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CHAPITRE III

LES CARACTÈRES.

Sur les neuf tragédies de Racine, — la Thébaïde et Alexandre laissés de côté, — six ont pour titres des noms de femmes, et, des trois autres, deux pourraient aussi justement s’appeler Agrippine et Roxane que Britannicus et Bajazet. C’est dire la place prépondérante que les femmes occupent dans ce théâtre. S’il est excessif d’avancer que Corneille n’a pas connu les femmes et que les siennes « sont des hommes », — car rien ne dépasse, comme vérité et énergie, le caractère de Camille, — il est certain que Racine les a étudiées avec une attention plus pénétrante et, surtout, leur a donné des caractères plus complexes. Dans Corneille, les femmes peuvent jouer un grand rôle, et même, comme dans le Cid, leur mariage peut être le sujet de la pièce ; les sentiments qu’elles éprouvent n’en sont pas moins subordonnés à d’autres, l’honneur, le patriotisme, la clémence, la foi. Dans Racine, au contraire, il arrive souvent