pourtant de questionner tel avocat, tel notaire, tel artiste, telle personnalité mondaine : si neuf fois sur dix on ne vous répond pas que le Canada est une colonie anglaise peuplée d’Anglais, de peaux-rouges et de quelques rares Français, je vais aller le dire à Rome en marchant sur les mains. Le Français ignore le Canada. Faisons cet aveu franchement, quitte à nous instruire après.
Pouvais-je deviner moi-même, quand je me suis embarqué pour l’Amérique, l’extraordinaire surprise qui m’attendait quelques temps après, en arrivant à Québec ? Pouvais-je m’imaginer que dans le nord de ce continent américain, j’allais trouver tout un peuple vivant de nos traditions, parlant notre langue, ayant gardé nos habitudes, nos usages, notre manière de penser, nos vieux proverbes, nos jolies légendes, nos vieilles chansons ? Quelle surprise et quelle joie ! Et aussi quelle confusion ! Positivement j’avais envie de demander pardon à ces frères méconnus. Songez que je venais de passer six longs mois aux États-Unis où tout le monde parle anglais. À Québec je me sentais heureux comme un poisson qu’on a un moment sorti de l’eau et que, généreusement, on vient de replonger dans sa rivière.
Je sais bien que même sans parler des voyageurs ou des savants ayant fait des études historiques, il y a quelques Français instruits qui savent qu’au Canada il existe un énorme contingent de Canadiens-français, devenus