Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome II.djvu/532

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vous rappeler mes impuissantes sollicitations d’aujourd’hui ! » Il est sûr qu’en nous gardant, il nous conduisait au tombeau, et j’avais peiné à comprendre comment il se plaisait à compliquer ainsi les affaires, et pourquoi il ne préférait pas nous laisser aller mourir ailleurs.

Sir Hudson Lowe est arrivé le même jour, amené, m’a-t-il dit, par mon billet au sujet de mon fils ; il avait fait mander le docteur Baxter, qui le suivit de près.

Dans une fort longue conversation, j’ai pu démêler que sir Hudson Lowe était aujourd’hui fort préoccupé de quelque but secret à mon égard. Nous nous sommes sondés réciproquement sur plusieurs points ; il a fini par établir d’abord n’avoir pu me renvoyer en Angleterre, l’Empereur ayant réclamé mon Journal, me disait-il, comme écrit par son ordre, tandis que moi j’exigeais, de mon côté, que cette pièce m’accompagnât en Angleterre ; raisonnement de sa part tout à fait d’une astucieuse absurdité ; puis, comme frappé d’un trait de lumière et d’un éclair de condescendance, il en est arrivé à me dire que si je voulais retourner à Longwood, il s’y prêterait volontiers. J’en tressaillis… Néanmoins, me rappelant la lettre et les paroles significatives de l’Empereur, je répondis que c’était, quant à présent, tout à fait contre mon intention ; mais qu’au seul désir connu de l’Empereur ma résolution changerait aussitôt. À cela il m’a dit qu’il avait des raisons de croire que l’Empereur le désirerait, et il se montrait fort préoccupé ; il avait évidemment quelque intention nouvelle à mon sujet, mais je ne la devinais pas. Lui ayant fait observer qu’il me faudrait écrire à Longwood pour connaître ce désir de l’Empereur, il ne s’y refusait pas précisément, mais il s’exprimait de la manière la plus entortillée. Enfin il me quitta, du moins je le crus, et je le supposais déjà bien loin, mais il était demeuré ; il avait conféré tout ce temps à l’écart avec son officier de confiance, et est rentré pour me dire qu’après avoir réfléchi, il trouvait bon que j’écrivisse au grand maréchal touchant mon retour, mais qu’il demeurait certain que ce serait la manière dont je présenterais mes idées qui porterait l’Empereur à exprimer son désir ou non. Cela n’était pas douteux, et j’en ai ri. Au surplus, voulant constater les points les plus importants de notre longue conversation, et dans l’espoir d’avancer vers un dénouement, je lui adressai, aussitôt son départ, la lettre suivante :

« Monsieur le gouverneur, il m’est revenu à l’esprit que dans votre visite, me parlant des embarras qui avaient gêné votre détermination à mon sujet, vous avez dit qu’une des difficultés qui vous empêche-