Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome I.djvu/310

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encore toute sa crainte était-elle que la ligne prussienne, dont il était fort près, n’en fit alors autant.

À Marengo, les soldats autrichiens avaient bien conservé le souvenir du vainqueur de Castiglione, d’Arcole et de Rivoli ; son nom était bien quelque chose sur leur esprit, mais ils étaient loin de le croire présent ; ils le croyaient mort ; on avait pris soin de leur persuader qu’il avait péri en Égypte ; que ce Premier Consul dont on leur parlait n’était que son frère. Ce bruit s’était tellement accrédité partout, que Napoléon fut dans l’obligation de se montrer publiquement à Milan pour le détruire.

L’Empereur, passant ensuite à un grand nombre d’officiers et de ses aides-de-camp, leur distribuait couramment le blâme et la louange ; il les connaissait tous à fond. Deux des circonstances, disait-il, qui l’avaient le plus affecté sur les champs de bataille, avaient été la mort du jeune Guibert et celle du général Corbineau : un boulet, à Aboukir, avait percé la poitrine du premier, de part en part, sans l’achever ; l’Empereur, après lui avoir adressé quelques paroles, s’était vu contraint, par la force de ses propres sensations, de s’éloigner. L’autre avait été enlevé,