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Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome II.djvu/630

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ce jour-là sir Pultney, si cet officier se présentait ; il recommandait, dans ce cas, de le conduire chez le général Bertrand.

Sir Pultney et lady Malcolm se sont présentés à Longwood, et ont rendu visite aux familles Bertrand et Montholon. Sir Pultney ne fait encore rien de la proposition du gouverneur de s’en rapporter à lui pour un arrangement : c’est avec tout son zèle qu’il s’efforcera de remplir cette mission.

J’ai vu Napoléon dans sa chambre à coucher avec le maréchal Bertrand. Le paquet de lettres que j’avais reçu du gouverneur était devant lui. Il venait de connaître la réponse d’Hudson Lowe, relative à la demande d’une visite d’adieu de Las Cases ; il a fait la réflexion que les criminels, condamnés à mort, avaient la liberté de dire adieu à leurs amis, sans que personne y fût présent. Napoléon dicta aussitôt au général Bertrand une protestation contre ces rigueurs avilissantes.

Voici ce qu’il m’a dit ensuite : « Ce gouverneur est un homme indigne de remplir le poste qu’on lui a confié ; il a de la ruse, mais ni talent ni fermeté. Il est soupçonneux, astucieux, menteur, double et plein d’insinuation : c’est un Italien d’il y a deux ou trois siècles. Il ne peut pas même dire simplement le bonjour ; on devrait l’envoyer à Goa. Je ne pense pas qu’il refuse définitivement à Las Cases de venir nous dire adieu.

« Que peut-il craindre ? que je lui dise d’écrire à ma femme : il le fera bien sans moi. Que je lui fasse part de nouveaux projets : il connaît toutes mes pensées. Le gouverneur pense-t-il que l’Europe soit une mine, et que Las Cases soit l’étincelle qui doit y mettre le feu ? »

29. — Poppleton a reçu une lettre du gouverneur, qui, à côté de la suscription, offrait ces deux mots : « très-pressée ; » une autre lettre adressée au comte Bertrand disait que, par suite de la conduite de Las Cases à Longwood, il ne pouvait pas le laisser prendre congé, sans témoin, du général Bonaparte. Quelques moments après, les généraux Bertrand et Gourgaud, le capitaine Poppleton partirent pour la ville, pour dire adieu à MM. de Las Cases.

Les intentions du gouverneur furent assez mal remplies ; car, une fois réunis, le capitaine Poppleton les laissa s’entretenir seuls. Le colonel Winyard et le major Gorrequer, chargés de les surveiller, de les écouter, se tinrent à l’écart. Il était près de trois heures quand Las Cases et son fils s’embarquèrent à bord du sloop de guerre le Griffon, pour le cap de Bonne-Espérance. Le gouverneur et sir Thomas Reade les accompagnèrent jusqu’au vaisseau. Le journal de M. de Las Cases