouvent, exactement les mêmes, chez les singes ; en sorte que le terme de quadrumanes, adopté depuis Cuvier, consacre une erreur, et que la distinction des deux ordres de primates est, sous ce rapport, effacée. Quant au cerveau, la conclusion est la même. On avait dit que le lobe postérieur, la corne postérieure et le petit hippocampe étaient des particularités anatomiques propres à l’homme. M. Huxley prouve que ce sont précisément les caractères de structure cérébrale les mieux marqués comme étant communs à l’homme et aux singes, « Les différences anatomiques entre l’homme et les singes anthropomorphes, conclut le savant naturaliste anglais, nous autorisent certainement à le considérer comme formant une famille distincte; mais comme il diffère moins de ces singes qu’eux-mêmes ne différent d’autres familles du même ordre, il n’y a aucune raison pour le placer dans un ordre distinct. Ainsi se trouve justifiée la sagace perspicacité du grand législateur de la zoologie méthodique, Linné, et un siècle de recherches anatomiques nous ramène à sa conclusion : que l’homme est un membre du même ordre que les singes et les lémuriens, auquel la dénomination linnéenne de primates doit être conservée. Cet ordre peut maintenant se diviser en sept familles d’une valeur systématique à peu près égale : 1° les anthropiniens (hommes) ; 2° les catarrhiniens (singes de l’ancien monde) ; 3° les platyrrhiniens (tous les singes du nouveau monde, excepté les marmousets) ; 4° les arctopithèques (marmousets) ; 5° les lémuriens ; 6° les chéiromyens ; 7° les galéopithéciens (lémuriens volants). Aucun ordre de mammifères ne se présente peut-être avec une série aussi extraordinaire de gradations que le fait celui-ci, qui nous conduit insensiblement du sommet de la création animale à des êtres qui ne sont séparés, comme on le voit, que par un échelon du plus inférieur, du plus petit et du moins intelligent des mammifères à placenta. Il semble que la nature elle-même ait prévu l’orgueil de l’homme, et, avec une cruauté toute romaine, ait voulu que son intelligence, au sein même de ses triomphes, fît sortir les esclaves de la foule pour rappeler au vainqueur qu’il n’est que poussière. »

La conclusion anatomique de M. Huxley conduit à l’hypothèse de l’origine de l’homme par voie de transformation simienne. Cette hypothèse, selon notre auteur, rentre dans la grande théorie du transformisme, dont elle est une application logiquement irréprochable. Elle sera justifiée si le transformisme peut être établi. « L’homme n’étant séparé des animaux par aucune différence anatomique plus importante que celles qui les séparent les uns des autres, il semble que, si l’on peut découvrir un procédé quelconque, causatif de modifications organiques, par lequel se seraient produits les genres et les familles des animaux ordinaires, ce procédé pourrait amplement rendre compte de l’origine de l’homme. En d’autres termes, si l’on pouvait établir que les marmousets, par exemple, se sont formés et élevés, par des modifications graduelles, des platyrrhiniens, où que marmousets et platyrrhiniens sont des rameaux modifiés d’une même souche primitive, on ne trouverait aucune raison solide pour mettre en doute que l’homme peut avoir pris origine, en vertu de modifications graduelles, d’un singe anthropomorphe.… C’est pour quoi la question des relations des hommes avec les animaux se fond d’elle-même, quant à présent, dans le problème plus large de la possibilité ou de l’impossibilité des vues de Darwin. » Examinant le théorie darwimienne, M. Huxley n’hésite pas à déclarer que, « si elle n’est pas exactement vraie, elle s’approche de la vérité pour le moins autant que l’hypothèse de Copernic, par exemple, par rapport à la véritable doctrine des mouvements célestes. » Il reconnaît toutefois que, si elle explique suffisamment la diversification des formes anatomiques, il manque un anneau dans l’enchaînement des preuves qu’elle invoque : il faudrait qu’elle nous mon- trât des races différentes sorties d’une commune origine par voie de sélection, et réalisant les caractères des espèces naturelles, c’est-à-dire stériles entre elles comme ces espèces.

M. Dally a fait précéder l’ouvrage de M. Huxley d’une curieuse introduction. Au lieu d’écarter, à l’exemple de l’école positiviste, le problème des origines comme insoluble, il pose bravement ce problème, qu’il faut, dit-il, résoudre sous peiné de « renoncer