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Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome I.djvu/834

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furent tentés souvent, dans le principe, d’enlever leurs drapeaux et de revenir. Toutefois j’étais venu à bout de les réconcilier avec le pays, où il y avait abondance de toutes choses, et à si bon marché, que je fus un moment tenté de les mettre à la demi-solde pour leur conserver l’autre moitié en réserve. Je m’étais acquis un tel empire sur eux, qu’il m’eût suffi d’un simple ordre du jour pour les rendre mahométans. Ils n’eussent fait qu’en rire ; la population eût été satisfaite, et les chrétiens de l’Orient eux-mêmes eussent cru leur cause gagnée ; ils nous eussent approuvés, pensant que nous ne pouvions pas faire mieux pour eux et pour nous.

« Les Anglais ont frémi de nous voir occuper l’Égypte. Nous montrions à l’Europe le vrai moyen de les priver de l’Inde. Ils ne sont pas encore bien rassurés, et ils ont raison. Si quarante ou cinquante mille familles européennes fixent jamais leur industrie, leurs lois et leur administration en Égypte, l’Inde sera aussitôt perdue pour les Anglais, bien plus encore par la force des choses que par celle des armes. »

Le grand maréchal a rappelé à l’Empereur une de ses conversations avec le mathématicien Monge, à Cutakié, au milieu du désert. « Que vous semble de tout ceci, citoyen Monge ? disait Napoléon. – Mais,