Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome I.djvu/166

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quables : « Messieurs, on prononce ici par la majorité, je demeure seul, je dois céder ; mais je déclare que, dans ma conscience, je ne cède qu’aux formes. Vous m’avez réduit au silence, mais nullement convaincu. »

Dans le monde, où l’on ne se doutait même pas de ce qu’était le Conseil d’État, on était persuadé que personne n’osait y prononcer une parole en sens différent de l’Empereur ; et je surprenais fort dans nos salons, lorsque je racontais qu’un jour, dans une discussion assez animée, interrompu trois fois dans son opinion, l’Empereur, s’adressant à celui qui venait de lui couper assez impoliment la parole, lui dit avec vivacité : « Monsieur, je n’ai point encore fini, je vous prie de me laisser continuer. Après tout, il me semble qu’ici chacun a bien le droit de dire son opinion. » Sortie qui, malgré le lieu et le respect, fit rire tout le monde et l’Empereur lui-même.

« Toutefois, lui disais-je, on pouvait s’apercevoir que les orateurs cherchaient à deviner quelle serait l’opinion die Votre Majesté ; on se voyait heureux d’avoir rencontré juste, embarrassé de se trouver dans