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RACINE.

polyte lui offrant son cœur, sa main et son trône, elle répond :

J’accepte tous les dons que vous me voulez faire.
Mais cet empire enfin, si grand, si glorieux,
N’est pas de vos présents le plus cher à mes yeux.

Et lorsque Hippolyte lui propose de fuir avec lui, elle tient à prendre la précaution nécessaire :

Dans quels ravissements à votre sort liée,
Du reste des humains je vivrois oubliée !
Mais n’étant point unis par un lien si doux,
Me puis-je avec honneur dérober avec vous ?

Atalide n’a qu’un rôle effacé devant la formidable Roxane, et, obligée de mentir, elle se trouve dans une situation fausse. Elle sauve celle-ci, dans la mesure du possible, par la sincérité de son dévouement à Bajazet. Elle n’a guère qu’une scène où, perdue et résignée, elle fait le sacrifice d’elle-même, ne songe plus qu’à son amant et dit tout ce qui pourrait attendrir une autre que Roxane.

Ériphyle est à part dans cette galerie. Âme flétrie par le malheur, princesse esclave, amante dédaignée, amie envieuse, elle a les vices de la souffrance et la servitude ; elle est ingrate, perfide et menteuse. Elle voit Iphigénie en possession d’un rang qui a été le sien et fiancée à l’homme qu’elle-même adore, couvert du sang de sa race. Cette âme douloureuse excite à elle seule tous les sentiments tragiques, pitié par ce qu’elle souffre, admiration par sa vérité complexe, terreur par ce dont elle est capable.

Ces femmes si diverses ont en commun les sentiments de leur sexe et de leur condition, ceux qui