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Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome I.djvu/433

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intrigues et l’immoralité reconnue de la plupart d’entre eux. Aussi n’est-ce rien de tout cela qui m’a renversé, mais seulement des catastrophes imprévues, inouïes, des circonstances forcées : cinq cent mille hommes aux portes de la capitale ; une révolution encore toute fraîche, une crise trop forte pour les têtes françaises, et surtout une dynastie pas assez ancienne. Je me serais relevé du pied des Pyrénées mêmes, si seulement j’eusse été mon petit-fils.

« Et ce que c’est pourtant que la magie du passé ! Bien certainement j’étais l’élu des Français, leur nouveau culte était leur ouvrage. Eh bien ! dès que les anciens ont reparu, voyez avec quelle facilité ils sont retournés aux idoles !…

« Et comment une autre politique, après tout, eût-elle pu empêcher ce qui m’a perdu ? J’ai été trahi par Marmont, que je pouvais dire mon fils, mon enfant, mon ouvrage ; lui auquel je confiais mes destinées, en l’envoyant à Paris au moment même où il consommait sa trahison et ma perte. J’ai été trahi par Murat, que de soldat j’avais fait roi, qui était l’époux de ma sœur. J’ai été trahi par Berthier, véritable oison que j’avais fait une espèce d’aigle. J’ai été trahi, dans le Sénat, précisément par ceux du parti national qui me doivent tout. Tout cela n’a donc tenu nullement à mon système de politique intérieure. Sans doute on pourrait m’accuser avec avantage d’avoir employé trop facilement d’anciens ennemis ou des nobles et des émigrés, si un Macdonald, un Valence[1], un Montesquiou m’eussent trahi, mais ils m’ont été fidèles ; que si on m’objectait la bêtise de Murat et de Berthier, je répondrais par l’esprit de Marmont. Je n’ai donc pas à me repentir de mon système politique intérieur, etc. »


Chance de danger dans les batailles, etc. – Les bulletins très véridiques.


Jeudi 28.

L’Empereur, pendant le dîner, parlait sur les chances de danger des bâtiments de la Chine, dont un périssait sur trente, d’après les renseignements qu’il avait obtenus des capitaines ; ce qui l’a conduit aux chances de péril dans les batailles, qu’il a dit être moindres que cela. Wagram lui a été citée comme une bataille sanglante ; il n’évaluait pas les tués à plus de trois mille, ce qui n’était qu’un cinquantième : nous étions cent

  1. Parcourant un jour à Longwood le nom des sénateurs qui avaient signé la déchéance, l’un de nous fit observer celui de M. de Valence, signant comme secrétaire. Mais un autre expliqua que cette signature était fausse, que M. de Valence s’en était plaint et avait réclamé. « C’est très vrai, dit l’Empereur, je le sais, il a été très bien ; Valence a été national. »